Thread by @emmanuelzemmour

Il aura fallu du temps pour que quelqu’un se risque à défendre #Parcoursup. Malheureusement les arguments de cet édito paru dans @lemondefr ne tiennent pas. Mais alors pas du tout. Voilà pourquoi 🧵⬇️ lemonde.fr/idees/article/…

Pour résumer, l’idée principale est le suivant : « Il vaut mieux #Parcoursup que rien du tout ». Rien du tout étant « une foire d’empoigne ». D’après l’auteur, avant la mise en place de cette plateforme, seuls les « premiers arrivés et les pistonnés avaient une chance ».

Ce n’est pas exact. Avant 2018, c’était déjà un système d’affectation en ligne (Admission Post Bac ou APB) qui permettait aux bacheliers de s’inscrire à l’université. Pas de files d’attente pour espérer une place, ni de « premier arrivé premier servi ».

L’auteur de ce plaidoyer pro-Parcoursup oppose ensuite « le travail de milliers d’universitaires qui, dans les filières sous-tension ou sélectives, examinent et choisissent les étudiants, là où un absurde tirage au sort était parfois effectué dans le système APB ».

Trois gros problèmes dans une seule phrase. Le premier, c’est que justement, avant Parcoursup, la sélection n’existait que pour certaines filières (les BTS, les IUT, les prépa). Désormais, cette logique de classement a été étendue à 100% des formations du supérieur.

Le deuxième, c’est que la généralisation de la sélection sur dossier entraîne forcément des choix arbitraires. Comment classer TOU.TE.S les élèves de France, sans possibilité d’ex aequo, sur la seule foi de leurs notes de lycée ?

Je suis enseignant dans le secondaire, et je connais de membres de commission d’examen des dossiers dans le supérieur. Et tous les discours s’accordent sur un point : les critères retenus dans les classements ne reflètent que très imparfaitement le niveau réel des élèves.

On ne sait pas faire la différence entre une élève qui à 13 de moyenne en spécialité SVT à Maubeuge et un autre qui a la même moyenne à Nantes. Alors on prend des critères « faute de mieux » (le lycée d’origine, la note en math de 1ère …) parce qu’il faut bien choisir.

Mais le classement fait foi, et on trouvera toujours des personnes pour considérer que si cet élève est 1500ème dans le classement, c’est qu’il doit être moins bon que ça voisine qui est 1400ème. Avec la culpabilisation qui va avec. La preuve dans cet édito.

Le troisième problème relève plutôt de la mauvaise foi, en opposant ce « travail de sélection » à « l’absurde tirage au sort ». Il faut le répéter : le tirage au sort, qui est en effet scandaleux, n’avait concerné en 2017 que… 700 élèves d'après la Cour des Comptes.

Les autres étaient affecté.e.s en fonction de leurs vœux et de leurs préférences d’orientation. Le problème du tirage au sort aurait dû conduire à augmenter le nombre de place, pas à généraliser le système de loterie à 100% des filières.

Mais peu importe nous dit l’auteur. De toute façon, la sélection est « inévitable. « Qui peut soutenir que n’importe quel cursus convient à n’importe quel lycéen ? » écrit-il. Là on arrive au cœur du problème.

Car personne ne dit que n’importe quel cursus convient à n’importe qui. Par contre, nous sommes nombr.euses.eux à dire que ce sont aux élèves eux-mêmes de décider de la formation qui est la meilleure pour eux. C'est très différent.

Au fond le discours défendu ici, et c’est celui d’E. Macron, est que laisser les bacheli.ères.ers s’inscrire là où ils.elles pensent être le mieux formé.e.s, est forcément une mauvaise idée. Que cela va forcément conduire à l’échec.

Plutôt que d'ouvrir des places supplémentaires et renforcer l'accompagnement, on préfère évincer, renoncer à former et, par dessus le marché, culpabiliser les élèves en leur disant qu'ils.elles ne sont pas assez performant.e.s

C’est assez terrifiant quand on y pense sur le manque de remise en cause, d’ambition et de confiance de notre système d’enseignement. Alors que l’on peut retourner la question : « Qui peut soutenir que l’État sait mieux que les jeunes ce qui est bon pour eux ? »

C’est même pire que ça. Avec Parcoursup, l’État laisse le choix mais « dans la limite des places disponibles ». Si tu es bien classé.e, tu peux choisir. Mais si tu es mal classé.e on choisir pour toi.

Je ne sais pas quelle expérience de Parcoursup cet éditorialiste a eu, pour dire que ce n’est pas « la machine à broyer » qui est décrite par les lycéen.ne.s eux-mêmes et leurs familles. Et j'ai une pensée pour celles et ceux qui sont encore en attente.

Mais il est évident que tant que l’on considèrera les élèves comme des irresponsables indignes de confiance, il ne faudra pas s’étonner que tant de jeunes se sentent oublié.e.s et incompris.es par ceux qui décident à leur place.

Alors oui il faut supprimer #Parcoursup d’urgence. Et, dans le même temps, ouvrir suffisamment de places dans le supérieur pour former les politistes, assistant.e.s soci.ales.aux, technicien.ne.s, profs…. Fin.