Thread by @LiveFromLiege

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<#HistoiredeLiège> 1581-1688
Un peu d'histoire et un peu de bagarre: Chiroux contre Grignoux à l'époque des Princes de Bavière, ou "l'éternelle lutte des Liégeois contre le Prince-Évêque et la fin définitive des Libertés communales" #trètte 🧵

Pendant un siècle, la Principauté est gouvernée par 3 Princes de Bavière: Ernest, Ferdinand et Maximilien-Henri. Peu présents à Liège, leur absolutisme et leur opposition aux libertés relancent la guerre civile, donnant naissance à 2 partis férocement opposés, Chiroux et Grignoux

À l'époque Liège est tiraillée entre l'Empire, l'Espagne, la France et les Pays-Bas. Une des préoccupations principales des Liégeois est de garantir l'indépendance et la neutralité de la Principauté, notamment pour assurer la liberté de commerce

Ernest est le moins despotique des trois Princes de Bavière. Il est resté dans les mémoires pour sa maison d'Outremeuse, devenue l'hôpital qui porte son nom. Bien accueilli par les Liégeois en 1581, il ne parvient cependant pas à maintenir la sécurité et l'intégrité territoriale

Lassé des abus lors des élections, le peuple le force à rendre aux Métiers le privilège d'élire les Bourgmestres de la Cité. À son décès en 1612, son neveu Ferdinand lui succède. Dès son intronisation il abolit les libertés rétablies par Ernest

Soutenu par l'Empereur, il se heurte cependant aux Liégeois qui imposent malgré tout leurs Bourgmestres. Cette intransigeance de Ferdinand donne alors naissance à deux partis qui vont s'affronter violemment durant 20 ans: les Chiroux et les Grignoux

Les Chiroux sont les partisans du Prince et de l'Espagne. Souvent issus de la noblesse, de la haute bourgeoisie et du clergé, leur tenue caractéristique leur vaut le surnom d'hirondelles ("Chiroux" en wallon)

Les Grignoux ("grognons") représentent pour leur part le peuple liégeois, marchands et ouvriers des 32 Métiers, mais aussi bourgeois opposés à l'absolutisme du Prince et au fanatisme religieux. Défenseurs de la neutralité liégeoise, ils cherchent appui auprès de la France

En 1629, Ferdinand tente d'imposer ses élus mais le peuple en colère obtient que son candidat Beeckman soit désigné Bourgmestre. Adulé par les masses populaires, il s'oppose aux prétentions du Prince jusqu'à son dernier souffle et décéde en 1631, probablement empoisonné

Sébastien Laruelle devient Bourgmestre et chef des Grignoux, qui se rapprochent de plus en plus de la France. L'agitation est insupportable pour Ferdinand qui fait appel à des troupes étrangères pour mater la révolte. Des soldats croates viennent alors piller le Pays de Liège

Malgré l'intervention des milices liégeoises, ils laissent derrière eux 8.000 fermes en flammes ! Lui-même choqué par ces excès, Ferdinand rappelle ses troupes. L'exaspération du parti populaire est alors à son comble

Afin de retrouver les bonnes grâces du Prince-Évêque, un certain Comte de Warfusée décide de s'attaquer aux Grignoux et à leur emblématique Bourgmestre, auxquels il fait mine de s'allier. Le 16 avril 1637, Warfusée invite Laruelle à un banquet dans sa maison de la place X.Neujean

Des soldats espagnols y attendent le Bourgmestre et l'assassinent sans jugement. Le peuple liégeois en fureur accourt sur les lieux. Warfusée et ses complices sont massacrés, les Chiroux sont pourchassés et exilés, Laruelle et Beeckman deviennent des martyrs vénérés par le peuple

3 ans plus tard, la "Paix fourrée" est signée. Le Prince et les Chiroux reviennent à Liège. Les conflits reprennent néanmoins et en 1646, suite à la "Saint-Grignoux", plus de 1.500 Chiroux reprennent la route de l'exil. La "commune de Liège" vivra 3 ans

Exilés à Bonn, le Prince et les Chiroux décident de reprendre le pouvoir par la force. Aidés par des troupes étrangères menées par son neveu et futur successeur Maximilien-Henri, ils s'imposent malgré la lutte courageuse du peuple liégeois

La répression est alors féroce. Les Grignoux sont pourchassés et massacrés en masse. Leurs meneurs Hannet, Barthel et par la suite de Bex, Macors et Renardi sont tous assassinés. Les statues des héros Beeckman et Laruelle sont détruites et la possession de leur portrait interdite

Pire que tout: Ferdinand retire aux Liégeois l'élection des Bourgmestres et il interdit les réunions des Métiers. La démocratie municipale liégeoise vit alors ses derniers instants, les antiques libertés seront bientôt définitivement enterrées

En 1650, le décès de Ferdinand propulse Maximilien-Henri sur le trône épiscopal. Connu des Liégeois pour avoir écrasé militairement le pays, son arrivée ne présage rien de bon. Son règne est notamment marqué par des invasions étrangères qui mettent fin à la neutralité liégeoise

Mais aussi par une répression ferme qui se traduit par des impôts élevés et destinés à bâtir la Citadelle afin de maintenir la ville sous domination. Son heritage principal reste cependant l'abolition définitive des anciens privilèges

En 1684, une fois la victoire assurée, Maximilien-Henri supprime définitivement l'ancienne constitution liégeoise, abolit l'élection populaire des Bourgmestres, supprime les milices bourgeoises et retire tout pouvoir politique aux Métiers

C'est ainsi que les Libertés liégeoises disparaissent de la vie politique pendant un siècle, jusqu'à la Révolution /FIN

Anecdote bonus: Chiroux et Grignoux réapparaissent brièvement à l'époque de Max Henri sous le nom de "mangeurs de tartes / tartines" et "mangeurs de boudin"
Anecdote bonus bis: aujourd'hui les Chiroux désigne une bibliothèque et les Grignoux des cinémas
/VRAIE FIN

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