Christian Lehmann Profile picture
Romancier, médecin, rôliste, GNiste, geek-vintage. Journal de Pandémie dans @Libe. Auteur de la trilogie "No Pasaran". Fuck around? Find out.

Jan 27, 2023, 45 tweets

Voulez-vous que je vous raconte une belle histoire qui illustre le niveau de foutage de gueule endogame de l"intelligentsia" médiatique et littéraire auto-proclamée? TW: pédocriminalité et apologie du terrorisme ( Ca donne envie, hein?)

Et parce que devant une si alléchante promesse, peu d'entre vous réussissent à garder leur sang froid, je rajouterai TW: gros bâtards de droite et emplois fictifs ( Avouez que c'est un menu appétissant, non?)

Tout commence par une balade dans les rayons d'un magasin de presse, à la recherche d'un magazine que jamais je ne trouva ( oui je sais que c'est pas français, mais les vieux sachent )

Et là, au lieu de mon GuardianWeekly, qu'est-ce que c'est sur quoi t'il je tombe. Je vous le donne en mille: La Revue des Deux Mondes

alors oui, La Revue des Deux Mondes, vous en avez entendu parler, soit parce que vous étiez à un dîner entre milliardaires avec Marc Ladreit de Lacharrière ( peu probable, mais on ne sait jamais... )

soit parce que vous avez suivi le #PenelopeGate, dans laquelle outre l'emploi fictif d'assistante parlementaire, Penelope Fillon a été épinglée pour avoir touché 100.000 euros sur un an pour deux ou trois feuillets, ce qui montre que les pigistes n'ont pas à se plaindre

Dans cette affaire, Marc Ladreit de Lacharrière a été condamné à huit mois avec sursis et 375.000 euros, mais ce n'est pas ce qui nous intéresse. Pas plus que la condamnation de son fils en fevrier 2022 à un an de prison ferme ( aménagée avec bracelet électronique) pour détention

"de 3865 fichiers mettant en scène des enfants de 4 à 14 ans" @Wikipedia_fr

Non, restons sur la Revue des Deux Mondes, et ses obsessions et paniques morales droitardes

"On peut pu ren dire", "C'était mieux avant","Notre civilisation fout le camp", avec mise en avant de Michel Onfray, Sylvain Tesson, Michel Houellebecq, en boucle

Bon, je regarde la couverture, et immédiatement, je me dis qu'on va être sur du lourd

Je vous remets un peu les bails. "Ecrivain maudit", c'est le terme habituel pour victimiser un type qui a écrit de la merde mais qui a ou a eu son rond de serviette dans le clergé culturel

Mais alors là, le combo @fogiesbert + Richard Millet, ça promettait du sublime. Comme dit Michel Serrault dans GARDE A VUE "Ce soir, on va atteindre des sommets" ( le notaire Martineau articule bien les deux m de som-mets, c'est un plaisir d'esthète)

Bon alors on y va. Richard Millet, écrivain français, directeur littéraire, membre du comité de lecture des éditions Gallimard, et accessoirement boomer très énervé par les "mauvais genres"

Sans surprise, l'obsession droitarde numero uno, qui donnera le grand remplacement, est là depuis longtemps: "quelqu’un qui à la troisième génération continue à s’appeler Mohammed quelque chose, pour moi, ne peut pas être français" ( 2012)

Mais ce genre de facétie est tellement commun que personne ne s'y arrête, jusqu'à.... son "Eloge littéraire d'Anders Breivink" ( je ne mettrai pas de photo de cet anus à pattes, mais voici un tardigrade)

dans lequel il s'en prend au multiculturalisme et à la perte de repères identitaires à l'origine, selon lui, du geste du tueur norvégien. Frappé par la « perfection formelle » des actes de Breivik, Richard Millet leur prête une « dimension littéraire » qui aurait été mal comprise

Je cite @Wikipedia_fr Tout en condamnant les actes d'Anders Breivik17, Richard Millet affirme que c'est « sans doute ce que méritait la Norvège et ce qui attend nos sociétés qui ne cessent de s'aveugler » sur « les ravages du multiculturalisme », « l'islamisation de l'Europe »

et son renoncement à « l'affirmation de ses racines chrétiennes. » Richard Millet considère Anders Breivik comme « tout à la fois bourreau et victime ». Il assimile ce massacre à un nouveau symptôme de l'échec de la littérature, supplantée par le fusil d'assaut.

Ce genre de délire ne passe pas inaperçu, même à l'époque, où l'extrême-droite ne s'est pas encore totalement décomplexée

Et c'est Annie Ernaux qui publie dans @lemondefr une tribune co-signée par une centaine d'écrivains: "Le pamphlet fasciste de Richard Millet déshonore la littérature". Et voilà, une bonne femme qui vient emmerder un membre du clergé culturel... Le péril woke avant l'heure, quoi

Xénophobie, racisme, apologie du crime, les accusations fusent, de plusieurs journaux, et écrivains dont Le Clézio. Richard Millet est contraint de démissionner du comité de lecture des éditions Gallimard, une perte de pouvoir qui n'est pas que symbolique

Mais très vite, Millet aura des défenseurs, en mode "on peu pu ren dire", "c'est la littérature qu'on assassine". Revenant sur cette affaire quelques années plus tard, Benoît Duteurtre note qu'Annie Ernaux en demandant que Richard Millet ne soit plus édité...

ni ne puisse éditer les autres et en rassemblant « un bataillon d’auteurs en vue d’obtenir son châtiment » parvint à « accomplir ce qu’on avait rarement vu, même en Union soviétique : une pétition d’écrivains dirigée contre un écrivain ;

confrérie rassemblée non par solidarité, mais par la volonté d’éliminer une brebis galeuse" ( On parle bien d'apologie de crime terroriste, hein, mais en fait normalement c'est juste sensé marcher pour les arabes, ce truc, c'est abusé, là...)

Bon. FAST FORWARD to 2023. @fogiesbert , donc, vient nous parler de cet "écrivain maaauuuuudit"

Et c'est là que ça devient intéressant, parce que Giesbert file ses lubies dans l'article. Il commence par rappeler l'oeuvre considérable de Richard Millet avant d'aborder "le point qui fâche", l'éloge littéraire à Breivik... et de commencer à dérouler un whataboutisme délirant

en essayant évidemment de saucer les gens qu'il n'aime pas, dont @edwyplenel , qui comme Annie Ernaux représente, "chez ces gens-là, monsieur", le péril woke et la cancel culture, de longue date ( Chacun ses obsessions )

@fogiesbert
donc, dénonce les gens qu'il n'aime pas, mais qui n'ont pas été excommuniés alors qu'ils avaient commis les pires horreurs. Et avec une fatuité qui "troue le cul", comme disait assez vulgairement je vous le concède Lucien Ginsburg, il dénonce avec force les soutiens

du pédocriminel #Matzneff.

"Ces gens-là" écrit donc @fogiesbert , "n'ont jamais eu de comptes à rendre pour les insanités qu'ils ont signées ou proférées." ( Ce qui en soi n'est pas faux, mais il ajoute...) "Il est vrai qu'ils fricotaient souvent avec l'extrême-gauche, ce qui reste le meilleur des...

parapluies pour tous ceux qui déparlent, aujourd'hui encore". Magnifique plaidoirie d'un Zola des temps modernes... si @fogiesbert lui-même n'avait pas été un des facilitateurs mondains complaisants et aveugles du pédocriminel #Matzneff christian-lehmann.org/post/ivre-du-t…

Exhibit A:

Exhibit B: dailymotion.com/video/x7q0im7 "il y a beaucoup de gens qui ont écrit des beaux livres et qui n'étaient pas des saints"

Exhibit C:

Giesbert avait donc à peine lu un essai pour lequel il faisait partie d'un jury qui a donné un prix littéraire à Matzneff. Il n'avait pas bien lu le reste de l'oeuvre non plus, ou alors comme Beigbeder il devait penser que c'était de la fiction...

Cette faculté à prendre les gens pour des cons, à constamment minimiser les actions passées, tout en dénonçant une mise au ban de granzécrivains, est quand même fabuleuse

On notera que la compagne de Giesbert, Valérie Toranian, directrice de la Revue des Deux Mondes de 2014 à 2022, puis du Point ( à la suite de... Franz-Olivier Giesbert ) depuis 2022, avait elle-même commis un article sur #Matzneff dans la Revue...

en janvier 2020, quand grâce au livre de Vanessa Springora le scandale #Matzneff éclate

En gros: #Matzneff, c'était de la littérature en 1970, donc ça en reste ( à bas la cancel-culture woke!) S'il y a un procès à faire, c'est à la justice, et aux parents de Vanessa Springora. Pas à la littérature. Le procès s'il doit être fait, serait celui des élites de gauche

polpotiennes, stalinistes, pro-palestiniennes, antisémites, indigénistes, racialistes, propédophiles et j'en passe

Et elle conclut: "Nos petites élites ressemblent terriblement à la « tribu délirante » des années 70" Ben... comment dire, Valérie, Franz-Olivier : on vous voit...

Pour Millet comme pour Matzneff, il s'agit de couvrir vos propres traces tout en conspuant une cancel culture qui viendrait abusivement demander des comptes à vos semblables, apologistes du terrorisme, tarés racialistes, pédocriminels... Welcome to Wokeland

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