🇮🇳🚩Le Parti communiste indien (marxiste) achève son 24e congrès. Le CPI(M) doit relever des défis immenses : regagner ses anciens bastions électoraux, renouveler ses dirigeants, incarner la résistance sociale, riposter au fascisme de Modi, etc. Topo sur ses orientations 1/23🧶⬇️
Le CPI(M) est un parti de masse. Un million de membres. 13,5 millions dans son énorme ligue paysanne. Une organisation de 10millions de femmes. Un syndicat de 6,2millions d’affiliés (CITU). 4,3 millions de jeunes communistes. 150 000 volontaires rouges (//Secours populaire). Etc.
Les chiffres sont évidemment vite démesurés en Inde avec 1,4milliard d’habitants. Les adhésions du Parti du Congrès (héritier de Gandhi/Nehru) et du BJP (Modi) sont bien plus importants. Quoique loin derrière eux, les communistes ont très souvent fait figure de 3e parti national.
Le CPI(M) s’est toutefois affaibli. Trois États (sur 28) étaient habituellement dirigés par les communistes : le Bengale-Occidental (91M), le Tripura (3,5M) et le Kerala (39M). Les deux premiers ont été largement perdus en 2011 et 2018, malgré 35 ans de gestion presque continue.
Le CPI(M) a été largement dominant au Bengale-Occidental (4e état le plus peuplé) et dans sa gigantesque capitale Calcutta mais a été écrasé par le congrès Trinamool, un parti régional populiste. Les communistes ont ensuite nettement échoué à revenir et ont perdu leur ancrage.
Il serait long d’expliquer les multiples raisons d’un pareil fiasco mais cette perte a relégué le CPI(M) à une situation marginale. D’un summum de 43 députés (les 2/3 au Bengale-Occ.), le parti a reculé jusqu’à seulement 3 circonscriptions en 2019 (scrutin majoritaire à un tour).
Le petit État du Tripura était aussi presque totalement communiste mais n’a pas résisté à la vague Modi. Le BJP et ses milices fascistes (RSS) ont mené des campagnes d’intimidation très violentes contre le CPI(M),allant jusqu’à attaquer au bulldozer des locaux communistes (2021).
Le CPI(M) s’est en revanche renforcé au Kerala et a mis fin à la traditionnelle alternance depuis '57 en remportant à nouveau les élections régionales en 2021, sans doute grâce à sa formidable politique sociale et à la bonne gestion des inondations de 2018 puis de la crise Covid.
Le Kerala a en effet augmenté le salaire minimum (deux fois supérieur à la moyenne nationale),la retraite des paysans et le nombre d’infirmiers du meilleur système hospitalier de l’Inde. Des kits alimentaires ont été distribués durant l'épidémie. Sans parler de l’alphabétisation.
C’est justement aujourd’hui l’anniversaire de l’investiture de ce 1er gouvernement régional communiste. Furieux, le Congrès l’a révoqué deux ans plus tard, ce qui n’a pas empêché le CPI(M) de revenir au pouvoir en 1967. Histoire fascinante à raconter !
Finalement, le CPI(M) conserve des points d’appuis dans quelques autres États comme le Bihar (grâce à l’alliance avec les autres PC) ou le Tamil Nadu (grâce à l’entente avec le ministre en chef, un nationaliste de gauche laïc) mais peine à jouer encore un rôle au niveau national.
Le CPI(M) n’est à ce propos pas le seul PC d’Inde. Il y a le vieux CPI (fondé en '25) et le CPI(ML), issu du naxalisme (révolte maoïste toujours active à l’est du pays mais bien moins qu’avant). J’en profite d’ailleurs pour remercier @PerspCommuniste qui écrit souvent à ce sujet.
Le CPI(M) est en train de renverser la vapeur, notamment grâce à la solidarité entre partis de l’opposition à Modi. C’est ainsi qu’une énorme circonscription au cœur du Rajasthan, qui n’avait jamais été rouge, est passé communiste aux dernières élections générales de juin 2024.
Voilà 30 ans qu’il n’y avait plus eu de député communiste dans la ceinture hindie. Amra Ram n’est du reste pas un inconnu. Le nouveau député a capitalisé sur son rôle d’organisateur dans les grandes grèves paysannes de 2020-2021, concentrant la sympathie de millions de fermiers.
🧑‍🌾Des paysans avaient effectivement assiégé durant des mois New Delhi contre la libéralisation du marché agricole. Modi l’avait en définitive abrogé après une mobilisation constante, qui a atteint son pic le 26 nov. 2020 par la plus grande grève de l’Histoire (250M de grévistes).
C’est de la sorte que le CPI(M) envisage son grand retour au Bengale occidental. La ligue paysanne communiste y a toujours été très puissante. La direction locale affirme en tout cas avoir pu rafraîchir et relancer sa présence dans la majorité des districts grâce à ces combats🚜.
Ce renouveau passe par le rajeunissement de ses dirigeants. Au moins cinq membres du Politburo ont franchi la barre des 75 ans et devraient laisser leur siège,même si Pinaray Vijayan (ministre en chef du Kerala) parait indispensable à la consolidation de leur dernier bastion sûr.
Un nouveau secrétaire général va être désigné. Mort en sept.2024, @SitaramYechury avait le don de conclure des alliances électorales avantageuses pour le CPI(M),en particulier avec le Congrès. Mais leur rivalité dans le Kerala et la pression de Modi rendent instable leur rapport.
Le dirigeant du CPI(M) devra lui permettre de gagner en visibilité nationalement et d’incarner les luttes paysannes-ouvrières à venir ainsi que la résistance à la fascisation de l’État indien. Car l’ethno-nationaliste Modi n’abandonne pas son projet de régime autoritaire raciste.
L’Inde est officiellement une république socialiste séculaire. Modi veut altérer la Constitution en texte religieux, sectaire et exclusif mais a échoué aux dernières élections à obtenir la majorité des deux tiers pour l’acter. Le BJP devient toujours plus violent pour l’imposer.
Le BJP est structuré par le puissant RSS. Cette milice n’a pas changé depuis sa création en 1925 ni dans son organisation fasciste ni dans son dogme ségrégationniste. Des millions de fanatiques sont préparés au pire, comme l’ont montré les pogroms de 2002.
@AxelNodinot expliquait récemment par exemple dans @humanite_fr comment les suprémacistes hindous tentent de structurer idéologiquement partout dans le monde les Indiens en imposant leur nationalisme ethnique (Hindutva), avec le soutien US (et français).
humanite.fr/monde/donald-t…
Le CPI(M) a donc un rôle clé à jouer lors des prochains chocs sociaux et électoraux. Modi va continuer sa charge. Il y aura de grandes luttes pour la démocratie et les droits paysans. Les prochaines élections régionales au Kerala et Bengale-Occidental ont lieu en 2026. À suivre…
Le CPI(M) vient d’apporter son soutien actif à la grève générale nationale convoquée le 20 mai prochain par la plateforme des syndicats indiens. Modi veut libéraliser le code du travail et s’en prendre aux conditions/heures de travail, au salaire minimal, au droit de grève, etc.
Le centenaire du Parti communiste d’Inde sera fêté à Noël 2025. Je suis peu revenu sur son histoire dans ce fil, je l’aborderai donc (ou en partie) à cette occasion: lutte pour l’indépendance, insurrections armées régionales, scission de '64, relation changeante avec le Congrès…
Je pense aussi approfondir à l’avenir certains aspects pertinents du CPI(M) : sa branche féminine, son syndicat paysan, le parcours de certains militants, les raisons concrètes de son succès au Kerala et de son échec au Bengale-Occidental, le rapport avec les autres communistes…
Si ce fil🧶 vous a plu, n’hésitez pas à me suivre✅ à RT et à l'envoyer/taguer à vos avis fans d'Inde. Je publie souvent en thread des histoires originales du mouvement social au sens large et de ses militants, en particulier d’ici mais aussi d’ailleurs.🌏
Je ne suis pas un spécialiste de l’Inde, désolé pour les erreurs éventuelles. J’ai sauté pas mal de détails. Le communisme indien est peu connu du côté francophone. Merci à @LinaSankari qui a longtemps couvert l'Asie pour L'Huma et écrit sur la politique🇮🇳
humanite.fr/monde/inde/en-…
🇲🇲Voisin de l’Inde, la Birmanie connaît des troubles politiques importants. La guérilla communiste, puissante durant la Guerre froide, a été récemment refondée et lutte les armes à la main contre la dictature. Tour d’horizon de son passé et de son présent.
🇱🇰Le Sri Lanka a élu triomphalement en novembre dernier un président communiste. J'avais réagi avec un fil bref sur AKD. Je le réécrirai à l'avenir sur base d'un premier bilan de mandat : beaucoup de questions se posent au sujet de ses intentions réelles…
🇮🇳@MABABYCPIM est donc le nouveau dirigeant du CPI(M). MA Baby a suivi un parcours assez semblable à ses camarades: ex-leader étudiant (arrêté par Indira Gandhi), ex-"sénateur" (Rajya Sabha), ex-ministre de l'éducation du Kerala, au Politburo depuis 2012.
theweek.in/news/india/202…
Issu d'une famille de 8 enfants, président de la @SFI_CEC puis de la @dyficec, M.A. Baby a été l'un des plus jeunes élus à la Rajya Sabha (32 ans). Il a aussi fondé un Comité de solidarité cubaine et une organisation artistique et culturelle (Swaralaya).
Voici les 8 nouveaux membres du Politburo @cpimspeak On reconnaît notamment le député paysan @AmraRamMPSikar, Mariam Dhawale (dirigeante du @aidwacec) ou @kbcpim (ex-chef du @tncpim). @pinarayivijayan reste membre mais pas le chef ad interim Prakash Karat.
@PerspCommuniste a relevé pertinemment une série de prises de paroles et de faits marquants du #CPIM24thPartyCongress ainsi que des chiffres sur l'effectif des fédérations (la moitié se trouve ainsi au Kerala) et leurs évolutions, leur sociologie... #CPIM
editoweb.eu/nicolas_maury/…
@vijayprashad @LeftWordBooks @tri_continental Lal Salam !
#CPIM24thPartyCongress #CPIM
@threadreaderapp unroll please
Share this Scrolly Tale with your friends.
A Scrolly Tale is a new way to read Twitter threads with a more visually immersive experience.
Discover more beautiful Scrolly Tales like this.