Thread by @RomainBurrel

"It wasn't a good life", elle disait. Anna Mae Bullock était née dans les champs de coton. Elle a fui un mari violent rencontré à 16 ans qui lui cassait la gueule et l’obligeait à monter sur scène le soir même. Elle l’a quitté mais les journalistes lui parleront sans cesse de Ike

Quand elle a obtenu le divorce en 1978. Tina Turner ne voulait pas d’argent. Elle voulait garder ses enfants et son nom. Ce nom de scène qu’elle ne devait qu’à elle et que Ike voulait lui reprendre.

La musique ne marchait plus. Les nouveaux directeurs artistiques de sa maison disque ne « voulaient pas payer pour la musique de cette [le mot en N] ». Elle a fini par jouer à Las Vegas pour payer les factures et nourrir sa famille.

En 1980, au fond du trou, elle participe au Christmas Special d’Olivia Newton-John. Sur le tournage, elle croise le producteur de la chanteuse et actrice et l’implore de s’occuper de sa carrière.

Roger Davies, c’est son nom, accepte. Il embarque Tina Turner à Londres. Pourquoi ? Parce que l’Angleterre a toujours adoré Tina. Et que dans les 80s, les anglais règnent sur la pop. Il faut réinventer Tina. On propose des chansons à la chanteuse. Dont une. Qu’elle déteste.

La chanson s’appelle « What's Love Got to Do with It ». La chanson avait été déjà interprétée par un horrible groupe synthétique : Bucks Fizz. Mais Tina, elle, va en faire un tube planétaire.

L’album Private Dancer l’installe au sommet. Elle remplit des stades. Elle est les Rolling Stones a elle toute seule. Sauf que cette musique ne l’a fait pas vibrer. Le truc de Tina c’est le rythm & blues. Le rock. Les synthés de Human League, elle ne comprend pas.

C’est dur pour une artiste de ne pas être aimée pour une musique qu’on aime. D’être adorée pour une musique qu’on méprise.

Et si ça ne suffisait pas, on la bassine encore avec Ike. Même divorçée depuis des années de son tortionnaire, les journalistes demandent à Tina si elle a des nouvelles, des contacts avec lui. Ce qu’elle retient de leur «collaboration». Au-delà des dents pétées et des cicatrices.

On lui souffle qu’écrire un livre sur sa vie et son mariage lui permettrait de passer à autre chose. Puis après le livre, un film. Est-ce que ça met un terme aux questions merdiques sur Ike ? Non. C’est même tout le contraire. Ike est toujours là. Elle ne lui échappe pas.

Alors non, « C’était pas une bonne vie ». Et je passe sur les enfants qu’elle doit enterrer. Dans cette existence douloureuse, il y a quand même une belle histoire. Sa rencontre en 1986 avec un producteur de musique allemand, Erwin Bach. A 47ans, Tina Turner a le coup de foudre

Lors de leur première rencontre, elle lui lance « Erwin, je voudrais que vous me fassiez l’amour ». Elle est célibataire. Elle est libre et c’est un homme bien. Enfin un. Il lui fait découvrir la Suisse. Ils s’y installent et se marient en 2013 après 27 ans d’amour.

La chanteuse est retournée aux USA pour la première de la comédie musicale Tina, « pour dire au revoir à ses fans ». Elle a tout donné à la musique. A ce pays. On lui a beaucoup pris. Arraché. A défaut d’avoir été heureuse, elle avait bien le droit à la paix, non ? Adieu Tina.