Dimanche soir, c'est le bon moment pour faire un thread de #botanique !
Résumé d'un article passionnant publié l'année dernière dans Plant Physiology sur les plantes parasites.
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Les plantes parasites sont caractérisées par la présence d'un haustorium, un organe spécialisé qui entre dans la plante hôte et se connecte à ses tissus conducteurs pour en extraire des ressources.
C'est une structure qui est apparue 12 fois de manière indépendante au cours de l'évolution des angiospermes et se retrouve chez plus de 4,700 espèces !
Nickrent (2020) 4/
L'objectif principal de l'article est de discuter de la façon dont il est possible de classer toutes ces espèces sur base de critères de diversité fonctionnelle (pas phylogénétique, ça c'est plus ou moins clair).
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La diversité fonctionnelle & morphologique est immense parmi les plantes parasites !
(Teixeira-Costa & Davis, 2021) 6/
Nickrent (2020)
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Il est fréquent de diviser les plantes parasites en 2 grandes catégories selon la capacité ou non à faire de la photosynthèse :
- Les holoparasites en sont incapables, et sont donc dépendantes à 100% de leur hôte
- Les hémiparasites en font → partiellement autonomes.
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Par exemple, les orobanches (O. teucrii ici, Orobanchaceae) sont holoparasites. Leur couleur brune indique l'absence de chlorophylle → incapacité à faire de la photosynthèse. Tandis que les rhinanthes (Orobanchaceae aussi) possèdent des feuilles vertes → hémiparasites.
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Le site de fixation de la plante parasite a aussi souvent été utilisé comme critère de classification : sur la tige ou les racines de l'hôte ; ou encore la morphologie de l'haustorium et le fait que la plante soit grimpante ou non.
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Avant l'apparition de la phylogénie moléculaire (çàd la classification sur base de caractères moléculaires comme l'ADN), ces critères ont été abondamment utilisés pour former des groupes qui, aujourd'hui, ont été éclatés avec les nouvelles approches de taxonomie.
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En plus, tous ces critères sont parfois d'utilisation délicate, avec par exemple des plantes intermédiaires entre holo- et hémiparasites quand elles deviennent photosynthétiques uniquement à la fin de leur cycle.
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Les auteurs de cet article on ainsi voulu proposer une classification fonctionnelle (et pas phylogénétique, j'insiste !) plus rigoureuse et moins ambigüe.
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Ils se sont basés principalement sur des étapes-clés du développement de la plante-parasite, en interaction avec son hôte -autrement dit, des "traits d'histoire de vie", c'est à dire ceux qui influencent la reproduction et la survie tout au long de la vie de l'individu- :
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- Lieu & caractéristiques de la germination ;
- Position des haustoria (apical ou latéraux) ;
- Possibilité de croissance indépendante de l'hôte.
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Le cycle de vie des plantes parasites peut être divisé en 3 grandes étapes, fortement liées à ces traits :
1⃣ De la germination à la localisation de l'hôte.
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2⃣ Développement de l'haustorium, intrusion dans l'hôte et connexion avec ses tissus conducteurs.
3⃣ Le reste du développement de la plante et sa reproduction, en interaction étroite avec l'hôte.
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Sur base de ces 3 grands critères, ils ont regroupé l'entièreté des plantes parasites en 5 groupes fonctionnels :
- Parasites euphytoïdes
- Guis (au sens large)
- Plantes parasites grimpantes
- Parasites racinaires obligatoires
- Endoparasites
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1⃣ Parasites euphytoïdes ("comme des plantes vertes")
→ Ce groupe inclut la majorité des espèces classées auparavant parmi les "hémiparasites". Elles sont capables de faire de la photosynthèse, et se connectent à leur hôte sur ses organes souterrains.
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Elles sont ainsi capables de vivre en autonomie pendant quelques jours à semaines avant de trouver un hôte. Mais ça ne veut pas dire pour autant qu'elles sont capables de faire leur cycle complet en autonomie !
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Ça a parfois été réalisé en conditions contrôlées, mais c'est très peu probable en conditions naturelles.
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Les haustoria se développent de manière latérale sur les racines. Ça veut dire que la partie apicale (à l'extrémité), où se trouve le méristème (tissu qui génère les nouvelles cellules) est toujours fonctionnelle pour
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étendre le système racinaire et ainsi permettre de se connecter à plusieurs hôtes.
En résumé :
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2⃣Les guis (au sens large).
→ Plantes caractérisées par une germination hors du sol, directement sur l'hôte. La jeune plantule est très exposée, elle a tout intérêt à rapidement envahir l'hôte. Cela explique la présence d'un haustorium apical sur la racine embryonnaire.
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À peine la graine a germé, l'individu est déjà connecté à son hôte. Vu que cet haustorium replace le méristème, la plante ne peut plus croître pour rejoindre un autre hôte si la connexion avec le 1er échoue.
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Une fois la minuscule plantule connectée pour de bon au système conducteur de l'hôte, son développement peut commencer pour de bon et donner au final le buisson de gui que tout le monde connaît connaît bien.
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3⃣ Plantes grimpantes
Ce groupe regroupe les genres Cuscuta sp. (Convolvulaceae) et Cassytha (Lauraceae), des plantes très éloignées d'un point de vue taxonomique, mais d'apparence très proches, résultat de convergence évolutive.
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Les graines germent sur le sol, et peuvent avoir une courte vie autonome. La tige commence à pousser autour de l'hôte, et de nombreux haustoria sont générés sur elles, pour entrer directement en contact avec la tige de l'hôte et rejoindre ses tissus conducteurs.
Ces plantes ont des petites graines avec peu de réserves nutritives et sont incapables de faire de la photosynthèse. Leur germination doit donc absolument se faire à proximité immédiate de l'hôte, pour s'y connecter très rapidement.
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La germination est stimulée par la présence de molécules produites par l'hôte. Grâce à ça, les graines germent uniquement si un hôte est à proximité, condition indispensable pour sa survie.
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Elles produisent un haustorium terminal, donc la croissance du système racinaire est très limitée.
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5⃣ Endoparasites
C'est certainement la catégorie la plus fascinante, puisqu'il s'agit de plantes dont les seuls organes visibles sont les fleurs (ou inflorescences), fruits et graines.
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Les autres stades de développement sont sous forme d'une structure similaire à un mycélium de champignon à l'INTÉRIEUR de la plante hôte !
Chez plusieurs de ces espèces, le génome plastidal (celui des chloroplastes) est fortement réduit, empêchant -entre autres- d'avoir une machinerie photosynthétique fonctionnelle.
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Le cycle :
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L'article continue à discuter de considérations biogéographiques, mais je vais m'arrêter là.
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Il y a quelques années, j'ai fait mon mémoire sur les herbiers à posidonie (Posidonia oceanica), et entre temps on découvre qu'elles établissent des symbioses avec des bactéries fixatrices d'azote au niveau des racines ! 😯
Thread aquatique ⬇️⬇️⬇️
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L'article, publié en novembre dernier dans Nature, est disponible en Open Access : nature.com/articles/s4158…
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