1/41
L'INSEE a actualisé les données de mortalité, avec l'année 2022 complète.
Cela me permet de mettre à jour un précédent thread et de revoir les estimations faites...
insee.fr/fr/statistique…
2/41
Les données de mortalité (et excès de mortalité) sont précieuses en cette période de pandémie car :
A) Aucun pays ne peut documenter la totalité de ses cas de CoVID, et donc des décès qui en découlent
B) Les définitions des décès CoVID varient+++ dans le temps et entre pays
3/41
Il en résulte une SOUS-estimation importante de la mortalité réellement induite par la pandémie.
Le décompte officiel est à ~6,8 millions de décès depuis 2020, alors que l'excès de mortalité constaté sur la même période varie de 16,6 à 29,9 millions
economist.com/graphic-detail…
4/41
Encore récemment, avec l'exemple de la Chine, l'OMS rappelait le handicap de définitions trop restrictives des décès CoVID, et l'importance de suivre l'excès de mortalité pour évaluer l'impact réel de cet aspect le plus sévère de la pandémie
bbc.com/news/world-asi…
5/41
Ou encore plus récemment quand le directeur de l'OMS rappelait le bilan des 8 dernières semaines (>170000 décès recensés), en précisant que la réalité était très supérieure
who.int/publications/m…
6/41
A cela s'ajoute le débat sans fin sur "mort DU ou mort AVEC le CoVID".
Exemple d'un patient diabétique (maladie chronique), qui contracte la CoVID, décompense son diabète (acidose sévère, coma hyperosmolaire, défaillance multiviscérale...), et décède...
7/41
Est-il mort "du CoVID" ou bien "avec le CoVID" ?
Il vivait avec son diabète depuis plusieurs années. Sa route n'a pris fin qu'au moment où il a rencontré SARS-CoV-2.
Certains diront "mais s'il n'était pas diabétique, il ne serait pas mort à ce moment"...
8/41
Mais s'il n'avait pas rencontré SARS-CoV-2, il ne serait pas mort non plus à ce moment, et aurait continué à vivre avec son diabète, comme il le faisait depuis de nombreuses années...
9/41
Il y a donc un choix à faire pour la cause du décès, et ce choix varie+++ d'un pays à l'autre, d'une période à l'autre, mais aussi d'un praticien à l'autre...
L'excès de mortalité est beaucoup moins subjectif et moins sujet aux biais de ce genre...
10/41
Cependant, d'autres problèmes se posent avec la méthode de l'excès de mortalité.
Tout d'abord, cet excès ne représente que ce qui dépasse d'un niveau de référence.
On peut donc sous-estimer la mortalité spécifique totale d'une cause de mortalité donnée
11/41
Ensuite, le niveau de référence peut varier++ selon les sources.
Parfois, mortalité observée durant l'année qui a précédé le début de la pandémie.
Parfois une moyenne sur plusieurs années précédentes +/- associée à une projection si les conditions restaient inchangées...
12/41
Parfois il inclut les années pandémiques.
Cas du UK 🇬🇧 qui inclut 2021 dans le niveau de référence de mortalité.
Ceci conduit à inclure une partie de la surmortalité++ de la pandémie, et donc à SOUS-estimer la surmortalité des années suivantes
ons.gov.uk/peoplepopulati…
13/41
En France, on a tout d'abord les données INSEE comparées à l'année 2019.
La comparaison "brute" ne tient pas compte de l'évolution démographique, et donc de l'évolution "attendue" des décès.
insee.fr/fr/statistique…
14/41
Sur les données consignées par l'INSEE, on remarque que 2020 🔴 a été associée à une surmortalité massive par rapport à 2019 🔵.
Mais on note que 2021 🟡 et 2022 🟣 suivent une tendance similaire et sont même > à 2020...
15/41
La répartition de cette surmortalité sur l'année 2022 est assez évocatrice, puisqu'elle est divisée en 5 vagues, qu'on peut superposer aux 5 vagues de CoVID de l'année 2022.
La concordance est indiscutable 🤷‍♂️
16/41
Comme en 2021, on observe à nouveau une importante SURmortalité en 2022, avec des vagues d'excès parfaitement superposables aux vagues de CoVID.
Mais quelle est l'ampleur de cet excès ?
Il faut se pencher sur l'évolution ATTENDUE en l'absence de pandémie...
17/41
3 facteurs entrent notamment en jeu :
A) La démographie.
L'évolution de la répartition des âges (vieillissement de la population), ainsi que du nombre d'habitants, tend à faire ↗️ lentement la mortalité année après année, indépendamment de tout autre facteur...
18/41
B) Les quotients de mortalité.
Ils tendent au contraire à ↘️ d'année en année, sous l'impulsion des progrès de la médecine, de l'hygiène, de niveau socio-économique...
Cela tend à faire ↘️ la mortalité attendue...
19/41
C) "L'effet moisson".
La pandémie induit des décès précoces. Or on ne meurt qu'une seule fois. Ces décès qui surviennent plus précocement en raison de la pandémie, son autant de décès qui ne surviendront pas au moment où ils étaient "attendus"...
20/41
Il en résulte donc une évolution de mortalité "attendue" (hors pandémie), qu'on peut alors retrancher à la mortalité "observée", et en déduire l'excès de mortalité induit par la pandémie
insee.fr/fr/statistique…
21/41
En l'occurrence pour 2020, l'INSEE avait calculé une ↗️ de mortalité ATTENDUE (hors pandémie) de +9000 décès :
+14000 par vieillissement de la population
+1600 pour le jour supplémentaire en février
-6900 par évolution des quotients de mortalité
22/41
Au lieu des +9000 décès attendus, nous avons observé, malgré la lutte contre la transmission de SARS-CoV-2, un excès de +46700 décès !
Ceci est < au total des décès CoVID car c'est uniquement ce qui "dépasse" du niveau habituel de mortalité...
23/41
En 2021, avec la même méthode, l'INSEE attendait un excès de +9300 décès par rapport à 2019 :
+23100 par vieillissement de la population
- 13800 par évolution des quotients de mortalité.
En réalité, on a observé un excès +39100 décès !
24/41
Pour l'anecdote, dans un précédent thread j'avais été un peu plus "optimiste" que l'INSEE, car avec la tendance des années AVANT pandémie, j'arrivais à un nombre de décès attendus en 2021 > à celui de l'INSEE, et donc un excès de mortalité < à celui de l'INSEE 🔽
25/41
Qu'en est-il pour 2022 ?
Les données 2022 ne sont pas encore consolidées.
De plus, l'analyse par l'INSEE ne sera pas publiée avant le printemps 2023 car elle nécessite une analyse démographique étendue pour calculer les décès attendus...
insee.fr/fr/statistique…
26/41
Ce que je vais faire ci-après, est donc uniquement une estimation/approximation.
Comme évoqué précédemment, pour l'année 2021, mon estimation était un peu trop "optimiste" avec un excès de mortalité à ~+25000, quand le vrai excès INSEE était finalement à +39100 😅
27/41
Comment faire l'estimation pour 2022 ?
Tout d'abord, reprendre les données de mortalité cumulée pour 2022.
L'INSEE recense 673637 décès en 2022.
Il s'agit là des décès OBSERVÉS ; ceci inclut donc l'excès de mortalité 2022 dû à la pandémie (qu'on cherche à calculer)...
28/41
On peut alors reporter ce cumul des décès observés en 2022 🔴, sur le graphe INSEE qui compare les décès observés 🔵, avec les décès attendus (hors pandémie) 🟢...
insee.fr/fr/statistique…
29/41
Ensuite, il nous faut estimer les décès attendus pour 2022 (hors impact de la pandémie).
L'extrapolation linéaire à partir des données INSEE de 2010 à 2021 donne la tendance usuelle (hors pandémie), et aboutit à 628982 décès attendus en 2022.
Cf. point 🟢 foncé
30/41
On peut donc estimer la surmortalité 2022 à :
673637 - 628982 = +44655 décès en excès !
C'est quasiment la même surmortalité qu'en 2020 !
Toujours nettement ↗️ par rapport à ce qu'on observerait sans la CoVID.
Cet écart est de plus apparu/persistant avec la pandémie 🤷‍♂️
31/41
Pourquoi ?
Certains évoquent la canicule de l'été 2022.
Plusieurs problèmes avec cette hypothèse.
Tout d'abord, les autorités ne lui attribuent que 2800 décès en excès (2000 à 3500), ce qui
n'explique pas le gap majeur à +44655.
H/T @Panda31808732
santepubliquefrance.fr/determinants-d…
32/41
De plus, comment peut-on penser que la canicule de 2003, plus intense et plus durable, sans
"plan canicule", ait fait 19000 morts ; et que la canicule 2022, moins intense et moins
durable, avec un "plan canicule", puisse en faire >2x plus ? 🤷‍♂️
meteofrance.com/actualites-et-…
33/41
On ne peut pas négliger l'impact de la CoVID durant l'été 2022, puisque la vague estivale
2022 (BA.5) est :
A) Synchrone avec la vague de surmortalité
B) Nettement plus massive que les vagues de 2020/2021 en termes de contaminations 🤷‍♂️
34/41
Ne pas oublier que si Delta pouvait avoir un "excès" de virulence par rapport au variant
originel, Omicron n'est pas devenu "non-virulent".
Il a la même virulence que le SARS-CoV-2 qui a conduit le monde au confinement en 2020
Cf. tweets 20 à 23 🔽
35/41
Or contrairement à 2020 ou 2021, l'année 2022 a été caractérisée par la diffusion du lignage
Omicron, doté d'un échappement immunitaire ↗, et associé à une transmissibilité ↗↗↗.
2022 a donc connu une prévalence d'infections 🟡 beaucoup plus élevée que 2020 ou 2021
36/41
Ainsi, la ↘↘ de létalité obtenue via la vaccination, a été +/- "rongée" par la ↗↗ des
contaminations.
Au bilan, il en résulte une mortalité qui ne change pas beaucoup. 🤷‍♂️
Sans compter que l'adhésion aux rappels vaccinaux a ↘↘ malgré leur nécessité.
37/41
En clair, il faut bien plus d'infections pour atteindre le même nombre de morts. Cela permet
de rouvrir pleinement l'activité économique (fin des restrictions).
Par contre, comme on laisse les infections ↗↗↗, toujours autant de vies sont perdues
chaque année.
38/41
Le dépistage des infections par SARS-CoV-2 a ↘↘↘ en 2022, rendant le recensement des
décès induits par la CoVID beaucoup moins exhaustif.
Or sans test, il est impossible de classer un décès dans la catégorie CoVID (définition étiologique) 🤷‍♂️
39/41
C'est le "nouveau normal", qui va mécaniquement impacter l'espérance et qualité de vie dans
les pays similaires à la France.
Je rappelle que le titre du rapport 2022 de la DREES ne portait que sur les données allant
jusqu'à 2019 🤡
40/41
Il faut également bien comprendre que nous sommes actuellement dans une période
"favorable" ou "protégée" car :
A) Les primo-vaccinations sont encore +/- récentes
B) Pas encore de variant totalement résistant à l'immunité acquise
C) Pas de variant à virulence ↗↗
41/41
Le bilan de nette surmortalité qu'on observe toujours en 2022 est donc un résultat en
conditions "favorables" !
La pandémie est peut-être finie dans votre esprit car vous l'associez aux "restrictions", mais
son impact sur nos vies ne fait que commencer.

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Jan 27
1/5
Thread #CoVID #ONS 🇬🇧
Cette semaine, uniquement une très rapide mise à jour avec l'enquête publiée aujourd'hui, car les tendances observées concordent avec ce qui était attendu d'après l'enquête précédente :
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Thread V2

1/24
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Ancien threads :
2/24
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Cf. threads précédents
3/24
A la place, uniquement une présentation de l'enquête ONS 🇬🇧 hebdomadaire, puis une exploitation des datasets pour :
A) Comparer les données ONS/officielles 🇬🇧🏴󠁧󠁢󠁥󠁮󠁧󠁿
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Jan 8
1/24
J'aimerais compléter le tweet ci-dessous à propos de la fréquence des réinfections par SARS-CoV-2.
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2/24
La source du graphe ci-dessus est "Gov UK".
Il s'agit donc uniquement des seuls tests de dépistage/diagnostic réalisés par :
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Ces taux de dépistage sont au plus bas.
coronavirus.data.gov.uk/details/testin…
3/24
Le graphe des réinfections n'est donc construit qu'à partir de la petite fraction d'infections détectées via le peu de tests encore réalisés.
Cette incidence "apparente" est très inférieure à l'incidence réelle, ce qui fait ↘️ la fréquence apparente des réinfections...
Read 24 tweets
Jan 7
1/37
3ème partie du thread issu des données de l'ONS
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Cette fois, on va s'intéresser à l'extrapolation des données UK 🇬🇧 à la situation FR 🇫🇷...
2/37
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3/37
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◀️ Suivi des 2 indicateurs
▶️ Ratio au cours du temps
Read 37 tweets

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