𝗡𝗼𝗻, 𝟵𝟲% 𝗱𝗲𝘀 𝘃𝗶𝗼𝗹𝘀 𝗻𝗲 𝘀𝗼𝗻𝘁 𝗽𝗮𝘀 𝗰𝗼𝗺𝗺𝗶𝘀 𝗽𝗮𝗿 𝗱𝗲𝘀 𝗵𝗼𝗺𝗺𝗲𝘀.

Mini-Thread pour débunker rapidement les chiffres mis en avant sur les hashtags :
#commentfaitonpourqueleshommescessentdevioler
#commentfairepourqueleshommesarretentdevioler
On verra ici pourquoi le pourcentage d'hommes violés est sous-estimé et pourquoi le pourcentage de femmes responsables de ces viols l'est par la même occasion.

J'apporterai également une réflexion autour du paradigme de l'agresseur masculin et de la femme victime en
reprenant l'article "La victimisation sexuelle des hommes en Amérique: les nouvelles données remettent en question les anciennes hypothèses" de Laura Stemple.

Big-up à elle.
𝗜 - 𝗨𝗻 𝗽𝗿𝗼𝗯𝗹𝗲̀𝗺𝗲 𝗱𝗲 𝗱𝗲́𝗳𝗶𝗻𝗶𝘁𝗶𝗼𝗻

Allons droit au but, si des études obtiennent de tels chiffres c'est simplement parce qu'elles utilisent une définition erronée et incomplète du viol qui exclue une grosse partie des hommes en tant que victimes.
Pour l'illustrer, on va s'intéresser à l'enquête Virage de l'Ined, datant de Janvier 2017.

Disponible ici : ined.fr/fichier/s_rubr…
Voici comment l'Ined a catégorisé les violences sexuelles lors de son enquête. La définition du viol est uniquement centrée sur une pénétration subie. Le cas "forcé à pénétré" a lui été qualifié "d'agression sexuelle".
Alors, n'allez pas blâmer l'Ined, leur étude date de 2017 et la définition du viol a été modifiée en 2018. Pas de bol. 🤷‍♂️

La définition actuelle du viol dans le code pénal comprend bel et bien le cas "forcé à pénétrer" en incluant "la personne de l'auteur".
La personne de l'auteur (de la pénétration), la personne qui pénètre donc, est victime de viol si la pénétration n'est pas consentie.

Si cet aspect a été ignoré, il n'y a rien d'étonnant à observer une sous-représentation des hommes victimes dans leur étude :
Même cas de figure dans la lettre de l'observatoire national des violences faites aux femmes.
Disponible ici : m.centre-hubertine-auclert.fr/sites/default/…
𝗜𝗜 - 𝗟𝗲𝘀 𝗲́𝘁𝘂𝗱𝗲𝘀 𝗮𝗺𝗲́𝗿𝗶𝗰𝗮𝗶𝗻𝗲𝘀

Je ne trouve pas d'études françaises intégrant le cas "forcé à pénétrer", on va donc se rabattre sur des études américaines.
Vous pouvez aussi aller lire l'article de Slate, parce que je vais simplement me contenter de répéter ce qui y est dit : slate.fr/story/90153/ho…
En 2012, l'enquête "National Crime Victimization Survey" du Bureau of Justice Statistics qui est la principale source d'information des États-Unis sur la victimisation criminelle a permis d'interroger 40.000 foyers sur le viol et la violence sexuelle.
L'enquête trouvait que 38% des victimes déclarées étaient des hommes. Auparavant le pourcentage d'hommes victimes de viols et de violences sexuelles oscillait entre 5% et 14%. En excluant les violences sexuelles autre que les viols et en ne gardant que les viols, on peut supposer
que les résultats étaient sensiblement similaires à ceux de nos études françaises.

Bref, c'est à partir de ce moment que Laura Stemple a commencé à décortiquer des études existantes pour trouver d'où pouvait provenir cet écart.
A noter qu'elle avait bien avant cela l'intuition que les violences sexuelles perpétrées sur des hommes étaient sous-déclarées. Elle a donc cherché à la vérifier.

Voici ce qu'elle a trouvé dans l'enquête "National
Intimate Partner and Sexual Violence Survey" du
NISVS, datant de 2010.

Disponible ici : cdc.gov/violencepreven…

"𝙎𝙞 𝙡'𝙤𝙣 𝙥𝙧𝙚𝙣𝙙 𝙚𝙣 𝙘𝙤𝙢𝙥𝙩𝙚 𝙡𝙖 «𝙘𝙤𝙣𝙩𝙧𝙖𝙞𝙣𝙩𝙚 𝙖̀ 𝙥𝙚́𝙣𝙚́𝙩𝙧𝙚𝙧», 𝙡𝙚 𝙣𝙤𝙢𝙗𝙧𝙚 𝙙𝙚 𝙫𝙞𝙘𝙩𝙞𝙢𝙚𝙨 𝙛𝙚́𝙢𝙞𝙣𝙞𝙣𝙚𝙨 𝙚𝙩 𝙢𝙖𝙨𝙘𝙪𝙡𝙞𝙣𝙚𝙨 𝙚𝙨𝙩 𝙚́𝙦𝙪𝙞𝙫𝙖𝙡𝙚𝙣𝙩"
En effet, après avoir inclut cette contrainte dans leur enquête à partir de 2010, les résultats récoltés sur 12 mois sont les suivants :
On retrouve 1,270 million de femmes et 1,267 million d'hommes déclarant avoir été victimes de violences sexuelles.

Attention, comme vous pouvez le voir, dans cette étude le cas "forcé à pénétré" n'est toujours pas qualifié de viol mais comme une forme de violence sexuelle à
part. Cependant, le cas colle désormais avec la définition d'un viol, c'est pourquoi il est possible de compter le nombre d'hommes victimes de "forcé à pénétrer" parmi les victimes de viols.
On va maintenant s'intéresser au sexe des agresseurs.

Les résultats sont les suivants :

93,3 % des hommes victimes de viol déclarent un auteur masculin.

Cependant, comme dit précédemment, le cas "Forcé à pénétrer" n'est pas considéré comme un viol dans l'étude.
79,2 % des hommes victimes de la violence sexuelle "forcé à pénétrer" déclarent un auteur féminin.

Si l'on prend une autre étude du NISVS dont les données s'étalent de 2010 à 2012,
disponible ici : cdc.gov/violencepreven…

Les résultats sont sensiblement les mêmes :
Un autre point important relevé par Laura Stemple concerne les détenus, qui n'entrent pas du tout dans les statistiques générales. es résultats de ces enquêtes vont à l'encontre de nos a priori. Ici, les femmes sont plus susceptibles d'être agressées par d'autres détenues
, et les hommes par des gardiens, dont beaucoup de gardiennes.

Par exemple, dans les centres pour mineurs et pour les abus perpétrés par des membres du personnel pénitentiaire, 89% des cas concernent des garçons abusés par une femme.
𝗜𝗜𝗜 - 𝗹𝗲 𝗽𝗮𝗿𝗮𝗱𝗶𝗴𝗺𝗲 𝗱𝗲 𝗹'𝗵𝗼𝗺𝗺𝗲 𝗮𝗴𝗿𝗲𝘀𝘀𝗲𝘂𝗿 𝗲𝘁 𝗱𝗲 𝗹𝗮 𝗳𝗲𝗺𝗺𝗲 𝘃𝗶𝗰𝘁𝗶𝗺𝗲

Je vous invite vraiment à aller lire cet article : ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/P…
La conceptualisation des hommes comme auteurs et des femmes comme victimes reste le paradigme dominant de la victimisation sexuelle et ce qui va à l'encontre de ce paradigme reçoit généralement peu d'attention.
Des chercheurs ont proposé certaines explications :

1 - Certains ont remis en question la focalisation écrasante sur la victimisation féminine, non seulement parce qu'elle manque les victimes masculines, mais aussi parce qu'elle sert à renforcer les notions régressives de la
vulnérabilité féminine cela peut perpétuer les normes qui considèrent les femmes comme des victimes sans pouvoir, renforçant l'idée que les femmes sont «nobles, pures, passives et ignorantes».
Lorsque les préjudices subis par les femmes sont présentés comme extrêmement plus courants et plus inquiétants, ils contribuent à la croyance que les hommes sont des victimes improbables et renforce le paradigme précédemment cité.
Et la France n'est pas exclue de ce problème, il suffit d'aller lire les grandes lignes de la MIPROF, une mission menée par le Ministère chargé de l'égalité entre les femmes et les hommes.
2 - Un autre stéréotype de genre courant dépeint les hommes comme sexuellement insatiables. L'idée que, pour les hommes, pratiquement tous les rapports sexuels sont les bienvenus, contribue probablement à des attitudes de mépris envers la victimisation sexuelle masculine.
3 - L'idée reçue que les victimes masculines subissent moins de force physique que les femmes victimes. Une récente analyse pluriannuelle du BJS National Crime Victim Survey (NCVS) n'a révélé aucune différence entre les victimes masculines et féminines dans
l'utilisation d'une stratégie de résistance lors de viol et d'agression sexuelle. Si les blessures nécessitant des soins médicaux aient été plus nombreuses chez les femmes, les hommes ont également subi des blessures importantes (12,6% des femmes et 8,5% des hommes)
4 - Le fait de présenter la victimisation masculine comme aberrante ou inoffensive ajoute également à la stigmatisation des hommes confrontés à la victimisation sexuelle ou encore à l'idée que "les vrais hommes peuvent se protéger."
Tout ces stéréotypes induisent une minimisation de la victimisation sexuelle masculine dans l'imaginaire collectif. Les violences sexuelles perpétuées contre des hommes reçoivent peu d'attention mais elles sont également minimisées par les victimes.
Les hommes ont généralement tendance à considérer comme moins graves les violences sexuelles qu'ils subissent. Les sentiments d'embarras, la peur de la victime de ne pas être crue et la croyance que se dénoncer lui-même n'est pas masculin ont tous été cités comme des raisons de
la résistance des hommes à dénoncer la victimisation sexuelle et l'hésitation des victimes à se manifester peut également contribuer à un manque de poursuites judiciaires concernant la victimisation sexuelle masculine.
Par exemple, aux États-Unis, l'affirmation erronée selon laquelle la victimisation masculine est rare a également été utilisée pour justifier l'exclusion des hommes et des garçons des bourses d'études sur la victimisation sexuelle. Peut-être qu'une telle exclusion généralisée en
elle-même amène les victimes de sexe masculin à supposer qu'elles sont seules dans leur expérience, ce qui alimente la sous-déclaration.
Pour conclure, on peut aussi se demander si les hashtags :
#commentfaitonpourqueleshommescessentdevioler
#commentfairepourqueleshommesarretentdevioler

Qui excluent totalement les femmes des auteurs des viols ne contribuent pas également à renforcer ce paradigme et donc à
minimiser la victimisation sexuelle masculine.

Ça serait dommage pour certaines personnes qui invitent généralement les autres à se "déconstruire" sur le sujet et sur les stéréotypes de genre.

• • •

Missing some Tweet in this thread? You can try to force a refresh
 

Keep Current with LesBonsThreads

LesBonsThreads Profile picture

Stay in touch and get notified when new unrolls are available from this author!

Read all threads

This Thread may be Removed Anytime!

PDF

Twitter may remove this content at anytime! Save it as PDF for later use!

Try unrolling a thread yourself!

how to unroll video
  1. Follow @ThreadReaderApp to mention us!

  2. From a Twitter thread mention us with a keyword "unroll"
@threadreaderapp unroll

Practice here first or read more on our help page!

Did Thread Reader help you today?

Support us! We are indie developers!


This site is made by just two indie developers on a laptop doing marketing, support and development! Read more about the story.

Become a Premium Member ($3/month or $30/year) and get exclusive features!

Become Premium

Too expensive? Make a small donation by buying us coffee ($5) or help with server cost ($10)

Donate via Paypal Become our Patreon

Thank you for your support!

Follow Us on Twitter!