J'ai commencé le décompte des féminicides conjugaux en France Il y a 6 ans pile, avec le meurtre d'une mère de 26 ans à Tahiti le 3 janvier 2016. dikecourrier.wordpress.com/2016/01/29/201…
A l'époque, la France était sous le choc des attentats du 13 novembre et entamait un gros travail mémoriel sur les violences terroristes, et un travail médiatique sur la représentation des victimes, survivantes ou non.
4-5 ans à peine avant le Covid, notre pays vivait littéralement sous état d'urgence, face à la gravité des violences du 13 novembre. Avez-vous oublié ?
Et pour beaucoup de militantes féministes, le contraste entre le traitement politique du terrorisme islamiste et celui du terrorisme conjugal était sidérant, désolant.
Les violences intimes et conjugales nourrissent le terrorisme. Elles reposent sur les mêmes mécanismes de contrôle par la manipulation et la terreur, et de représailles face aux résistances et aux exigences d'égalité.
Mais le cadre est privé, les victimes sont la femme, l'ex et/ou les enfants du terroriste, pas des victimes ciblées au hasard en public. La majorité ne Se sent pas, ou ne veut pas se sentir concernée ni menacée par le phénomène des violences intrafamiliales.
Les féminicides conjugaux étaient relégués aux faits divers, anecdotiques. Ils étaient qualifiés de "drame passionnel", comme le dénonçaient les féministes depuis des DÉCENNIES.
Une vraie dissonance cognitive : face à deux phénomènes d'une même violence masculine de masse, notre société réagit de manière contradictoire : mobilisation citoyenne et état d'urgence d'un côté, banalisation et impasses institutionnelles de l'autre.
Et pour accabler encore plus les victimes invisibles des violences intrafamiliales : chaque année un journaliste ou un politique tombe dans le panneau du "combat des pères privés d'enfants", ces pères masculinistes violents, nos agresseurs, qui se font passer pour des victimes.
Pour moi le choc était d'autant plus grand que cela faisait un an pile que j'avais quitté mon ex violent. En février 2015, j'avais dû quitter ma maison et mon job, avec seulement 1300 euros en poche et mes enfants à charge, pour lui échapper.
Et donc depuis un an j'étais passée des violences conjugales aux violences post-séparation : finies les violences physiques et sexuelles, bonjour les violences économiques, le harcèlement judiciaire, le stalking, le harcèlement de mes soutiens, et j'en passe.
Ma liberté et ma sécurité physique mont coûté très cher. Ça vaut le coup et je suis bien soutenue. Mais la machine destructrice de mon ex est toujours à l'oeuvre. 7 ans après, je suis encore endettée et harcelée, mais j'ai du recul et des perspectives. En 2016, j'étais submergée.
J'étais en état d'hypervigilance permanente. Je vérifiais si j'étais suivie dans la rue, j'ai troqué ma bandoulière contre un sac à dos, pour pouvoir courir facilement si je devais être agressée par mon ex. Mes enfants et moi sursautions à chaque coup de sonnette imprévu.
A raison puisqu'il a tenté de s'introduire chez nous, 5 minutes après mon départ pour le boulot. Les enfants étaient, ben, terrorisées à l'idée d'être kidnappées. L'école aussi : mon aînée a été privée de voyage scolaire après que mon ex a menacé la proviseure.
J'étais mentalement épuisée, mais vu les retards de la justice, il fallait que j'assure: reconstruire ma carrière pro, emmener mes enfants à l'école et chez le docteur, aller au tribunal. Je courrai tout le temps, avec un ordi, pour pouvoir travailler partout et gagner des sous.
J'étais dans une optique de survie. Je pensais tout le temps aux femmes qui n'avaient pas survécu. Les victimes de féminicide (pas seulement conjugal), mais aussi celles qui se suicident, celles qui meurent à petit feu, consumées par le harcèlement, dépossédées, désenfantées.
Je ne pouvais pas toutes les compter, et de toute façon seules les mortes étaient mentionnées dans la presse. Donc je me suis mise à compter nos mortes sur mon blog, et très vite d'autres féministes se sont mobilisées pour participer ou relayer ce travail de veille.
Quand j'arrivais au bureau, ma première action, chaque jour, était de rechercher les mortes sur Google. Mes propres difficultés personnelles me paraissaient dérisoires par rapport à leur sort. Je n'arrivais pas à me mettre à bosser avant d'avoir mis à jour le décompte.
Le plus efficace, c'était de chercher dans Google et dans Google News "femme morte" et "femme retrouvée morte". Ça a peut-être changé maintenant que le terme de "féminicide conjugal" est devenu mainstream. Grâce à nous.
Le plus angoissant c'était de vivre avec les disparues. Penser à elles, penser à les googler régulièrement pour voir si on les a retrouvées, vivantes, ou tuées, ou suicidées. L'angoisse, qui s'ajoutait à mes propres états d'hypervigilance.
Et vu l'indifférence générale, le sentiment d'urgence, de gâchis m'etouffait. Tous les deux ou trois jours, une nouvelle morte qu'on savait menacée. Des scénarios qui se répètent banalement :
Une femme, très souvent mère de famille, victime de violences, décide de reprendre sa liberté et de quitter son ex. Il ne l'accepte pas, et la tue, le plus souvent chez elle, à son bureau ou quand elle va chercher les enfants. Piégée. Exécutée.
Un "pattern" si banal, si répétitif, que cela rend encore plus scandaleux notre incapacité collective à endiguer les féminicides conjugaux.
Alors mue par le sentiment d'urgence, je twittais pour attirer l'attention des politiques. Message : une mère qui veut protéger ses enfants d'un conjoint violent est en danger de mort.
Ça n'a jamais été un travail individuel. tout cela s'inscrit dans la continuité des pétitions d'@abandon2famille, des travaux de @SueurGwenola & @Pierre_Pgt sur le contrôle coercitif, du travail d'écoutante / formatrice de Gwenola, du Tumblr #LesMotsTuent de @Sophie_Gourion, etc.
J'ai arrêté de compter les mortes au bout de 5 mois (Leïla, 46e victime de 2016), après un énième coup bas de mon ex. Il fallait que je recentre mon énergie sur moi-même, question de survie. Merci @feminicidesfr d'avoir amplifié et pérennisé ce décompte.
Pensées pour toutes les victimes et pour leurs proches. Nous ne vous oublions pas.
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Via @Val_Do : Olivier Carbone, directeur de casting, vomit sa haine sur Adèle Haenel et ce qu'elle représente : le courage, la soif de justice, la colère juste, le sang-froid.
Avec ses 15 modifications de son message, lui incarne la perte de contrôle, l'affolement, la bassesse.
"HAENEL TU ES QUI POUR TE LA RACONTER COMME ÇA FACE À UN MONSTRE VIVANT SALEG"
"SALEG" = Sale gouine, je suppose ?
Au moins Olivier Carbone admet que Popolanski est un monstre sacré. Monstre et sacré, littéralement en effet.
Olivier Carbone menace d'omerta mais ne tient pas longtemps : c'est plutôt la diarrhée verbale.
"CETTE CONNE DE FORESTI"
Et cette perle révélatrice :
"QUELLE BANDE DE MERDES IL Y A PRESCRIPTION"