Thread by @jsoufi

📣 Vladimir Poutine va se rendre en Mongolie, un État membre de la CPI. Ce voyage en dit beaucoup sur les forces et les faiblesses de la Cour, mais aussi sur les conséquences de l’attitude des Occidentaux concernant la situation en Palestine.

🧵Je vous explique dans ce thread.👇

2. Vous le savez, depuis le 17 mars 2023, V. Poutine est l’objet d’un mandat d’arrêt de la @CourPenaleInt pour sa responsabilité alléguée dans le transfert et la déportation d’enfants ukrainiens, un crime de guerre.

icc-cpi.int/fr/ukraine

3. Contrairement aux États, la CPI ne dispose pas de force de police propre pour arrêter les individus qu’elle poursuit. Pour ce faire, comme pour la plupart de ses actes d’enquêtes, la Cour doit s’en remettre à la coopération des États.

fidh.org/fr/themes/just…

4. La Mongolie, comme tous les États parties au Statut de Rome, a l’obligation de coopérer avec la @CourPenaleInt. Elle doit notamment arrêter les personnes recherchées par la Cour qui se trouvent sur son territoire. 🛬 🚓

Même les chefs d’État en exercice!

5. C’est la raison pour laquelle, les personnes qui font l’objet d’un mandat d’arrêt de la CPI ne se rendent généralement pas sur le territoire d’un État partie. Trop risqué, surtout dans les États qui disposent d’un système judiciaire indépendant.

lemonde.fr/international/…

6. Si un État ne coopère pas, il peut faire l’objet de sanctions par l’Assemblée des États parties, voire par le Conseil de sécurité des Nations Unies. Mais jusqu’à présent, ni l’AEP, ni le CSNU n’ont jamais pris de telles sanctions pour non-coopération

asp.icc-cpi.int/fr/non-coopera…

7. Pourquoi V. Poutine décide de se rendre en Mongolie ?

Parce qu’il a reçu l’assurance des autorités mongoles qu’il ne serait pas arrêté malgré leur obligation légale de le faire.

rtbf.be/article/le-kre…

8. Pourquoi la Mongolie choisit-elle de ne pas respecter le Statut de la CPI ? Parce qu’elle fait un calcul politique : elle estime qu’elle a plus à perdre politiquement à respecter le droit international qu’à le violer.

Et c’est là tout le problème où je voulais en venir !

9. Vous l’avez compris, l’effectivité de la Cour dépend donc largement de la coopération des États. Si les États ne coopèrent pas avec elle, alors, elle n’a qu’un pouvoir théorique.

Elle n’est rien de plus qu’un « tigre de papier ».

10. Au contraire, si les 125 États parties coopèrent, ou s’ils sont prêts à sanctionner ceux qui ne le font pas, alors la Cour devient extrêmement puissante. C’est tout le paradoxe du droit international en général : sa force dépend de celle que veulent bien lui donner les États.

11. Depuis toujours, les États sont confrontés à un dilemme : respecter le droit international et le renforcer - y compris lorsque ça n’arrange pas leurs intérêts stratégiques, ou privilégier la realpolitik et contribuer à son érosion. C’est le principe des vases communicants.

12. Pour prendre l’exemple de la Mongolie, deux considérations entrent en jeu. D’une part, sa volonté d’être reconnu comme une démocratie, respectant le droit international et le Statut de la CPI, avec tous les avantages politiques que cela implique. ⚖️👏
eeas.europa.eu/eeas/dialogue-…

13. De l’autre, sa crainte de se fâcher avec la Russie, un voisin puissant et un partenaire économique et militaire important. 🇷🇺😰

thediplomat.com/2023/04/explai…

14. Le problème c’est que depuis quelques années, les États, y compris les pays occidentaux, ont renoncé à faire du respect du droit international leur priorité. Elles ont contribué à affaiblir le droit international, d’autant plus qu’ils en étaient les principaux défenseurs.

https://twitter.com/rfi/status/1732113660745744839

15. C’est notamment le cas de la CPI. Depuis que le Procureur a indiqué sa volonté de poursuivre Netanyahu et Gallant, les États-Unis, le Canada, le Royaume-Uni et certains États européens l’attaque, contribuant grandement à fragiliser la Cour.

news.un.org/fr/story/2024/…

16. Bien sûr, tous les autres États de la planète observent cela. 👀 La Mongolie aussi! Et ils se disent aujourd’hui qu’il n’y a plus grand-chose à gagner à respecter le Statut de Rome et le droit international. C’est le règne de la puissance et de la realpolitik. 🔥

17. Cette situation est à la fois triste, car elle érode nos valeurs communes, et dangereuse, car elle remet en cause les fondements de l'ordre international.

L’alternative au droit, c’est le chaos, la force et la guerre. C’est aussi simple que ça. 🌍🧨

18. Voilà aussi pourquoi la situation en 🇵🇸 est si importante. Quand la CPI délivrera ses mandats d’arrêt contre les responsables 🇮🇱, les États seront confrontés à un choix déterminant : la soutenir ou l'affaiblir durablement !