Dans son rapport de mai dernier la cours des comptes à lourdement critiqué la politique des caisses vides qui fragilise la Sécurité sociale.
Sauf 2020, entre 2018 et 2023, la Sécu serait excédentaire sans le contournement du salaire !
Fil⬇️
Depuis des années la politique publique a favorisé le contournement du salaire. Elle l’a fait notamment en offrant la possibilité aux entreprises de verser des compléments de salaires bénéficiant d’exemption ou d’exonération de sécurité sociale.
Au fil du temps beaucoup de dispositifs se sont accumulés: aides directes aux salariés (ticket restau, etc.), indemnités de rupture de contrat, partage de la valeur en entreprise (participation, etc.), protection sociale complémentaire et heures supplémentaires.
Dans le secteur privé les compléments en 2022 s’élevaient à 87,5 Mds (13,2% de hausse de revenu). Les principaux postes concernent le partage de la valeur (30,7 Mds) et la protection sociale complémentaire (25,3 Mds).
Soit un manque à gagner pour la Sécu de 18 Md !
La cour des comptes est très critique vis-à-vis de ces dispositifs. Les objectifs sont imprécis, ils bénéficient à des intermédiaires douteux (comme les tickets restaurants) et leur efficacité est discutable (par exemple pour le dispositif de partage de la valeur).
Pour limiter les effets sur le manque à gagner pour la sécurité sociale, des taxes compensatoires ont été mises en place. Le cas emblématique est celui du forfait social créé par la loi de financement de la sécurité sociale de 2009.
La cour explique que ces taxes compensatoires rendent la fiscalité complexe alors même que le rendement de ces taxes est peu satisfaisant. Pire, le rapport entre les pertes de recettes liées aux exemptions et les recettes des taxes compensatoires baisse au cours du temps.
Le plus gros problème soulevé par la cour est la fragilisation du financement de la sécurité sociale. Les entreprises préfèrent de plus en plus distribuer des compléments de salaire plutôt que du salaire, ce qui érode la base contributive des cotisations sociales.
Contrairement à l’objectif de la loi dite Veil de 1994 qui prévoit que l’État compense tous les manques à gagner imposés à la sécurité sociale, la compensation n’est pas appliquée aux exemptions. Les pertes de recettes ne cessent de croitre.
Entre 2018 et 2023 les réductions non compensées de cotisation sociales pour compélements de salaire, sont passé de 9,9 Mds à 19,3 Mds.
Le manque à gagner pour la Sécu est de près de 20 Mds en 2023 et il a doublé depuis le début de la présidence d’Emmanuel Macron.
Le plus incroyable est que ce manque à gagner est supérieur au déficit de la sécurité sociale sur la période 2018-2023 (hors 2020).
Par exemple, l’année dernière le déficit (hors dépenses covid) était estimé à 7,8 milliards alors que le manque à gagné était de 19,3 milliards !
Dit de façon plus abrupte, si la Sécu est en difficulté financière, c’est parce qu’elle a été mise en déficit. Ce n’est pas (structurellement) à cause des arrêts de travail !
Et ce n’est pas fini...
D’après la cour des comptes, l’autre effet négatif de la politique publique de contournement du salaire est d’augmenter les inégalités entre salariés (alors que la Sécu a un effet de réduction des inégalités).
Par exemple, les versements au titre de la participation financière et de l’actionnariat salarié bénéficient avant tout aux personnes dans les grandes entreprises. 53% des sommes versées en 2021 bénéficiaient aux personnes dans des entreprises de plus de 10 salariés.
« Les 45 % de salariés qui perçoivent entre 1 et 1,4 fois le Smic comptent ainsi pour 42 % des bénéficiaires de la prime de partage de la valeur, mais seulement pour 32 % de la participation, 27 % de l’intéressement et 16% des plans d’épargne entreprise »
Autre exemple, ces dispositifs de contournement du salaire favorise les complémentaires santé d'entreprise au détriment de la sécurité sociale... alors que les premières sont plus chères et inégalitaires.
En conclusion, la cour des comptes appelle « à mieux piloter et à réformer » les dispositifs sociaux dérogatoires. Si elle ne va pas jusqu’à proposer de remettre en cause complètement ces dispositifs elle a le mérite de poser la question.
Imaginons pour conclure la tournure qu’aurait le débat public si on commençait non pas par pointer du doigts les malades ou les retraités, mais le fait que la sécurité sociale a été délibérément mise en déficit par le contournement du salaire.
Fin
• • •
Missing some Tweet in this thread? You can try to
force a refresh
L'argument central contre ce type de projet est de rappeler à quel point la Sécurité sociale est supérieure aux complémentaires santé pour financer les soins.
L'enjeu est de ne pas focaliser sur la dépense de soins mais sur la production de soins.
La mauvaise question que pose le gouvernement est : "comment fait-on pour réduire les dépenses de santé financées par la sécurité sociale" ? A ce jeux là, il n'y a que des mauvaises réponses, car passer par le marché c'est plus cher et plus inégalitaire.
Tout se passe comme si les dépenses actuelles (et leur augmentation) étaient injustifiées. Alors que le vrai problème collectif auquel nous faisons face est le vieillissement de la population qui va conduire nécessairement à la hausse des dépenses.
Pour rappel, la cour des comptes à évoqué le dossier des arrêts maladie dans son rapport du moi de mai. Il faut dire (au moins) deux choses à ce sujet : 1/9
Premièrement, l'augmentation du coût des arrêts maladie n'est pas liée à un changement de comportement des assurés (prétendument plus opportunistes) mais à des causes structurelles: 2/9
En particulier les indemnités augmentent du fait de la hausse (relative) des salaire, de l'augmentation de la population, de l'intégration de certains régimes au régime général de sécu, du vieillissement de la population, des effets probables de la pandémie, etc.
3/9
C'est difficile d'émettre un jugement puisque les détails sont inconnus mais on a de bons indices. Le chiffre de 3 millions de personnes colle avec les dernières statistiques disponibles. Mais qui sont ces gens ?
D'après la dernière enquêtes IRDES, 3,6% de la population est sans complémentaire (2,5 millions de personnes). Ce sont les plus pauvres les plus touchés : jusqu'au 3ème décile de revenu leur taux de non couverture est plus élevé que pour le reste de la population.
1. La nouveauté de la situation n’est pas d’abord le haut score de l’extrême droite mais la dissolution. En choisissant ce moment pour dissoudre, Emmanuel Macron créé une dynamique inédite pour l’extrême droite.
2. Dans ce contexte, les chances que l’extrême droite soit en position de former un gouvernement sont très élevées. C’est ce qu’il faut éviter.
3. Emmanuel Macron a déjà conduit une politique proche de l’extrême droite, pour ne pas dire plus. Une politique antisociale, autoritaire, raciste, etc.
La menace qui pèse sur les arrêts maladie n'a rien à voir avec la responsabilisation de travailleurs coupables d'abus et de fraudes. Et c'est la Cour de comptes qui le dit.
Fil (1/16)
Le point qui ne fait pas débat est que les dépenses d'arrêt maladie ont fortement augmenté ces dernières années passant de 8,2 Mds en 2017 à 12,6 Mds en 2022 (+53,6%).
Dans son rapport sur l'indemnisation des arrêts de travail, ce que fait d'utile la Cour des comptes est d'expliquer pourquoi cette hausse.
Plusieurs raisons sont évoquées, aucune ne concerne les abus ou la fraude. L'évolution est expliquée par des causes structurelles.
Quelle que soit la manière dont on compte, la Sécurité sociale est toujours plus efficace que les complémentaires santé.
Un petit fil (1/7)
🧶
En moyenne, les frais de gestion des complémentaires santé s'établissent à 19%.
Cela veut dire que sur 100 € hors taxe, les complémentaires prennent 19 € pour les divers frais de gestion et 81 € reviennent aux cotisants sous forme de prestations.
Cependant, lorsque l'on souscrit à une complémentaire santé, il faut aussi payer une taxe. Il n'y a pas de TVA mais une TSA : taxe de solidarité additionnelle. Le plus souvent 13,27%.
Sur 100€ dépensé par le cotisant... seulement 70,25€ lui reviennent.