Le cas de la sélection et création variétale chez l'asperge est vraiment intéressant tant il est différent des autres espèces.
L'asperge est une espèce dioïque, c'est a dire que les plants portant des fleurs mâles et les plants portant les fleurs femelles sont distincts.
Ce régime de reproduction est largement minoritaire chez les spermatophytes. En effet , on estime que 72% environ des espèces de ce groupe présentent des fleurs hermaphrodites
et à 7% celles qui portent fleurs mâles et femelles séparées mais portées par le même individu (monoécie comme chez le maïs ou le noisetier)
Enfin seulement 4% des espèces sont dioïques comme donc l'asperge , le houblon cf quiz 45 ou encore le figuier.
Et les 17% restants ??? Des cas complexes ou coexistent plusieurs types sexuels soit au niveau d'un même individu (melon, concombres par exemple) soit au niveau de la population (la gynodioécie chez le thym, ou la betterave sauvage par exemple)
Bref, pour revenir a l'asperge cette séparation des sexes interdit donc l'autofécondation et ainsi conditionne des procédure de sélection spécifiques.
De plus l'asperge est une plante vivace et sa culture est une culture pérenne, la récolte des turions (jeunes tiges) n'a lieu que 2 a 3 ans après le semis et pour une dizaine d'années environ.
Connue depuis l'Egypte ancienne , elle n'est cultivée en France que depuis le 15e siècle et la création variétale se résume a une sélection massale (on conserve les meilleurs plants).
Dans les années 60, on a pu montrer que ce type sélection avait atteint ses limites, en effet la production individuelle est extrêmement hétérogène : la moitié du rendement d'un champ ne repose que sur 10% des individus.
On constate néanmoins que les plants mâles sont plus productifs et plus précoces que les plants femelles. De plus les plants mâle ne portant pas les baies ils sont productifs plus longtemps. Ainsi l'idéal recherché est un champ avec 100% plants mâles pour la culture.
De part son régime de reproduction allogame , il existe chez l'asperge une vigueur hybride importante qui sera également exploitée mais ce ne sera pas l'objet de ce fil
(ça nous amènerait bien trop loin vu l'implication du régime de reproduction) mais consultez les sources si le sujet vous intéresse.
Donc comment obtenir a tous les coup à partir d'un semis un champ avec 100% de plants mâles ?
Pour parler des plants mâles et femelles je vais utiliser la même nomenclature que celle utilisée chez la plupart des animaux (on en retrouve 2 dans la littérature mais pour la compréhension un mâle XY parle plus qu'un mâle Mm).
Ainsi les asperges femelles seront désignées XX et les asperges mâles XY.
Les graines destinées aux agriculteurs sont issues de la reproduction sexuée entre un plant mâle et un plant femelle.
Ainsi la descendance est constituée de 50% femelles XX et 50% de mâles XY (comme chez la plupart des animaux)
Pour une fois on fait sans chaussette (sinon cf Quiz 6)
Mais ce qui est requis c'est une descendance 100% mâle ...
C'est ici qu'interviennent les "super-mâles" ! Des individus YY qui garantissent que 100% de la descendance sera a coup sur 100% mâle
C'est bien beau mais comment les obtenir ces individus super mâles YY ?
2 pistes ont été suivies
1⃣ Les plantes mâles andromonoïques
2⃣ La culture d’anthères
1⃣ Les plantes mâles andromonoïques
On a dit précédemment que l'asperge est dioïque ... Mais
Il existe chez certains plants mâles (XY) des fleurs qui sont hermaphrodites. Ces individus portent donc à la fois des fleurs exclusivement mâles et des fleurs mâles et femelles (individus andromonoïques).
Ainsi une "simple" autofécondation va donner :
1/4 de plants femelles XX 1/2 de plants males XY 1/4 de plants super-mâles YY
LE problème est que ce genre de plantes sont très rares (moins de 2% des plants mâles)et produisent peu de graines (entre 1 et 10 comparés aux centaines obtenues sur les plants femelles) ... dont seulement 1/4 sont statistiquement super-mâles.
Je vous laisse imaginer la quantité de travail pour identifier ces plants au sein d'un champ et les fleurs en questions pour contrôler la production de baies et d'assurer la récolte
Ainsi des techniques d'identification morphologiques de ces fleurs particulières a été mis en place
Mais elles ont été rapidement détrônées par
2⃣ La culture d’anthères
La culture in vitro des organes reproducteurs mâles permet d'exploiter une capacité extraordinaire des cellules végétales : la totipotence
Ainsi on peut potentiellement reconstituer à partir de n'importe quelle cellule un nouvel individu.
Ici la culture d'anthère (qui contient les gamètes mâles) va permettre de reconstituer des individus haploïdes à partir des gamètes (et si vous avez suivi on aura statistiquement 50% de femelles haploïdes X et 50% de mâles haploïdes Y).
On pourra par la suite effectuer un doublement chromosomique avec la colchicine par exemple pour obtenir des plants super-mâle homozygotes YY et des plants femelles homozygotes XX
(et pour la production d'hybrides F1 dont je ne parlerai pas c'est un sacré avantage par rapport a une autofécondation).
Ainsi le premier hybride F1 issu de ces méthodes et appelé Andréas fut disponible en 1991. J'aurai pu aussi parlé des hybrides de clones, des hybrides 3 voies, de la polyembryonie femelle pour obtenir les lignées homozygotes mais je crois que ce fil est assez velu comme ça
Merci de m'avoir lu
Fin du fil
Sources
Histoire et amélioration de cinquante plantes cultivées
Par Claire Doré, Fabrice Varoquaux 2006
Edition Quae
La découverte de chromosomes surnuméraires en 1907 chez la Punaise américaine de la Floride (Acanthocephala terminalis) est confirmée en 1915 chez le maïs. Il seront nommés chromosomes B en 1928 lors de travaux également chez le maïs.
Les chromosomes B sont présents chez de nombreuses espèces, comme les champignons (environ 10 espèces recensées) , les animaux (environ 500 espèces recensées) et les plantes (environ 1400 espèces recensées).
Bravo a toutes et a tous, les 4 réponses étaient valables, en effet cette nouvelle publication permet d'apporter un nouvel éclairage sur la domestication et la sélection de la carotte
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L'article publié cette année permet de préciser les mécanismes de domestication et de création de variétés cultivées
Je ne m'étendrai pas sur la partie qui parle de l'assemblage & l'annotation d'un génome de référence de qualité supérieure à ce qui était disponible jusque là
1- Identification de la structure des populations de carotte
Les autrices et auteurs ont séquencé 630 génomes issus de
- 95 carottes sauvages
- 533 variétés cultivées (cultivar et variétés de pays)
- 2 espèces apparentées : Daucus syrticus et Daucus sahariensis
La fécondation à l’intérieur d’une fleur fermée est appelée la cléistogamie, elle reste minoritaire dans le monde végétal où la chasmogamie (fécondation d’une fleur plus ou moins ouverte) reste la règle, mais est observée dans de nombreuses familles suggérant un avantage sélectif
Chez la violette odorante on observe ainsi 2 types de fleurs :
les fleurs ouvertes qui sont bien visibles et de couleur très caractéristique
L'agave bleu (Agave tequilana / Agave angustifolia ssp. tequilana cv azul Web) est une des nombreuses espèces d'agave (environ 200) qui sont pour la plupart originaires du Mexique.
Son utilisation très ancienne dépasse largement la seule production d'alcool, si ces considérations ethnobotaniques vous interessent, je vous conseille la lecture de cet article tela-botanica.org/2019/08/lagave…