Thread by @o_d_e_c

[Ostéopathie] [Dérives thérapeutiques et sectaires]

Bonjour à tous,

Je me présente, je suis ostéopathe depuis un an et je souhaite vous partager mon parcours et mon expérience.

A l'âge de 24 ans je rejoins un cursus d'ostéopathie, dans un moment de quête de mon avenir qui m'était plutôt incertain à cette époque. Je n'ai jamais consulté d'ostéopathe mais j'en avais de bons a priori, probablement comme une bonne partie de la population générale.

Surtout, je pensais que c'était scientifique, car jamais je n'aurai fait cela autrement, en l'occurrence si j'avais été correctement éclairé puisque j'ai toujours été exclusivement attiré par les sciences.

Je faisais difficilement la différence entre kinésithérapie et ostéopathie, certainement aussi comme la plupart des gens, il m'a alors semblé logique de tendre vers l'ostéopathie en constatant surtout l'évolution de nombreux kinésithérapeutes vers l'ostéopathie.

J'ai alors considéré l'ostéopathie comme une forme d'aboutissement de la kinésithérapie, je me suis orienté dans cette voie directement étant donné la facilité d'accès.

Cette naïveté aura été la plus grosse erreur de ma vie jusqu'à présent.

Je me souviens encore comment je me sentais en arrivant au sein de ce cursus, chanceux et privilégié mais aussi sous la pression de la réussite tant du point de vue intellectuel que financier étant donné l'investissement personnel et économique que ce parcours pouvait représenter

pour moi. Je n'avais pas le droit à l'erreur.

Dans un cadre aux allures médicales et des enseignements à venir des sciences fondamentales telles que l'anatomie, la physiologie, la biomécanique, la biochimie, la biophysique, la sémiologie et j'en passe, peuvent laisser penser à une discipline tout à fait rigoureuse du champs

de la santé. D'autant plus que certains enseignants sont de véritables professionnels de santé (certains cours sont dispensés par des médecins par exemple), à aucun moment il n'est possible ne serait-ce que d'imaginer un instant à une quelconque supercherie.

Pourtant, dés les premiers mois, des enseignants affirmaient avec aplomb qu'une mobilité des os du crâne existait, en précisant que "des médecins" n'y croyaient pas encore. Pourquoi m'aurait-on dit des choses fausses ?

A ce moment là, la question n'était même pas envisageable. Nous avions en face de nous des professionnels d'expérience, des thérapeutes, associés à l'ensemble des éléments évoqués précédemment,

n'importe quelle personne de nature sceptique aurait pu se laisser abuser par simple ignorance.

L'anatomie palpatoire est la première initiation au toucher, faisant suite à l'apprentissage de l'anatomie et la physiologie de la zone en question. Jusque là rien d'anormal, la première année est principalement consacrée aux sciences fondamentales.

Viennent également s'y mêler certains cours spécifiques à l'ostéopathie tel que le "concept ostéopathique" qui, concernant un aspect historique, est tout à fait passionnant au demeurant.

C'est la découverte totale et nous sommes généralement candides à explorer l'ensemble des connaissances qui nous sont proposées de façon tout à fait ouverte.

Au cours de la deuxième année viennent alors les enseignements de techniques qui regroupent principalement les mobilisations et manipulations articulaires, certaines techniques musculaires mais aussi des cours d'ostéopathie crânienne et viscérale.

Ces techniques sont souvent accolées à des concepts et modèles qui, dans la grande majorités des cas et sous couvert d'une pression constante de la connaissance parfaite de l'anatomie, sont totalement faux.

Mais encore une fois, il est presque impossible de le comprendre à ce moment là.

Tout cela dans la continuité des apprentissages en parallèle des sciences fondamentales et notamment l'initiation à la sémiologie des différentes sphères du corps humain, ce qui n'aide en rien à faire le tri dans l'ensemble des informations proposées.

A partir de la troisième année apparaissent davantage de cours plus particuliers comme la pratique des fascias par exemple.

Nous sommes invités de plus en plus à développer notre "ressenti", comme lors des cours d'ostéopathie crânienne où nous devrions percevoir le Mécanisme Respiratoire Primaire (mobilité rythmique hypothétique au niveau du crâne).

Avec le recul, ce genre de cours était totalement imprégné d'un contexte méditatif et suggestif, avec un enseignant qui nous guidait de longs moments sur ce que nous devions ressentir, comme le mouvement des os du crâne, accompagné par des mots-clefs tels que notre "présence",

notre "attention" et notre "intention", en étant "ancré" sur nos "fulcrums" (points d'appui). Les cours où nous sommes poussés à "ressentir" sont plus souvent guidés que d'autres cours de pratique en général.

Les questionnements et les incohérences s'accumulent au fil du temps ainsi que les biais de raisonnement qui sont proposés comme réponses aux interrogations.

J'ai tendance à me remettre en question moi-même avant tout étant donné que l'on nous répète fréquemment que nous deviendrons des professionnels de "LA" santé,

que nous "sentirons" probablement plus tard des choses que nous ne percevons pas encore et que nous devons restez ouverts afin de "garnir notre palette d'outils thérapeutiques".

C'est à cette période que je commence à m'initier à l'esprit critique par le visionnage des vidéos de la Tronche en Biais sur youtube à mes heures perdues.

Je décide de changer d'école entre la 3ème et la 4ème année car je m'inquiétais de la faible fréquentation de la clinique de la première école (nous commençons la pratique en clinique en 4ème année).

Entre temps, je reçois un diagnostic de trouble du spectre autistique sans déficience intellectuelle, diagnostic que j'ai plutôt mal reçu et qui n'aidera pas à la suite des événements.

Arrivé au sein de cette nouvelle école, c'est encore plus flou.

J'assiste à davantage de cours très particuliers, les enseignements, discours et conceptions ne sont pas tout à fait similaires en fonction des écoles, mais toujours sous couvert de pression sur la connaissances des sciences fondamentales.

On nous présente par exemple des techniques comme valides et efficaces, indiquées dans certaines affections bien spécifiques, sans preuve scientifique à l'appui évidemment.

C'est aussi le début de la pratique en clinique et j'ai l'impression que mon raisonnement clinique n'est pas au point, la théorie ne semble pas refléter la réalité mais encore une fois je me remets en question,

je sors de chaque clinique en affirmant de façon tout à fait assumée que je suis nul, malgré mes efforts pour ne pas l'être. Pourquoi m'aurait-on dit des choses fausses ?

Etant donné mes interrogations qui s'intensifient, je me demande aussi pourquoi l'ostéopathie est parfois qualifiée de charlatanisme puisque, malgré quelques doutes, j'avais tendance à penser jusque là que la discipline était sérieuse et étayée,

je décide donc de faire davantage MES PROPRES RECHERCHES () et j'approfondis ainsi mes connaissances en passant par le cours de Richard Monvoisin, le rapport de l'INSERM de 2012 sur l'ostéopathie, les rapports CORTECS, le site osteostop de Dr Parot...

A partir de ce moment là je commence à qualifier ouvertement certaines pratiques et conceptions de "mystiques" et je considère devoir aborder les choses selon un modèle biomécanique afin de respecter une approche plus pragmatique.

Je commence à me positionner en en parlant sur mon mur privé facebook à mes "amis" et il m'arrive d'intervenir au sein de discussions sur des forums ostéos où j'exprime parfois mes premiers désaccords.

Quelques temps plus tard j'apprends que des captures d'écran de mes propos ont été faites et ont été transmises entre étudiants et enseignants de l'établissement et je deviens ainsi un sujet de discussion.

J'ai très mal vécu ces événements, j'ai été stigmatisé pour mes opinions et mes prises de position et j'ai commencé à affronter des difficultés face à des enseignants qui semblaient chercher à me challenger sur certains aspects qui me posaient justement problème.

J'ai tenté d'en discuter mais il semblerait que je dérangeais plus qu'autre chose et surtout que j'étais "fermé d'esprit".

Au fil de ma dernière année, rejetant de plus en plus les propositions douteuses et infondées proposées, tandis que des amis me conseillent de me taire et de ne pas me faire remarquer, sans pouvoir le prouver je pense avoir été tout simplement saqué,

les examens étant souvent subjectifs et évaluateur-dépendant. Ainsi, je réagis relativement mal à ce qu'il se passe, je vais jusqu'à diffamer un enseignant vis à vis de ses comportements déplacés envers les étudiantes, j'ai également fait une grève de la faim pendant 3 semaines

et me suis mis en danger afin de reprendre le contrôle sur ma vie que j'estime me faire voler par ces individus. Au final, je ne valide pas mon année et me retrouve évidemment exclu de l'établissement.

Tout s'effondre pour moi.

Par hasard, je me renseigne sur le phénomène sectaire et j'estime faire un lien pertinent sur ce que j'ai pu observer par mon expérience au sein de cette dernière école. Je la signale d'ailleurs à la MIVILUDES que je remercie pour avoir été bien accompagné et entendu.

Je parviens tout de même à redoubler au sein d'une troisième école qui se revendique appliquer "les données les plus probantes".

Là, l'espoir renait en moi et je me dis qu'une pratique raisonnée de l'ostéopathie est possible, que j'ai enfin trouvé ma place et que je vais pouvoir m'épanouir, que tout ça n'était qu'une expérience malchanceuse et dont j'étais en partie responsable pour ma mauvaise gestion des

évènements.

Or je déchante rapidement lorsque j'assiste à un cours d'appel au ressenti, lorsque je questionne une enseignante sur ce que je suis censé ressentir et qu'elle me parle du "mouvement des fascias" ou encore lorsque nous parlons de conception et qu'elle m'argumente qu'il lui semble

pertinent d'avoir "un pied dans la science et un pied dans la tradition" avant de m'évoquer la physique quantique. Ou un cours entamé par un discours autour de l'empirisme et de l'expérience personnelle de l'enseignant comme faisant la base de son enseignement.

Là, s'en est trop pour moi. Je suis en dépression et je vais à l'hôpital. Je décide d'être le moins présent possible durant l'année, malgré le fait d'avoir payé la totalité de l'année pour 2 matières et mon mémoire à refaire, et j'obtiens finalement mon diplôme, non sans mal.

Je profite surtout de cette année pour approfondir au maximum mes connaissances issues de mes recherches annexes dans lesquels je passe littéralement des centaines d'heures.

L'obtention du diplôme est une réelle libération pour moi, je me sens enfin libre de toute pression et par ailleurs, j'ai enfin accomplis quelque chose dans ma vie, bien que je ne sois pas vraiment satisfait de mon diplôme, je suis au moins parvenu à aller au bout de ce calvaire.

Une solution immédiate que je trouve afin de me distinguer des charlatans est de rejoindre le GEMPPI (Groupe d'Etude des Mouvements de Pensée en vue de la Protection de l'Individu, association loi 1901 d'information et de lutte contre les dérives sectaires)

auprès duquel je signe la charte des "praticiens et acteurs du corps et de l'esprit" qui, malgré le peu de valeur que cela puisse avoir, correspond à une éthique et des valeurs sur lesquelles je souhaite m'engager en acceptant un regard sur mes pratiques et prétentions.

En Septembre dernier je créer une page critique sur l'ostéopathie. Indépendamment de cela, les altercations se multiplient sur les forums ostéos, pour lesquels j'ai ma part de responsabilité dans ma mauvaise gestion de la communication mais en faisant face tout de même à des

individus totalement endoctrinés et sans aucune base épistémologique à mon sens. Je précise également qu'à ce moment là j'agis sous un pseudonyme dans le but de me protéger.

Peu à peu une grande partie de la communauté ostéo me tourne le dos tandis que je dénonce les dérives de l'ostéopathie de plus en plus sur ma page.

Au bout d'un certain temps, certaines personnes divulguent mon identité sur les réseaux et sur ma page en prétextant que "tout le monde sait qui je suis", dont le directeur de l'établissement duquel je suis issu, la dernière école.

D'ailleurs celui-ci va tout faire pour tenter de me dissuader sur ma communication, faire des tentatives de manipulations, me harceler pendant plusieurs mois jusqu'à contacter ma mère de 68 ans à différentes reprises (en ayant tenté de la liguer contre moi).

Je passerai sur les différentes tentatives d'intimidation et de menaces juridiques de certains ostéopathes, pour diffamation notamment.

Bien que j'aie pu parfois effectivement déborder du cadre légal pour me défendre, j'ai tenté d'être la majorité du temps respectueux au regard de la loi.

Le harcèlement que j'ai subi à duré plus de 8 mois, j'ai déposé plainte deux fois à l'encontre de ce directeur en y mentionnant les différentes personnes qui ont participé à la divulgation de mes données personnelles.

Aujourd'hui je suis inscris pour la rentrée de Septembre en Master d'Histoire et Philosophie des sciences, je milite activement dans le cadre de mon travail associatif avec le GEMPPI contre les dérives thérapeutiques et sectaires,

je poursuis ma dénonciation des dérives en ostéopathie, j'essaie de diffuser et de partager ce que j'ai acquis pour permettre à d'autres ostéopathes d'évoluer également mais surtout dans l'intérêt et la protection des usagers et des étudiants et enfin,

j'ai pour objectif de poursuivre en doctorat et si possible d'établir une thèse sur le phénomène sectaire en prenant l'ostéopathie pour exemple.

Voilà, je pense avoir tout dit, c'est la première fois que je récapitule intégralement mon parcours de façon la plus exhaustive possible, je suis sincèrement désolé de la longueur et je vous remercie infiniment de m'avoir permis de m'exprimer et de m'avoir lu jusqu'au bout.

Je suis disposé à fournir tous les éléments que je possède afin d'étayer mon propos, à échanger sur le sujet et à recevoir vos différents avis.

Je tiens à remercier tout particulièrement les promoteurs de l'esprit critique et de la zététique qui, je pense, sont probablement les meilleurs éléments disponibles de prévention à ce jour pour lutter contre le phénomène sectaire.