Thread by @DavidRampillon

Devant la difficulté de réunir la somme de 20000€ sur KissKissBankBank, @PodcastParis a, dans les dernières heures de sa campagne, modifié l'objectif pour le diminuer de moitié et obtenir les 10000€ péniblement recueillis

Cette technique est interdite selon les CG de @Kissbankers qui stipule d'ailleurs qu'un changement à la baisse "donne droit à la rétractation des Dons affectés" ()kisskissbankbank.com/fr/pages/condi…

Est-ce une bonne nouvelle ?

Oui, et non.

Oui, parce que le festival se tiendra comme prévu en Octobre. Il semble compliqué d'annuler une édition après s'être octroyé cette somme. Qu'on partage ou pas cette vision du Podcast, ce festival a son public et une place indéniable

Alors déjà : un gros (gros !) courage à l'équipe du PPF. L'organisateur de PodRennes que je suis sait comme il peut être difficile de mener une barque (retrouvez votre cap, moussaillons !)

Non, car un festival de cette ampleur qui en arrive à devoir changer les règles du jeu en douce pour gagner deux fois moins qu'espéré est un signe très alarmant sur l'état du marché organisé autour de ce média (et bien entendu du festival en question)

Non, enfin, car modifier les règles d'un jeu, parce qu'il y a un partenariat entre le joueur (PPF) et le concepteur du jeu (KissKissBankBank), amène forcément à une inégalité avec les autres joueurs·ses qui, elleux, n'ont pas eu la chance d'avoir ce passe-droit...

Cet échec et cette façon de faire ne font que renforcer l'idée d'une bulle artificielle, une croyance auto-générée, un déni qui ne peut conduire qu'à une dégringolade inévitable de ce château de cartes

Pire, ça pourrait dire que le Podcast ne vaut rien (la "chaîne de valeur")

Qu'on ne s'y trompe pas pourtant, l'échec de ce financement, le désaveu qu'il met en lumière, vise bien plus le positionnement du PPF et un marché à côté de la plaque que la valeur du Podcast en elle-même

C'est l'image étriquée et formatée d'un Podcast vu par ce petit monde, et cet "eldorado du Podcast" bien trop incestueux et fait de faux-semblants, qui sont remis en cause

Je suis à la base un podcasteur indépendant, très attaché à la liberté d'expression, de création, et à la force démocratique (au sens noble du terme) que propose le Podcast

Je vis aussi en partie du Podcast : composition musicale, formations, production...

Je vois et j'entends parfois des aberrations, des tentatives commerciales vouées à l'échec

Ce n'est pas de la réticence à toute dimension commerciale, je n'ai juste pas d’œillères

Mais "chut" !

Après tout, quel poids pourraient avoir les voix qui font grandir le Podcast depuis 20 ans, connaisseurs et connaisseuses du terrain, face à des conquistadors aveuglés d'envies* ?...

*si légitimes soient-elles

Pourtant, podcasteurs et podcastrices en ont vu défiler des "messies" du Podcast... Souvent initiés, d'ailleurs par des profils très similaires : experts d'un autre média, totalement novices dans celui qui nous anime, pensant tout savoir car de la "bonne école"

Je suis convaincu que ces échecs sont le résultat d'une méconnaissance du Podcast et de ses codes, parfois volontaire et teintée d'arrogance. Nombre d'échecs s'expliquent tout naturellement pas le refus de comprendre

Il est impossible de faire rentrer dans un moule ce qui, par définition, par nécessité et par nature, est protéiforme

C'est systématique des échecs commerciaux qu'essuient le Podcast d'années en années et c'est pourtant très simple à comprendre : pour bien vendre, il faut savoir ce qu'on vend

Le Podcast, c'est du son, comme la radio certes, mais tout le reste est différent : le ton, le fond, la forme, la diffusion, l'esprit... tout

Ce n'est pas péjoratif, c'est juste autre chose, et une belle et très grande chose si peu qu'on lui laisse la possibilité d'être

Ce n'est pas qu'un fichier sonore qu'on met sur Internet

A trop vouloir façonner et contenir le Podcast,des manières de produire à la finalité de commercialisation, on finit par créer un être qui n'est plus rien, sans âme propre, et au final sans raison d'être

On oublie alors que ce média est né d'un manque

Et on ne peut plus ni le défendre, ni le représenter

Mettre en avant des studios, des radios et des célébrités, tout ce qui "brille", et sous-représenter celles et ceux qui font 70% du média sera toujours une erreur

Comment espérer ensuite l'engagement et le soutien financier de cette majorité réduite à si peu ?

Lancer un projet qui vient clamer son "amour pour le Podcast" en mettant les copains/copines, grandes marques et autres "têtes d'affiche" (sic) auto-proclamées c'est l'assurance de passer à côté de l'essence même de ce média, tout qui le rend si attractif

Est-ce si difficile que ça à comprendre ?

A quel moment ne vous dites-vous pas que vos études de marché sont faussées, quand elles font l'impasse sur celles et ceux qui sont votre public majoritaire ?

Le podcast est un média où la confiance est native

Quelle confiance quand on débarque avec la volonté de s'emparer et de redéfinir le travail de millions de gens ?
Quelle confiance commerciale quand des gens passent leur temps à trafiquer des chiffres ?

J'étends ma réflexion aux formations "Podcast" faites par des spécialistes d'autres médias et qui font tant de mal : informations souvent non adaptées ou erronées, spécificités du média (écriture, diffusion, communication) survolées, belles promesses...

Ce gâchis de temps, d'argent, d'énergie(s), de croyances
Ces arrangements de la réalité
Ce déni devant l'échec

... tout ça ne pourrait-il pas s'arrêter afin de fortifier, ensemble, ce média unique qu'est le Podcast ? Il y a tant à faire !

Combien d'années devrons-nous encore être témoins de ces mauvais chemins ? Combien de temps encore croirez-vous ou essaierez de faire croire à vos chimères ? Combien de dépenses inutiles avant de fabriquer avec les artisan·e·s ?

Je le crie du plus profond de mes tripes : le Podcast est un média magnifique, plein d'avenir, avec un potentiel (humain, créatif, expressif, culturel) énorme

Et sans nul doute un potentiel financier aussi, pour celleux que ça intéresse

Mais pour qu'il soit viable, cet avenir doit s'écrire ensemble

Les 70% d'indépendant·e·s qui le construisent depuis des années ne demandent que ça : être reconnu·e·s, représenté·e·s, soutenu·e·s, aidé·e·s, intégré·e·s

Pas relayé·e·s au fond d'une liste

Il suffit juste de s'intéresser à leurs travaux, à elles, à eux, et de savoir humblement écouter

Le savoir-faire est là

Sinon, ielles font comme vous : ielles vous tournent le dos

Et finalement personne n'y gagne