Hier un ami m'a filé le livret de l'agapèthérapie pratiquée à Cacouna (Québec) par des cathos charismatiques et qui a été rapporté en France par Bernard Dubois (Béatitudes).
Ce truc est aujourd'hui encore pratiqué sans que cela n'émeuve outre mesure. #AssisesDérivesSectaires
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Dubois a été dégagé de ces sessions lorsque l'Église a toiletté la chose en 2012-2013, mais il a continué à la Cotellerie (Mayenne) sous un nom plus discret.
Et ô surprise, qui revoilà en juin prochain sur le programme du centre Marthe et Marie de Béthanie des Béatitudes ?
Pour l'historique de ces sessions qui ont fracassé de nombreuses victimes je vous invite à lire ce dossier : lenversdudecor.org/L-Agape-du-Puy…
Alors voici quelques extraits du "Livret du participant" de l'agapèthérapie. Le principe est simple: il s'agit de revisiter toute son histoire personnel sous l'angle des blessures subies. Avec un a priori qui laisse songeur : soit je n'ai pas été aimé, soit j'ai été mal aimé.
Et cela a des conséquences terribles: je suis non seulement incapable d'aimer et d'être aimé moi-même, mais de ce fait je blesse gravement à mon tour mes proches.
Dès le début, je suis prévenue: pas question de montrer ce livret à qui que ce soit (oups). C'est redit à la fin.
On se demande pourquoi. Si ça marche si bien, il faudrait le diffuser massivement ! (non)
Le livret commence avec une description des "bienfaits du pardon".
On va pardonner tout à tout le monde, y compris ce qui ne relève pas de la faute,
mais on va aussi se pardonner tout seul ses propres saloperies et mieux encore on va demander pardon SPIRITUELLEMENT à ceux qu'on a blessés.
Ils ne le sauront jamais mais c'est pas grave.
C'est hyper pratique en fait 😂😂
Puis on attaque dans le dur.
On va pardonner à nos ancêtres pour les gènes qu'ils nous ont filé (on en parle du nez Trouiller ?) et les traumas qu'ils nous en transmis (coucou la psychogénéalogie, installe-toi la science vient de partir).
Si la science est en PLS (ah bon le trauma de pépé m'affecte génétiquement ?) la théologie ne va pas bien mieux. "Le péché originel qui pour moi a pris les couleurs des tares liées à mon hérédité" mais pfff oh la la rien ne va en fait.
Bon voilà, pardon aux ancêtres ☑️
Maintenant je vais pardonner à mes parents ce qui s'est passé au moment de ma CONCEPTION.
Les auteurs sentent bien que ça ne va pas forcément passer crème, on a donc droit à quelques explications.
Le déterminisme de ces lignes est terrifiant. Comme si on ne pouvait pas avoir été désiré et être malheureux. Ou ne pas être désiré et se porter comme un charme. Mais il s'agit avant tout de désigner des responsables au mal-être, et ce sera les parents.
Et on assiste à une inversion dingue: ce n'est pas "je sais que mes parents ne m'ont pas désiré➡️ il est possible que certaines carences affectives viennent de là", mais "je ne me sens pas aimé à ma juste valeur ➡️ j'ai des carences affectives➡️mes parents ne m'ont pas désiré".
Et là ça devient fabuleux. On visualise la scène, on est invité à tenir en pensée le spermatozoïde de Papa et l'ovule de Maman dans ses mains puis à les faire fusionner. O
On nage en plein délire new age. Et sur un plan théologique, c'est quoi ce trip invraisemblable de se mettre pile poil à la place de Dieu unissant les gamètes ? Mais ça va pas non ?
Donc maintenant on passe à la vie intra-utérine. On est toujours dans ce discours pseudo-scientifique selon lequel le fœtus dès sa conception (et avant tout système nerveux) est capable de ressentir non seulement ses émotions mais celles de sa mère et même celles de son père.
"Comme le fœtus est fusionné à sa mère, il aura directement accès à sa façon émotive de vivre les événements". Mais l'angoisse ptn.
"Maman a-t-elle vécu sa grossesse dans la solitude et l'ennui en l'absence de papa ?" Purée même quand on s'emmerde on traumatise bébé.
Sous quelle forme les sentiments traversent-ils la barrière du placenta ? Ça m'intéresse.
Let me introduce to you la "génétique négative".
Vient ensuite le pardon. Grand seigneur, je pardonne donc à ma mère d'avoir eu peur pour moi.
Oui, c'est mal d'avoir peur de ne pas pouvoir mener sa grossesse à terme. Tout ce qu'ont fait les parents est tjs mal.
Quand l'intention était bonne... Et quand ils n'y pouvaient rien.
Exemple au chapitre suivant où, "par exemple", on est invité à pardonner à sa mère si l'accouchement a été difficile.
Après une séance malaisante au possible où l'on s'imagine dans le vagin de sa mère, on lui pardonne (!!) "de m'avoir fait mal, coincé•e, empêché•e d'avancer".
Tout le reste est à l'avenant. Je vous livre uniquement les pardons.
L'accueil de la mère à la naissance :
L'accueil du père :
L'affirmation de soi:
La découverte de la complémentarité des sexes:
La période scolaire (enfin ! On est à la moitié du bouquin et on reproche enfin un truc à quelqu'un d'autre que les parents) :
L'adolescence (ah ben non c'est les parents à nouveau) :
Les traumatismes sexuels (ajoutons les frères et sœurs) :
Que serait une agapèthérapie sans thérapie de conversion ?
(suite)
Voilà. Les autres chapitres proposent de réutiliser les formules de guérison déjà employées. Du coup c'est assez bizarre car
pour la guérison physique par exemple on demande de pardonner à ses parents, en premier lieu.
Pas étonnant que les associations d'aide aux victimes de sectes reçoivent tant de gens en rupture familiale.
Et avant de clore ce fil: la tambouille psycho-spirituelle, c'est le Sodexo de l'Église. On en bouffe partout, dans toutes les cantines.
Le centre Siloé du Chemin Neuf, les diverses écoles de charismes et de guérison... Parfois c'est brut de décoffrage, parfois c'est dilué dans
un enrobage ignacien ou carme.
Mais gardez en tête un truc: les blessures, ce n'est pas un péché.
/FIN
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