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May 4 • 53 tweets • 10 min read
💸Combien touche un député ? Est-ce que leurs collaborateurs sont grassement payés à ne rien faire grâce à nos impôts ? Peut-on s’offrir des vacances au soleil et une garde de robe digne de la fashion week sur ses indemnités d'élu ? Pour tout savoir, c’est par ici ⤵️
On va commencer par enfoncer des portes ouvertes. Les députés ne touchent pas une rémunération mais une indemnité car ils exercent des fonctions bénévoles. Cette nuance a toute son importance.
Cette indemnité répond à l’exigence d’égalité de tous les citoyens d’accès aux fonctions publiques. L’idée est de ne pas censurer les personnes qui se sentiraient l’âme de nous représenter car ils ne pourraient pas cumuler cette activité avec un emploi salarié.
Surtout, le but est de prévenir tout risque de conflit d’intérêts. Le temps du mandat doit être exclusivement tourné vers la représentation des français et la production de la loi.
Cette coquette somme d’un montant de 7 239,91 € mensuel est fixée de manière unique pour les 577 députés. De telle sorte, un député d’une circo parisienne touche exactement la même somme que celui de Wallis-et-Futuna ou bien d’un représentant des français à l’étranger.
Cette somme est calée sur celle des Conseillers d’Etat, parmi les plus hauts gradés dans la hiérarchie administrative, "hors échelle".
Cette indemnité est venue se caler au régime salarial de telle sorte que des cotisations sociales sont déduites, des droits au chômage sont ouverts ainsi que d’un relevé de points pour la retraite.
Car oui, une fois le mandat arrivé à son terme ou à l’occasion d’une démission, la vie est sensée reprendre son cours. Il n’existe pas de retraite à vie pour les députés.
Il n’existe pas non plus de retraite à vie pour les anciens ministres contrairement à une croyance commune : francetvinfo.fr/replay-radio/l…
Mais cela n’est pas tout. Sur cette somme de 7 239,91 €, il faut compter une indemnité de résidence de 168,70 € et d’une indemnité de fonction NON IMPOSABLE de 1 447,98 €.
Pour l’indemnité de résidence, il n’y a pas de grande difficulté. Il s’agit de permettre aux députés non parisiens de disposer d’une petite aide pour se loger pas trop loin de l’hémicycle.
Ici aussi, un débat de justice sociale se pose des fonctionnaires bien qu’ayant réussi les concours, ne disposent pas d’une indemnité de résidence aussi importante.
Ensuite, vient l’indemnité de fonction. Se pose aussi la question de son caractère non imposable alors qu’elle représente 25% du montant total de l’indemnité.
Certaines indemnités spéciales existent pour les titulaires de postes à responsabilité. Tel est le cas du Président de l’AN, des Questeurs et des Vice-présidents etc. Ce supplément est plafonné à 1,5 fois le montant cumulé de l’indemnité de base et de l’indemnité de fonction.
Pour en finir avec la situation du député et de passer aux frais liés au mandat, il faut parler de la situation des cumulards.
16.Pour rappel, les lois du 14 février 2014 ont sonné le glas des députés-maires. Depuis 2017, il faut choisir entre les deux fonctions et démissionner en cas d’élection à l’un des deux mandats.
L’argument phare contre le cumul était de lutter contre l’absentéisme qu’un tel cumul engendrerait et un affaiblissement de la démocratie représentative locale, prenante, passionnante mais chronophage.
L'argument pour le maintien était celui d'un plus grand ancrage local permettant des décisions prise par le haut plus réalistes et une meilleure prise en considération des besoins de la population.
Par contre, il n’est pas interdit aux députés de disposer d’un mandat électif local. Une loi organique du 25 février 1992 prévoit un écrêtement de ces indemnités dans la limite d’une fois et demie le montant de l’indemnité parlementaire à savoir au maximum 2 811,62 €.
Ce cumul peut être source de difficultés lors que les missions locales sont exigeantes et incompatibles avec celles de député. J’en parlerais peut-être dans un autre thread.
Pour mener à bien ses missions, le député dispose d’une autre enveloppe indépendante de ses indemnités personnelles.
Premièrement, et depuis le 1er janvier 2018 les députés disposent d’une avance de frais de mandat (AFM) venue remplacer l’indemnité de frais de mandat (IRFM). Cette dernière était une indemnité perçue par chaque député/sénateur pour couvrir ses frais de représentation.
Pour vous rendre compte de l’ampleur de détournements allégués, vous pouvez vous reporter à cet article récent de Mediapart. : mediapart.fr/journal/fil-da…
L’IRFM, longtemps dévoyée de son but et manquant de contrôle elle a été remplacée par l’AFM. D’un montant de 5 373 €, elle permet de faire face aux dépenses non prises en charge par l’Assemblée Nationale ni remboursables.
Un autre poste de dépense, le plus connu, concerne les collaborateurs de cabinet. Avant d’en étudier le montant, revenons sur le statut bien particulier de ces « petites mains » de l’assemblée.
Ils ne sont ni élus, ni fonctionnaires. Ils sont recrutés par le député à leur convenance et dépendent hiérarchiquement de ce dernier et non pas de l’assemblée nationale. Leur contrat de travail peut être rompu sur décision du député et aux grès des alternances/ démissions.
Leur salaire peut varier en fonction du choix qui sera fait par le député de composition de son équipe. Un crédit est alloué sur un calcul permettant de recruter au moins 3 collaborateurs. Certains députés en ont 3, d’autres un seul ou même 5.
Il faudra partager la part de l’indemnité entre tous les collaborateurs et à l’unique discrétion du député.
Beaucoup de députés choisissent de s’accompagner de profils diplômés en communication ou en droit. Ce qui nécessite EN PRINCIPE de prévoir une juste rémunération.
Mais il n’est pas rare que les collaborateurs acceptent un salaire moindre que dans le privé car la mission les passionne et que cela peut ouvrir à de belles perspectives à l'avenir.
La définition de leurs fonctions a longtemps été floue et de nature à favoriser des scandales d’ampleurs du type le #PenelopeGate. L’AN a rédigé une fiche visant à décrire de manière non exhaustive la teneur de leur travail : www2.assemblee-nationale.fr/decouvrir-l-as…
Parallèlement à cela, les députés disposent d’une dotation matérielle annuelle d’un montant de 18 950 € pour tout ce qui est relatif aux moyens de bureautique et de communication, la prise en charge des frais de taxi, de téléphone, de courrier avec des jolies entêtes…
Deuxièmement, qui dit député dit déplacements. Les députés représentent une circonscription ce qui signifie qu’ils doivent s’y rendre régulièrement. A noter que des collaborateurs parlementaires peuvent être positionnés à un travail au sein de la circonscription.
C’est l’AN qui raque pour les frais de train en 1ère classe (oui oui !) en direction de leur circo. Une flotte de véhicule avec chauffeur est également mise à disposition pour tous les déplacements en lien avec l’activité parlementaire.
Enfin, les transports sur le réseau parisien sont également rendus gratuits pour le député uniquement. Il existe des quotas pour le nombre de trajets aériens et je vous invite à aller lire la fiche de l’AN qui explique très clairement leur volume : www2.assemblee-nationale.fr/decouvrir-l-as…
Je passe volontairement sur les autres types de frais détaillés dans la fiche car ils sont assez classiques des fonctions électives.
Le plus intéressant c’est de savoir dans quelle circonstance les dépenses occasionnées par un député seront susceptibles de poursuites pénales en détournement de fonds publics notamment.
Le détournement de fonds publics est inscrit à l’article 432-15 du code pénal. C'est quand une personne chargée d’une mission de SP (un parlementaire : Crim., 27 juin 2018) aurait détruit, détourné ou soustrait des fonds publics remis en raison de ses fonctions.
Les sommes dont disposent le député pour mener à bien ses missions sont allouées par l’Assemblée Nationale elle-même abondée par nos impôts. Il s’agit bien de deniers publics dont il convient de contrôler l’utilisation conforme à l’intérêt général.
Chaque pécule employé doit l’être dans le prolongement des fonctions de député. Si un costume est acheté avec la « carte de l’assemblée », cela est possible s’il a pour vocation à être porté à l’occasion d’évènements, de plateaux télé, de réunions publiques…
Si un verre est payé au troquet du coin, il faut que cela soit à l’occasion d’une réunion de travail et non pas pour debriefer des rdv tinder de ses collabs.
Aussi, il existe un principe propre à la fonction publique et qui s’applique (normalement) aux fonctions électives : l’interdiction des dépenses somptuaires.
Une certaine décence veut que l’on ne s’achète pas sur ses frais de mandat des chaussures hors de prix de créateur alors que l’on pourrait tout à fait opter pour des modèles moins chers et équivalent.
Idem pour les dépenses évènementielles. Il n’y pas lieu de diner dans restaurants étoilés toutes les semaines lorsque l’on est député car cela n’est pas rendu essentiel à la poursuite des missions.
Les députés, en tant que responsable de leur personnel sont aussi tenus à garantir la réalité de leur mission et de les faire travailler pour l’AN et non pour le parti. C’est ce qui est en jeu dans l’affaire Roussel : mediapart.fr/journal/france…
Mais comment contrôler cela allez-vous me demander ? J’y viens.
Déjà, la HATVP, institution née sur fond d’affaire Cahuzac est en charge du contrôle des déclarations de patrimoine des élus. En cas de fluctuation suspecte du patrimoine d’un élu qui se serait enrichi de manière inexpliquée pendant son mandat, elle peut effectuer un signalement.
Le PNF pourra ensuite, s’il y a lieu, ouvrir une enquête et rechercher si des sommes ont été utilisées à mauvais escient. Des assos anticorruption peuvent également effectuer des signalement sur le fondement de dossiers solides.
Aussi, le déontologue de l’AN, M. Christophe Pallez, effectue un contrôle des notes de frais. Ce qui s’est produit dans l’affaire Dubost très commentée la semaine dernière.
Depuis une réforme de 2017, les députés sont contrôlés de manière aléatoire par tirage au sort annuel par le service déontologie.
Les députés épinglés peuvent être sommés de rembourser les sommes. Ce qui n’exclut pas, en principe, les poursuites pénales si les faits sont caractérisés.
Voilà ça sera tout pour ce thread qui n’est pas exhaustif. Il y a tant à dire sur nos amis les députés. N’oubliez pas d’aller voter pour les législatives !
Et n'hésitez pas à me signaler des imprécisions ou erreurs. J'adore apprendre et je suis loin d'atteindre la perfection sur ces sujets !

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