Fil consacré au débat Justine Triet / @RimaAbdulMalak en 3 points : 1/ Le Festival de Cannes : origines, happenings ; 2/ Le financement du cinéma français : des accords Blum-Byrnes (1946) au financement par les chaines de télévision ; 3/ Les inquiétudes contemporaines.
1/ Jean Zay, ministre de l'Education nationale et des Beaux-arts de 1936 à 1939, devait inaugurer la 1ère édition du festival de Cannes en septembre 1939 né de la volonté de trouver une alternative àla Mostra de Venise. Il n'en fût rien. film-documentaire.fr/4DACTION/w_fic…
Du Front Populaire aux paillettes, la transition parait brutale. Bien trop. En mai 68, le fond de l'air était rouge et le festival de Cannes n'échappa pas au contexte : francetvinfo.fr/culture/cinema…
Le festival de Cannes, incarnation de la politique culturelle française, de son "soft power" dirait-on aujourd'hui, n'a pas connu, loin s'en faut un long fleuve tranquille.
Lors de sa 1ère édition en 1946, les accords Blum-Byrnes viennent d'être signés et l'inquiétude grandit chez les cinéastes français. Les films américains à nouveau autorisés en France contre une aide américaine - la France est à reconstruire et le Plan Marshall n'existe pas
encore - sous forme d'emprunts consentis à taux minorés. Il faut donc financer la production cinématographique nationale et c'est à cet effet qu'est créé la même année le CNC - Centre national de la Cinématographie
2/ On a peine aujourd'hui à bien saisir l'intense effort collectif qui permit la Reconstruction de la France. Il faudrait lire Georgette Elgey pour rendre justice à la mal-aimée IVe République mais il s'agit ici d'évoquer "la Grande Peur" du cinéma français : les films américains
Le CNC "bénéficie de pouvoirs considérables : organisation de la profession, vérification des recettes, administratif de la censure et surtout gestion de la loi d'aide au cinéma instituée en 1948" (Goetschel, Loyer, "Histoire culturelle de la France...., A. Colin, 2002, p.155).
Au régime d'aide temporaire instauré par la loi de 1948, au financement d'institutions privées comme l'IDHEC et la Cinémathèque, le législateur ajoute, dans la foulée de la création du ministère des Affaires culturelles, le mécanisme de l'avance sur recettes,
géré par le CNC, lui-même rattaché au nouveau ministère afin d'aider les premiers films. Ainsi mis en place, le financement du cinéma français est assuré de manière à... limiter le financement par des aides publiques.
La loi de 1948 a institué une taxe spéciale sur les places de cinéma - environ 10 % du prix d'entrée - et depuis 1984 et la création de Canal +, la première chaîne de télévision privée en France, les chaines de télévision ont l'obligation de consacrer une part de leur chiffre
d'affaires au financement d'œuvres cinématographiques européennes - 3 % du CA - dont 2,5 % pour des œuvres cinématographiques françaises. Depuis 1985, moyennant déduction fiscale, particuliers et entreprises peuvent investir dans des SOFICA -
Sociétés de financement du cinéma et de l'audiovisuel - . Les autres sources de financement sont les distributeurs, les producteurs, les régions...
Pour un tableau synthétique, on peut lire un rapport sénatorial de 2003 consacré aux aides publiques au cinéma en France
De cette trop longue partie, que retenir ?
- le ministre de la Culture est garant du bon fonctionnement du CNC qui distribue des aides gérées par lui-même sur fonds privés ;
- les aides publiques au cinéma restent minoritaires mais l'Etat joue un rôle administratif-clé ;
- ces aides sont vitales pour des premiers films et/ou des films indépendants ;
- le terme d'exception culturelle française se comprend comme des mécanismes protégeant juridiquement et financièrement les industries culturelles nationales contre une
complète américanisation de la culture ou une culture uniquement dévolue à l'aspect commercial.
Pourquoi donc le débat entre la cinéaste française remportant la plus prestigieuse récompense au Festival de Cannes et la ministre de la Culture interroge-t-il le financement du cinéma en France ?
3/ La fulgurante progression des plate-formes de vidéo à la demande comme Netflix ou Amazon Prime et le Covid ont entraîné une baisse de la fréquentation des salles de cinéma en France, les données du mois d'avril dernier annonçant néanmoins un rebond. cnc.fr/professionnels…
Justine Triet n'est pas la seule à mettre en cause la politique culturelle cinématographique du double quinquennat. En effet, la nomination de Dominique Boutonnat, ancien producteur de cinéma, fondateur d'une une SOFICA, à la tête du CNC - aujourd'hui appelé
Centre national du cinéma et de l’image animée - interroge dès son premier mandat quant à la nature des projets qu'il entend mener à bien et à sa reconductible pour des faits allégués d'agression sexuelle. Le président de la République nomme sur proposition de la ministre de la
Culture le président du CNC. Proche d'Emmanuel Macron, Dominique Boutonnat a rédigé un "Rapport sur le financement privé de la production et de la distribution cinématographiques et audiovisuelles". cnc.fr/professionnels…
Comment ne pas mettre en rapport "Tout l’écosystème du cinéma et de la production audiovisuelle doit opérer sa mutation dans un délai de 3 à 5 ans de sorte à créer les conditions de marché capables d’intéresser des financiers privés" et "Une des plus significatives consiste à
vouloir soumettre le fonctionnement des aides sélectives à une approche fondée sur les performances économiques. Cela se traduit notamment par le choix des personnes nommées à la tête des commissions qui examinent les projets et attribuent ces aides. " ?
Du côté des producteurs-distributeurs - donc financeurs majeurs du cinéma français - comme Jérôme Seydoux, président du groupe Pathé, le constat est sévère pour d'autres raisons : radiofrance.fr/franceinter/po…
La critique de Justine Triet qui a tant déplu @RimaAbdulMalak n'est ni isolée ni purement circonstancielle. Aussi la réfutation en illégitimité de @jeromegodefroy se révèle-t-elle très personnelle lorsqu'il évoque le financement d'"Anatomie d'une chute".
A l'heure où la suppression de la redevance audiovisuelle fragilise l'audiovisuel public, où les exécutifs régionaux sont maîtres d'accorder ou nom des subventions, où le président du CNC met l'accent sur "la rentabilité des actifs", se met à jour une inversion des normes issues
du système de financement du cinéma français mis en place à partir de 1946, sa viabilité économique ayant des sous-jacents ambitieux etv s'appuyant à l'origine sur un financement en partie interne, une régulation administrative et des garantissant la vitalité d'un cinéma
@pierrelescure et aussi appelle les remarques suivantes :
- 1/ Roger Karoutchi rappelle que le CNC joue un rôle essentiel dans le financement du cinéma français et son budget est abondé par la collecte par l’Etat de 4 taxes reversées car lui appartenant (il ne s’agit pas d’argent public) ;
- 2/ la suppression de la redevance audiovisuelle l’an dernier fragilise par rejeu le financement du cinéma auquel sont tenus par voie légale les chaînes de télévision et ce, depuis la création de Canal + en 1985 ;
- 3/ les emprunts garantis par l’Etat sont remboursables (par ailleurs, au 1er janvier 2023, l’encours des prêts garantis par l’Etat était de 98 milliards d’euros au 1er janvier 2023 ;
- 4/ c’est grâce aux politiques d’émission monétaire massive des banques centrales ayant maintenu les taux d’intérêt très bas et à cause des fermetures liées au Covid que le soutien ponctuel de l’Etat à la filière s’est accru ;
- 5/ ans un retour à une situation plus pérenne, le financement de la filière est conçu pour être assuré en grande partie interne - et qu’il le soit à 69 % dans une période post-Covid le prouve - ;
6/ le cadre législatif concernant la filière du cinéma découle de la reconnaissance par les pouvoirs publics de missions de service public assurées notamment par la commission de classification des œuvres du CNC.
Trois dates-clés :
- 17 février : en 1ère lecture, l'Assemblée n'a pu délibérer sur l'article 7 ;
- 16 mars : utilisation du 49.3 par le gouvernement ;
- 2 mai : l'Intersyndicale décide d'une nouvelle journée le 6 juin.
il y aurait à fortement nuancer le terme "d'imperdable" sinon l'appréciation de l'ampleur du mouvement. Oui, de nombreuses journées de manifestations ont dépassé pour la France le million et bien au-delà. Oui, la grève a été bien suivie dans quelques secteurs comme l'énergie
Fil. Le dernier billet de Frédéric Lordon mérite une lecture attentive et aussi dépassionnée que possible. 1/
« Quand elle se penche sur les forces de gauche, la presse bourgeoise n’a d’yeux et de sentiment que pour celles qui sont de droite ou pour celles qui sont perdantes. » sonne comme la phrase la plus juste. 2/
Caustique et ravageur, Frédéric Lordon se laisse quelquefois déborder par son élan. On peut notamment lui objecter qu’un conflit imperdable trouvé dans son déroulement les vecteurs de son succès. 3/
Le propos s'ordonne autour de trois thématiques ; un rappel de ce qu'était "Apostrophes" au moment où Annie Ernaux y est invitée pour la 1ère fois ; le regard porté par Annie Ernaux sur cette "démocratie du gros
oeil" qu'"Apostrophes" représente selon son producteur Bernard Pivot ; l'aire culturelle française habile à promouvoir entre autres ses chefs de file du champ littéraire.