C'est la ville restée dans l'angle mort de nos suivis hier. Située sur la côte, bastion de l'opposition entre 2011 et 2013, avec une population à la fois sunnite et alaouite. La ville avait déjà subi un massacre en mai 2013, de la part de partisans du régime Assad sur les quartiers sunnites.
Hier, et encore ce matin, ce sont les quartiers alaouites qui ont été visés par des bandes armées. Au moins 50 personnes tuées sommairement, principalement des civils. Des jihadistes d'Asie Centrale, qui n'ont pas voulu se soumettre aux nouvelles autorités, sont accusés, ainsi que des membres des forces de sécurité, anciennement de l'ANS. 1/
Baniyas fut longtemps, dès 2011, un bastion de l'opposition syrienne. Aussi bien sunnite qu'alaouite par ailleurs. Plusieurs opposants alaouites au régime étaient notamment natifs de cette cité.
En 2013, le régime décide de briser cette ville frondeuse au coeur de son bastion côtier. Début mai, des centaines de miliciens d'Assad se déchainent, principalement dans les quartiers sunnites. Ce massacre a fait plus de 280 victimes, toutes civiles. Notamment des femmes et enfants. 2/
Le massacre de Baniyas, et d'al-Bayda, un village voisin, avait soulevé l'opprobre internationale. Des enquêtes sérieuses et approfondies avaient confirmé les actes criminels. Et des responsabilités directes du régime Assad et de ses cadres locaux, dont un chef milicien, Mirhac Ural (toujours recherché). 3/
Hier, 7 mars 2025, quand bien même il n'y a pas eu d'opérations d'importance des insurgés de l'ancien régime dans la zone de Baniyas, des bandes armées se sont déchaînées à leur tour.
Le bilan ne cesse de monter depuis plusieurs heures. Des dizaines de morts, principalement des hommes, mais aussi des familles entières. Dans deux quartiers alaouites de la ville, notamment al-Qusour. 4/
Les violences ont été sommaires, gratuites. Certaines actions ont été filmées, documentant les horreurs. En dehors de tout cadre judiciaire comme établi par les nouvelles autorités.
Les villages voisins ont également été touchés avec le même mode opératoire que dans d'autres campagnes côtières : des gens abattus sur leurs lieux de travail agricole. 5/
Plusieurs accusations circulent avec des témoignages qui commencent à être recueillis par les journalistes :
- des jihadistes d'Asie Centrale.
- des hommes des forces de sécurité et de l'armée nouvelle, issus des éléments venus de Homs (les troupes dirigées par Abu Amsha)
- des miliciens sunnites locaux (probablement en vengeance des massacres commis en 2013). 6/
Symbole du chaos jusqu'à ce midi du 8 mars 2025, les autorités syriennes ont décidé de déployer... de nouvelles forces de sécurité dans Baniyas afin de faire cesser les exécutions et les abus de ces bandes. C'est dire si le pouvoir syrien ne contrôle que très peu la situation et ne peut que réagir a posteriori. 7/
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Il fallait garder de la distance. Quelques frappées sur tous sites, très fortifiés au demeurant par les tortionnaires et tyrans du régime des mollahs, ne pouvaient pas mettre fin au programme nucléaire iranien. Pas même les assassinats concomitants menés par le Mossad ou par des frappes de Tsahal.
Le nucléaire iranien ce sont près de... 100 (oui vous lisez bien) sites nucléaires. Du plus important point de centrifugeuses au centre de recherche en passant par une simple casemate protégeant du matériel... C'est aussi un vaste complexe d'ingénieurs par milliers. On peut supprimer ici et là une tête ou deux, ou même plus, ça n'empêche que le système universitaire iranien produit désormais assez de chercheurs en capacité de tenir le projet... 2/
Alors quel était le but des frappes américaines, et même israéliennes en définitive ?
Et bien simplement dire à l'Iran que l'on sait qu'il a un programme nucléaire massif, qu'il est surveillé. Mais surtout, qu'il peut être interféré, parasité et ralenti quand il le faudra dans l'avenir.
Est-ce que cela aura été utile pour faire abandonner au régime toute perspective de bombe d'ici 5 à 10 ans, le retard probable que prendra le programme nucléaire iranien ? C'est tout le sujet... 3/
Bon, on va rentrer dans un sujet très sérieux. Beaucoup en Occident et en Israël imaginent une chute du régime iranien. Ce qui serait positif au demeurant.
Soit. Partons de ce principe, et dessinons le panorama d'un Iran où Khamenei ne tient plus le pouvoir. Le thread sera très long.
SPOIL : l'Iran ne sera pas une démocratie laïque libérale apaisée après. Et il ne faut donc en rien être naïf. 1/
Tout d'abord, rappelons les fondamentaux. L'Iran compte 90 millions d'habitants. Ils sont repartis dans le pays avec de grandes disparités en termes de densité. 70 % de la population vit dans une zone urbanisée. Plusieurs villes dépassent le million d'habitants. Mais Téhéran écrase par son poids : plus de 15 millions d'habitants. 2/
De nombreuses ethnies peuplent le pays. C'est une information importante pour la suite, en cas de chute du régime de Khamenei.
Les perses sont largement dominants. Mais il faut évoquer les kurdes, les baloutches, les turkmènes, les arabes notamment ahwazis, les lors, les azéris, les pachtounes...
Chacune de ces communautés est régulièrement présente dans un autre pays voisin. Ce qui a des implications nombreuses... 3/
L'Etat Islamique serait responsable de l'atroce et sordide attaque qui a visé, via un kamikaze, l'église de Saint-Elie à Damas. Il s'agit de la plus grave attaque de l'EI, s'il se confirme que le groupe est bien responsable, en Syrie depuis des années. Au moins 30 fidèles tués. Un massacre alors que le nouveau pouvoir réprimé, depuis plusieurs semaines, l'EI via des arrestations nombreuses.
L'EI révèle une posture de mauvais perdant revanchard et haineux. L'échec de son califat, détruit en 2019, et la mort de nombre de ses califes, notamment des mains d'HTS (un des califes du groupe a été traqué et abattu par les troupes d'Ahmad al-Sharaa il y a plusieurs années), se transforme en volonté de saccager toute possibilité de transition.
En visant une église, le groupe distille le venin de la dissension dans un pays déjà si fragile et en reconstruction...
Nous ne cessons d'alerter sur le problème... Et cela depuis des années et même encore ces dernières semaines.
Le nouveau pouvoir syrien a lancé une politique de recherche et d'élimination des cellules de l'Etat Islamique. Et voilà la réponse du groupe.
Il faudra encore attendre. Mais il se pourrait que les frappes américaines n'aient pas eu l'effet escompté, avec l'exemple du site de Fordo.
1) L'Iran avait évacué une large partie du matériel de Fordo vers un autre site (image satellite de gauche) ces derniers jours.
2) Les États-Unis ont visiblement prévenu le pouvoir iranien des frappes. C'est la méthode habituelle, comme ce fut le cas pour les frappes américaines en Syrie en 2017. Le régime des mollahs peut donc évacuer du personnel stratégique si nécessaire.
3) Les dégâts sur le site de Fordo sont doubles (image de droite) : sur les entrées du site d'enrichissement, afin de les combler (il faudra creuser pour y revenir) et sur ses hauteurs. Il faut savoir si les frappes sur leurs hauteurs ont réellement détruit les installations en dessous...
In fine, l'opération se dessine comme une demi-mesure. Les iraniens, et le renseignement US le savait, ont pu évacuer de larges parties des activités de Fordo. Et les frappes n'ont probablement pas détruit les installations globalement.
Dans les faits : le programme nucléaire iranien est ralenti pour 5 ans ? 10 ans ? Il faudra voir si le vrai objectif (qui était de forcer les iraniens à revenir sur la table des négociations) sera atteint...
Rappelons que l'essentiel était aussi de détruire les centrifugeuses du site de Natanz. Là encore, les autorités iraniennes ont été prévenues avant les frappes américaines par ces mêmes autorités américaines. Il faudra attendre, pour ce site précis, une vision plus claire.
Mais si c'est comme à Fordo, on est vraiment dans une opération qui confine presque davantage à la communication diplomatique par les armes (on peut vous frapper donc négocier), qu'à une vraie opération méthodique de destructions des capacités nucléaires iraniennes.
Le fait de prévenir l'adversaire, via des canaux intermédiaires, est une habitude peu connue des administrations américaines. En 2017, et en 2021, déjà, les États-Unis avaient prévenu la Syrie des Assad, via la Russie, des frappes qui allaient advenir.
Israël frappe l'Ahwaz (ou Ahwaz selon l'orthographe) ce 21 juin 2025.
Un choix stratégique qui va par delà des frappes sur des infrastructures militaires, sécuritaires ou nucléaires. Car l'Ahwaz, au delà d'être le coeur de la production pétrolière iranienne, est le bastion d'une minorité souvent rebelle au pouvoir : les arabes ahwazis.
Je vous présente cette minorité peu connue d'Iran et qui s'embrase régulièrement contre Téhéran... 1/
L'Ahvaz n'a pas d'existence institutionnelle en 2025 dans la République Islamique d'Iran. Aucune région ne porte ce nom. Mais elle est globalement centrée sur une région administrative qu'est le Khuzestan.
C'est une région stratégique. Elle accueille en effet une large partie de la production pétrolière iranienne... 2/
La géographie de l'Ahvaz, aux yeux des arabes de la région, dépasse largement le Khuzestan administratif (qui, par ailleurs, inclue aussi la minorité lor).
Ici, une infographie issue d'un groupe favorable à l'indépendance de l'Ahvaz dévoile un panorama bien plus large que le seul Khuzestan, prenant quasiment tout le bord côtier iranien sur le Golfe...3/
Éliminer le père, soit. Mais vous aurez peut-être le fils...
Dans le tourbillon informationnel sur l'Iran, et les prises de positions d'une partie du spectre politique, qui s'imagine que la chute du régime iranien serait une partie de plaisir, on oublie les ressorts de ce régime tyrannique.
Et l'un de ses ressorts est d'avoir déjà une génération suivante : et elle est notamment personnalisée par Motjaba Khamenei...
Je vous le présente aujourd'hui... 1/
Motjaba Khamenei, c'est l'histoire d'un homme préparé pour gouverner.
Son père, l'ayatollah Ali Khamenei, a régulièrement écarté toute décision de succession héréditaire du pouvoir. Mais les faits et le parcours de son fils ne peuvent donner à voir qu'une longue marche vers la capacité à gouverner. 2/
Né en 1969, Motjaba Khamenei a très rapidement poursuivi un cursus en théologie, notamment à Qom, ville essentielle pour le clergé chiite, où il eût pour enseignant... son propre père.
Les rumeurs, probablement propagées par son entourage, assurent qu'il a servi durant la guerre Iran-Irak. Sans que cela ne soit clairement établi. 3/