Thread by @Bena_druuis

Prises de têtes chez les Gaulois (thread)

Une coutume est souvent évoquée lorsqu’on parle des gaulois: la prise des têtes coupées. Souvent associée à une pratique guerrière, la conservation de la tête est en réalité plus complexe (1/18)

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Les sources littéraires antiques sont les premières à nous renseigner sur cette tradition. Diodore de Sicile et Strabon (1er s.av. et ap. J.-C.), inspirés par un auteur grec Poséidonios d’Apamée qui a visité le sud de la Gaule pendant le 1er s.av. 2/18

Poséidonios nous explique qu’après le combat, les gaulois avaient l’habitude d’accrocher les têtes des ennemies vaincues à l’encolure de leurs chevaux, suspendre aux lances pour ensuite les rapporter chez eux afin de les clouer à l’entrée des bâtiments publics ou des maisons 3/18

Toujours selon lui, certaines têtes, les plus renommées, étaient embaumées à l’huile de cèdre. Elles étaient fièrement montrées aux étrangers et les gaulois refusaient de les rendre même au prix d’un poids égal d’or. 4/18

Les premières découvertes archéologiques de crânes humains isolées ont été faites en Gaule méditerranéenne, à Roquepertuse puis à Entremont et Glanum et ces restes ont été tout de suite mis en rapport avec les textes antiques. 5/18

Ensuite le prélèvement de la tête est ressorti sur de très nombreux sites partout dans la Gaule. Le plus spectaculaire reste le site du sanctuaire de Ribemont-sur-Ancre (somme) où plusieurs dizaines de corps de guerriers décapités ont été découverts. 6/18

Un lien évident semble se dessiner entre ces crânes et le monde guerrier. Diodore nous relate d’ailleurs que les Gaulois consacrent une journée entière à prélever les têtes de leurs ennemies sur le champ de bataille. 7/18

Grâce à l’étude de ces ossements, nous savons que les têtes étaient prélevées après la mort sur cadavre « frais » à l’aide de petits coups tranchants sous le crâne. On parle alors de décollation et non de décapitation. 8/18

Au restes humains s’ajoutent de nombreuses représentations sculptées dans la pierre, en ronde-bosse ou en bas relief, gravées ou peintes. Sans oublier les monnaies. 9/18

Tous mettent l’accent sur le guerrier et la force (les guerriers assis d’Entremont évoquent cette puissance et le caractère ostentatoire de trophées belliqueux glorieux. 10/18

Toutefois, l’ethnographie nous apprend qu’une telle coutume peut concerner aussi bien les ennemies que les ancêtres comme une forme d’hommage à travers la conservation d’une partie très symbolique de l’individu. 11/18

La possibilité de têtes appartenant à des femmes n’est pas exclus par les chercheurs car si il a pu être établi que les crânes concernaient des adultes voir des adolescents, le sexe des individus reste incertain. 12/18

Les têtes coupées gauloises pouvaient donc appartenir aux deux catégories (ennemi/ancêtre) même si les auteurs antiques n’en citent qu’une sur deux. A rappeler: les écrits indirects des grecs et des romains sont loin de refléter la réalité des sociétés gauloises complexes. 13/18

A Pech Maho, Glanum ou Roquepertuse, les crânes retrouvés semblent avoir été encloués sur des linteaux, des poutres ou des piliers appartenant à des lieux collectifs ou exposés près des remparts des oppida. 14/18

Outre les sanctuaires, et les bâtiments publics, des témoins identiques se retrouvent en contexte domestique. Conservés dans des coffres, ils pouvaient ensuite être ressortis à l’occasion lors de réunion. 15/18

Pour ces cas de figure, l’hypothèse d’ancêtres héroisé plutôt que de têtes arrachées à des ennemies est avancée. Le fait de s’afficher avec de glorieux aieux divinés aurait été un gage de l’autorité des élites en place. 16/18

Quant à la signification de l’importance de la tête dans la société gauloise, les chercheurs mettent l’accent sur une âme du mort qui vivait dans la tête coupée». Ainsi l’exposition des têtes coupées serait régie par la croyance que l’âme est inséparable du crâne. 17/18

En conclusion, il est donc fort à parier que diverses pratiques étaient d’usages chez les populations gauloises et qu’il reste encore beaucoup d’éléments à découvrir à l’avenir. 18/18

Pour aller plus loin :

Dedet, Bernard. «La tête coupée, symbole de mise à mort suprême en Gaule méridionale ? 2013

Roure, Réjane, et Lionel Pernet. Des rites et des Hommes 2011