4 jours que le Sénégal brûle et ces images font remonter des souvenirs que l’on croit enfouis pour toujours dans l’oubli et pourtant. Nous qui avons grandi dans des pays où la répression est monnaie courante avons le corps et l’esprit remplis de traumas.
En plus 1990, l’homme politique Joseph Redjambé est retrouvé mort dans une chambre d’hôtel à Libreville.
L’hôtel Dowé est brûlé. Le pays s’embrase. J’ai 10 ans. L’armée tire des bombes lacrymogènes dans mon école primaire de Baraka. L’une d’entre elles atterrit dans ma classe.
La maîtresse essaie en vain d’évacuer les élèves. Elle finit par perdre connaissance. Avec des camarades de classes, nous la tirons par les pieds vers l’extérieur. Je me souviens de sa robe qui ne cesse de remonter plus nous tirons. De nos larmes d’enfants. De la peur.
Je me souviens de cette sensation d’avoir du piment dans les yeux. Je la ressentirais à nouveau en août 2016 en étant aspergée de gaz lacrymogène avec un spray par un CRS devant l’ambassade du Gabon à Paris alors que nous étions venus voter. Des votes volés au demeurant.
1990. Après avoir attendu que ma mère vienne me chercher pendant des heures devant mon école, je me décide à marcher vers la maison. Elle est au moins à une heure à pied. Je passe par Pleine Niger, le Camp Baraka, Nombakele, Akebe Ville pour retrouver la Peyrie où j’habite.
Partout autour de moi des adultes saccagent des magasins. Des voitures brûlent. J’ai 10 ans. Je ne comprend pas ce qui se passe. Je sais juste que je dois retrouver le chemin de la maison.
Je vais retrouver ma mère à un carrefour. L’armée l’empêche de passer. Parce qu’elle a résisté ils one déchiré ses vêtements. Peut-être l’ont-ils frappée. Je ne sais pas. Je suis si choquée que je reste paralysée sur place regardant ma mère se défendre comme elle peut.
Ma mère est là à peine habillée. Humiliée pour être sortie chercher son enfant. Elle me crie de venir. Je ne me souviens pas du reste. Je sais que nous sommes arrivées à la maison sans échanger un mot. Nous n’en avons jamais reparlé.
En 1993, alors que le pays prend à nouveau feu parce que les bûcherons refusent cette élection volée, maman m’envoie acheter une bouteille d’huile. Sans huile, pas de repas possible. Le magasin le plus proche est la boutique d’un libanais en face du cinéma d’Akebe.
Je ne fais pas attention au char posté devant la maison du parti. Ni aux hommes armés ici et là. Ma bouteille d’huile en main, je ressors du latin et entends taratata. Je crois à un bruit de pétards. Puis je vois un jeune homme tituber du côté du cinéma, comme s’il était saoul.
Il finit par s’écrouler. On vient de lui tirer dessus. Parce qu’il courait ? Parce qu’il avait l’air menaçant dans son tee-shirt blanc ? Je ne saurais jamais. Pensant que l’on va me tirer dessus également, je saute dans le caniveau devant moi et vais y rester allongée des heures.
Je me souviens de l’odeur de l’eau sale, du ciel au dessus de ma tête. Je n’en sortirai que lorsqu’il commencera à faire nuit. Le corps du jeune homme était toujours là. Il y restera pendant plusieurs jours. Quelqu’un prendra la peine de le couvrir d’un drap.
Il y a ceux qui ont vu en couverture du quotidien national le corps de Kamgo Komo brûlé dans un pneu à Rio. Je l’ai vu de mes propres yeux en passant par là avec ma mère. Je me souviens de l’odeur de chair humaine brûlée encore à ce jour. J’étais un enfant.
2016 : mon téléphone sonne à 2 h du matin. C’est mon ami Yann depuis LiBreville. Il est au QG de Jean Ping et pleure en me murmurant quelque chose que j’ai du mal à comprendre tellement j’ai sommeil. «Appelle France 24, appelle France 24. On nous tire dessus ». Je suis à Paris.
Yann me supplie de l’aider. Je lui dit de ne pas raccrocher quoi qu’il en coûte. Il me répond qu’il ne peut pas. Que les militaires montent d’étage en étage et arrosent tout. Il a dû se cacher sous un mort pour faire lui-même le mort et finira par couper l’appel.
J’évite de l’appeler pour ne pas le mettre en danger. J’envoie des messages jusqu’au petit matin sans réponse. J’appelle son cousin le lendemain qui n’a pas de ses nouvelles. Pendant deux jours nous le cherchons avant de retrouver sa trace.
Ils ont été arrêtés et emmenés au Cedoc, un ami de la famille va le reconnaître et le faire descendre du camion avant l’arrivée. Yann s’est caché dans les hautes pendant la nuit avant trouver refuge chez quelqu’un. D’autres amis et proches à mois n’auront pas la même chance.
Rodney E.
Yoan Z.
Pour ne citer que ceux là.
Le premier sera emprisonné des mois.
Le deuxième y restera plusieurs jours avant que l’ambassade de France ne le fasse sortir. Le récit de ce qu’il y a vu est inhumain.
Théo O. un autre de mes amis a reçu une balle dans le ventre. Il a survécu. Sa double nationalité lui a permis de venir se faire soigner en France où il vit depuis. Tous sont traumatisés. Nous qui l’avons vécu de loin le sommes également.
Les images de la dépouille de Mboulou Beka, de ce jeune homme qui a perdu la main au carrefour charbonnage, de ces jeunes abattus dans leurs quartiers, de ces snipers dans les rues de Libreville, des avions de chasse qui passent à répétition pour effrayer les populations.
On aura beau essayer de banaliser ces violences, elles sont réelles. Elles laissent des taches indélébiles en nous et des traumas que même le temps n’efface pas.
Voir ces images de Dakar depuis quelques jours me remplit d’amertume et j’ai compris d’où elle venait. De ma propre histoire avec le pouvoir et la violence qui l’accompagne dans mon pays. Du désespoir qui est le nôtre de voir un jour les choses changer.
Je suis admirative du courage du peuple sénégalais. Son combat est noble. Puisse t-il se faire de manière pacifique malgré la colère et le ras le bol.
Je pense aux familles endeuillées.
À nos amis activistes qui n’ont de cesse d’agir pour l’intérêt collectif.
5 CHOSES À SAVOIR AVANT DE SE LANCER DANS UN PROJET IMMOBILIER EN AFRIQUE.
A thread.
On a tous entendu parler d’un chantier de construction au pays qui s’est transformé en véritable cauchemar quand on ne l’a pas vécu directement, surtout quand on vit à l’étranger.
1/ TROUVER LE TERRAIN ADAPTÉ À SON PROJET.
Au juste prix et sans litiges. Passer idéalement par la case NOTAIRE avant d’effectuer le paiement afin d’avoir TOUS les papiers nécessaires. Plus on vous pressera de payer, plus vous devrez vous méfier.
📸 Atelier Kalm (Instagram)
2/ DÉFINIR SON PROJET AVEC DES PROS DU BÂTIMENT.
Villa ? Immeuble ? Bureaux ?…
Il faut identifier les besoins PERSONNELS et FONCTIONNELS selon la superficie et le quartier. Les pros du bâtiment qui maîtrisent l’espace vous aideront à définir le programme le plus réaliste.