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L’État israélien poursuit sa politique potentiellement génocidaire dans l’impunité la plus totale. Pour ce faire, il utilise notamment des drones tueurs, qui d’après le philosophe Grégoire Chamayou, «sont les armes d’un terrorisme d’État». 1/25 Première de couverture du livre de Grégoire Chamayou, «Théorie du drone» (La fabrique éditions, 2013).
Défini comme un «véhicule terrestre, naval ou aéronautique, contrôlé à distance ou de façon automatique», le drone est d’abord un engin de reconnaissance : c’est à cette fin qu’il est utilisé par l’armée américaine durant la guerre du Vietnam. 2/25 Ryan Model 147 "Lightning Bug", drone américain de reconnaissance en basse altitude (AQM-34L), Strategic Air Command & Aerospace Museum.
En 1973, lors de la guerre du Kippour, l’État israélien et son armée, Tsahal, envoie également des drones, mais pour leurrer son ennemi égyptien. Cet usage est fidèle au sens premier du mot «drone» en anglais : le faux bourdon, bruyant mais dépourvu de dard. 3/25 Tadiran Mastiff, drone israélien utilisé en 1973 dans la guerre du Kippour.
Ce n’est qu’en 2001 que le drone devient véritablement une arme de guerre. Après les attentats du 11 septembre, le Predator tue à distance sur le terrain afghan. La «chasse à l’homme international» (l’expression est du président George W. Bush) est ouverte. 4/25 Le MQ-1 Predator, drone américain au salon du Bourget, en 2007.
Le modèle adopté par les États-Unis est alors le programme d’«assassinats ciblés» d’Israël. Toute une stratégie de la chasse à l’homme, de la «guerre cynégétique» comme le dit Grégoire Chamayou, est élaborée au cours des années 2000. 5/25
Dans ce cadre, la guerre n’est plus un duel, mais l’abattage d’ennemis réels, supposés ou potentiels, identifiés après avoir été étroitement surveillés. S’ils ont un comportement jugé suspect, ils intègrent la «kill list». Bien sûr, ils n’ont pas les moyens de se défendre. 6/25
La marge d’erreur est grande, car, à 6.000 mètres d’altitude, un comportement peut très vite être interprété comme étant suspect. La distinction entre combattants et non-combattants est d’autant plus difficile que le drone rend tout combat réel impossible. 7/25
Surtout, les «dommages collatéraux» sont presque inévitables : le missile du Predator tue dans un rayon de 15 mètres et blesse dans un rayon de 20 mètres. Même si l’ennemi est correctement identifié, toutes les personnes à proximité seront victimes de la frappe. 8/25 Les habitants afghans et les membres des familles des victimes se rassemblent à côté d’un véhicule endommagé à l’intérieur d'une maison, au lendemain d’une frappe aérienne de drone américain à Kaboul, le 30 août 2021. La frappe a fait 10 morts d’une même famille, dont 7 enfants. (WAKIL KOHSAR / AFP) https://www.timesofisrael.com/us-military-investigating-reports-of-civilian-casualties-in-kabul-airstrike/
Peu importe pour la puissance qui déploie des drones tueurs : l’objectif premier est de préserver les vies nationales, quitte à sacrifier des civils du camp ennemi. C’est ce que Grégoire Chamayou appelle le principe d’immunité du combattant impérial. 9/25 Écusson du drone MQ-9 Reaper de l'US Air Force : la faucheuse, souriante, les yeux rouges et menaçants, portant une faux ensanglantée, avec l’inscription «Que les autres meurent».
Ce principe a été théorisé par des philosophes israéliens, spécialistes en éthique de la guerre. Asa Kasher, l’un de ces spécialistes, a écrit avec le major général Amos Yadlin un article sur «l’éthique militaire dans le combat contre la terreur.» 10/25
philpapers.org/rec/ASAMEO-2
Ces derniers soutiennent que le combattant, «citoyen en uniforme», a autant droit à la vie que les autres citoyens. Il serait donc immoral de distinguer les combattants des civils (sous-entendu : la distinction entre nationaux et étrangers n’est pas contraire à l’éthique). 11/25
Citons Asa Kasher et Amos Yadlin : «Conformément à notre norme de priorité des devoirs, l’État doit accorder la priorité à la sauvegarde de la vie d’un seul de ses citoyen, même si les dommages collatéraux sont beaucoup plus élevés, ce qui peut paraître inacceptable.» 12/25
Il existe une justification plus modérée du principe de l’immunité du combattant impérial : pour le philosophe américain Bradley Strawser, l’usage du drone est obligatoire dès lors qu’il n’engendre pas plus de dommages collatéraux que d’autres armes. 13/25
philpapers.org/rec/STRMPT
Le drone incarnerait ainsi, affirme Grégoire Chamayou, un «pouvoir humilitaire», «qui tout à la fois tue et sauve». Ce serait le moyen ultime de «bien tuer», la mise en pratique parfaite de la «nécroéthique». Mais concrètement, le drone tue de manière indiscriminée. 14/25 Le Bureau of Investigative Journalism a rapporté les chiffres suivants pour les frappes américaines de janvier 2004 à février 2020. Pour le Pakistan, les chiffres du BIJ couvrent les frappes de drones américains ; pour les autres pays, ils incluent les frappes de drones et d’autres actions.  Afghanistan      Frappes minimum : 13,072     Civils tués : 300–909     Enfants tués : 66–184     Total tués : 4,126–10,076     Blessés : 658–1,769     Total des victimes : 4,784–11,845  Somalie      Frappes minimum : 202     Civils tués : 12–97     Enfants tués : 1–13     Total tués : 1,197–1,410     B...
La cruauté de cette arme est renforcée par le fait qu’elle implique un décalage (Günther Anders) entre le pilote à distance et sa cible : le premier est très éloigné de la seconde et ne voit en elle qu’une fine silhouette. Cette situation a tendance à le désinhiber. 15/25
Si certains pilotes se sont sentis mal d’avoir tué, ils ne souffrent pas, en général, du syndrome de stress post-traumatique, car ce trouble ne concerne par définition que les personnes dont la vie a été directement mise en danger. 16/25
En outre, la plupart apprennent à «compartimenter» leur vie, leur «moi de guerre» et leur «moi de paix» selon les concepts freudiens. Grégoire Chamayou cite l’un d’entre eux : «Je ne ressens aucun attachement émotionnel à l’ennemi […] J’ai un devoir et je fais mon devoir.» 17/25
Opérant à distance, il leur est plus facile de tuer que sur un champ de bataille. C’est ce qu’explique l’ancien militaire et psychologue américain Dave Grossman : plus la distance physique avec la cible est élevée, moins la répugnance à tuer est grande. 18/25 Graphique intitulé «Le spectre de l’agression selon Dave Grossman», illustrant la relation entre la «Résistance à tuer» et la «Distance physique avec la cible».  Description des axes et du contenu :      Axe vertical (y) : Résistance à tuer         En haut de l’axe, la résistance à tuer est forte         En bas de l’axe, la résistance à tuer est faible      Axe horizontal (x) : Distance physique avec la cible         À gauche de l’axe, la distance est proche         À droite de l’axe, la distance est lointaine  Une courbe décroissante relie ces deux axes. Au fur et à mesure que la distance ...
Cela a déjà été analysé au XIXe siècle par Clausewitz, qui écrivait dans «De la guerre» : «Avec une fronde, nous pouvons imaginer un certain degré de colère accompagnant le lancement de la pierre ; ce sentiment intervient beaucoup moins dans la décharge d’un mousquet […]» 19/25 Première de couverture du livre de Carl von Clausewitz, «De la Guerre», publié pour la première fois entre 1832 et 1835.
Hegel disait aussi dans son «Système de la vie éthique» : «L’arme à feu est la découverte de la mort générale, indifférente, impersonnelle». «La loi de Clausewitz-Hegel» se vérifie avec l’usage du drone. «C’est comme jouer au jeu vidéo Civilisation» dit un pilote américain. 20/25 Première de couverture du livre de George Wilhelm Friedrich Hegel, «Système de la vie éthique», écrit en 1802-1803.
Cet effet d’«amortisseur moral» ne concerne pas seulement les pilotes, mais aussi l’opinion publique. Nous sommes généralement plus choqués par des massacres en face à face, comme l’attaque du 7 octobre 2023, que par les massacres à distance. 21/25
Le fait est qu’il n’y a pas forcément besoin d’une haine viscérale pour appuyer sur un bouton. Les conséquences sont les mêmes, voire pire, que celles d’un massacre «classique», mais on perçoit mal les mauvaises intentions derrière cet acte. 22/25
Il se peut même que les intentions ne soient pas mauvaises, que le pilote se contente de «faire le job». Le mal peut être fait en toute indifférence, banalement, au sens qu’Hannah Arendt a donné à ce terme pour comprendre les logiques génocidaires. 23/25
Alors, la chasse à l’homme qu’est la guerre par drone devient un vulgaire travail, dont la production est une quantité toujours plus grande de cadavres. La robotisation réduit la haine à l’état d’antiquité pour reprendre une autre idée de Günther Anders. 24/25 Première de couverture du livre de Günther Anders, «La haine à l’état d'antiquité», publié pour la première fois en 1985.
Cependant, le drone exacerbe la haine de ses victimes : face à un ennemi intouchable, tuant des innocents et semant la terreur, certains se retournent contre lui par des moyens terroristes, faisant payer l’immunité du combattant impérial par des victime civiles de l’empire. 25/25  Les houthistes revendiquent un tir de drone depuis le Yémen qui a fait un mort à Tel-Aviv  L’engin, qui aurait parcouru plus de 2.000 kilomètres, a franchi les défenses israéliennes sans déclencher les sirènes d’alerte. Les rebelles yéménites agissent en solidarité avec le Hamas dans le cadre de l’«axe de la résistance» mené par l’Iran.  Par Louis Imbert (Jérusalem, correspondant)  https://www.lemonde.fr/international/article/2024/07/19/au-yemen-les-houthistes-revendiquent-un-tir-de-drone-qui-a-fait-un-mort-a-tel-aviv_6252556_3210.html

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Jul 13
Si le Rassemblement National (RN) est arrivé en 3e position lors des dernières élections législatives, ce sont plus de 10 millions de Françaises et de Français qui ont opté pour ce parti. D’après le sociologue Félicien Faury, ce choix est largement motivé par le racisme. 1/25 Première de couverture du livre de Félicien Faury, «Des électeurs ordinaires. Enquête sur la normalisation de l’extrême droite», Paris, Seuil, 2024.
Là où il a enquêté, dans le sud-est de la France, Félicien Faury a constaté que les électeurs RN tiennent régulièrement des propos racistes contre les minorités d’origine non-européennes. Celles-ci sont vues comme étant «homogènes», «différentes et séparées». 2/25
Surtout, elles sont assimilés «à des comportements suscitant des affects négatifs (peur, hostilité, mépris, ressentiment), en opérant implicitement une hiérarchisation entre les valeurs et les attitudes de ces groupes et celles du reste de la population.» 3/25
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Jun 16
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Niceto Alcalá-Zamora, catholique et ancien royaliste, préside le nouveau régime de décembre 1931 à avril 1936. Il tente de suivre une ligne centriste dans une Espagne divisée, où la République est constamment menacée par une droite autoritaire, voire fasciste. 3/25 Niceto Alcalá-Zamora (1877-1949).
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lemonde.fr/sciences/artic…

Image d’illustration : titre «La science est-elle neutre ?», sur un fond noir représentant des équations stylisées.
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May 5
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2/25
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