Qu’est-ce qui est le plus polluant : l’avion, la voiture ou le train ? L’ambiance actuelle est au bashing aérien. Un avion, ça fait du bruit, ça vole au pétrole, donc c’est polluant. Facile, non ? Sauf que ce n’est pas si simple. Thread.
Je vais commencer par un petit disclaimer. J’aime voyager en train, j’aime voyager en avion, j’aime voyager en voiture, j’aime me déplacer à vélo : chaque moyen correspond à un besoin.
Le train est confortable, l’avion est rapide, la voiture est pratique, le vélo est facile. Je ne suis pas de ceux qui veulent absolument se ranger dans une catégorie et en faire un objet de communautarisme. Tout ce qui est raisonnable me va.
Parlons d’abord carburant. Le transport aérien est un secteur très concurrentiel et le moindre centime de marge est souvent durement acquis. L’économie des compagnies aériennes est tributaire d’un facteur variable : le prix du carburant.
Un avion étant conçu pour voler plusieurs dizaines d’années, sa conso en carburant ne peut pas être prise à la légère. On le sait peu, mais la consommation d’un avion de ligne est très compétitive par rapport à, par ex., celle d’une auto.
La conso par passager d’un moyen courrier A319Neo, par exemple, est de 2,8 l./100 km. Par comparaison, votre berline consomme probablement entre 6 et 9 litres aux 100 km et n’elle est souvent occupée que par une personne.
Si vous devez aller de Paris à Nice, vous devrez voyager à 3 ou 4 dans votre auto pour consommer moins par passager qu’en avion. Et là, vous allez me dire que le train, c’est bien mieux pour l’écologie car ça n’émet pas de CO2.
On peut discuter de ce point. La proportion de CO2 dans l’électricité dépend de tout un tas de choses, notamment sa forme de production. Renouvelable, fossile, nucléaire : tout ceci variera d’un pays à un autre, d’un trajet à un autre.
C’est en tous les cas l’argument qui revient tous les jours à la une : l’avion pollue, le train c’est mieux. Eh bien, sauf à considérer que seul le CO2 est source de pollution c’est pas si évident, en fait. Car l’écologie, c’est un peu de choses que ça.
Un train, comme un avion, comme une voiture, il faut bien le fabriquer. Pour ça, il faut donc des matières premières, faire tourner des usines, des fonderies, etc. Un TGV de 400 places pèse 385 tonnes. Un B787 de 250 places, c’est 118 t..
Au siège, le B787 pèse 285 kg (soit moins qu’une voiture), là où le TGV fait 960 kg. Rapporté à la vitesse d’évolution, on dira ce qu’on voudra, mais c’est assez remarquable.
OK, mais il faut de l’essence pour faire voler un avion. On peut donc réfléchir à la chaîne de fourniture en énergie. Là encore, la chaîne du pétrole est moins capitalistique et donc moins pondérale que celle de l’électricité.
Extraire du pétrole, le transporter, le stocker, le distribuer, ça ne coûte pas cher. De la centrale au caténaire, il n’y a rien de gratuit, et les coûts d’entretien ne sont pas nuls non plus.
L’écologie, ce n’est pas que le CO2, disais-je. Est-ce que parmi tous les ardents adversaires de l’aviation, certains se sont vraiment demandé quel était l’impact réel du train sur les écosystème, et comment ça se comparait vs. l’aviation ?
Par exemple, la surface totale des insfrastructures ferroviaires en France (voies + gares + installations techniques), c’est à peu près 167 000 hectares.
La voie de chemin de fer, pour la construire, il a fallu défigurer un paysage, démolir un éco-système, nuire à des millions d’habitants et d’animaux de toutes sortes.
Par ailleurs, les infrastructures de roulage du train (rails, traverses, caténaires…) sont renouvelés très fréquemment, car s’usent très rapidement (surtout avec le TGV).
La surface totale des aéroports en France, c’est autour de 46 000 hectares. L’emprise au sol est importante, certes, mais très concentrée. Surtout, elle est nulle entre deux aérogares puisque les avions, ils volent.
On peut aussi discuter du nombre de km.passager, ce qui semble donner (en France) un avantage au TGV : 60 milliards de km. Passager, vs. 9,5 milliards pour les vols intérieurs.
Mais dans les aéroports français, il n’y a pas que des passagers en vol intérieur. Si on manque de données, on estime que le vol moyen fait 1000 km (et c’est sûrement bien plus), alors on arrive déjà à 200 milliards de km.passager.
Donc dans ce domaine comme dans les autres, tout ce qui est excessif est dérisoire. Il faut sortir de ces prises de positions religieuses et réfléchir globalement, mais sereinement et sans dogme.
L’avion, le train, la voiture : toutes nos formes de déplacement laissent une empreinte écologique significative. Ce sur quoi on peut (on doit) travailler, c’est sur nos besoins en déplacements. Là se situe la véritable écologie.
