« Excusez moi Monsieur,il faut m’aider ».... ces quelques mots me parviennent alors que je referme la porte de l’UMJ, il est 18h...Ces quelques mots sont ceux de Salma,39 ans,1m57,corps frêle,regard mêlant peur et espoir, visage crispé dissimulé sous un voile couleurs d’été
1/ Salma avait rdv à l’UMJ il y a trois mois, elle ne s’y est pas rendue. Suite à un appel de ses voisins après une énième dispute, un équipage s’était rendu chez elle,l’avait conduite au commissariat pour l’auditionner mais elle avait nié,par peur,
2/ Préférant se taire que d’envisager la violences des représailles le jour où il sortirait de GAV en sachant ce qu’elle avait raconté. Le quotidien de Salma est marqué par des insultes,des rabaissements, des dénigrements et des menaces de la priver de ses enfants. Son portable
3/ est vérifié plusieurs fois par jour pour s’assurer qu’elle ne fait rien d’autre qu’être « une bonne épouse ». Quand elle prend quelques minutes pour humer le jasmin sur le chemin du supermarché, il lui reproche d’être « encore allée faire la pute avec les hommes du quartier »
4/ Souvent,quand les enfants sont à l’école, Salma est obligée de s’allonger et de le laisser la pénétrer,sans amour ni désir. Elle a bien essayé au début de lui dire non,elle se rappelle encore son visage dans la glace, le sang coulant de ses narines, et cette douleur affreuse.
5/ Salma n’a ni carte bleue, ni chéquier, ni argent liquide. Lorsque elle effectue une dépense,elle doit la justifier au centime près...ah oui j’oubliais, Salma n’a pas le droit de travailler non plus,juste celui d’être « une bonne épouse ». Elle ne voit personne, elle n’a pas
6/ le droit d’avoir d’amis, elle aimerait aller à la piscine mais cela non plus elle n’y a pas droit. Alors ce soir,pour une raison qu’elle ignore,elle a pris la trottinette de son fils aîné,elle a roulé sous la pluie battante pour venir chercher de l’aide à l’hôpital. Elle sait
7/ que là-bas,il y a un service qui s’occupe des « femmes comme elle » comme elle dit avec pudeur. Je prends le temps d’évaluer sa situation. Comme beaucoup de victimes,Salma est hésitante,elle veut qu’on l’aide mais elle a peur des conséquences, peur qu’on
8/ lui enlève ses enfants,peur de se retrouver seule dans cette ville dont elle ne connaît presque rien tant sa vie est devenue une prison. Sans ses enfants elle n’est plus rien et n’hésitera pas à mourir me dit-elle. Je suis seul et décide de lui donner rdv le lendemain matin
9/ juste après avoir déposé les enfants à l’école. Je lui demande alors si elle se sent capable de rentrer ce soir,je sais qu’il faudra qu’elle se justifie de son retard... Pendant notre rencontre,il tentera de la joindre douze fois,elle ne répondra pas...mais que se passera t-il
10/ une fois Salma rentrée ? Je le crains, je le redoute et je passerai la soirée à me demandais si mon évaluation était là bonne...ai-je bien fait de laisser repartir Salma? Et si elle ne revenait pas demain ....
Soulagement en la voyant franchir les portes de l’UMJ
11/ le lendemain matin. Elle est tendue et semble terrifiée, elle se tient droite à l’entrée du couloir.L’infirmière s’approche de Salma qui se contentera de dire « il est là ».... il l’a suivie jusqu’à l’hôpital,à la descente du bus sur le parking,il l’a saisie par le bras pour
12/ lui dire de rentrer, mais Salma a tenu bon,avec force et courage elle s’est engouffrée dans le hall en pressant le pas. Il n’a pas cru à sa consultation gynécologique et fait les cent pas à quelques mètres du service...il l’appelle,l’appelle et l’appelle encore,quinze fois
13/ en dix minutes,elle ne répond pas depuis le bureau de l’infirmière qui lui explique la procédure pré plainte hospitalière. Mais Salma panique,la peur se lit sur son visage, elle hésite et veut quitter le service,elle s’est emballée et ne voulait pas en arriver là. Elle a
14/ probablement exagéré sa situation,après tout comment vivrait-elle sans lui, avec ses enfants,elle qui n’a jamais eu le droit de travailler. Nous lui parlons de l’association « du côté des femmes » qui fait un travail formidable...mais elle veut partir. Nous temporisons et,
15/ en équipe,nous reposons rapidement la situation : Salma est en danger et sous emprise évidente...seule, elle n’y arrive pas et cette venue spontanée à l’UMJ était sa fusée de détresse. Que se passera t’il si nous la laissons repartir ? Ne pas bousculer les choses, c’est
16/ peut être prendre le risque de revoir Salma dans quelques jours....mais à la morgue cette fois-ci, insoutenable idée et pourtant...triste réalité. Nous décidons de signaler au procureur la situation de Salma,pour la protéger, et ce après l’en avoir informée. Elle ne
17/ n’est pas trop d’accord mais nous expliquons que la loi nous autorise depuis peu à lever le secret professionnel lorsque nous estimons qu’une victime de #ViolencesConjugales est en danger et sous emprise...pour la protéger.
Salma quittera le service sous la protection
19/ les professionnels de santé ont la possibilité de signaler les faits de #ViolencesConjugales
Cette nouvelle démarche, avec le concours de l’UMJ du CH @Ville_Pau sera déployée très prochainement sur le ressort du TJ @gensac33 ...
Pour en savoir plus => rdv içi le 📅 mars ✅
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A la demande de @SirYesS25095892 et pour compléter la photo de la grande famille judiciaire,voici le portrait de l’enfant caché de la Médecine et du Droit : le médecin légiste 🩺👨⚕️🔪
1/ il est Docteur en médecine avec jusqu’à très récemment une formation de base hétérogène (médecin généraliste, psychiatre, anatomopathologiste, médecin de santé publique,pédiatre...) complétée par un DESC de « médecine légale et expertises médicales »
2/ Depuis 2017 il se spécialise dès la 7ème année d’études via le DES de « médecine légale et expertises médicales » au même titre que d’autres spécialités avec une formation d’une durée supplémentaire de 4 ans au travers de semestres en CHU et en CH.