Comment assassiner sa mère ? En 59, Néron ordonne l’exécution de sa maman, la redoutable Agrippine. Un plan complexe est mis en place pour l’éliminer discrètement et faire passer ça pour un accident. Mais tout ne se passe pas comme prévu… 👇🧶
Dans ce thread, je vais expliquer pourquoi et surtout comment Néron a tué sa mère. Une décision lourde de conséquences, le matricide étant l’un des actes les plus grave aux yeux des romains. Bien entendu, je vais aller droit au but, on est sur Twitter.
Je sais qu’à ce moment-là, vous pensez à votre chère môman et vous vous dites « mais comment on peut-on en arriver là ? ». Posons les bases tout de suite, Agrippine n’est pas exactement la mère modèle. Néron n’a tout simplement pas eu le choix.
Attention, la plupart des sources antiques sur cette histoire sont… disons orientées (Sénèque, Tacite, Suétone). Agrippine n’a pas la meilleur des réputations. Il faut donc prendre tout ça avec des pincettes. C’est parti !
Comme dans toute affaire de meurtre, il faut d’abord brosser le portrait de la victime. Une femme aux ambitions démesurées qui a utilisé tous les moyens à sa disposition pour arriver au sommet. Une nécessité dans un monde d’hommes tel que l’était la Rome Antique.
Julia Agrippina, ou Agrippine la jeune, naît en 15. Elle fait partie de la famille impériale. Fille de Germanicus, l’un des plus grands généraux romains du Ier siècle, elle est aussi la sœur d’un certain Caligula.
De sa première union avec Cnaeus Domitius Ahenobarbus naît un petit Néron (oui, CE Néron). Après la mort de son mari, elle épouse le richissime Passienus, qui décédera dans des circonstances étranges au bout de quelques années…
A-t-il été empoisonné par sa femme ? Agrippine a-t-elle ajouté un peu de sauce de mort dans son plat préféré ? Impossible de savoir. En tout cas, ce décès suspect contribue à sa réputation de veuve noire.
Coup de « bol », c’est à ce moment que Claude fait assassiner sa femme Messaline (48). L’empereur cherche une nouvelle épouse et son choix se porte sur Agrippine. Il faut dire qu’elle fait partie de la famille impériale, donc bon parti.
Mais il y a un souci. Un gros souci. Claude est l’oncle d’Agrippine (il est le frère de Germanicus) et l’inceste… ça ne passe pas trop à Rome. Ni une ni deux, on fait passer une loi autorisant le mariage entre oncle et nièce.
Maintenant Impératrice, Agrippine est au sommet, mais ça ne lui suffit pas. Elle cherche à placer son fils Néron en tant que successeur de Claude, qui finit par l’adopter. Le jeune homme épouse même Octavie, la fille de l’empereur.
Oui, on est totalement sur un arbre généalogique en forme de cercle. Mais l’important, c’est que le pouvoir reste dans la famille.
Pragmatique, intrigante, n’hésitant pas à éliminer ses rivaux si nécessaire, Agrippine arrive à ses fins à chaque fois. Si vous voulez une idée du personnage, sachez que Cersei de Game of Thrones est calquée sur elle.
En 54, Claude meurt après un banquet. Il s’est goinfré comme pas deux et a enquillé les verres de vin plus que de raison (une habitude, chez lui). Le lendemain matin, il est raide comme un cierge.
Les auteurs antiques accusent clairement Agrippine d’avoir empoisonné ses champignons, plat dont il raffole. Mais ça, c’est loin d’être prouvé. Claude a très bien pu mourir d’intoxication alimentaire, tout simplement.
L’empereur n’est plus et la succession s’engage en faveur de Néron. Reste un souci à régler : Britannicus, le fils de Claude et de Messaline. Comme le hasard fait bien les choses, il meurt quelques mois après son père...
Là encore, l’hypothèse du poison est évoquée par les auteurs antiques. Néron serait le responsable (poussé par Agrippine), mais il est plus probable que sa mort soit naturelle, le jeune homme étant peut-être épileptique.
Néron est maintenant seul au sommet de l’Etat, mais dans l’ombre, c’est Agrippine qui tire les ficelles. Ultra influente, elle fait le ménage à la cour, créant des alliances dans toutes les strates du pouvoir et isolant de plus en plus son fils.
Qui plus est, Néron n’a pas les épaules pour le poste, plus attiré par les arts et les sorties entre copains que par le pouvoir. Quand bien même, il commence à se sentir un peu étouffé par sa maman.
Les relations entre les deux sont tendues et se dégradent quand Claudia Acte et Poppée entrent dans le paysage. La première est une affranchie dont Néron tombe fou amoureux. Scandale, surtout qu’elle le met en garde contre sa mère !
Poppée, pour sa part, est une aristocrate qui a les faveurs de l’empereur (je ne fais pas un dessin). Il l’aime aussi, car il a un cœur gros comme ça, le Néron. Il veut répudier sa femme et l’épouser. Elle vient d’une bonne famille, donc il peut.
Cela rend fou de rage Agrippine, qui a toujours été de mèche avec Octavie, la femme de Néron. C’est une alliée de choix à la cour. Perdre Octavie, c’est perdre une influence considérable. C’est le point de rupture.
Il faut savoir que Néron n’est pas totalement sous l’emprise de maman. Il a tout de même des conseillers qui le mettent en garde. C’est le cas d’Anicetus, un affranchi proche de l’empereur qui ne peut pas piffrer Agrippine. On peut aussi citer Sénèque.
Après sa rencontre avec Poppée, tout dégénère rapidement et Néron doit prendre une décision radicale. Entre lui et sa mère, c’est la guerre froide. Cela fait trop longtemps qu’elle tire les ficelles. Elle a trop pris la confiance et ça le fragilise.
Agrippine est exilée de Rome sans ménagement, un camouflet pour elle. L’affaire aurait pu en rester là, mais un jour, Néron l’invite à un banquet de réconciliation. De quoi enfin enterrer la hache de guerre !
Nous sommes en mars 59. Elle se rend au banquet organisé dans la villa de l’empereur située au bord de la baie de Naples, à Misène. Les relations se réchauffent entre mère et fils et la soirée se passe merveilleusement bien.
A la fin de la fête, Néron accompagne sa maman à son bateau. Un bateau prêté par le fiston pour rentrer chez elle, de l’autre côté de la baie. La soirée a été bonne et a été l’occasion de faire table rase du passé. Agrippine ne se doute de rien. Erreur.
Ce qu’elle ne sait pas, c’est que tout ça, c’est un piège. Un piège savamment mis en place pour la tuer.
Néron sait qu’il doit se débarrasser de sa mère envahissante. Il n’a pas le choix. Mais le matricide est un crime odieux à Rome (comme chez nous, hein ?) et il doit la jouer fine…
Difficile de savoir ce qui se passe dans la tête du jeune homme lorsqu’il voit partir sa mère sur le bateau. Agrippine est une adversaire politique, mais c’est surtout sa maman. Ça n’a pas dû être facile, quoi qu’on en dise.
Alors que le navire vogue tranquillement dans la baie de Naples, une trappe piégée s’ouvre dans la coque. L’embarcation se disloque sous les pieds d’Agrippine ! Le crime est parfait, puisqu’il passe pour un accident.
Mais la vieille carne, ça meurt pas comme ça. Telle une Laure Manaudou antique, elle saute de l’épave et rejoint le rivage à la nage. Le plan a ÉCHOUÉ. C’est un échec critique pour l’empereur.
Lorsque Néron l’apprend, c’est la panique ! Plus le temps de niaiser, il faut mettre fin au problème, tant pis si c’est du travail de sagouin. La vieille doit crever, et vite !
Des soldats sont envoyés en catastrophe auprès d’Agrippine (qui s’est réfugiée dans sa villa) et l’achèvent salement à coup de glaive. Selon Tacite ses derniers mots ont été « frappe le ventre ! ». Le ventre qui a porté Néron.
Bien sûr, Tacite affabule un peu sur ce coup (il n’était pas là). Si vous voulez mon avis, les derniers mots d’Agrippine devaient plus être « nooon pitiééaeuuuuuaaaaaargh », mais moi non plus j’étais pas là, donc ça vaut ce que ça vaut.
Agrippine éliminée, tout est bien qui finit bien. Néron et Poppée se marient et vécurent heureux jusqu’à la fin de leurs jours…
C’est faux, évidemment. Le règne de Néron continuera à être marqué par les scandales jusqu’à la toute fin. Accusé de matricide, il n’a pas la faveur ni du Sénat ni du peuple. Ça n’ira pas en s’arrangeant.
Ses dernières années seront marquées par le grand incendie de Rome en 64, dont je parle dans ce thread.
Mais aussi par la mort de Poppée en 65 (on l’accusera de ce crime) et par ses tournées « artistiques » en Grèce. Son Principat se termine en 68. Alors isolé, désavoué par le Sénat et voyant Galba se proclamer empereur à sa place, il se suicide. Mais ça, c’est une autre histoire.
Voilà, j’espère que cette petite histoire vous a plu et son se dit à très bientôt pour de nouveaux threads histo !
• • •
Missing some Tweet in this thread? You can try to
force a refresh
Hadrien, l’un des plus grands empereurs de Rome. Mesuré, lettré, philosophe, passionné et parfois cruel, il a régné pendant l’apogée de l’Empire. Je vous raconte aujourd’hui son Principat, marqué par les voyages incessants et son amour immodéré pour la Grèce 👇🧶
Dans ce thread, je vais plus m’attarder sur son règne que sur sa vie dans sa globalité. Bien entendu, on est sur Twitter, donc je vais aller droit au but. La team Romains, soyez indulgent !
Avant de commencer, il faut savoir qu’Hadrien a été empereur de 117 à 138. Un principat de vingt ans pendant lequel il consolide les frontières de l’Empire et abandonne les conquêtes. Une politique audacieuse
La Domus Aurea a été l’un des palais les plus somptueux de la Rome Antique. Pourtant, ce joyau architectural n’a existé que quelques années avant d’être oublié. Je vais aujourd’hui vous raconter son histoire étonnante 🏛️
Plus qu’une construction fantasque, la Maison Dorée était une prouesse technique qui a marqué l’histoire de la Ville au fer rouge, et pas forcément pour les bonnes raisons. Elle devait être le trésor de l’empereur Néron. Au lieu de ça, elle a contribué à sa chute.
Dans ce thread, je vais faire simple et aller droit au but, on est sur Twitter. La Team Romain, soyez indulgent !
Quand un homme s’introduit dans une soirée réservée aux femmes pour séduire l’une d’elles, cela donne lieu à l’un des plus grands scandales de la République Romaine. Laissez-moi vous raconter l’affaire de la Bona Dea, qui a conduit César à répudier sa femme Pompeia 👇
Il s’agit d’une histoire assez loufoque rapportée par Plutarque et qui a fait grand bruit à l’époque. Un véritable micmac que je vais essayer de résumer de manière concise. Vous êtes prêts ?
Nous sommes en décembre -62, dans les dernières décennies de la république romaine. Cette dernière a déjà été secouée par de nombreux coups d’état et guerres civiles. Les institutions sont fragiles, mais tiennent encore.
L’argent n’a pas d’odeur ! Une expression qui nous vient de la Rome Antique et qui concerne… l’urine. Dans ce thread, nous allons nous pencher sur l’origine de cet adage et étudier la question des toilettes publiques dans la Ville 👇🚾
L’anecdote est connue et racontée par Suétone. L’empereur Vespasien souhaite imposer une taxe sur l’urine. Son fils, Titus, lui fait remarquer que ce n’est pas super propre. « Pecunia non olet », lui répond-t-il alors.
Ce qui est moins connu, c’est le contexte qui entoure cette histoire, donc la gestion de l’hygiène à Rome. C’est ce qui nous intéresse aujourd’hui.
Le film Les Deux Tours est sorti il y a exactement 20 ans en France, le 18 décembre 2002. Une œuvre démesurée qui a définitivement installé Le Seigneur des Anneaux et la fantasy dans le paysage. Les jeunes ont du mal à imaginer le raz-de-marée culturel que ça a été à l’époque 👇
Ce thread est évidemment la suite de celui de l’année dernière, fait à l’occasion des 20 ans de La Communauté de l’Anneau et qui -à ma grande surprise- avait été beaucoup partagé.
Je vais continuer à parler de mon expérience, d’une tranche de mon adolescence bercée par la saga. Ce sera donc un fil très personnel, mais j’espère que certains d’entre vous s’y retrouveront.
La Rome de l’Antiquité est, dans l’imaginaire collectif, le symbole de la cité grandiose, démesurée et pleine de merveilles. Toutefois, la réalité était tout autre. Rome, c’était avant tout une ville où la vie était difficile 👇
Que ce soit dans les tableaux ou dans les films, on voit Rome dépeinte comme une cité en marbre avec d’immenses avenues propres et des statues impeccables. Une vision très éloignée de la réalité.
Dans ce thread, je vais essayer de vous faire voyager dans la Ville et de vous montrer que tout n’y était pas rose, loin de là. La vie y était bien difficile, surtout si vous étiez pauvre.