Clément Molin Profile picture
20 ans, Lyon 🇫🇷, étudiant en Relations Internationales à Lille, cartes, analyses et suivi des conflits 🇸🇩🇨🇩🇦🇲🇲🇲🇺🇦🇸🇴🇸🇾 Directeur d'@atummundi

May 22, 23 tweets

À Istanbul 🇹🇷, l’Ukraine 🇺🇦 a montré qu’elle était prête à négocier, la Russie 🇷🇺 qu’elle pouvait attendre

Moscou n'a pas intérêt à entrer en négociations et préfère temporiser. La stratégie ? Demander des concessions massives en continuant la guerre.

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En 2022, en Biélorussie puis à Istanbul, des négociateurs ukrainiens et russes se sont rencontrés pour négocier un cessez-le-feu.

Ces négociations n’ont pas abouti, notamment en raison de la grande divergence dans les objectifs : retrait russe/capitulation ukrainienne.

À l’époque, l’armée russe contrôlait environ 25 % du territoire ukrainien, puis environ 20 % après le retrait du nord de l’Ukraine.
Ce retrait n’a pas été négocié, il a été unilatéralement décidé par Moscou après son échec militaire, se tournant vers l'est et le sud du pays.

Depuis, il n’y a pas eu de nouvelles négociations ; seuls des échanges réguliers de prisonniers ont été réalisés, sachant que les Russes détiennent davantage de prisonniers ukrainiens (encerclements, notamment à Marioupol avec plus de 5 000 capturés).

L’arrivée de Donald Trump au pouvoir à Washington a changé la donne, tout comme la fixation d’un front dans une guerre de tranchées (seulement 3 000 km² de progression en 2024, un peu moins en 2023), meurtrière pour les deux camps.

Donald Trump a d’abord exercé une pression sur l’Ukraine, en coupant l’aide militaire et le soutien américain. Des tensions sont même apparues lorsque Zelensky s’est rendu à la Maison Blanche.

Cette pression sur l’Ukraine a été surmontée grâce à une longue médiation, qualifiée d’« épuisante », des leaders occidentaux pour convaincre Donald Trump de revenir à la raison.

On doit en partie le retour aux discussions à l’Arabie Saoudite, qui, une fois de plus, a joué un rôle en faveur de l’Ukraine, comme elle le fait régulièrement depuis le début de la guerre.

Cette diplomatie saoudienne envers l’Ukraine reste discrète. Elle vise à concurrencer Moscou, son principal rival dans la vente d’hydrocarbures, ainsi que l’Iran et les Émirats, qui soutiennent plutôt la Russie.

Les États-Unis et l’Ukraine sont parvenus à un accord sur les terres rares ukrainiennes, un accord qui semble relativement équitable comparé aux premières négociations.
Cependant, il faut garder à l’esprit que ces richesses ne se trouvent pas principalement à l’arrière du front.

La majeure partie des ressources ukrainiennes critiques est située dans le Donbass, dont la majorité est occupée.

Ce qu’il reste, ce sont des gisements sur la ligne de front, à Shevchenko, Pokrovsk, Dobropillia, ainsi que des usines à Kramatorsk ou Kostiantynivka.

Pour les États-Unis, l’exploitation de ces ressources implique la libération des territoires occupés, mais il n’est pas certain que l’administration américaine l’ait réellement intégré dans ses calculs.

Donald Trump a repris contact avec Vladimir Poutine, qui, une fois de plus, a vaguement évoqué sa disponibilité pour des négociations.

Pour montrer sa bonne foi, Moscou a unilatéralement annoncé des cessez-le-feu de quelques jours, tout en renforçant ses positions au passage.

Ces épisodes ont également prouvé que la Russie est à l’origine des décisions de cessez-le-feu et qu’elle serait donc en mesure de stopper la guerre elle-même.

Les États-Unis et les Européens ont proposé un cessez-le-feu de 30 jours. Poutine l’a refusé, arguant que le Kremlin était prêt à reprendre les négociations à Istanbul.

Zelensky a donné son accord et a pris l’avion pour Istanbul. La délégation ukrainienne n’a été accueillie que par les mêmes négociateurs qu’en 2022, Vladimir Poutine, ses hauts gradés ou ministres ne s’étant pas déplacés.

En réalité, cela montre clairement que Moscou n'a aucun intérêt à négocier un cessez le feu ou la fin de la guerre.

La Russie peut se permettre de continuer la guerre longtemps, et elle espère que l'Ukraine ou les occidentaux cèderont sur certaines de ses demandes.

En réalité, l'objectif de la Russie est de montrer une bonne volonté de négocier, en gagnant du temps. Cela doit lui permettre de garder Trump raisonnable dans son soutien à l'Ukraine, en espérant un abandon de l'aide à l'Ukraine.

Poutine espère l'impossible, que les 4 oblasts annexés le soient entièrement, c'est à dire que l'Ukraine se retire. C'est honnêtement impossible et c'est une ligne rouge. Soyons un tout petit peu réalistes.

Des postes comme celui-ci, publié par un compte qui suit la guerre, sont totalement pro-russe.

L'Ukraine devrait abandonner les 4 régions. En l'occurrence, la ville de Zaporizhia, 6ème ville d'Ukraine, l'ouest du Donbass, minier et industriel...

...mais aussi la région de Kherson libéré en 2022, permettant ce qui est impossible jusque là, la traversée de l'armée russe du Dniepr (à Kherson et Zaporizhia), permettant dans la prochaine guerre de s'en prendre Mykolaiv, Odessa, Dnipro ou Krivi Rih.

Hors sol.

La situation militaire est difficile, oui. Mais il ne faut pas abuser, elle l'est depuis 2014 et l'Ukraine tient depuis tout ce temps.

Si nous voulons être réaliste, nous pouvons dire que l'Ukraine a intérêt à un arrêt de la guerre maintenant, elle le veut, d'ailleurs.

Mais le problème ici, c'est bien Moscou. La Russie n'a pas vraiment intérêt à terminer la guerre maintenant, et les négociations bloquent à cause de la Russie.

Alors n'écoutons pas ceux qui n'ont toujours pas compris comment fonctionne la Russie de Poutine.

Les promesses ne seront pas tenues et la Russie lancera une nouvelle invasion. Lui abandonner l'Ukraine et une partie de ses territoires, c'est lui donner l'opportunité de recommencer.

La base de toute négociation est un gel du front et un cessez le feu...

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