L’une des choses qui me ravissent égoïstement dans les impressionnantes protestations biélorusses, c’est qu’elles ferment le clapet aux doctes discours sur les « peuples soumis » et « l’attachement à la main forte » ➡️
Ces discours sont non seulement racistes mais dangereux pour nos démocraties. Ils réservent l’autoritarisme à des pays jugés fondamentalement différents de nous parce qu’enclins (historiquement ou naturellement) à la soumission. ➡️
Or, un pouvoir autoritaire peut être authentiquement attractif et apporter des bénéfices à une grande partie de la population, comme je me suis attachée à le répéter sur le cas biélorusse. C’est troublant et c’est un impensé de nos sociétés, voire un tabou. ➡️
Tout comme les Biélorusses ne sont pas « naturellement » attachés au pouvoir fort, nous ne sommes pas « naturellement » attachés à nos libertés et à nos institutions démocratiques. Nous pouvons très rationnellement faire le choix de les céder ➡️
Et à l’attention de ceux qui me répondront « oui, d’ailleurs nous vivons déjà en France dans un pays autoritaire » (commentaire si classique), je répondrai : ne se permettent ce genre d’affirmation que ceux qui ne connaissent rien aux régimes autoritaires. ➡️
L’hybridité des régimes est une constante du XXIe siècle. La plupart des régimes démocratiques ont des îlots et des composantes autoritaires. La plupart des régimes autoritaires intègrent des dynamiques et des pôles démocratiques. L’idéal type, c’est pour les manuels. ➡️
La soumission à un régime politique est une affaire d’arbitrage, de dosage, de contexte, de choix explicites ou implicites. De choix individuel de vie que l’on souhaite vivre. Et ça se pose de la même manière devant les Biélorusses et devant nous.
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1,05 millions de personnes ont été mobilisées et servent aujourd'hui dans l'armée ukrainienne, a affirmé hier Oleksandr Litvinenko, secrétaire du Conseil de défense et de sécurité nationale d'Ukraine (institution relevant directement du président). 1/14 youtube.com/live/Z7ggedTKv…
Il n'est pas clair dans son allocution s'il s'agit de l'effectif des forces armées sur le front (mobilisés + contractuels) ou seulement de l'effectif des mobilisés. Supposons que c'est la première option: l'effectif total des forces sur le front.
2/14
Les statistiques officielles chiffrent à 11,5 millions le nombre d'hommes ukrainiens de 18 à 60 ans, à la veille de l'invasion russe.
L'armée compte aussi des femmes, mais on parle de quelques dizaines de milliers, faisons le calcul sans elles. 3/14stat.gov.ua/uk/datasets/ch…
Ne pas lire cet article superficiellement (comme un témoignage de défaitisme des Ukrainiens).
Avec une guerre qui s'installe dans la durée et les ressources qui arrivent au compte-gouttes, la question de l'engagement combattant change de nature. 1/10 lemonde.fr/international/…
Il ne s'agit plus de mobiliser toutes les ressources disponibles sur un temps court pour repousser l'ennemi en un mouvement. Il faut à la fois continuer à combattre sur le front, et continuer à vivre et faire marcher le pays à l'arrière. Ce qui génère une tension prévisible. 2/10
La mobilisation ou l'engagement volontaire qui ne prévoient pas de démobilisation avant la fin de la guerre génèrent un fort sentiment d'injustice. Il est inacceptable aux Ukrainiens de partir combattre avec leur mort comme seul horizon temporel, alors que d'autres... 3/10
Le drapeau rouge et noir, initialement celui du mouvement nationaliste ukrainien, a été endossé par le bataillon Pravy Sektor dès 2014. Ce bataillon a servi de figure de repoussoir aux médias russes (avant qu’Azov ne prenne sa place). Dans les faits, … 1/
… Pravy Sektor a été très divers dans son recrutement (j’ai fait plusieurs entretiens avec ses membres a l’époque), avec certaines branches assez idéologisées et d’autres pas du tout; des ukrainophones et russophones mélangés, et même une « unité juive » au sein du bataillon.2/
Des parties du bataillon sont désormais intégrées à l’armée, mais l’attachement au drapeau est bien là, ce qui explique sa présence sur les tombes des combattants de PS.
L’ancien drapeau nationaliste est donc bien relégitimé, tout comme le sont certains slogans. 3/
La ville de Lviv est loin de la zone de front. A peu près aussi loin qu’on puisse l’être en Ukraine. Mais tous les jours - tous les jours! - dans cette ville, on dit adieu sur la place centrale à un ou plusieurs combattants tués au front. 1/
Sur la place centrale - Ploscha Rynok - , des panneaux annoncent qui sera inhumé ce jour-là, avec une biographie du soldat. Une cérémonie a lieu dans l’église à côté, liée à l’armée et devenue un lieu de commémoration, avec de grandes affiches énumérant les victimes. 2/
En fin de matinée, le centre-ville s’arrête pour quelques minutes. Le cortège funéraire marque l’arrêt devant l’hôtel de ville, les passants se mettent à genoux, les serveurs sortent des cafés, et le trompettiste joue un hymne à l’honneur des combattants défunts. 3/
Une nlle mobilisation à venir en Russie?
Cet article est une bonne synthèse.
J'y ajouterais la question de l'envoi de jeunes conscrits au combat.
Contrairement à ce que l'on pense souvent, la législation permet à l'Etat russe d'envoyer des conscrits...1/7 theins.ru/en/politics/27…
... au combat. Sans aucun décret ni aménagement supplémentaire nécessaire.
Ne pas envoyer ouvertement en Ukraine les 260 000 jeunes hommes annuellement appelés sous les drapeaux est un choix purement politique, car le pouvoir connaît l'extrême sensibilité de la question. 2/7
Par exemple, cette enquête de Russian Field (mai-juin 2024) montre que 82% des Russes interrogés jugent inacceptable la participation de conscrits à la guerre. (Alors même qu'ils sont 57% à soutenir l'idée d'une seconde vague de mobilisation.) 3/7
Ces derniers temps, on entend à nouveau la petite musique de "plus d'Ukrainiens sont prêts à négocier avec les Russes"; "les Ukrainiens sont fatigués".
Ne transformons pas une description des évolutions de la société ukrainienne en désinformation. 1/
Les enquêtes donnent des chiffres différents d'Ukr en faveur de discussions avec la Ru.
L'enquête de Democratic Initiatives /Razumkov de juin 2024 évalue à 20% le nombre d'Ukrainiens qui sont prêts à DISCUTER avec la Ru sans conditions préalables. 2/ dif.org.ua/en/article/war…
(Le terme ukrainien "переговори" me semble être très imparfaitement traduit par "négociations". "Pourparlers de paix" me semble plus juste.)
La moitié des Ukr interrogés posent des conditions à ces discussions. 18% pensent qu'on ne peut pas du tout discuter avec la Russie. 3/