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15 Feb 19, 22 tweets, 3 min read
Ça y est. On a décidé de repartir en France après une année au Maroc. Une année dure aussi bien professionnellement que personnellement. Un échec? Oui certainement.
Qd on est en France, on nourrit cette envie, cet espoir de revenir au Maroc un jour. Pour sa famille, pour ses parents, parce qu’on sent parfois qu’on n’est pas complètement français... peu importe la raison le Maroc est souvent présent dans nos projets.
J’ai sauté le pas. Je dis « je » mais en réalité on était, est, deux à l’avoir sauté ce pas. Une opportunité intéressante, des projets ambitieux, des promesses. Ça y est. C’est parti.
Au Maroc.
Les premiers jours sont toujours enivrants. On achète sa voiture. Avec le recul, j’aurais dû en prendre une à Paris. Mais bon, à Paris, on n’a pas vraiment besoin d’une voiture et c’est surtout cher et pas pratique.
Bref. Acheter une voiture. Trouver un joli appartement dans une jolie résidence. Ça change de Paris. De l’espace, beaucoup d’espace. On a bien fait de revenir, et puis on est dans « notre » pays.
Le travail. Les collègues. Ah les collègues... Le plus compliqué c’était les collègues. Je n’ai jamais réussi à m’intégrer. Pourtant que des jeunes, ISCAE, écoles françaises, d’autres diplômes marocains... Cette diversité m’a ravi. Ici on donne sa chance à tout le monde (Non).
Le plus dur avec les collègues était d’affirmer ses opinions. Sa différence justement. Darwin, Dieu, l’homosexualité, l’égalité, la justice... je me casse mes premières dents. Je comprends que pour m’intégrer, il faut que je taise mes opinions. Soit.
Ça se corse. Il ne faut plus taire ses opinions seulement. Il faut s’intégrer, faire comme eux, acquiescer, participer. Le vendredi, prier. Les regards quand tu restes au bureau seul. Seul enfin non. Avec les filles. Le vendredi est une affaire d’hommes.
Les relations entre collègues sont compliquées. Les échanges par mail virulents, souvent conflictuels, on met en copie le N+10 pour poser une question, relancer. Les couteaux sont tirés, aiguisés, mais tout le temps derrière un grand sourire.
Ce qui est déroutant c’est les sourires. Discerner le vrai du faux, ses amis de ses ennemis. On se tait encore plus. La crainte, la tension, le stress s’installe petit à petit, devient quotidien. J’ai vu des gens pleurer.
J’ai pleuré.
Je décide de changer. Oui peut être je suis tombé sur la mauvaise entreprise, le mauvais environnement. J’en parle.
Mes amis s’ouvrent à moi. Trois entreprises différentes, trois secteurs différents, tous vivent la même chose. La tension continue. La peur de perdre son travail aussi.
Je cherche quand même une nouvelle opportunité. Je ne peux pas continuer dans cette entreprise. Ça doit être mieux ailleurs. Tous ces gens qui vont chaque matin au travail, ils doivent bien être heureux. Tous ne peuvent pas avoir ce noeud dans l’estomac.
Chercher un travail au Maroc. Compliqué. Pas d’offres ou peu. On apprend à démarcher: les cabinets de recrutement, les RH, les opérationnels, les amis, la famille... Qd on revient de France, qd on a pris l’habitude d’être contacté, parfois j’avais l’impression de mendier...
On doute. On pense au taux de chômage. Pourtant j’ai un bon diplôme, une expérience riche. Mais on doute. Les cabinets de recrutement qui donnent rdv à 15h. Mais madame, je suis toujours en poste. Peu importe. C’est 15h.
On se retrouve enfin face à un opérationnel, puis deux, puis plus de nouvelles, puis le dernier entretien un mois après. Ah enfin. Le dernier entretien...
Ça se passe très bien. J’ai assuré. J’ai une offre. Un meilleur salaire. Top! Mais Non.
Pendant mon entretien, je vois chez mon futur employeur l’arrogance du présent. Je vois dans ses yeux, dans ses mots, dans ses deux cigarettes allumées en pleine salle de réunion le mépris du présent. Le futur sera dépendant de lui, suspendu à ses appels la nuit. Non.
Que faire maintenant ?
On revient en France chérie ?
Oui.
Il n’y a pas que le travail qui nous a poussé à cette décision. Non. Personnellement aussi cette année était éprouvante. La misère dans la rue me bouffait. La misère des gens bien sûr, mais surtout celle des animaux. Mais ça c’est une autre histoire.
L’histoire de Maman Roux, de petite tâche, de Maxou, de Xena, des Muchachos, des gardiens aussi. Oui le plus dur à raconter c’est cette histoire.

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