Thread by @AsmaMhalla

🇺🇦 THREAD récapitulant quelques éléments d'analyse sur les enjeux de la #cyberguerre dont on en parle tant, à l'aune du conflit et des éléments à date #UkraineRussie 👇

La cyberguerre, c’est quoi ? En gros, ce sont les actions menés par des Etats ou organisations pour mener des attaques dans le cyberespace contre un autre Etat. Elle se divise schématiquement en 2 grands volets: cyberattaques & le volet information /désinformation (1/22)

Les actions cyber nécessitent peu de moyens financiers et humains.Ce sont des « guerres invisibles », pour reprendre l'expression de @ThomasGomart qui peuvent avoir un effet de déstabilisation réelle :panique, sabotage, blocage d’infra vitales,perturbation logistique, ... (2/22)

Elles sont complémentaires des guerres conventionnelles qu’elles accompagnent sur la 4ème dimension : cyberespace. Les guerres s'hybrident en devenant totales (lire l'analyse de @ThomasGomart: lemonde.fr/idees/article/…). Les pays les plus développés sont les plus vulnérables (3/22)

Dans le cas ukrainien,la faible intensité du volet cyber est étonnante,dénotant 3 choses: on a pu sur-estimer la centralité de ces modalités dans un contexte de conflit lié à un enjeu territorial;nous en sommes aux prémisces; la guerre conventionnelle reste la plus efficace(4/22)

Dernier élément notable signant un changement de paradigme : la position de l’OTAN et d’un certains nombre d'Etats-majors (USA, UK, ..) qui estiment désormais une cyberattaque critique comme un acte de guerre nécessitant des mesures de rétorsion au moins symétriques (5/22)

Maintenant si on analyse la stratégie russe à l'aune de la guerre en #Ukraine, nous obtenons les premiers éléments de la morphologie des futurs conflits du XXIème siècle et la recomposition géopo en cours.-Ici, la stratégie russe est à la fois offensive et défensive (6/22)

Sur le volet offensif, 3 scénarios possibles font, à tort à ou à raison, la une des médias. Ils sont dans tous les cas encore de l’ordre de l’hypothèse : cyberattaques massives, sabotage de cables sous-marins, coupure du réseau en Ukraine et en Europe (7/22)

1/Cyberattaques: discrètes à date,la salve de janv-fév. participe d’une stratégie de cyberharcelement que UA subit depuis 2014. Plongeant la communauté internationale d'experts dans une grande perplexité (lire le complet thread de @LPetiniaud:

https://twitter.com/LPetiniaud/status/1499300468547371008?s=20&t=mDoh5gcGBdkYyAPvNU97IQ

(8/22)

2/Menaces de coupures par les russes de câbles sous-marins (lire ici un bon article latribune.fr/technos-medias…) latribune.fr/technos-medias…) mais compte-tenu des enjeux, ne sommes-nous pas en train de sur-estimer cette menace ? l'avenir nous le dira ... (9/22)

3/ Coupure du réseau en Ukraine et en Europe: la Russie pourrait diriger des attaques DDoS ou d'autres cyberattaques sur les routeurs frontaliers qui relient le réseau d'un fournisseur d'accès à l'internet mondial. Là encore, nous verrons ...(10/22)

En synthèse sur l'offensif: étant donné les interdépendances et mesures de rétorsion, des cyberattaques massives pourraient faire dégénérer le conflit à une échelle mondiale. L’arbitrage coût-bénéfices fait pour l'instant pencher la balance vers un statu quo des 2 blocs (11/22)

Maintenant sur le volet défensif, on parle beaucoup de #splinternet ces jours-ci. 3 éléments de réflexion sur sa portée théorique et réelle : 1/oui, la Russie construit une politique de souveraineté technologique robuste, avec une forte accélération depuis 2018-19 (12/22); ...

... ; 2/ oui, l’ambition russe est de prendre le contrôle de l’ensemble du cyberespace, des infrastructures techno aux services avec le RUnet pour avoir un système totalement résilient en cas de cyberguerre (13/22); ...

... 3/ théoriquement, elle en aurait les moyens. En pratique, c’est moins sûr: résultats des tests effectués depuis l'été 2021 non communiqués. Elle peut bloquer une partie du réseau mais probablement pas isoler 100% le pays qui reste connecté au réseau mondial ... (14/22)

... par ailleurs, elle s’isolerait beaucoup trop : cela la couperait réciproquement du reste du monde or le volet informationnel reste important et la porosité des systèmes, une condition pour le faire (15/22)

L’enjeu de la mise sous cloche du cyberespace russe qui est encore en cours de construction : prendre le contrôle de l’ensemble de l’écosystème informationnel, nous revenions dessus avec @flogsell ici sciencespo.fr/public/chaire-… (16/22)

Le risque, encore hypothétique, du splinternet à la russe est une balkanisation de l’internet mondial et la fin définitive de la neutralité du net, de son rêve d’ouverture, de liberté, d’égalité d’accès, de connaissance, etc. (17/22)

La Russie développe une souveraineté techno forte: cloud souverain (dont yandex), son moteur de recherche (#Yandex),réseau social sous contrôle de Gazprom (#Vkontakte), mail(mail.ru). Lire l'excellent thread de @JulienNocetti:

https://twitter.com/JulienNocetti/status/1498344497159286790?s=20&t=mDoh5gcGBdkYyAPvNU97IQ

(18/22)

Cette hypothèse est crédible mais à terme. Elle est structurante dans la reconfiguration géopolitique en cours, notamment avec la mise en place de l’axe Moscou-Pékin. En miroir de la techno, les interdépendances vont, elles aussi, se « fragmenter ». (19/22)

A cet égard, la stratégie d'approvisionnement pour les les semi-conducteurs par exemple est à particulièrement instructive. De ce point de vue, la stratégie sino-russe en Afrique n’est pas du tout anodine. Voir ici :

https://twitter.com/AsmaMhalla/status/1499133686759018499?s=20&t=mDoh5gcGBdkYyAPvNU97IQ

(20/22)

Pour finir, notre angoisse grandissante sur les sujets cyber / techno dénote davantage la conscience de nos vulnérabilités dans un monde en réseau interconnecté et interdépendant plutôt qu’une menace effective (sous condition de non escalade avec la Russie) (21/22)

En creux, cela doit nous interroger nous, européens, sur les attributs de notre puissance technologique et militaire, notre capacité nationale et communautaire à défendre notre souveraineté si elle venait à être menacée. Cc @FredericEncel (22/22)