Vous pensiez que les chevaliers médiévaux étaient de grosses brutes toujours avides de partir en croisade pour tuer des Sarrasins... ? En réalité, les nobles s'avèrent très créatifs pour trouver des excuses afin de NE PAS avoir à partir. Un thread plein de mauvaise foi ⬇️ !
Il faut dire que partir en croisade coûte extrêmement cher : il faut de l'argent cash pour rémunérer ses hommes, acheter des chevaux et du fourrage, payer la traversée, etc. Les croisés doivent donc souvent s'endetter ou vendre des terres.
En plus du coût, la croisade est dangereuse. De très nombreux croisés meurent en route, d'un combat, d'une noyade, d'une insolation, ou alors tombent malade (Philippe Auguste perd un oeil), ou encore passent des années en prison... Il y a de quoi en refroidir plus d'un !
Il y a donc de bonnes raisons de ne pas aller en croisade. Dans un célèbre poème, écrit en 1267, Ruteboeuf fait ainsi dialoguer un partisan de la croisade et un homme qui ne veut pas du tout y aller, présenté comme un « décroisé ».
Ce dernier souligne qu'il faut être fou pour partir en Orient ! On peut tout à fait garantir son salut plus facilement, par exemple en accomplissant un pèlerinage en Occident. En plus, le « sultan » ne lui a rien fait et il ne voit pas pourquoi il irait mourir outremer...
Contrairement à ce qu'on pense souvent, la croisade n'a jamais fait l'unanimité : prêtres, théologiens, troubadours ont beaucoup critiqué ce nouveau concept. Avec la multiplication des défaites, notamment à partir des années 1185, l'idéal de croisade perd peu à peu de sa force.
Pas étonnant donc de voir autant de seigneurs chercher à tout faire pour ne pas partir. Ce qui n'est pas évident, car le pape fait peu à peu de la croisade un devoir sacré, auquel doit participer tout chrétien, surtout s'il est noble. Du coup... les seigneurs trichent.
Technique numéro 1 : l'art de faire croire que. A la fin du XIIe siècle, le roi d'Angleterre, Henri II Plantagenêt promet plusieurs fois d'aller en croisade, mais visiblement n'a aucune intention de tenir cette promesse.
Du coup, il offre fréquemment des sommes conséquentes aux Templiers, qui doivent les garder en réserve pour lui, en attendant sa venue. Finalement, il ne part jamais et les Templiers dépensent son trésor pour lutter contre Saladin.
Technique numéro 2 : l'art de faire attendre. Frédéric II, empereur, promet de partir en croisade dès son couronnement en 1220. Et puis, il traîne. Beaucoup. Et explique au pape que promis, il partira au prochain printemps. Ou au prochain. En tout cas bientôt. Promis.
A force, le pape finit par se dire que trop c'est trop... et l'excommunie. Quand Frédéric finit par partir, en juin 1228, il est donc dans la curieuse situation d'être à la fois croisé et excommunié !
Technique numéro 3 : l'argument de la responsabilité. Joinville, noble français, a accompagné Louis IX dans sa première expédition en Orient, mais refuse fermement de repartir en 1270.
Il explique que quand il est revenu de croisade, il a trouvé « sa terre » appauvrie à cause des impôts et des méchants agents du fisc. S'il repartait en croisade, il mettrait donc son peuple en danger, ce que Dieu ne veut pas, donc il a le devoir sacré de rester.
Avec habileté, Joinville réussit ainsi à retourner totalement l'argumentaire de la croisade et à présenter son non-départ comme plus loyal et plus courageux qu'un départ !
Technique numéro 4 : l'excuse bidon. La palme de la mauvaise foi revient à un prince polonais, nommé Leszek le Blanc qui fait croire qu'à cause d'une attaque informatique venue de l'étranger... Ah non, pardon, ça c'est une autre excuse bidon 😉😅
En 1221, donc, le prince Leszek le Blanc écrit au pape Honorius III. Dans cette lettre, il rappelle d'abord qu'il aurait vraiment aimé partir en croisade, car cela lui tient à cœur : il sait combien cette mission sacrée est importante.
Malheureusement, il est malade depuis des années et ses médecins lui imposent de ne boire que de la bière. Or, comme tout le monde le sait, il n'y a pas de bière en Palestine. Du coup, impossible de partir... CQFD.
Le pape n'est probablement pas dupe, mais il ne peut pas traiter de menteur un aussi puissant seigneur, et doit donc accepter l'excuse, aussi grosse soit-elle... !
Décidément, les seigneurs médiévaux n'étaient pas tous des fous de guerre prêts à aller trucider des Sarrasins... Leur habileté à trouver des excuses en dit long sur la façon dont ils pensaient la croisade ! Retrouvez notre article du jour sur notre blog : actuelmoyenage.wordpress.com/2021/04/08/com…
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Vous avez (trop) chaud ?
Et si je vous disais que durant les croisades, les croisés ont eux aussi souffert de la chaleur, au point parfois... de mourir ? Je ne sais pas si ce thread va vous rafraîchir, mais ça vous cultivera... Un thread ⬇️!
La chaleur frappe violemment les croisés quand ils arrivent en Orient. Les chroniques de la croisade le répètent tout le temps, preuve que ça a marqué les contemporains : "les nôtres étaient brûlés par la chaleur dévorante", "la chaleur avait grandement affaibli l'armée"
Les mois d’été sont les plus redoutables. Les auteurs mettent en garde contre le « redoutable mois d’août » ou encore contre « juillet, mois insupportable à cause de l’ardeur du soleil ». Autant que possible, on décale les opérations militaires pour éviter d'agir en plein été.
"Ici commence une chanson d'une rare violence : jamais de notre temps n'en fut de meilleure !"
La chanson de geste de Garin le Lorrain, aujourd'hui bien oubliée, fut pourtant la plus appréciée du Moyen Âge... Un thread, plein de morts et de tragique ⬇️!
Cette chanson est la plus copiée au Moyen Âge : connue par 21 manuscrits, contre seulement 7 pour la Chanson de Roland.
Composée au XIIe siècle, c'est aussi la plus longue, avec 18 000 vers : 520 pages dans la nouvelle traduction, superbe, par JP Martin chez @HonoreChampion
@HonoreChampion Cette chanson raconte la longue guerre qui oppose deux lignages (mythiques), au temps (mythique) de l'empereur Pépin.
Dans une guerre sans merci s'affrontent les Bordelais (le comte Fromont et son fils) et les Lorrains (Garin et son frère Bégon).
Au XIIIe siècle, les béguines sont des femmes qui se regroupent pour vivre ensemble, en respectant une règle monastique tout en restant laïques.
Aujourd'hui, je vous partage un superbe texte pour plonger au cœur de la spiritualité de ces béguines, féministes avant l'heure... ⬇️
Ce texte date de la fin du XIIIe siècle. C'est une "disputatio" (exercice classique de l'université de cette époque), un débat, qui oppose un Maître en théologie de l'université de Paris et une béguine.
Dans le texte, la béguine dit "nous", s'opposant au "vous" du Maître.
Vous parlez, nous agissons.
Vous apprenez, nous saisissons.
Vous contrôlez, nous choisissons.
Vous mâchez, nous avalons.
Vous marchandez, nous achetons.
Vous brillez, nous brûlons.
Vous pensez, nous savons.
Vous demandez, nous prenons.
Vous cherchez, nous trouvons.
Dans une conférence donnée hier, J.L. #Melenchon parle de l'histoire médiévale de l'islam et... il dit n'importe quoi (cf cet extrait). Au menu, raccourcis et erreurs, pour renforcer une vision de l'histoire mise au service d'un discours politique.
Un thread ⬇️!
Précision initiale : comme toujours, je discute et réponds volontiers, je précise mon propos si besoin, mais je bloque les insultes, qu'elles viennent de fachoïdes ou de fanatiques de JLM. Soyons cordiaux, soyons intelligents.
La conférence de J.-L. Mélenchon porte sur la situation géopolitique en Orient aujourd'hui. Elle est disponible ici dans son intégralité. L'extrait qui nous occupe, que j'ai découpé pour mettre dans le premier tweet, est à 1h13-1h15.
Ces petites perles de verre bleu n'ont l'air de rien. Mais elles transforment nos connaissances historiques.
Car ces perles, fabriquées à Venise, ont été retrouvées en Amérique... et elles y sont arrivées AVANT Christophe Colomb. Un thread ⬇️ !
Ces perles de verre d'un beau bleu turquoise ont été retrouvées en 2019-2020 dans des fouilles archéologiques en Alaska, sur trois sites de fouilles différents (Punyik Point, Lake Kaiyak, Kinyiksugvik).
Les analyses au carbone-14 permettent de dater ces sites entre 1397 et 1488.
Oui, c'est une grosse fourchette, mais en l'occurrence l'important est que même le terminus le plus tardif se situe AVANT 1492, donc avant que des Européens ne mettent un pied sur le continent américain (scandinaves du Xe siècle mis à part).
Si je vous dis que c'est un outil incroyablement beau, fascinant, la preuve que le Moyen Âge est aussi une époque de sciences et d'inventions, ça vous donne envie d'en savoir plus ?
Un thread ⬇️!
Les volvelles se trouvent dans des manuscrits. Il s'agit d'un instrument fait uniquement de disques de papiers superposés, qui tournent les uns sur les autres ; cela permet de calculer des trucs, notamment astronomiques.
Ici, MS. Ashmole 370, fait vers 1430 en Angleterre.
Ici, la volvelle indique :
- les 8 directions cardinales
- le cycle des 2x 12h
- les mois
- les constellations du zodiaque
- les jours du calendrier grégorien
- les jours du mois lunaire