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Jun 4 27 tweets 8 min read Twitter logo Read on Twitter
Ce qui m'amène à une réflexion sur la pertinence de la représentation de la guerre dans #LOTR par rapport à des réflexions d'ordre doctrinales, stratégiques ou opératives réelles.
J'ai écrit plus haut qu'il n'y avait aucune leçon à tirer de #LOTR
quant à conduire des opérations.
Ce n'est pas tout à fait vrai.
On ne peut analyser la Guerre de l'Anneau à l'aune de tactiques antiques ou médiévales, pas plus que l'on ne peut la réduire à une allégorie de la Grande Guerre.
Ce que Tolkien décrit, c'est la matrice d'une nouvelle ère.
Et cette matrice est un affrontement symbolique entre l'imaginaire romantique dont il s'est nourri, et qui est lui-même inspiré de mythes du haut moyen-âge (Beowulf, légendes galloises) et du moyen-âge classique (matière de Bretagne, Eddas, chanson des Nibelungen), et…
la réalité d'une guerre industrielle, brutalisante (Mosse, Dubois etc.), et sans imagination.
Sauron est tous les généraux de la 1ère Guerre Mondiale, sans imagination, méthodique, ne comptant que sur sa supériorité numérique et matérielle pour l'emporter à terme.
*ou à l'image de leur représentation à l'issue de la guerre, surtout chez les soldats et officiers subalternes
Lorsque Tolkien fait de l'Anneau une opération spéciale au cœur du dispositif ennemi avec un objectif stratégique à très haute valeur ajoutée, il s'inscrit bel et bien dans un Zeitgeist.
Ce sont ses compatriotes et contemporains qui, au même moment, définissent ces opérations.
Pourtant, Tolkien ne fréquente pas les cercles militaires, il est professeur de littérature et de langues anciennes à l'université. Il n'a que faire des évolutions (doctrinales, techniques, structurelles) contemporaines de la chose militaire.
Alors pourquoi cette coïncidence ? Image
Ce n'en est pas une.
C'est une convergence.
Tolkien est issu du même univers de représentation, du même système éducatif, et est passé par la même expérience traumatisante des tranchées des Flandres que les hommes qui vont décider de recourir aux opérations spéciales.
C'est dans la littérature romantique nord-américaine, de Fenimore Cooper et alii, que #Tolkienpuise son inspiration pour la "petite guerre" des Galadhrim ou des Rangers de l'Ithilien.
Un imaginaire qui irrigue encore Danse avec les loups, Avatar, ou le Dernier Samurai.
Qui plus est, Tolkien grandit et vit dans un empire colonial qui affronte et soumet des rébellions.
Or il est lui-même anti-colonialiste et aurait tendance à prendre fait et cause pour les luttes désespérées des peuples attachés à leur liberté et à leur identité.
Mais c'est de ce même contexte colonial, de ce même univers de représentation, que naît, dans la tête de gens qui ont eu un parcours très similaire au sien, l'idée d'employer des petites unités discrètes pour frapper sur les arrières de l'ennemi. ImageImage
Évidemment, le fondement théorique de cette stratégie vient d'un autre universitaire excentrique qui, comme par hasard, avait gardé sur lui son exemplaire de Le morte d'Arthur de Malory et qui avait écrit sa propre geste romantique.
Au moment où la supériorité de l'Axe en matériel, en hommes, donne l'impression d'un rouleau compresseur inarrêtable (après Dunkerque, mais aussi la Grèce), les favoris de Churchill trouvent les mêmes solutions qu'un Tolkien confronté à sa propre description des forces de Sauron.
Et c'est là qu'il y a une leçon à tirer.
Car Sauron commet une négligence, et une erreur.
La négligence consiste à ne compter justement que sur des opérations méthodiques, reposant sur sa supériorité de moyens matériels et de combattants. Il procède par phases distinctes.
Progresse en tache d'huile, dispose de réserves nombreuses. À vrai dire, il est certain de gagner, malgré l'absence de l'Anneau, ou l'occasion manquée de s'allier à Smaug. Pourtant, son approche entièrement conventionnelle des opérations lui fait négliger certaines options.
Prenons Minas Tirith.
Sauron l'assiège, avec des tranchées et contre-fortifications - bref, fait les choses dans les règles de l'art.
À aucun moment, il n'envisage d'envoyer des troupes à revers, par le Mont Mindolluin, dépourvu de fortifications.
Or, il dispose, avec les Orcs des Monts Brumeux, de troupes de génie spécialisé dans le milieu montagneux...
À travers Sauron, ce que Tolkien critique, c'est une approche purement arithmétique de la guerre dans laquelle la victoire repose sur un rapport de force écrasant.
À l'inverse, Gandalf est contraint, par ce rapport de force défavorable, de trouver des solutions stratégiques et opérationnelles créatives.
Et là, Sauron commet une erreur, fatale en fin de compte.
Il envisage les réactions de son ennemi à l'aune de sa propre rationalité.
D'une part, à aucun moment, Sauron n'imagine que les 'Peuples Libres', se résoudront à se débarrasser de l'Anneau Unique. Il calque sa propre soif de pouvoir sur eux, et compte notamment sur la 'tentation' qu'exerce l'Anneau. Il en néglige du coup, et la garde d'Orodruin…
... et la prise en compte des Hobbits, de leur résilience face au pouvoir de l'Anneau, et de leur aptitude naturelle à l'infiltration.
S'il avait fait 1+1 font 2, il aurait compris les desseins fous de Gandalf.
Qui ne sont pas si fous.
Parce que d'autre part, Sauron ne comprend pas qu'avec ses démonstrations de force, il accule son ennemi à des prises de mesures radicales.
En étalant sa supériorité matérielle, il annonce qu'il gagnera conventionnellement dans le moyen/long terme quoi qu'il arrive.
Et il convainc ses ennemis (exception faite de Sarúman et Denethor).
Sauf que, au lieu de les gagner ou de les neutraliser, il leur force la main quant à prendre des risques.
Il ne leur laisse qu'une alternative à une défaite certaine après une défense prolongée :
La seule stratégie comportant une probabilité ridiculement faible de réussite, la destruction de l'Anneau Unique au Mont du Destin, sur le perron de Sauron lui-même.
Et ça, Sauron ne le conçoit pas...
Il échoue complètement à comprendre que le désir de liberté de ses ennemis font qu'ils préfèrent envisager une mission suicide, foutu pour foutu, à se résoudre à une lente agonie à l'issue certaine.
Sauron pense les réactions de ses ennemis qu'à travers le prisme de ses valeurs.
Il est ambitieux, avide de pouvoir, lâche, égoïste, il applique ses propres caractéristiques à ses ennemis.
Toute ressemblance avec un dictateur qui a récemment fait les mêmes erreurs est fortuite.
Ah et je retweete le thread originel pour ceux qui n'ont pas suivi et/ou pour les nouveaux abonnés.

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Jun 3
J'ai donc profité de cette marche pour rattraper mon retard dans les épisodes du Collimateur.
J'avais écouté Amélie Zima la veille à propos de la Pologne, j'ai donc écouté le Dans le viseur sur Tombouctou, puis le podcast sur l'Europe face aux limites des capacités US.
Mais c'est sur le Dans le viseur que je veux réagir. Je sais gré à @alexjubelin d'avoir rappelé que Camerone fut le fait de trésoriers et fourriers. Et cela me conduit à insister sur deux points.
Le premier, en tant que sous-officier dans une arme d'appui.
La nécessité de bien enseigner, et de "driller", vos soldats aux bases du combat d'infanterie. Que ce soit dans un contexte de contre insurrection où la notion de "front" n'existe pas et où les zones de contact avec l'ennemi sont en peu de léopard...
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Jun 2
Swale banks, Richmond, Easby Abbey and Hudswell. Image
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Jun 1
"Roberts-Smith is Australia’s most decorated living soldier and the recipient of the Victoria Cross [...]was also named Father of the Year and served as chair of the government’s Australia Day Council" yet behaved like a Sinaloa cartel gangster.

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"Roberts-Smith[...] manhandled the disabled man outside the walls of the compound where he threw him to the ground and fired his para machine gun into his prone body, killing him.

The disabled man’s leg was later[...] used by Australian SAS troops as a[...] drinking vessel"
This is what warrior culture leads to.
No accountability, tribal mentality, "us versus them" towards the chain of command and wider society, leading to a perversion of core values and standards such as integrity, respect for others and lawfulness. Image
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