Reprenons. En 1996, le dernier ministre des télécoms (François Fillon) effectue une erreur majeure, celle de déclasser un bien commun (le génie civil des telecoms), financé pour 1/5 par les collectivités, pour l'attribuer gratuitement à une société de droit privé.
26 ans après, après en avoir tiré près de 15 Mds € de rentes de cet héritage constitué par des tiers au moyen de prérogatives de puissance publique, financé en partie par les collectivités locales, l'héritier cherche à se défaire de ce bien commun
lesechos.fr/tech-medias/hi…
Cet élément est un fait non contesté par Orange (en même temps, écrire le contraire dans le cadre d'un appel public à l'épargne pouvait vous mener en correctionnelle), qu'il l'a même écrit noir sur blanc dans son DDR de 1997 dans le cadre de la privatisation
En 2022, on appellerait cela #AidedEtat, consistant à attribuer sans appel à concurrence un bien tout juste déclassé valorisé lors du bilan de constitution d'Orange un peu moins de 4 Mds €, sans que l'Etat ne perçoive de frais de mutations
Notez d'ailleurs le tour de passe-passe consistant à minorer la valorisation du génie civil lors du transfert réalisé le 31 décembre 1996 : de 3,8 Mds €, cette valorisation nette grimpe quelques mois plus tard lors de l'introduction en Bourse à 9,2 Mds €
26 ans après, le moins qu'on ne puisse dire, c'est que l'héritier n'a guère fait fructifier le patrimoine, car cette infrastructure, qui n'a pas fait l'objet de maintenance à la hauteur (alors que les revenus qui en ont été tirés dépassent la valeur nette) a perdu de la valeur
Rappelons que contrairement à ce qu'on peut lire ici ou là (ah, le mythe de l'opérateur coucou), l'utilisation du génie civil issu du domaine public des télécoms dont Orange a hérité gratuitement est tout sauf gratuite : près de 15 Mds € de revenus cumulés depuis 20 ans
Les montants que payent chaque mois, rubis sur l'ongle (sinon pénalités conséquentes) à Orange les Free/Bouygues/SFR & consorts embarquent des composantes génie civil & maintenance… visiblement non réinvesties de façon suffisante à en juger l'état déplorable constaté localement
Sachant que si on intègre l'ensemble des revenus tirés de l'utilisation du génie civil issu de l'ex domaine public national des télécoms, donc l'autoconsommation d'Orange pour ses propres abonnés, c'est + de 50 Mds € cumulées sur 20 ans.
Mais pourquoi on dit que l'erreur de 1996 est majeure ? Car c'est le seul mode de privatisation pour lequel l'Etat s'est défait de l'infrastructure, alors que dans les autres réseaux, seule l'exploitation a été cédée, la propriété du foncier restant à l'Etat.
Les autoroutes (dont Twitter adore détester la privatisation, sans avoir cherché à étudier sérieusement le sujet) ? L'Etat reste propriétaire.
Le ferroviaire ? Idem (ok, juste le foncier)
L'eau, l'électricité, le gaz ? Les collectivités (y compris pour Linky & Gazpar)
En 1996, le Législateur avait toutefois prévu un garde-fou : l'Etat pouvait s'opposer à la cession de ce qu'il venait de déclasser & transférer gratuitement, ou tout du moins l'assortir de quelques garanties
legifrance.gouv.fr/jorf/article_j…
Disposition abrogée le 31 décembre 2003, lors de la loi privatisant définitivement Orange (et supprimant la condition de majorité de l'Etat au capital)
legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTE…
Mais cela ne veut pas dire pour autant que l'Etat n'a plus de moyen de contrôle d'une telle opération.
D'abord, lorsque la cession relève d'une composante du service universel, elle doit faire l'objet d'une information
legifrance.gouv.fr/codes/article_…
Sauf que… à ce jour, il n'y a plus d'opérateur en charge du service universel
arcep.fr/la-regulation/…
Mais tout n'est pas perdu pour autant. Toute opération de cession d'actifs constitutifs de la boucle locale (tels qu'ici le génie civil : fourreaux, chambres d'accès, poteaux, appuis façades) doit être notifiée lorsqu'elle provient d'un opérateur puissant
legifrance.gouv.fr/codes/article_…
Voilà pourquoi l'@ARCEP va être amenée à examiner en détail le projet #Carignan, nom de code de l'opération consistant pour Orange à se défaire à très bon prix d'un actif stratégique dont elle a hérité gratuitement
lesechos.fr/tech-medias/hi…
Enfin, la question du périmètre du transfert opéré en 1996 est loin d'être tranchée : des collectivités considèrent que s'agissant des éléments présents sur le domaine public, le transfert ne concerne que les câbles, et non les fourreaux & poteaux
nextinpact.com/article/2399/7…
C'est ainsi que le juge administratif a eu l'occasion de préciser le transfert de propriété réalisé en 1996 au profit exclusif d'Orange ne s'entendait que pour les câbles, et pas pour les fourreaux, chambres et poteaux
legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATE…
Arrêt confirmant une analyse similaire développée dans un autre dossier, dans lequel la commune de Vannes avait obtenu une condamnation d'Orange pour occupation sans titre, et donc dépose des câbles
legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATE…
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