Thread by @RegimeCarbone

🧀 [Fromage] 🧀 Vous aussi, vous êtes accro au fromage ? Vous êtes plutôt fromage de 🐄 ou de 🐑 ? Brie, Emmental ou Roquefort ?
🍽️ Mais est-il possible de continuer à en manger dans une perspective bas carbone ?
Toutes les explications dans cette tirade [1/30]
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Cette tirade est inspirée par @laydgeur sur une sollicitation directe.
❓ Cette question n’est pas simple. En fonction du type de lait, de son origine animale ou végétale, et des fromages envisagés, les impacts varient.
👉 La conclusion va vous surprendre

https://twitter.com/lulutac/status/1393659893295484929

96% du lait utilisé en fromagerie vient des bovins (81% vache, 15% bufflonne), le reste se répartissant entre lait de chèvre(2%), brebis(1%) et chamelle(0.5%).
🥛Il faut en moyenne 8-10 litres de lait pour un seul kilo de fromage.

La fabrication du fromage peut être longue et se décompose en plusieurs étapes : caillage, égouttage, moulage, séchage, affinage, salage, sans oublier, emballage, transport et distribution Mais toutes ces étapes sont négligeables à côté du seul impact du lait.

Dans le graphique ci-dessous @ITABinstitut analyse l'impact du lait sur la fabrication de yaourt et fromage blanc. A chaque fois le lait écrase tout pour le seul aspect GES.
👉 Il devrait donc représenter de 70 à 80% environ de l'empreinte carbone totale du fromage.

Nous ne parlerons pas des autres sources de GES potentielles dans la fabrication du fromage : réfrigération, alimentation des machines de caillage et de moulage, des ateliers, transport des produits et des salariés, emballage.

En reprenant la base de donnée #agribalyse, nous avons ainsi des résultats basés sur les analyses de cycles de vie des 3 principaux laits animaux (entier) Ainsi, leur impact carbone
👉 lait de vache : 1.49 kgeqco2
👉 lait de chèvre : 1.63 kgeqco2
👉 lait de brebis : 2.42 keqco2

L’impact carbone du lait, quelque soit l’animal, se répartit entre la fermentation entérique (flatulences), la gestion des effluents (lisier, fumier) et l’achat et/ou culture des aliments (carburant, engrais azotés, etc).

La clé de calcul de l'empreinte carbone varie selon l'animal, en considérant tous ses sous-produits mais aussi sa productivité.
👉 Une vache produit 19L / jour, contre 3L pour 1 chèvre et 1L pour une brebis
👉Une vache fournit plus de viande et de cuir
devenir-eleveur.com/production-de-…

L’élevage en plaine semble ainsi avoir plus d’impact que l’élevage en montagne, ce qui parait logique quand on compare une alimentation à base de mais/soja par rapport à celle en herbe, mais qui ne se ressent pas forcément sur le résultat de l’empreinte carbone du lait de vache

De même, un fromage frais a moins d’impact qu’un fromage affiné. Le temps de fabrication est moindre, il a besoin de moins de lait, ce qui diminue son bilan carbone, mais la différence est assez faible, soulignant ainsi la prépondérance du lait dans l'impact carbone.

Mais cette question est d’autant plus complexe que s’y ajoute la dimension du stockage de carbone dans les prairies, qui donne alors un avantage sur le fromage de ferme ou artisanal par rapport au fromage industriel. Cette compensation est estimée à de 10 à 30% par la filière.

Agribalyse me parait clairement non pertinent sur la question du fromage, puisqu’il indique des impacts par grande famille de fromages, sans considérer les différences de volumes de lait nécessaires pour leur fabrication.

Jugez par vous même, voici les empreintes carbone d'une dizaine de fromages.
▶️ Camembert, Brie Bleu d’Auvergne, Maroilles, mozzarella, 5.49
▶️ Roquefort : 5.92
▶️ Feta : 5.98
▶️ Emmental : 6.27
▶️ Chavignol : 6.7
▶️ Ossau-iraty : 8.18
👉 Il y a un problème

Reprenons par exemple les chiffres données par @Interbev_fr sur son site dédié aux produits laitiers, en les ramenant au kilo, soit Camembert (8L), Pont-l’evêque (10L), Brie (7L), Comté(10L), Bleu d’Auvergne (3L), Saint Nectaire (8L), Maroilles (9L)
produits-laitiers.com/combien-faut-i…

Cette question peut aussi s'étendre aux fromages végétaux : Fabriqués à partir de noix de cajou ou d’amande, et dans des quantités bien moindres (1 kg de matière permet d’avoir 1kg de fromage), sans temps d’affinage long, leur empreinte carbone pourrait sembler meilleure.

Tel n’est pas le cas. Sur #agribalyse, leur empreinte carbone est très mauvaise : 5.5 kgeqco2 pour l’amande, 8.5 pour le cajou) De plus, leur ACV n’est pas bonne du tout, les noix consomment trop de sol, d’eau et d’énergie. Comparons les ACV lait animal et végétal

Le lait bovin parait meilleur sur la plupart des aspects de l’ACV : eutrophisation de l’eau, utilisation du sol, épuisement eau/énergie/minéraux, couche d’ozone. Mais la question est toujours celle du crédit accordé à la méthode ACV, qui agrège des données disparates.

D’autres études apportent des chiffres différents. Une étude établit ainsi un impact carbone de 1.92 kg eq co2 pour l’amande, tandis qu'une application (pas de meilleure source) indique 2.2 pour les noix de cajou
👉mdpi.com/2071-1050/7/11…
👉healabel.com/carbon-footpri…

Si des personnes ont des données plus pertinentes sur l’impact carbone des 3 laits et deux fruits à coques envisagés ici, elles sont les bienvenues. Je ne peux guère en l’état actuel des choses que vous fournir des estimations grossières sur l’impact des fromages.

La question du périmètre pris en compte dans les calculs, des différences de méthode de fabrication entre artisanal et industriel rend toute conclusion définitive impossible. Il est difficile de comparer élevage extensif et plein air, conventionnel et bio, français et brésilien

Ainsi, dans le cadre du projet Life Carbon Dairy de @IdeleLabo, pour des élevages bovins, nous trouvons en moyenne un litre de lait à 0.9 kgeqco2, voire 0.8 en incluant le stockage carbone.
👉 idele.fr/no_cache/reche…

L’idele a poursuivi ses expérimentations sur le lait de Chevre, en essayant d’optimiser leur alimentation pour baisser l’empreinte carbone et améliorer la productivité, amenant leurs résultats à environ 1.1 kgeqco2 par litre de lait de chèvre.
👉 idele.fr/fileadmin/medi…

De son côté @ITABinstitut parvient à diminuer de 20% l’empreinte carbone des brebis en dépassant à peine les 2 kgeqco2 par litre de lait, ceci en améliorant là aussi leur nourriture et leur productivité.
👉 itab.asso.fr/divers/LTNM_Re…

Ainsi, en reprenant toutes ces données, voici une estimation de ce à quoi pourrait ressembler l’empreinte carbone de 20 fromages différents avec 3 laits animaux et 2 laits végétaux, sans considérer la forme du fromage (rapé, frais, affiné, à tartiner, etc.)

A la réponse de l’impact carbone du fromage, je mettrais en comparaison celle de la viande : Sur la base des données agribalyse, le porc et le poulet font mieux ou égal (selon le morceau considéré) avec le fromage animal, pour un apport en protéine supérieur.

J'ai ajusté l'impact du fromage en prenant ainsi une base de 9 litres de lait pour le fromage de vache, 7 litres pour le fromage de chevre et 5 pour celui de brebis à partir des données agribalyse.
👉 la viande de porc et de poulet parait alors meilleure sur la base des GES

Mais c’est aussi faire un faux procès au fromage, qui est une forme pratique pour conserver et transformer le lait, considérant que l’élevage est la seule activité possible dans de nombreuses zones et donc le fromage le seul débouché économique possible, qui se conserve bien

De plus les élevages ovins ont une bonne intensité d'emploi par litre de lait, et c'est normal puisqu'ils sont moins intensifs que l'élevage bovin. Nous en avons sans doute besoin pour une transition écologique juste. devenir-eleveur.com/production-de-…

Cela ne veut pas dire que nous ne pouvons pas néanmoins faire preuve de sobriété. Avec 24 kilos de fromage par an, les Français sont les 2e plus gros consommateurs au monde. Sur la base des données ici consolidées, cela reviendrait à une empreinte carbone de 300 kilos de co2/an

Pour déguster votre fromage, le vin et le pain ne sont absolument pas un souci. Avec une empreinte carbone moyenne de 1.1 et 0.7 kgeqco2, ce ne sont pas eux qui vont alourdir votre bilan. Par contre, puisqu’il faut 20 litres de lait pour 1 kilo de beurre, vous voyez le souci...

Bref, vous pouvez continuez à manger du fromage, mais il va falloir faire un effort sur la quantité, privilégier la qualité, prendre conscience des ordres de grandeurs en jeu et en informer vos convives.

D'autant que, comme je l'avais indiqué en début de tirade, je n'ai pris ici en compte que les seuls ingrédients du fromage, pas l'impact de la transformation, du transport et de la distribution. On peut faire un forfait et ajouter 20% pour obtenir l'impact total.

Voilà c'est la fin de ce thread qui sent bon le fromage. Pour plus de threads sur la transition écologique des territoires, n'hésitez pas à suivre également @SolutionLocal et pour des threads généralistes sur l'environnement c'est @techn0verdose