Un article qui parle de l'impact - trop souvent oublié - des chats sur les oiseaux, c'est bien, non ? Sauf que c'est pour les comparer à l'impact des éoliennes, et que c'est assez gonflé. Le "Vert du faux", vraiment ? 🙄 1/n
"1340 fois plus d'oiseaux tués par les chats", voilà une comparaison qui n'a ni queue ni tête. Déjà, de quels oiseaux parle t'on ? Pour les éoliennes, surtout de rapaces et de laridés (mouettes/goélansds). Pour les chats, des passereaux "classiques" des jardins 🐦 2/n
Le Verdier (un passereau fortement prédaté dans l'étude 🇫🇷🇧🇪), c'est 1,5 millions de couples nicheurs. Le Milan Royal, 3000 couples. Vous voyez où je veux en venir ? Peut-on réellement trouver que cette comparaison tient la route... ? 3/n
Il va falloir revenir sur un peu de théorie écologique. Une éolienne tue un oiseau. Cet oiseau mort, c'est une chance de reproduction en moins pour un mâle ou une femelle. Sans intervention humaine, c'est qui se passe avec des prédateurs : leur pop fluctue avec celle de proie 4/n
Une éolienne, ça ne se régule pas comme un prédateur - c'est un facteur constant. Le risque, c'est ce qu'on appelle un "goulet d'étranglement", à savoir qu'à la suite d'une mortalité inhabituelle la population d'une espèce ait du mal à se reconstituer à un endroit donné 5/n
Vous allez me dire : vu les chiffres de mortalité d'oiseaux par les éoliennes qui sont assez faibles (56 000 en France selon l'article), c'est un risque exagéré. Sauf qu'une étude 🇳🇱de 2020, passée assez inaperçue, montre justement que cette mortalité est sous-évaluée 6/n
Ce que cette étude montre, c'est qu'une augmentation de 1 % de la mortalité pour l'étourneau par exemple, à la suite de collisions avec des éoliennes, c'est 10 % à 24 % de déclin supplémentaire de la population sur 10 ans. Un chiffre tout sauf négligeable. 7/n
Pour les espèces communes, une mortalité de 5 % due à un parc éolien est couramment considérée comme ayant un "effet négligeable" sur la dynamique des populations. Sauf que selon cette étude, 5 % de mortalité en plus, c'est 9-77 % de déclin en plus sur 10 ans. Négligeable ? 8/n
Même les espèces "communes" à haut potentiel reproductif comme l'étourneau sont vulnérables à une augmentation de la mortalité. Ces espèces ont déjà un haut taux de mortalité, qui se retrouve amplifié 9/n
Mais revenons-en aux chats. Etonnant que l'article mentionne les centres de soins (8-10% d'animaux recueillis blessés par des chats, donc 84% d'oiseaux) et les données LPO...mais pas ce papier scientifique de 2019 basé sur des données de baguage 🤔🐦 10/n chat-biodiversite.fr/sites/default/…
Si la prédation par les chats 🐈⬛ est une des 3 causes principales de mortalité chez les oiseaux des jardins et qu'elle a augmenté, elle est en fait du même ordre de grandeur...que les collisions avec des vitres ! 11/n
La prédation par les chats est importante sur les espèces d'oiseaux qui se nourrissent au sol (certains chats domestiques sont quand même de piètres grimpeurs) : moineau, verdier, merle, rougegorge... et d'autres animaux (66 % de mammifères dans cette étude participative) 12/n
Ces espèces de jardin sont aussi menacées. Le verdier, par exemple, a perdu 51 % de ses effectifs en 18 ans. Un passereau "commun" qui l'est de moins en moins. Destruction des habitats, pratiques agricoles, maladies...quel est l'impact réel des chats ? Difficile à dire. 13/n
L'article fait dans les raccourcis grossiers aussi, puisque sur les 15 millions de chats en France, 4 millions vivent en appartement, avec peu de chances de voir autre chose qu'une perruche domestique ! 14/n
Bref. On a donc un gros titre qui compare un chiffre potentiellement sous-évalué, la mortalité due aux éoliennes (quid de l'impact long terme sur les effectifs) et un chiffre de prédation par les chats à la précision scientifique très relative. Le journalisme, what else ? 🫣14/n
Tout n'est pas faux, bien sûr : l'article cite justement des moyens de réduire la prédation par les chats, certains tous simples et qui devraient être généralisés, comme le fait de leur faire porter une clochette. 🔔 Pour les éoliennes, par contre, c'est plus compliqué... 15/n
Si le fait d'installer les éoliennes à "bonne distance d’espaces à fort enjeu pour la biodiversité" est effectivement considéré dans les études d'impact, la science (encore elle...) montre que cette distance est potentiellement sous-estimée. 16/n besjournals.onlinelibrary.wiley.com/doi/full/10.11…
Ca se passe dans le sud de l'Espagne, avec des relevés GPS de milans noirs (migrateurs). Les zones situées jusqu'à 674m des éoliennes sont moins utilisées, malgré leur potentiel en tant que couloir migratoire. Le résultat ? Une perte d'habitat (les zones marquées). Pas joli. 17/n
C'est d'ailleurs un point cité dans l'étude 🇳🇱 que j'ai mentionné : le fait que sur un trajet de migration, un oiseau peut rencontrer des dizaines de parcs éoliens, décuplant le potentiel de perturbation/mortalité...mais ça n'est pas pris en compte dans les études d'impact ! 18/n
Dernier point, abondamment rapporté dans les médias : peindre une pale en noir "diminuerait de 70% la mortalité des oiseaux" - encore une fois, un raccourci monumental, en sachant que l'étude a été menée sur...4 éoliennes. (Une plus large a commencé aux 🇳🇱) 19/n
Comme avec toutes les solutions technologiques, la part d'inconnu pour ce qui est de l'impact sur la biodiversité est encore immense : moins de rapaces, c'est peut-être plus de rongeurs à devoir gérer en agriculture... La transition, oui mais à quel prix ? 20/n
🦔🦡 Hérisson et blaireau : un couple pas si heureux ? Puisque je vois passer cet extrait de l'évaluation IUCN du hérisson, je reviens sur un point qu'on évoque peu en France, mais qui cause des débats passionnels au Royaume-Uni : le lien entre ↗️ des blaireaux et ↘️ hérissons ⬇️
L'évaluation du 🦔 nous dit que par endroits, le déclin du hérisson est associé au blaireau, sans qu'on aie identifié les mécanismes sous-jacents : prédation directe, exclusion territoriale (d'apparence mignonne, le blaireau peut se montrer féroce) ou compétition alimentaire ⬇️
La situation au 🇬🇧: le hérisson a décliné d'à peu près 8%/an sur les 20 dernières années, malgré des augmentations locales. Le blaireau aurait lui augmenté de 88% entre 1985-88 et 2011-2013. Les deux espèces partagent des habitats semblables et des ressources alimentaires 🪱⬇️
Mais reprenons du début : la liste rouge de l'IUCN, créée en 1964 consiste à évaluer le risque d'extinction d'une espèce dans une zone définie (monde>pays>région) et à la classer en utilisant une série de critères (taille de population, aire de distribution, déclin connu etc) 2/n
Le besoin de listes à plus petite échelle s'est ensuite fait sentir, notamment pour mettre en oeuvre des politiques de conservation nationales ou régionales. Un groupe de travail de la Commission de sauvegarde des espèces de l’UICN a publié un guide spécial d'évaluation 3/n
"La biodiversité ne s'effondre pas en Europe". Ce titre du Point vous aura, au choix, hérissé le poil, fait sourire ou acquiescer. Un discours à contre-courant, mais avec quels fondements? Je tente de le mettre en perspective avec mon oeil d'écologue et un peu de science 👇🏻 1/n
Je n'ai rien de personnel contre l'interviewé. J'ai découvert le think-tank Action écologie il y a 2 ans suite à la publication du rapport "BIODIVERSITÉ : FAUT-IL VRAIMENT PANIQUER ? lorsque tant d’espèces se portent mieux…" alors moins médiatisé 2/n
L'auteur mentionne l'indice Planète vivante (LPI) et le chiffre 2024 de -73% (déclin des vertébrés depuis 1970). Il évoque ensuite le "LPI tempéré", un indice spécifique à ces régions qui n'apparait plus dans les publis du WWF : "s'agirait-il de taire les bonnes nouvelles ?" 3/n
Comme vous êtes plusieurs à me l'avoir demandé, voilà un 🧵récap de quelques-uns de mes fils sur différents sujets : 🚜agriculture, 🏙️ville, ⛈️climat, ☢️énergie, 🎩politique, 📰médias, 🌿nature, 🦋espèces...évidemment non exhaustif 👇
1) AGRICULTURE 🚜👩🌾
Agriculture ou environnement ?
Du lait de Nouvelle-Zélande ?
Les haies, 1977-2022
Messicoles
Complexité des paysages
Regardez, c'est encore la faute des bobos écolos ! Ah, si seulement les penseurs de ce monde apprenaient à lire des papiers scientifiques et pas le premier journal étranger venu...la désinformation ne vaut pas plus que l'idéalisme👇
2) Non, les sites d'agriculture urbaine ne permettent pas de nourrir les villes, il faut faire preuve de réalisme. Mais sachant qu'1 enfant sur 3 ne reconnait pas une courgette, dire que ce sont des trucs de bobos écolos c'est aussi nier tout leur rôle social et d'éducation...
3) Bref, ça n'est pas important, revenons au "désastre écologique". L'étude a pris 73 sites en France, Allemagne, Pologne, UK et USA de 3 types: fermes urbaines pros, jardins privés, jardins communautaires, calculé l'empreinte CO2/NPK synthétique et comparé avec le conventionnel
Agriculture contre environnement, un choix cornélien ? D'un côté, des agriculteurs qui dénoncent des normes trop contraignantes, coûteuses, créant un désavantage compétitif. De l'autre, des environnementalistes qui voient ces normes comme indispensables, et même insuffisantes 1/
Du point de vue des agriculteurs, comment accepter une perte de revenu liée à des mesures environnementales (directe ou indirecte avec une augmentation des risques), non compensée par une ↗️ des prix ou des subventions ? 2/n
Si l'on parle beaucoup des normes en elle-même, il est évident que leur application pose aussi problème. L'administration française et sa paperasse n'y est pas pour rien : le processus de déclaration PAC est d'ailleurs par ex plus simple dans d'autres pays européens. 3/