2/ « Pourquoi coexistent un âge légal et une durée de cotisations ? »
Question légitime.
Disons simplement que s’il n’existait qu’une durée de cotisations, le risque serait que beaucoup prennent leur retraite trop tôt (càd avec des toutes petites pensions) par choix ou dépit.
3/ Et finissent par tomber dans la pauvreté. Alors que le système actuel, forçant à travailler (et donc accumuler des droits) jusqu’à un âge légal a au moins permis de largement réduire le niveau et l’intensité de pauvreté parmi les retraités.
4/ Par ailleurs, d’un point de vue macroéconomique, un âge légal minimal a au moins l’avantage de mécaniquement assurer un certain niveau d’emplois des seniors.
5/ « Pourquoi l’âge légal, censé être un âge d’ouverture des droits, ne l’est pas car on peut partir avant mais avec une décote ? »
C’est assez rare pour le souligner : P. Cohen se trompe. L’âge d’ouverture des droits (auj. 62 ans ; 64 ans après réforme) est bien un âge plancher
6/ Sauf pour ceux concernés par un dispositif dérogatoire (carrières longues, pénibilité, handicap, etc.), on ne peut pas liquider sa retraite avant, même avec une décote.
7/ D’où la polémique sur ceux qui, post-réforme, auront toutes leurs annuités mais vont quand même devoir travailler jusqu’à 64 ans (les mères ayant accumulé beaucoup de trimestres pour enfants par exemple).
8/ On touche là précisément au limite de l’articulation entre durée de cotisations et âge d’ouverture des droits.
9/ « Comment fonctionnent la décote et la surcote ? »
En gros, on perd (ou on gagne) 1,25% de sa pension calculée par trimestre manquant (ou en en plus) du nombre requis pour le taux plein.
10/ Ce système a été instauré par la loi Fillon de 2003. Il vise à inciter à travailler jusqu’au taux plein afin notamment d’augmenter l’emploi des seniors. Mais aussi générer des économies pour le système.
11/ Ce système de décote/surcote se cumule avec « la proratisation ». En gros, s’il manque 10 T par rapport à la durée du taux plein (disons 172 T), la pension est calculée selon un facteur 162/172. A la louche, ça pénalise le niveau de pension 2x moins que la décote.
12/ « Quelle est la difference entre « trimestre validé » et « trimestre cotisé » ? »
En bref :
- Un trimestre est « cotisé » s’il est travaillé ;
- Il est validé s’il compense des périodes non travaillées subies (chômage, maladie, maternité par exemple).
13/ C’est la durée d’assurance totale (cotisée ou simplement validée) qui compte pour le calcul de la pension de base.
14/ C’est pourquoi techniquement on ne parle pas de durée de cotisations pour avoir le taux plein mais de « durée d’assurance requise » (DAR) englobant tous les types de trimestres.
15/ « Pourquoi le régime général cohabite avec des complémentaires ? »
N’étant pas spécialiste de cette question, je dirais simplement que cette construction par étages est le fruit de l’histoire sociale.
16/ Car, à travers les complémentaires au fonctionnement paritaire, les partenaires sociaux sont en première ligne dans le pilotage d’une partie du système. Mais on peut tout à fait imaginer un système à un seul étage. C’est celui qu’envisageait le système universel.
17/ Petite erreur ici de Patrick Cohen : les complémentaires, en tout cas la principale - l’Agirc-Arrco -, ne fonctionne pas par capitalisation.
18/ C’est un système par répartition. La confusion vient certainement du fait que cette caisse a accumulée des réserves qu’elle place sur les marchés.
19/ En revanche, le RAFP (régime additionnel de la fonction publique), régime supplémentaire des fonctionnaires d’Etat, est bien un régime par capitalisation collective. Il est aussi géré par les partenaires sociaux 🙃
20/ « Pourquoi ceux éligibles au dispositif carrière longue ont bien souvent des pensions supérieures à la moyenne ? »
Car ceux concernés ont par définition cotisé longtemps, ont connu une carrière sans longue interruption qui leur a permis d’accumuler pas mal de droits.
21/ Les plus petites pensions concernent à l’inverse ceux qui ont eu une carrière hachée.
Il faudrait se plonger dans les études de la DREES pour être plus précis ce que je n’ai pas le courage de faire un vendredi soir mais je laisse les spécialistes compléter.
22/ Tout ceci étant dit, il n’en reste pas moins que ce système est sans nul doute illisible pour le non-spécialiste🤯
Ce qui pose un problème démocratique car ces mécanismes pèsent lourd sur les existences individuelles, sur la vie des entreprises et sur les finances publiques.
23/ C’est pourquoi, à titre personnel, je continue de penser que le système universel, qui a fait l’objet de la précédente réforme avortée, reste un modèle cible.
24/ Si la transition vers ce système est techniquement redoutable - et difficile à expliquer - le principe qui le fonde est bien plus lisible et équitable : un euro cotisé ouvre les mêmes droits !
Est-ce possible de mener une réforme des retraites budgétaire sans mettre (au moins) 1 million de personnes dans la rue❓
Oui ✅
Deux réformes en témoignent, la première venant de la droite, la seconde de la gauche :
- La réforme Balladur (1993)
- La réforme Touraine (2014)
2/ Commençons par la réforme Balladur.
Face au déficit constaté au régime général (40 Mds de francs), son gouvernement lance une réforme quelques mois après son arrivée à Matignon.
3/ Annoncée en plein mois de juillet, la loi est votée en quelques semaines sans générer de contestations majeures.
Pourtant la réforme est dure (bien plus que celle actuellement en débat).
Les fonctionnaires sont-ils des privilégiés en matière de retraite ?
SPOILER ALERT : Non ❌
Tout dépend de la carrière mais, en moyenne, les règles du privé seraient légèrement plus avantageuses si l’on considère seulement le niveau de pension.
Explications ⤵️
2/ Il est presque communément admis qu’en vertu de la règle de prise en compte des 6 derniers mois dans le public (vs. 25 meilleures années dans le privé) les fonctionnaires sont mieux lotis pour le calcul de leur pension.
3/ Cette intuition est trompeuse.
Car seul le traitement indiciaire brut (soit la rémunération hors primes) est pris en compte dans le calcul de la pension principale des fonctionnaires.
Ce qui réduit l’assiette considérée d’environ 20% en moyenne !
❌ Beaucoup utilisent cette déclaration du president du COR pour contredire l’affirmation d’un déficit structurel et durable du système de retraite.
Pourtant, en rien celle-ci ne s’oppose à celle-là. Pour s’en persuader il suffit de lire…le rapport du COR 🙃
2/ Commençons par rappeler que la maîtrise des dépenses à l’horizon 2070, malgré la dégradation continue du rapport cotisants/retraités, s’explique par l’indexation, depuis la loi Balladur de 1993, des pensions sur l’inflation et non plus sur les salaires.
3/ Les salaires augmentant tendanciellement plus vite que l’inflation, les retraités vont relativement s’appauvrir ces prochaines décennies par rapport au reste de la population.
1/ Demain la SNCF et la RATP se joignent au mouvement intersyndical contre la réforme des retraites.
Pourtant, elle aura des conséquences très modérées pour la plupart de leurs agents.
Un petit 🧵 pour en expliquer les raisons ⤵️
2/ Considérons trois sujets :
- la fermeture de ces régimes ;
- l’âge d’ouverture des droits (AOD) à partir duquel on peut partir à la retraite ;
- la durée d’assurance requise (DAR) pour obtenir le taux plein.
3/ Sur la fermeture des régimes :
- la SNCF n’est pas concernée, le régime étant fermé depuis début 2020 (loi NPF) ;
- à la RATP : en vertu de « la clause du grand père », seuls les nouveaux entrants seront concernés donc, par définition, pas les grévistes.