Massacre du 17 octobre 1961 à Paris…
Il y a 60 ans
N’oublions jamais.
(fil à dérouler)
1)Le 17 octobre 1961 a eu lieu la répression d'Etat la plus violente qu'ait jamais provoquée une manifestation de rue en Europe occidentale dans l'histoire contemporaine.
Une répression longtemps occultée…
2)Rappelons un peu le contexte
En janvier 1961 un référendum avait donné une très nette majorité (75 %) en France métropolitaine comme en Algérie en faveur du processus de paix.
3)Mais la perspective de l’Indépendance suscitait un refus catégorique d’une frange favorable à l’Algérie française et ce même au cœur de l’Etat
D’où une recrudescence des violences dans les deux camps, en Algérie comme en métropole, contre des Algériens, contre des policiers fr.
4)Depuis la fin des années 1950, les rafles d’Algériens, ensuite enfermés au gymnase Japy, au Vel d’Hiv (pas encore détruit) ou dans le nouveau centre ouvert à Vincennes se multiplient. En réaction, les attentats du FLN contre les policiers reprennent.
5)En septembre 1961 on commence à repêcher des cadavres de nord africains dans la Seine.
Pour dire que le 17 octobre ne fut pas un épisode isolé, mais le pic le plus spectaculaire d’une répression érigée en système comme l’ont bien montré Jim House et Nail MacMaster.
6)Depuis le 5 octobre 61, un couvre feu avait été imposé à Paris par le préfet de police Maurice Papon, un couvre feu qui ne visait que les Algérien-nes.
Un couvre feu qui vise en fait tous les nord-africain-nes et leur rend la vie quotidienne invivable
7)La fédération de France du FLN choisit de riposter en bravant le «couvre-feu raciste» et en organisant une manifestation massive et pacifique, qui répondait à l’exaspération de la population discriminée, brutalisée
8)Hommes, femmes et enfants sont appelés à y participer dans le calme
Le port d'armes, même les plus insignifiantes, est absolument interdit.
9)L’information circule sous le manteau et la préfecture de Police de Paris n’a connaissance de la manifestation que vers 16 h. A la préfecture, c’est la panique
10)De Gaulle donne alors carte blanche à la police pour disperser la manif
Papon, le préfet de police fait dire aux troupes ; « pour un coup donné rendez en dix »
11) Pour Papon il est inacceptable qu’une manifestation d’Algérien-nes, même pacifique, entre dans Paris. Pour lui c’est une « invasion ».
12)En fin de journée, entre 20 000 et 30 000 Algériens et Algériennes, en habits du dimanche, commencent à se diriger vers les points de regroupements : l’Etoile, le bouv St Germain et les grands boulevards
13)La première manifestation (10 000 personnes), partie des bidonville et quartiers de l’ouest est bloquée par la police au pont de Neuilly. Les affrontements les plus violents auront lieu là.
14)Les policiers sont en nombre qu’ils jugent insuffisant. ils sont chauffés par des rumeurs (on dit que des policiers seraient morts, ce qui est faux), ils sont dans un esprit de revanche après les attentats dont ils ont été victimes et se sentent couverts par la hiérarchie.
15)Ils ripostent par la violence, frappent avec leurs «bidules» (matraque particulièrement dure faite pour briser les os) et plusieurs coups de feu sont tirés
16)Dans le même temps, des arrestations massives ont lieu aux sorties de métro à Etoile, Opéra, Concorde
17)Pdt ce temps, les Algérien-nes réussissent à se rassembler place de la République et défilent calmement en direction de l'Opéra.
Ils brandissent des drapeaux et écharpes aux couleurs vertes et blanches du FLN et scandent les slogans «Algérie algérienne»
18)Mais la manifestation se heurte vers 21 heures à deux compagnies de CRS devant le cinéma Rex
Les incidents de ce secteur sont à nouveau particulièrement violents et meurtriers
19)Le troisième secteur d'affrontements violents est celui des boulevards Saint-Michel et Saint-Germain où les forces de police encerclent, nassent les manifestants qu'ils chargent et frappent
20)Les manifestants sont poussés par les force de l’ordre dans la Seine, blessés, certains entravés, pour les noyer.
21)La seine charriera des dizaines cadavres des jours durant.
Les photos d’Elie Kagan donnent à voir ces arrestations, leur violences. Il est un des rares photographes à avoir pu témoigner par l'image des violences policières perpétrées à l'encontre des Algériens et Algériennes
22)Vous pouvez aussi écouter les témoignages recueillis plus tard par Daniel Mermet (qui était présent le 17 octobre) et Giv Anquetil dans l' émission @LabasOfficiel la-bas.org/la-bas-magazin…
23) Des arrestations massives ont lieu, obligeant la préfecture à réquisitionner des autobus de la RATP (1ère fois depuis la rafle du vel d’hiv) Il y aura jusqu'à 11 000 personnes arrêtées, rassemblées pour nombreuses au Palais des sports de la porte de Versailles.
24)Au Palais des sports, les 150 policiers qui assurent la garde des détenus se livrent à de nouvelles brutalités
nombre de témoignages d'appelés du contingent, affectés au service sanitaire, ont décrit la «vision d'horreur» qui les a saisis à l'entrée du Palais des sports
25) Nombreux/ses sont ensuite expulsé-es de France, envoyé dans des camps en Algérie sans que leur famille en soit informés. Nombreux, nombreuses ne sauront jamais ce que sont devenus leurs proches…
22)Pourtant, le lendemain, c’est l’occultation et le mensonge dans la presse dont les principaux titres se contentent de parler de violence mais sans dire de la part de qui et de reprendre le bilan officiel transmis par la préfecture : 2 morts.
26)le Parisien libéré, l'Aurore, Paris Match parlent d’une manifestation violente, mais sans évoquer la violence de la police ! Version à laquelle va adhérer tout naturellement la majorité de la population française
27)Seule l'Humanité et Libération réfutent le bilan gouvernemental et évoque les violences policières de la nuit
28)il faut voir la presse française pendant la guerre d’Algérie vit en permanence sous la menace des saisies, et la censure politique met en place ce que Le Monde appelle alors « la République du silence »
29)L’Humanité sera d’ailleurs saisie après son article sur le 17 octobre 1961
30)Le 20 octobre, un communiqué du GPRA soutient que le nombre de victimes s'élève «à près de cinquante, parmi lesquels plusieurs femmes». C’est plus que le bilan officiel, mais moins que la réalité
31) Car depuis, les travaux des historiens, bien que rendus difficiles par la disparition de gens, de sources, portent le bilan à plus de 150 morts pour les chiffres les plus bas, autour de 300 pour les plus haut, sans doute 200.
32)À l'Assemblée nationale, c'est le député Eugène Claudius-Petit, de sensibilité Centre gauche qui lance une attaque féroce contre la police
Il lance dans l'hémicycle : « la bête hideuse du racisme est lâchée »
33)Interrogé par le Conseil de Paris, Papon répondra juste « la police parisienne a fait ce qu'elle devait faire ». Il est félicité par le gouvernement.
34)Les intellectuels réagissent aussi. Nombreux sont mobilisés depuis qq temps, la publication du manifeste des 121 de sept 1960 et son appel à l’insoumission étant une étape importante
35)Ils font de nombreux tracts pour dénoncer le massacre
Un rassemblement en silence pour les victimes à Maubert, autour de Sartre
36)Le comité du quartier latin des étudiants et des artiste a l’idée d’une action.
Graffiter, à plusieurs endroits de Paris : « Ici on noie les Algériens »
37)Le recours au graffiti n’était pas neuve.
Il y avait une guerre des murs pendant la guerre d’Algérie
C’était une forme de braconnage de l’espace public
38)Les graffiti, au nombre de 6 sont faits dans la nuit du 5 au 6 novembre 1961 : l'un face de la préfecture, quai des orfèvres, trois en face de l’institut, près du pont des Arts, un 3eme un peu plus haut sur le quai, un autre sur le pont
39) On connaît le second car il a été pris en photo avant que d’être effacé par la police par une photographe de l’Huma jean Texier
la photo ne sera pas publiée
il faudra attendre 1985 pour qu'elle le soit
40)Pour l’histoire de ce graffito et de la photographie qui en a été prise voir cairn.info/revue-geneses-…
41)Paulette Péju rédige rapidement un récit détaillé des événements d'octobre, qui sera publié en novembre par François Maspero
L'ouvrage, intitulé Ratonnades à Paris et présenté comme un recueil d'articles de presse, sera promptement interdit à la vente
(réédité cette année)
42)De novembre 1961 à mars 1962, Jacques Panijel, tourne quant à lui Octobre à Paris à partir de témoignages de victimes rutube.ru/video/283b117c…
43)Ce documentaire est ensuite projeté clandestinement à Paris, Cannes ou Venise et en différentes occasions. Il ne sera pourtant autorisé qu’en 2011
44)Tout semble fait pour occulter l’événement. les instructions judiciaires ont été closes sans aboutir. Il y en a eu une soixantaine, elles ont toutes débouchées sur des non-lieux.
45)Papon continue sa carrière à la préfecture Le 8 fev 62 c’est lui qui est encore préfet de police qd la répression d’une manifestation pour la paix et contre l’OAS fait 8 morts à la station Charonne
je reviens plus tard pour vous expliquer comment le 17 octobre est sorti de l'oubli, du mensonge et du silence
désolée ce fil se casse à plusieurs endroits sans que je comprenne pourquoi car j'ai pourtant à chq fois répondu au précédent.
46)La mémoire d’octobre 61 s’estompe ensuite. Même si l’on peut citer le merveilleux livre de claire Etcherelli, Elise ou la vraie vie, 1967 qui en parle
47)L’Huma évoque le massacre en 1974 dans un article de C. Lecomte
En 1980 Libé ressort l’affaire et titre « massacre raciste en plein Paris »
48)17 octobre 1981 pour les 20 ans, dossier dans Libé à nouveau et dans l’Huma qui parle de racisme colonial
49) En 1983, 84 et 85 trois romans, de Didier Daeninckx, Nacer Kettane et Mehdi Lallaoui évoque l’événement
50)Un éducateur, citoyen historien, Jean Luc Einaudi se penche sur la question, récolte en Fr et en Algérie de très nombeux témoignages pour pallier la fermeture des archive fait paraitre en 1991 le premier livre d'historien : La Bataille de Paris
51)Dans son merveilleux livre " La bataille d'Einaudi", réédité cette année sous le nouveau titre "Ici on noya les Algériens", @campvolant raconte ce combat d’Einaudi pour la vérité. Je vous le conseille chaleureusement
53)Les premiers comités pour appeler à la reconnaissance officielle du massacre se constituent
54)1992 sortie du documentaire "Une journée portée disparue" réalisé pour la télévision française par deux britanniques
55)en 1997, procès Papon
or Einaudi est appelé à la barre
il témoigne
Et choc à nouveau.
Papon porte plainte pour diffamation contre Einaudi
56)le procès, merveilleusement rapporté par @campvolant dans son livre se conclue sur deux choses importante : Einaudi est relaxé et plus encore le réquisitoire du procureur utilise le mot massacre pour qualifier l’événement
57)le gouv Jospin promet l’ouverture des archives mais ne le fera pas, commande un rapport qui se révèle un scandale ( petit, truffés d’erreurs, avec sous-estimation des victimes et validation de la thèse de la réaction de la police à des violences de la part des manifestants)
58)au début des années 2000, les associations sont de plus en plus actives, alors que le débat public fait rage sur la question de la torture en Algérie (Raphaelle Branche vient de soutenir sa thèse)
59)c’est dans ce contexte que le maire de Paris, Delanoé fait voter le dépôt d’une plaque commémorative près du pont Saint Michel, après un débat houleux au conseil de Paris car pour la droite c’est une provocation
60) La plaque est minimale et surtout ne dit rien des responsabilités de la police, de l'Etat, mais reconnaît que la manifestation était pacifiste
Le syndicat de la police, alliance, proteste
61) dans d'autres villes, d'autres plaques sont bien plus explicites (Saint Denis, Aubervilliers, Grenoble et bien d'autres, je ne peux pas toutes les reproduire)
62)17 octobre 2012, le président de la République François Hollande publie un communiqué :
63)Mais il ne s’agit toujours pas de dire qui a opéré la sanglante répression, en l'occurrence la police parisienne, qui a agi sous les ordres du préfet de police, Maurice Papon, lui-même sous l'autorité du gouvernement du général de Gaulle
dimanche, une manifestation partira du Rex pour se rendre au Pont Saint Michel : Vérité et Justice
elle demande
- que le président confirme la reconnaissance et la condamnation de ce crime d'Etat
- que la lumière soit fait sur les Algériens renvoyés en Algérie après le 17 octobre
- que l'ouverture des archives soit effectives pour toutes et tous, historiens historiennes, citoyens citoyennes
- qu'une loi de réparation soit mise en oeuvre
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Mais c'est malin ça!
Comment féminiser les noms de rues sans gêner les riverains habituer au nom de leurs rues?
en rajoutant des prénoms à des rues déjà existantes pour leur donner le nom d'une femme
ainsi, la rue Rodier devient la rue Claude Rodier (9e) (résistante déportée)
La rue Gonnet devient la rue Marguerite Gonnet (11e)
La rue Moret devient la rue Marguerite Moret (11e)
La rue Jacquier devient la rue Paulette Jacquier (14e)
La cité Bauer devient la cité Anne-Marie Bauer (14e)
petit fil sur des monuments aux morts de la guerre de 14-18
Pas les plus nombreux (les monuments patriotiques, ou civiques) mais les moins fréquents, inattendus, ceux qui évoque le pacifisme, les civils, les femmes...
commençons par quelques monuments pacifiste
Le monument de la commune de Gentioux, avec l'inscription " Maudite soit la guerre" et cet enfant, le poing levé
Massacre du 17 octobre 1961 à Paris… Il y a 60 ans N’oublions jamais. (fil à dérouler)
1)Le 17 octobre 1961 a eu lieu la répression d'Etat la plus violente qu'ait jamais provoquée une manifestation de rue en Europe occidentale dans l'histoire contemporaine. Une répression longtemps occultée…
2)Rappelons un peu le contexte En janvier 1961 un référendum avait donné une très nette majorité (75 %) en France métropolitaine comme en Algérie en faveur du processus de paix.
Fil d’histoire sur le viol en France
Sa prise en compte par la justice, par les mouvements féministes, l’évolution de la loi…
(un peu long mais c'est important)
1) Il faut bien voir que les violences faites aux femmes, et notamment les violences sexuelles, ont mis très longtemps à être reconnues, judiciarisées. Des siècles d’impunité qui, même si les lois ont tardivement changé, pèsent encore lourdement de nos jours.
1) Si parfois la justice a bougé, c’est parce que les femmes s’en sont saisies. Parce que l’une des formes d’empowerment des femmes a été de se porter courageusement devant les tribunaux, d’y traîner leurs agresseurs, leurs violeurs.
envie de vous raconter en avance les Trois Glorieuses
27, 28, 29 juillet 1830
vous comprendrez pourquoi
1)Les Trois Glorieuses sont 3 journées insurrectionnelles lors desquelles le peuple parisien soulevé à viré le dernier frère de Louis XVI, Charles X, roi ultra, conservateur, nostalgique de l’Ancien régime
2) Bon posons un peu les forces politiques en présence en ce début de 19e siècle.
A droite les ultras. Nostalgique de l’ancien régime (social et politique).
A gauche, les libéraux, héritiers de 1789, prônant le libéralisme politique (et son suffrage censitaire) et économique