Aujourd’hui, au procès Paty, un protagoniste clé, ayant joué un rôle crucial dans le passage à l’acte d’Abdoullakh Anzorov, passe à la barre.
Cet acteur central, ou plutôt cette actrice, s'appelle Priscilla Mangel. Son influence sur le tueur pourrait avoir été supérieure à celle de Chnina et Sefrioui. En effet, jeune Française convertie à l’islam et ayant fréquenté les cercles jihadistes en France, elle a, à la différence de Chnina et Sefrioui, communiqué directement et consciemment avec le meurtrier de Samuel Paty, sans l’ombre d’une excuse. Elle l’a même encouragé dans son passage à l’acte, démontrant une influence jihadiste redoutable.
Et pourtant, elle comparaît libre. Il y a quelque chose de profondément troublant dans le fait de croiser son regard dans la salle des pas perdus de la Cour d’assises de Paris… Elle sera jugée pour complicité d'assassinat en relation avec une entreprise terroriste. Voici son histoire 👇
Priscilla Mangel, alias « Cicat’s », relaie la vidéo de Brahim Chnina sur Twitter et, à sa manière, semble vouloir transformer l’étincelle en un incendie.
L’engrenage est déjà enclenché : Mangel a déjà établi un contact avec Abdoullakh Anzorov, le futur assassin de Samuel Paty. En portant l'affaire à l'attention du tueur, alias « Tchetchene_270 », elle enclenche déjà le compte à rebours. De même, les deux utilisateurs échangent par messages privés. Quarante-six messages, entre le 9 et le 13 octobre 2020.
Preuve que le poison du fanatisme a déjà pénétré les veines du tueur de Samuel Paty ? Dès ce 9 octobre, à 15h58 précisément, Anzorov envoie un message sur son groupe Snapchat, composé de compagnons radicalisés : « Un professeur a montré le Messager d’Allah nu dans une classe à ses élèves de 4e. » L’esprit habité par la haine, il commence à taper frénétiquement dans la barre de recherche de Google, en quête d’informations sur le prétendu scandale révélé par Brahim Chnina.
A 19h12, Anzorov parvient à contacter Chnina ; qui a mis son numéro de téléphone sur Facebook. L’appel dure une minute et vingt-deux secondes. « De rien, mon frère, c’est normal », écrit ensuite Anzorov à Chnina par SMS. A 20h27 Anzorov écrit à « Cicat’s », pour le remercier du lièvre qu’il a levé : « Et d’ailleurs je l’ai appelé, son père, c’est bon. » Anzorov-Chnina-Cicat’s :
Samedi 10 octobre
Après avoir compulsé Google, Anzorov tombe sur un article du site d’Europe 1. Dans son esprit déjà rongé par le complotisme islamiste, il croit voir un lien évident entre l’incident de Conflans et la suspension d’un professeur à Mulhouse en 2015, pour avoir montré une caricature de Mahomet nu, juste après l'attaque contre Charlie Hebdo. Pour lui, ces événements ne sont pas des coïncidences, mais une sorte de machination orchestrée par l’État, contre l’islam. Comme il l'affirme à son nouvel interlocuteur, « Cicat’s » :
Tchetchene_270 – Assalamu Alaykum c'est bizarre y'a eu exactement la même chose en 2015
Cicat’s – Wa alaykoum salam C'est à Mulhouse là c'est dans le 78.
Tchetchene_270 – Oui ya juste la ville qui change
Cicat’s – Perso je suis pas étonné que ça se soit déjà produit et ça ne va pas être la dernière à mon avis
Tchetchene_270 – wAllahu 3alem
Tchetchene_270 – Mais c'est bizarre que ça c'est produit en 4e comme cette fois.
J'ai envoyé au père j'attends qu'il réponde.
On dirait un plan de l'état mdr genre en 4eme y a 5 ans et ça se répète pareil
Cicat’s – Tu me tiens au courant
Tchetchene_270 – Vasy
Mardi 13 octobre
La discussion entre Priscilla Mangel et Abdoullakh Anzorov bascule dans une spirale fatale. Désormais bien informé de l’affaire, Anzorov ne retient plus qu’une question avant de passer à l’acte : Samuel Paty sera-t-il sanctionné par sa hiérarchie pour les propos tenus en classe ? En l'espèce, Mangel, bien informée, va le pousser au crime.
Tchetchene_270 – Assalamu aleykum, le pere prend du temps a répondre, tu sais pas ce qu'il s'est passé par la suite avec le prof ? Il est suspendu ou alors il a d'autres sanctions ?
Cicat’s –Wa alykum salam
Nan aucune sanction
II s'est expliqué avec la directrice a la classe a reconnu qu'il n'aurai pas du demander qui était musulman parmi ses éleves mais que le but etait bien veillant envers eux
Et que la caricature n'est pas un pb pour le rectorat ni l'académie que l'étudier fait maintenant parti du programme, il faut vite inculquer au enfant que le blasphème est normal
Tchetchene_270 – Mdrr ok
Cicat’s – II faut vite inculquer aux enfants que le blasphème est normal
Tchetchene_270 – C'est ce que je disais à ma mère hier justement
Cicat’s – Maintenant les choses sont très clair plus de prétexte ou d'excuse ils veulent vraiment éradiquer la foi des cœurs des gens
Tchetchene_270 – Oui exactement, par Allah ils n'y arriveront pas si seulement ils savaient
Cicat’s – Comme j'aime à le dire des guerres pendant des centaines d'année n'ont pas réussi à éteindre une foi pas plus que l'oppression ou la colonisation alors oui c'est peine perdu un groupe de gens seront tir sur la croyance authentique et c'est bien pour ça qu’ils ragent et œuvre sans relâche car ils le savent très bien au fond deux
Tchetchene_270 – Al hamdulillah qu'ils nous combattent sinon je me serais inquièter
Cicat’s – Et oui l'acquiescement par une société complètement immoral n'est pas signe de bonne foi ni de bonne santé
Comment l’utilisateur « Cicat’s » a-t-il pu obtenir des informations sur l'absence de sanction à l’encontre de Samuel Paty, au point d’en informer Anzorov et d’armer ainsi sa main ? Cette question animera les enquêteurs dans les mois qui suivront le drame. Ils exploreront la piste d’un lien entre « Cicat’s » et Brahim Chnina, ainsi que celle d’un possible informateur au sein du collège du Bois-d’Aulne.
« Il est évident, à mes yeux, que ce message de Priscilla Mangel a motivé le passage à l’acte d’Anzorov et son désir de faire le djihad en France », écrit Mickaëlle Paty dans son livre paru ce 16 octobre. Mais une autre question, surtout se pose : pourquoi les agents des renseignements territoriaux n’ont-ils pas enquêté plus sérieusement sur cet obscur influenceur de la haine qu'était « Cicat’s » ? Était-ce parce qu'il s’agissait, non pas d’un influenceur, mais d’une influenceuse ?
Première découverte : avant même la création du compte « Cicat’s » le 8 octobre 2020, dédié à l’affaire Samuel Paty, Priscilla Mangel avait déjà tissé un réseau tentaculaire et joué un rôle actif dans les coulisses du drame. C’est elle qui, dès septembre, avait suivi Abdoullakh Anzorov sur Twitter avec un autre compte. Et noué des contacts avec certains acolytes radicalisés du futur assassin. Lorsque le compte « Cicat’s » est supprimé dans la panique après l’attentat du 16 octobre, il y a longtemps qu'elle n'est plus une simple spectatrice : sous divers alias (Kassandra Guerin, CicatriceSucrée, Hasna, Abou Bimboum…), elle s'est imposée en influenceuse islamiste, via Facebook, Twitter, Instagram et Snapchat. On recense pas moins de 50 tweets de sa part concernant l’affaire Paty.
Plus surprenant encore : dès 2017, la DGSI (Direction générale de la Sécurité intérieure) avait déjà identifié la radicalisation de Priscilla Mangel, ainsi que ses liens avec des individus incarcérés pour des faits de terrorisme ou connus pour leur appartenance à la mouvance islamiste radicale. En effet, dès mai 2020, dans le cadre de sa surveillance des réseaux sociaux, la DGSI avait repéré Mangel sous son précédent alias, « Cicatrice sucrée », dont « Cicat’s » ne sera qu'une nouvelle version. Ce compte diffusait une multitude de tweets, tantôt dénonçant l’islamophobie et les atteintes à la laïcité, tantôt fustigeant les discriminations subies par les musulmans. Parfois en prônant la suprématie de l’islam sur les autres religions. Citons ce tweet, le 1 septembre 2020 : « Apparemment Charlie Hebdo en redemande ! Gourmandise addict au nom de leur liberté d’expression synonyme de la déchéance intellectuelle en arriver aussi bas je n’appelle pas ça être debout mais couché à ras du sol se desséchant comme des coprolithes mais chacun sa vision des choses. »
Que dire encore du fait que Priscilla Mangel discutait régulièrement avec la mère de Foued Mohamed-Aggad, l’un des terroristes du Bataclan ? Entre avril 2020 et juin 2021, elle l’a contactée à 1 166 reprises. S'ajoutent à cela 130 contacts avec Kenza Mohamed-Aggad, la sœur du terroriste. Le lien avec la famille Mohamed-Aggad ? Remontons le fil de la vie de l’intermédiaire du tueur de Samuel Paty pour comprendre son lien avec l'écosystème djihadiste français.
Le profil de Yacine Benhamouda, le premier amour de Priscilla Mangel ? Pas très reluisant. Son nom apparaît dans les contacts de Sarah Hervouët. La promise de Larossi Abballa (meurtrier des deux policiers de Magnanville), impliquée dans l’attentat raté à la bonbonne de gaz près de Notre-Dame en 2016. Les réseaux djihadistes français, on le sait, sont étroits. Mais revenons à Priscilla.
Après sa séparation avec Benhamouda, sous les pseudonymes de Lilly Chamallow et Sarah Spencer, elle se lance à la recherche d’un nouvel époux djihadiste. Tout comme l’alias « Cicatrice sucrée », ces surnoms suggestifs trahissent une forme d’hypersexualisation souvent observée chez certaines femmes radicalisées. Paradoxalement, elles jouent à la séduction tout en se dissimulant derrière des voiles et des identités numériques, naviguant entre attirance et interdits.
C’est à ce moment-là que Priscilla Mangel devient particulièrement active sur les réseaux sociaux, intégrant des groupes virtuels jihado-salafistes. Elle rencontre aussi, via Facebook, celui qui deviendra son époux religieux : Sami Gharouz. Leur lien se noue, avant que Priscilla Mangel ne l’épouse par téléphone. Et le surnomme « Mon samouraï » dans son répertoire. C’est que Gharouz, alors incarcéré, a été condamné à quatorze ans de réclusion criminelle pour « association de malfaiteurs à caractère terroriste ». Il était impliqué dans un projet d’attentat à Marseille pendant la campagne présidentielle de 2017. Priscilla poursuit son activité en ligne sans être inquiétée par les autorités, multipliant les alias, jusqu'à adopter le pseudonyme « Cicatrice Sucrée ».
« J'espère que vous n'êtes pas là pour remplir un banc d'accusés qui est trop vide », dira avec aplomb aux enquêteurs Priscilla Mangel, après son interpellation le 22 juin 2021. « Je ne comprends pas ma présence ici aujourd'hui dont je ne peux que contester », poursuivra-t-elle malgré l’enquête et la perquisition accablantes à son domicile, où sera retrouvé un iPhone contenant des chants destinés à soutenir les « frères de Syrie », des photographies d'hommes armés, et du drapeau d'Al Raya, utilisé par Daech.
Elle niera toute intention malveillante en partageant la vidéo de Brahim Chnina, se présentant plutôt comme une victime d’offenses islamophobes : « Il y a des gens qui veulent du mal aux autres, et moi, au quotidien, j’en subis les conséquences. Il y a des gens qui sont dérangés par un voile. La discrimination fait partie de notre quotidien. Mes enfants ne comprennent pas pourquoi je ne peux pas les accompagner en sortie scolaire ou pourquoi on me regarde différemment. » Et ajoutera : « Je sais que c’est permis de blasphémer en France, mais je ne crois pas que ça soit bien dans les écoles. »
Pour lire l'article en entier, avec l'histoire de Priscilla Mangel et les failles des RT78 et de la mairie de Conflans : marianne.net/societe/terror…
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"Si on avait réglé ça entre hommes avec Monsieur Paty, il ferait encore ses cours" : Brahim Chnina, l'outrance jusqu'à l'indécence
Mon récit d'audiences à lire sur le site de @MarianneleMag
"Son fameux masque chirurgical a disparu. En quatre ans, Brahim Chnina semble en avoir pris vingt. Amaigri, la barbe et le crâne désormais striés de blancs, comme ce pull crème qu’il arbore. Seule sa voix, reconnaissable sur la fameuse vidéo qui a conduit à la mort de Samuel Paty, n'a pas changé. Le père de famille est campé là, sous les yeux des siens, le regard hagard, une bouteille de Cristalline à portée de main.
(...)
La stratégie de Brahim Chnina ? Un équilibre précaire entre regrets affichés, autojustifications maladroites et efforts constants pour minimiser sa responsabilité. Il admet des « erreurs », mais s’efforce d’en atténuer la portée en se présentant comme une victime. Il plaide la naïveté, l’excès de confiance envers ses proches, et joue la carte du père abusé par les mensonges de sa fille. Face aux caricatures montrées par Samuel Paty, Chnina s’accroche à une interprétation biaisée : « Je pensais que Samuel Paty était contre les musulmans. » Avant que le président ne la démonte avec une simplicité désarmante : « Les caricatures ne signifient pas être contre ce qu’elles caricaturent. »"
>> marianne.net/societe/police…
À cette ligne déjà hasardeuse, il en défend une autre, sans doute plus indigne encore. En ne tardant pas à désigner un autre coupable : la proviseure du collège du Bois-d’Aulne, Audrey Fouillard. Selon lui, tout aurait pu basculer le 9 octobre 2020, lorsqu’il s’était présenté devant l’établissement. « Si, ce jour-là, la proviseure m’avait dit que ma fille mentait, Samuel Paty serait encore en vie. Il suffisait qu’elle dise : “Votre fille n’était pas au cours” et rien ne serait arrivé. » Avant que son inversion accusatoire s’emmêle, face à l’interrogation de l’avocat de la proviseure consistant à savoir si c’est elle, dès lors, la coupable : « Je ne la traite pas de menteuse, mais elle ne dit pas toute la vérité. (…) Je n’ai jamais dit qu’elle était responsable, mais qu’elle a sa part de responsabilité. »
Cette phrase, qui fait gronder la salle, marque l’un des sommets de l’ambiguïté et de l’absurde dans les mots de Chnina. À son langage, dont il semble parfois jouer pour feindre des difficultés de compréhension, s’ajoute une élocution hésitante. Et Chnina s’enferre dans des stratégies qui rappellent les clichés d’interrogatoires de petits délinquants pris sur le fait. Les mots fusent, mais manquent leur cible. On relève une quarantaine de « Je ne me souviens pas », une trentaine de « J’ai oublié », une dizaine de « ça dépend », et un joli « J’ai dû avoir un trou de mémoire », jetés ici et là. Tandis que la salle, lasse, assiste à cette tentative désespérée de diluer la responsabilité dans l’oubli.
Puis vient le sujet brûlant, celui qu’attend toute l’assistance depuis le début de l’audience : son échange avec Abdoullakh Anzorov, l’assassin de Samuel Paty, le soir du 9 octobre 2020. Le tribunal veut savoir : qu’a-t-il à dire sur cet appel dont il a été établi qu’il dura précisément 1 minute 22 ? Brahim Chnina, déconcertant, lâche : « Il paraît qu’il m’a appelé. Je ne m’en souviens pas. J’ai découvert en garde à vue que c’était lui. » L’interrogatoire s’intensifie. Pourquoi, lui demande-t-on, avoir enregistré le numéro d’Anzorov dans son téléphone sous le nom « Zaina Abdoullah Évreux » ? Chnina répond encore avec nonchalance : « Comme d’autres, il a dû proposer une aide financière. »
Mauvaise foi jusqu’à l’indécence, voilà ce qui transparaît quand Brahim Chnina ose affirmer, avec un aplomb déroutant, que si le collège du Bois-d’Aulne lui en avait donné l’opportunité, « Samuel Paty serait encore en vie ». Et de préciser : « Si on avait réglé ça entre hommes avec Monsieur Paty, il ferait encore ses cours. » Un frisson dans la salle. Mais la cour ne s’en laisse pas conter. Les faits, implacables, sont remis sur la table. Il aurait suffi, lui fait-on remarquer, de consulter la plateforme scolaire ENT pour découvrir que sa fille n’assistait pas aux cours de Samuel Paty et qu’elle n’avait jamais été renvoyée à cause de lui. Pas besoin de venir au collège pour ça. « Je n’ai plus les codes pour me connecter. »
Et ce mail d’alerte, daté du 10 octobre, où un proche lui signalait qu’il y avait de fortes chances que sa fille mente sur sa présence en cours ? « Il a dû arriver dans mes courriers indésirables. » Puis vient la question au sujet d'une vidéo qu’il aurait consultée sur YouTube le 16 octobre, après l’attentat, sur l’abattage rituel musulman. Pourquoi ce visionnage ? Chnina s’empêtre : « Sûrement une fausse manipulation. Je n’ai jamais égorgé un mouton. » La cour insiste sur un autre point : ce message de soutien reçu, appelant à « briser le dos » de Samuel Paty, auquel il avait répondu par un acquiescement en arabe. Sa défense ? « Je ne m’en souviens pas. » Et celui appelant à « casser la gueule » de Paty ? « C’est flou. »
🗺️ Jérôme Fourquet a (encore) superposé les cartes 🧐
Il présente dans @MarianneleMag son nouvel indicateur pour comprendre le vote RN : l'indice IPI (Immigration, pauvreté, insécurité), conceptualisé dans une note captivante pour @Institut_Terram 👇
"La carte de l'indice IPI par département correspond assez nettement à celle du vote RN. Le RN prospère dans des contextes locaux marqués par la combinaison de ces différentes variables."
Comment mesurez-vous ces trois variables dans l’espace ?
"Nous avons synthétisé l’évaluation du poids des populations issues de l'immigration via la carte de la proportion de garçons ayant reçu un prénom arabo-musulman en 2021 (21 % des naissances masculines au niveau national).
La pauvreté via le taux de pauvreté par département (revenu inférieur à 60 % du revenu médian français).
Et l’insécurité via le taux de coups et blessures volontaires moyen entre 2015 et 2019 (pour 1 000 personnes de 15 ans ou plus). Sur chacune de ces trois variables, nous avons ensuite appliqué la méthode des quintiles."
"Pour chacune de ces trois variables, chaque département s’est vu attribuer une note allant de 1 à 5 en fonction de l’intensité du phénomène dans le département en question. Dans ces cinq strates de départements, ceux qui appartiennent au quintile supérieur ont un score de 5, ceux qui appartiennent au quintile inférieur ont un score de 1. Par exemple, un département où l’insécurité est très élevée obtient un score de 5 sur 5.
Nous avons ensuite additionné les trois notes thématiques obtenue par chaque département, pour obtenir un score global, que nous appelons donc l’indice IPI. L'indice synthétique qui relie ces trois mesures varie donc par construction de 3 (3*1) à 15 (3*5). Si on vit dans un département très peu touché par l’insécurité et la pauvreté et très peu concerné par l’immigration, son indice IPI sera de 3. Et inversement l’indice IPI atteindra 15 dans un département particulièrement marqué par ces trois facteurs."
🚩 Aujourd'hui, Marianne est en grève. L'origine de la crise que nous vivons : le non alignement entre notre pratique du journalisme et les orientations de notre actionnaire. Et le fait que notre rédaction n'ait pas assez ménagé le pouvoir en place.
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"Les cloportes paniquent depuis la dissolution" : le récit de la débâcle des conseillers d’Emmanuel Macron
Mon enquête sur le chaos qui règne désormais dans le premier cercle de conseillers du Président, soupçonnés d'avoir influé la dissolution kamikaze du 9 juin, et l'ambiance fin de règne à l’Élysée.
Vous apprendrez quel rôle ils ont joué dans la dissolution, la panique de Jonathan Guémas et Clément Léonarduzzi depuis que Bruno-Roger Petit a parlé au @lemondefr, avec la mise au point d'@ArianeChemin et @ITrippenbach.
Mais aussi la colère de Publicis et de Bernard Arnault contre Clément Léonarduzzi (à cheval entre les affaires et l’Élysée), le livre que Bruno-Roger Petit prépare sur Emmanuel Macron (et qui le maintient en poste), le fait qu'Alexis Kohler songe lourdement à démissionner en cas de cohabitation avec le RN...
Et, plus globalement, comment la gestion volontairement chaotique d'Emmanuel Macron de son premier cercle a conduit à la situation actuelle, au désarroi des macronistes de la première heure, et à cette ambiance crépusculaire post-dissolution. Extraits. 👇
Un ancien proche conseiller d’Emmanuel Macron, qui les voit œuvrer aujourd’hui à son ancien poste, résume ainsi la chose : « Les cloportes se savent tchernobylisés par l'écosystème parisien, et ça ne fait que commencer. »
Un autre ancien pensionnaire influent de l’Élysée :
« Ils sont complètement paniqués et sortent le parapluie pour post-rationnaliser leur geste et écarter leur responsabilité, tant ils ont tout à perdre en terme de réputation. Eux n’ont plus n’ont pas envie de se réveiller le 8 juillet et d’avoir à porter la responsabilité de Bardella à Matignon. »
« Ils se sont dit que c'était le meilleur des coups. Cela a infusé dans la tête du Président, et puis en effet vers 18 h 30, est arrivé ce qui est arrivé : il s’est dit ‘chiche’ et s’est mis à évoquer sérieusement l’hypothèse. Puis a passé un coup de téléphone à Gérard Larcher, comme le prévoit la Constitution. Et à Gabriel Attal, resté bouche bée »
Aujourd'hui, côté BRP, on fait chemin inverse quant à ce que le conseiller mémoire a dit dans cet article :
"Ce sont des propos qui n’ont pas été tenus dans la version qui a été servie par Le Monde, et qui n’ont pas été tenus directement aux deux journalistes Des gens veulent toujours se précipiter pour écrire l’histoire secrète des évènements. Or cela ne se fait pas en trois heures dans la nuit.
D’ailleurs Ariane Chemin revient sur ce narratif au fil de ses apparitions télévisuelles. Il ne s’agit pas d’une dizaine de conseillers qui fomentaient la dissolution, mais plutôt d’une dizaine de conseilleurs qui avaient compris qu’elle était possible. Nuance !"
@ArianeChemin, journaliste du Monde à l’origine de l’article, nie avoir changé de narratif et maintient auprès de Marianne ses informations : « Aucun de ces conseillers parmi ces rares initiés n’a, que je sache, dit que c’était une mauvaise idée. Ils auraient pu la contredire, or ils ont même préparé et mis en musique cette dissolution. »
🧶 Pour @MarianneleMag, j'ai passé deux jours à #GrandeSynthe, sur les traces de Philippe, tombé sous les coups d'une ultra-violence qui tourmente la ville.
Pour comprendre qui il était et ce qui lui est arrivé, j'ai échangé avec sa famille, ses amis, les habitants, la mairie, la police.
Voici l'histoire de Philippe, 23 ans, dont les Grand-Synthois louent unanimement les qualités humaines, lui qui "ne ferait pas de mal à une mouche".
Il aimait jouer à Call of Duty et à FIFA, bien qu’il ne fût pas très branché foot. Il aimait les animes japonais, passer des journées avec son maillot des Lakers et aller à la salle, chez Basic Fit.
Il aimait les soirées de début d’été, celles où l’on boit, rit et se sent vivre. Il aimait partir en vacances à Thoiras, dans le Sud, ou en colonie, dans son Nord. Il aimait montrer des vidéos un peu bêtes à ses collègues pendant les pauses clopes.
Justement, il aimait son boulot d’éducateur, à la mairie et la maison de quartier. Grande-Synthe, en retour, l’aimait.
Après la marche blanche et le discours du frère de Philippe, son ami Yacine Bensaber a prononcé un poignant et profond discours, un cri du cœur pour la justice, car "Philippe n'est pas un fait divers" :
"Entendre la vérité pour que Philippe ne soit jamais oublié. Marcher comme on prie sans un bruit, avec recueillement et sincérité. Marcher aussi longtemps que dure la mémoire, marcher pour maintenir vivant les souvenirs de notre bien aimé. Marcher pour que le long silence du deuil trouve un écho en ce monde et que notre voix soit entendue.
Et si, sur le chemin, un mot vous vient, si vous devez formuler un hommage, si vous devez vous indigner, si vous devez dire un mot de soutien ou d'amour, si nous devons porter haut une parole pour que la vie jamais ne s'arrête, nous dirons haut et fort : que justice soit faite. Pour Philippe."
J'étais à #VieuxCondé, sur les traces de Philippe Mathot, tabassé devant sa maison par Yacine*, 17 ans, après s'être plaint du bruit.
Agressé le 5 juillet, Il est décédé le 11.
Voici l'histoire de l'ancien fleuriste de 72 ans, figure locale à Vieux-Condé.
@MarianneleMag 🧶👇
Philippe avait pourtant récemment échappé à la mort, et un AVC en janvier. D'un naturel anxieux, il veillait sur sa femme, malade, victime d'une embolie pulmonaire il y a peu.
"Mais bon on a un traitement ma femme et moi, et puis l'été arrive !", clamait-il début juillet.
Ce mercredi soir du 5, de l'autre côté de sa rue, dans ce squat improvisé entre deux pavillons de femmes âgées craintives : trois jeunes bruyants, et alcoolisés.
Philippe "qui aurait préféré baisser les yeux plutôt qu’avoir des histoires", ne vas pas, cette fois, les baisser.
aux sénateurs une commission d’enquête sur la mort de son frère.
Le ton ? Loin du "vous n'aurez pas ma haine"...
"Les "méchants" qui endossent le rôle de méchants, cela reste cohérent. Mais les "gentils" qui oublient d’endosser celui de gentils, comment les nomme-t-on ?
Mon frère, Samuel Paty, n’a-t-il pas rempli sa part du contrat social pour que l’État ne lui ait pas assuré sa protection ?
Dans le cas de l’assassinat de mon frère, l’absurdité de cette situation est illustrée par la volonté, en amont, de « ne pas faire de vagues »...