Thread by @CelineBoeuf

Ce soir, trajet retour un peu exceptionnel. Je dois prendre l’itinéraire bis, car des gens circulent sur les voies de ma ligne de métro. Sur une correspondance particulièrement peuplée, on m’attrape le bras et une voix féminine me demande si je veux prendre l’escalator. 1/n

Oui, je voulais prendre l’escalator, mais j’indique à la dame que je préfèrerais qu’elle me lâche. L’explication qui a suivi fut un peu musclée. 2/n

A ce niveau du récit, je précise que je bloquerai sans aucune hésitation toute personne qui me traiterait d’ingrate ou m’expliquerait que je pourrais être reconnaissante avec les gens qui veulent m’aider. 3/n

J’explique une fois et on y revient pas : toute aide imposée et non sollicitée n’est pas une aide mais une agression. Et comme tout être agressé, je me défends. Je suis d’abord polie. 4/n

Je le suis moins si on persiste à ne pas écouter mon besoin, que je connais mieux que toute personne qui ne vit pas avec mon #Handicap. En l’occurrence, je suis restée polie mais ferme. Mais surtout, j’en suis ressortie lessivée et les larmes aux yeux. 5/n

Cette dame m’a imposé sa volonté de se sentir utile, sans se demander si j’avais besoin de ça ou pas. Cette dame a décidé pour moi de ce dont j’avais besoin et a persisté quand je lui ai dit que ce n’était pas la bonne attitude. 6/n

Elle a donc décidé que je n’étais pas capable de savoir ce qui était bon pour moi. Je ne suis plus précisément une enfant et cette attitude trop fréquente est très humiliante. A ce moment-là, je ne suis plus qu’une #CanneBlanche. Blessée, je rumine donc le restant du trajet. 7/n

En sortant du métro, j’arrive à une zone en travaux depuis des mois, au point que les palissades me servent désormais de repère à la #CanneBlanche. J’entends que des gens bougent les palissades en question et ralentis donc. 8/n

Deux jeunes femmes se parlent, l’une s’excuse et se décale pour me faciliter le passage. Je comprends que l’autre s’est en fait glissée derrière la palissade, au moment où, quand je passe devant elle, elle me demande si je n’aurais pas un mouchoir en papier. 9/n

Et elle se lance dans une explication : je suis en train de faire pipi, mais je n’ai pas de mouchoir. Amusée, je lui explique que je vais lui trouver un mouchoir mais que je ne suis pas certaine de vouloir en savoir plus. 10/n

Je sors plusieurs mouchoirs du paquet, en ironisant un peu sur le fait que je pense que c’est un gros pipi, ce qu’elle confirme, en détaillant ce qu’elle a bu. Je lui redis que je ne tiens pas plus que ça à avoir les détails. 11/n

Elle me répond qu’elle m’explique, parce que je suis blind et que donc c’est normal qu’elle m’explique. Ô merveille ! Une personne qui se soucie de l’accès à l’information des personnes #Aveugles ! 12/n

Et elle me remercie pour les mouchoirs avec un « Meuf, tu gères ». Voilà, je suis une meuf qui gère. C’est tout ce que j’avais besoin d’entendre après m’être fait infantiliser une demi-heure plus tôt. 13/n

Ma 2e interlocutrice a donc vu en moi une femme qui avait potentiellement des mouchoirs sur elle et m’a interpelée pour cette raison-là, tout en tenant compte de la spécificité qu’est ma cécité. C’est l’attitude idéale. Ca m’a refait ma soirée ! Merci à elle ! 14/14