« Il faut réduire la population pour sauver la planète »
C’était déjà l’idée prônée par certains adeptes de la décroissance, à la fin des années 60.
Peu après, en Inde, les hommes fuyaient leurs maisons pour se cacher dans les champs...
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Quand Indira Gandhi, fille de Nehru, arrive au pouvoir en 1966, elle hérite d’un pays usé par la guerre, où la famine menace.
Pour nourrir la population, il manque 20 millions de tonnes de grain, et les caisses sont vides.
Elle n’a pas le choix. Il lui faut quémander une aide alimentaire aux États Unis.
Mais le moment est très mal choisi.
On vient de remettre à Lyndon Johnson un rapport fantaisiste, censé prouver que les enfants du tiers monde présentent une "valeur économique négative".
Séduit, Johnson déclare que "5$ investis dans le contrôle des naissances valent 100$ investis dans la croissance économique".
Il s’empresse de faire voter une loi qui conditionne toute aide américaine à la stérilisation des plus pauvres.
Et crée le "Bureau de la population", avec le Dr Reimert Ravenholt à sa tête.
Épidémiologiste raciste et misanthrope, il considère la grossesse comme une maladie à éradiquer, au même titre que la variole ou la fièvre jaune, et imprime ses cartes de visite sur des préservatifs.
Lors de sa rencontre avec la 1ère ministre indienne, Johnson lui fait savoir qu’il ne va pas “gaspiller l’aide étrangère américaine pour des nations qui refusent de traiter leurs problèmes de surpopulation”.
Indira n’a d’autre choix que de capituler.
Immédiatement, des quotas de stérilisation sont mis en place dans chaque État indien.
Les hôpitaux du pays voient une grande partie de leurs équipements réquisitionnés. Les soins courants en pâtissent, mais les quotas sont drastiques.
Comme cela ne suffit pas, des centaines de camps sont mis en place dans les zones rurales.
Du personnel paramédical, formé en quelques jours, doit y effectuer 150 vasectomies ou 300 implantations de stérilets par mois, sous peine de voir son salaire amputé.
Des « motivateurs » indépendants sont recrutés, et des primes sont versées aux patients volontaires : 2 à 3 $ pour un stérilet, 8 à 16 $ pour une stérilisation définitive.
Dans un pays où le salaire d’un ouvrier est de 2$/jour, ce n’est pas si dérisoire.
En fin de mois, certains états privent d’eau les villages qui n’atteignent pas leurs quotas.
Des millions de pauvres, voyant leurs cultures menacées et se profiler la famine, n’ont d’autre choix que de se soumettre aux bistouris d’état.
Les résultats sont impressionnants. Alors qu’il était de 100 000/an au début de la décennie, le nombre total de stérilisations atteint plus de 1,8 millions en 1967-68.
Johnson peut être fier de lui.
Mais, si elle ruine l’existence de millions de personnes, cette campagne n’a que peu d’effet sur la croissance démographique Indienne.
C’est ce que regrette Paul Ehrlich dans un ouvrage qui marque un véritable tournant dans l’action malthusienne : « La Bombe Démographique ».
Il y développe une idée simple : la croissance de la population dépasse de loin la quantité de ressources disponibles.
Et ses prévisions sont sans appel : "Dans les années 1970, des centaines de millions de personnes mourront de faim".
Il a plusieurs idées : ajouter des stérilisants temporaires à l'approvisionnement en eau ou aux aliments de base.
Ou organiser un système de "triage" des pays, conditionnant l’aide alimentaire au contrôle de la démographie.
Pour l’Inde, son opinion est faite : "aucun expert [ne] pense qu’elle sera autosuffisante sur le plan alimentaire en 1971, ou même qu’elle le sera un jour", écrit-il.
Elle est "si loin derrière dans le jeu de la population et de la nourriture qu'il n'y a aucun espoir."
Il a pourtant tout faux : l’autosuffisance alimentaire, l’Inde l’atteint précisément en 1971.
Non pas par le contrôle de sa démographie, mais grâce à un autre chantier qu’Indira a lancé : la révolution verte. thewire.in/agriculture/fo…
Grâce aux progrès de l’industrie chimique, qui fournit produits phytos et engrais, à la mécanisation et à de nouvelles variétés hybrides, les rendements agricoles explosent.
Et si écologiquement tout n’est pas parfait, un objectif inestimable est atteint : l’Inde mange à sa faim
Mieux, les paysans s’enrichissent : le Punjab, grenier à grain du pays, devient progressivement l'un des Etats les plus riches du sous-continent.
En 30 ans, le revenu annuel par habitant y passera de 60 à 440 dollars, bien au-dessus de la moyenne nationale.
Ses prévisions indiennes ne seront pas le seul fourvoiement d’Ehrlich. Il prédit que les USA devront rationner l’eau en 74, que les pesticides feront chuter l’espérance de vie des Américains à 42 ans dans les années 80, ou encore que l’Angleterre aura disparue avant l’an 2000…
Pourtant, son discours apocalyptique fait de nombreux émules.
En 68, Robert McNamara, fervent malthusien, prend la présidence de la Banque Mondiale. Lui aussi décide de lier prêts et aide humanitaire à une politique de natalité rigoureuse.
Le budget du bureau de Ravenholt passe de 36 à 120 millions de $. Pour compenser, on coupe dans les programmes d’aide médicale, qui tombent de 130 à 38…
L'Amérique ne cherche plus à éradiquer la pauvreté, mais à éradiquer les pauvres.
Les ressources sont finies, il ne faut pas les gâcher.
Ravenholdt et son bureau deviennent les précurseurs des cuistres climatiques, sillonnant le monde en première classe, de palace en palace, pour prôner la sobriété…
En 70, Nixon nomme à la tête d’une commission spéciale sur la croissance démographique un fervent partisan du contrôle des naissances, John D. Rockefeller III.
Par le passé, la fondation Rockefeller a en effet financé les programmes eugénistes nazis.
Inspiré par les idées d’Henry Ford, Hitler avait organisé l'"euthanasie" des enfants handicapés, des malades mentaux ou incurables, et un programme de stérilisations contraintes - 400 000 entre 1933 et 45. geo.fr/voyage/nazisme…
En 72, le Club de Rome publie un rapport qui fait grand bruit : The Limits To Growth.
Lui aussi considère que les ressources naturelles vont s’épuiser sous les coups de la croissance démographique et économique.
Il pose les bases des concepts de "croissance infinie dans un monde fini" ou du "jour du dépassement".
Ses conclusions sont aussi catastrophistes que celles d’Ehrlich : si rien n’est fait, le système économique mondial s’effondrera en 2030, entraînant une véritable hécatombe.
C’est dans ce contexte que Rockefeller remet son premier rapport, suivit 2 ans plus tard par un autre, commandé à H. Kissinger.
Les 2 préconisent toute une série de mesures coercitives, pour contrer la hausse du nombre "d’assistés & de criminels qui seraient un fardeau".
Un mémo complémentaire conseille même de rationner les denrées alimentaires ou d’utiliser l’armée contre les pays les plus récalcitrants.
Ceux qui pensent que les grands capitalistes voient la démographie comme une opportunité de main d’œuvre à bas prix en sont pour leurs frais…
Dans le même temps, l’Inde subit de plein fouet le choc pétrolier. En 1975, l’état d’urgence est déclaré. Indira Gandhi s’octroie les pleins pouvoir, musèle la presse et les dissidents.
Mais une fois de plus, elle se retrouve à la merci de l’aide internationale.
A la Banque Mondiale, McNamara est très clair : si l’Inde veut de nouveaux prêts, elle devra régler d’une manière plus radicale son prétendu problème démographique.
Au lieu de mesures incitatives, la force sera désormais employée.
Son fils Sanjay est chargé de mener l’offensive. Et il prend sa tâche très à cœur.
La stérilisation devient une condition à l’attribution des terres, à l’accès à l’eau, à l’électricité, aux cartes de rationnement, aux soins médicaux, aux augmentations de salaire et même aux permis de cyclo-pousse.
On donne aux policiers des quotas de rafles à effectuer dans les foyers les plus pauvres.
Des escadrons de démolition partent raser les bidonvilles et expédier les occupants vers les camps.
Les vasectomies y sont pratiquées dans un manque d’hygiène effroyable.
Les infections se multiplient chez des patients qu’on jette sans ménagement à la rue. Certains y perdent leurs jambes, que la gangrène ne laisse le choix que d’amputer.
Dans la seule ville de Delhi, sept cent mille personnes sont expulsées de leurs foyers.
Ceux qui parviennent à s’échapper ne récupèrent leur logement que lorsqu’ils se soumettent.
Des manifestations de résistance éclatent.
La police n’hésite pas à les réprimer par la force, tirant à balles réelles sur la foule.
Des milliers de personnes y perdent la vie.
Ravenholt se précipite dans la péninsule.
Il y distribue des endoscopes modernes, qui permettent de réaliser 12 800 vasectomies / jour.
En 1976, c’est 6,2 millions d’Indiens qui sont stérilisées.
Loin d’être consternée par les violations massives des droits de l’homme, la communauté internationale applaudit. McNamara se rend en Inde pour féliciter le gvt d’Indira Gandhi. "Enfin," dit-il, "l’Inde prend des mesures efficaces pour régler son problème de surpopulation"
La Première Ministre obtient ses prêts, mais est chassée du pouvoir l’année suivante.
Le peuple Indien, indigné, inflige une défaite cinglante à son parti, au pouvoir depuis trois décennies.
Cette période engendre en Inde un profond et durable rejet de la vasectomie.
Mais dans le même temps, de nouvelles techniques de stérilisation féminine sont mises au point. Des programmes visant la "santé des femmes" déplacent vers elles le contrôle de la natalité.
Encore aujourd’hui, la tubectomie, ou ligature des trompes, est le moyen de contraception le plus répandu dans les classes populaires. Faute de moyens, l’accès régulier à une pilule contraceptive n’y est pas aisé.
Si l’Inde abandonne officiellement ses quotas en 1996, la pression est encore mise sur les professionnels de santé.
La fin de l’année fiscale est nommée "saison de la stérilisation". hrw.org/news/2012/07/1…
En 2012, 53 femmes ont été stérilisées en l’espace de deux heures dans l’Etat du Bihar, dans les locaux d’un collège sans accès à l’eau courante ou à du matériel de stérilisation.
L’année suivante, l’Etat a déclaré envisager l’ouverture de 13.000 camps de stérilisation.
Début 2013, au Bengale-Occidental, plus de 100 femmes ont été abandonnées, inconscientes, dans un champ après une opération de stérilisation collective qui avait mal tourné. slate.fr/story/94723/st…
En 2014, 11 femmes sont mortes à la suite d'une de ces campagnes. Elles avaient été payées 600 roupies, soit une dizaine de dollars.
La semaine précédente, 83 femmes avaient été opérées en 6h par un seul chirurgien. 68 ont été traitées pour choc septique.
Pourtant, un célèbre pari aurait dû définitivement clore les thèses catastrophistes d’Ehrlich ou du Club de Rome.
L’économiste Julian Simon, théoricien de l'écologie de marché, ne croyait pas du tout au problème de la surpopulation ni à l’épuisement des ressources.
Il pensait que l'humanité pouvait s'adapter aux conditions changeantes, que la créativité humaine améliorerait le niveau de vie et que la plupart des ressources étaient remplaçables. Que leur prix diminuerait au fil du temps et de l’évolution des techniques.
Ehrlich, riant de ce « techno-solutionnisme », était au contraire persuadé qu’elles seraient de plus en plus rares, et donc de plus en plus chères.
Sûr de lui, il accepta de parier sur la tendance des prix des ressources au cours d'une période de dix ans. Simon, encore plus sûr de son fait, lui laissa choisir les dix produits qu'il pensait se raréfier.
Au terme du pari, leur prix moyen avait diminué d'environ 30% ...
Si on étend la durée du pari à la période 1900 - 2019, le prix du panier d’Ehrlich a baissé de 87%.
Alors que la population mondiale a augmenté de 375%. humanprogress.org/luck-or-insigh…
Mieux, les gagnants de cette abondance sont les gens ordinaires. Un ouvrier doit aujourd’hui travailler 8 fois moins qu’en 1900 pour acquérir le fameux panier.
Et les famines n’ont jamais été si peu nombreuses que depuis qu’elles ont été annoncées par Ehrlich ou le Club de Rome.
Car production agricole continue d’augmenter, inexorablement. Et depuis 20 ans, avec de moins en moins de surfaces cultivées.
Pourtant, de nos jours, de nouveaux prophètes de l’apocalypse, jouant sur la peur du réchauffement climatique, reprennent mot pour mot le discours d’Ehrlich.
Ces partisans de la décroissance voient leurs plans contrariés :
les pays riches ont atteint un niveau de développement qui leur permet de continuer à croître, tout en réduisant leurs émissions de CO2.
La France est revenue à son niveau d’émission d’il y a 60 ans, malgré une population 1,5 fois plus nombreuse.
En diminuant les capacités d’investissement dans la recherche et la transition énergétique, la décroissance a toute les chances d’y être contreproductive.
Le GIEC ne s’y trompe pas, et rejette tous les scénarios décroissants.
Les pays en développement, eux, n’ont évidemment aucune intention de décroître.
Le contrôle de leur population est donc le dernier levier actionnable par les idéologues.
Il serait pourtant plus logique qu’ils les encourage à croître :
Sur le chemin de la prospérité, il y a un point de bascule où un enfant cesse d’être un bras pour devenir un désir, et une charge.
Ce ne sont jamais les classes moyennes que l’on stérilise…
"Les pays riches (…) ont le devoir moral de jouer un rôle de premier plan dans le contrôle de la population." pensait Ehrlich.
Notre véritable devoir moral, c’est celui d’innover, et de diffuser ces innovations.
Les tristes prophètes qui ont si peur de manquer de ressources, négligent la plus précieuse de toutes : l’intelligence humaine.
Les défis qui attendent l’humanité n’ont peut-être jamais été aussi grands : heureusement, nous n’avons jamais été aussi nombreux pour les affronter.
#Fin
PS : Il serait très injuste de parler de l’eugénisme de la fondation Rockefeller sans évoquer son apport considérable à la révolution verte : agdaily.com/insights/brief…
Pour le think tank de Jancovici, les data centers vont tripler leur consommation d’ici 2030.
Des projections maximalistes, bien au-dessus des estimations de l’IEA (700 à 1 250 TWh).
Principal responsable : l’IA, dont l’essor repose sur les énergies fossiles, aux États-Unis et en Chine. Pour éviter ça, pourquoi ne pas favoriser l’installation des data centers en France 🇫🇷, où l’électricité est largement décarbonée ?
"S'acheter un climatiseur, c'est comme s'acheter une 2e voiture et rouler avec à fond"
Avant que les maths ne décèdent, je crois qu'un débunk s'impose 😂
#thread ⬇️
Je ne sais pas d'où viennent les chiffres de François Camé.
Mais le rapport le plus précis que je connaisse, qui s'appuie sur les données des réparateurs de l'État américain du Maine, estime que 2% des climatiseurs des particuliers fuient. efficiencymaine.com/docs/EMT_Refri…
Parfois, ces fuites sont minimes. Parfois, 100% des HFC, ces gaz réfrigérants et à effet de serre, sont rejetés dans l'atmosphère.
En prenant une hypothèse médiane de 50% de pertes, on obtient : 2% x 50% = 1% de fuites en moyenne par clim.
Selon l’@Arcep, les datacenters ont consommé 2400TWh d’électricité en 🇫🇷 en 2023.
C’est 5,4 fois la conso totale du pays 😂
Les décroissants ont quelques problèmes avec les ordres de grandeur, un #thread⬇️
Partout dans le monde, on se réjouirait d’accueillir des datacenters.
Avec notre mix décarboné, c’est même la planète entière qui devrait se féliciter quand ils s’installent chez nous… mais évidemment, on est jamais mieux desservi que par soi-même.
L’@Arcep publie donc un rapport à première vue alarmant : les émissions de GES, la conso d’eau et d’électricité progresse. 😱
Revenir à l’essentiel.
La première action des Khmers rouges ? Détruire tous les objets modernes, des voitures, symboles de l’occident et du capitalisme, aux équipements médicaux et aux outils agricoles. Les industries sont dynamitées et 1,5 million de têtes de bétail supprimées.
Partager le même repas.
Toutes les cultures sont abandonnées, à l’exception du riz. Faire la cuisine pour soi ou sa famille est banni. Les repas doivent être pris en commun.
Progressivement, les rations diminuent. En 1979, elles ne seront plus que de 10g par jour.
Le protectionnisme, une bonne idée pour réindustrialiser l’Amérique ?
Retour sur ses plus grands succès à travers l’histoire 🍾
#thread ⬇️⬇️⬇️
Après l’indépendance, l’Inde veut s’émanciper des anciennes puissances coloniales en taxant les importations. Le prix des voitures est multiplié par 3.
Protégé de la concurrence, le constructeur local n’innove pas et produit l’Ambassador, un modèle des années 50, jusqu’en 2014.
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Les téléphones sont si rares que les listes d’attente pour en acheter un à la seule entreprise du pays durent des années.
Un appareil dépassé coûte plusieurs mois de salaire.