Alec ن Archambault Profile picture
French lawyer. Law & Bits. ePrivacy. CyberSec. Different Thinker / Avocat Numérique. Libertés publiques. SSI & OIV. Exégète professionnel depuis 1996.

Jan 19, 2023, 22 tweets

Il y a tout juste 40 ans, le 19 janvier 1983, était commercialisé #Lisa, le premier micro-ordinateur à interface graphique & souris. Si Xerox avait posé les bases avec son Alto, le génie d'Apple a été d'en saisir le potentiel commercial et de rendre le truc vraiment sexy.

Certes, un flop magistral, car la machine (qui au départ était prévue pour 2000 $) sera victime des injonctions contradictoires de Jobs, qui se verra écarté du projet pour s'approprier ce qui deviendra le Macintosh. A l'arrivée, un prix de vente flirtant avec les 10 000 $

Car ce Local Integrated Software Architecture (ou officieusement Lisa : Invented Stupid Acronym) combinait l'héritage Apple II / III (architecture modulaire) et la volonté de faire sortir des labos de Xerox, en les améliorant, les concepts de l'Alto

Car tout comme l'iPhone n'a nullement inventé le smartphone à interface tactile, Lisa et le Mac n'ont nullement inventé l'interface graphique et la souris. Ca existait avant, mais c'était très laborieux. Le génie d'Apple a été de rendre cela accessible au premier venu.

Il est donc totalement erroné de croire qu'Apple n'a fait que pomper les développements de Xerox (qui au passage avait pris 5% du capital d'Apple) sur l'interface graphique et la souris. Car sur l'Alto, bien que graphique, l'interface n'était guère intuitive.

Les interactions avec l'Alto étaient toujours en plusieurs temps : d'abord pointer l'icône, puis sélectionner la fonction déplacer, puis désigner la zone où elle doit être déplacée. Par ailleurs, la souris avait 3 boutons. Une hérésie pour Jobs, fana du minimalisme.

Et l'équipe Lisa (qui accueillera une quinzaine de devs de Xerox qui se morfondaient de voir leur employeur refuser toute application commerciale, ainsi que le déjà génial Bill Atkinson, père de l'interface graphique du Mac) reprendra tout de A à Z, avec du code 100% original

Le mantra : chaque interaction avec la machine ne doit nécessiter qu'un seul geste. Et ensuite tout pleins de concepts absents de l'Alto et désormais devenus courants : la barre de menus, les menus déroulants, la corbeille et, surtout, le copier-coller.

C'est ainsi que le génie de Bill Atkinson pourra commencer à s'exprimer : il écrira la première routine capable d'afficher en temps réel la prévisualisation de l'action envisagée (car les ressources CPU au regard du coût ne permettaient pas encore de tout afficher temps réel)

Ainsi que le truc que tout le monde trouvait superflu sauf Jobs qui en faisait une question de principe (car les écrans cathodiques de l'époque étaient à bords ronds) : afficher en temps réel des rectangles à coins arrondis pour occuper tout l'écran

Prévu pour être commercialisé en 1981 pour faire oublier le flop de l'Apple III (une machine destinée aux entreprises mais plombée par les compromis imposés par Jobs), le programme Lisa va se retrouver ralenti par les exigences de Jobs. Il sera présenté le 19 janvier 1983

Entre temps, Jobs a été prié par les actionnaires, échaudés par l'expérience Apple III, de prendre un peu de recul sur Lisa. Mais publiquement, il fait le job, en présentant la machines aux actionnaires le 19 janvier 1983 puis à la presse

Petit moment pépite des 80's : le film promo du Lisa

Mais en coulisses Jobs travaille à saper Lisa depuis sa mise à l'écart du projet. Il se rabat en 1981 sur le projet Macintosh (qui au départ tenait + du Newton que du Mac) avec la ferme intention d'en faire sa revanche. Il vampirise le projet pour en faire un mini-Lisa à son goût

Il débarque donc dans l'équipe initiale, menée par Jeff Raskin, et réoriente totalement le projet, avec son sens bien à lui de la diplomatie. Le champ de distorsion de la réalité jouant à plein régime, Jeff Raskin (ici au centre) quitte le projet Macintosh puis Apple en 1982

Il en profite également pour siphoner l'équipe Lisa, dont le génial Bill Atkinson qui rejoindra les non moins géniaux Andy Hertzfeld (un des pères de l'intégration hard / soft du Mac) et Burrel Smith (qui s'illustrera en créant la carte mère de la 1ere imprimante laser)

Bill Atkinson programmera ainsi les bases de l'interface graphique du Mac (les routines Quickdraw), ainsi qu'un génial petit logiciel de démo, préfigurant Photoshop : #MacPaint
computerhistory.org/blog/macpaint-…

Cette image très connue de MacPaint popularisera le pixel art. Son autrice n'est autre que la très géniale Susan Kare, sans laquelle le Mac ne serait pas ce qu'il est, car rendant encore + personnel les concepts d'icônes lancés par le Lisa

Quant l'autre femme de la bande de pirates (avec Patti Kenyon), c'est Joanna Hoffman, celle qui aura en charge le marketing du Mac (et de ramener sur terre le boss)

La scène d'ouverture du film Jobs, tirée de la conférence de présentation du Mac qui a failli être un fiasco du fait des injonctions contradictoires de Jobs (on veut un truc top, mais impossible à ouvrir) illustre tout cela à merveille

Si l'histoire retiendra que c'est le Mac (qui niveau hard poussera l'intégration & fermeture à son paroxysme, préfigurant l'iPhone) qui a changé l'informatique, en fait, tout était déjà là avec le Lisa.

“ Apple Lisa changed computing 40 years ago, but the world didn't notice ”
appleinsider.com/articles/23/01…

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