Thread by @SciTania

J'ai l'impression de voir énormément d'informations convergentes dans ma veille anglophone et pas grand chose en francophone, donc c'est l'heure d'un thread : "Comment ne pas péter un câble en pleine crise sanitaire ?".
(Dont je muterai sans doute rapidement les notifications.)

Précision : je parle d'une situation de crise telle que nous la vivons actuellement (mi mai 2020) en France. C'est-à-dire avec un virus en circulation et des mesures préventives de restriction partiellement levées sans visibilité à moyen terme.

En gros tout tient dans une contradiction : un virus potentiellement mortel (et très balèze pour surcharger les hôpitaux et devenir encore plus mortel) circule MAIS, si ça a été utile pour calmer la crise, on ne peut pas non plus passer notre vie enfermés chez nous pour l'éviter.

Il se trouve qu'en fait, cette situation n'est pas si nouvelle que ça. Cet article de l'épidémiologiste @JuliaLMarcus fait un parallèle très intéressant avec le VIH : theatlantic.com/ideas/archive/…
Sur le long terme ça ne fonctionne pas de prôner l'abstinence totale.

On s'est tous bien rendu compte du point auquel le confinement est pénible (même avec 1h de footing autorisée). Et ce n'est pas une découverte que ce genre de situation peut avoir des effets sur la santé mentale, cf ce live, notamment :

Le plus raisonnable (tant que les hôpitaux ne sont pas re-saturés, et c'est une précision importante) ce n'est ni de rester cloîtré chez soi à angoisser, ni de faire comme si le virus avait disparu. C'est d'apprendre à vivre avec. Lisez "apprendre" en gras, souligné, police 72.

Par apprendre à vivre avec je veux dire :
- évaluer notre niveau de risque individuel en cas de contamination
- évaluer le niveau de risque des situations auxquelles on prend part
- savoir comment diminuer ce niveau de risque
- évaluer le risque des personnes qu'on expose

Et à partir de tout ça, ajuster nos curseurs de tolérance et y adapter nos comportements.
(Parce que dans une certaine mesure ça reste un choix individuel, même si les conséquences peuvent être collectives. Comme pour quelqu'un qui conduirait en n'étant pas sobre.)

J'aime l'idée d'un guide "vivre en temps de pandémie" (theatlantic.com/ideas/archive/…) et j'ai l'impression que ça commence à se construire, côté anglophone surtout.

Cet article fait par exemple une bonne synthèse : theconversation.com/how-do-you-sta…
1/ Si vous êtes susceptible d'être malade : soyez responsable et protégez les autres, restez chez vous.
2/ Si vous vous sentez bien et vos proches aussi, adaptez votre vigilance à votre niveau de risque.

Il y a un certain nombre de choses qui permettent de retrouver une vie sociale en gardant un risque de contamination limité :
- se voir dehors plutôt que dedans
- ne pas partager nourriture et boisson
- maintenir la distanciation physique et l'hygiène des mains

Les masques sont un des outils existants, avec l'objectif principal d'empêcher la personne masquée de contaminer son entourage. Un masque enlevé pour parler à quelqu'un ne sert à rien. Un masque porté en se serrant la main ne sert à rien. Ça s'ajoute au reste sans le remplacer.

La difficulté dans tout ça, c'est l'incertitude : comment adapter votre comportement alors qu'on ne sait pas à quel point il est risqué de faire telle ou telle chose ? (Ranger vos courses, mettre vos enfants à l'école...)

Je suis désolée, j'en ai déjà parlé un peu ici et je sais que l'incertitude est inconfortable. Mais ce virus est connu depuis moins de cinq mois, donc il va falloir faire avec.
Et être prêts à adapter nos comportements en cours de route.

S'adapter quand les connaissances progressent, ce n'est pas renier ses convictions et se montrer faible ou effrayé : c'est être responsable.

(Et ça ne veut pas dire que c'est facile ou confortable, donc si on pouvez éviter de se juger les uns les autres, au passage...)

Enfin, même s'il y a des incertitudes, on sait quand même des choses. D'où les recommandations que j'ai pu donner plus haut.

On sait notamment qu'il y a des situations plus à risque en terme de contamination que d'autres, cf cette chronique @lamethodeFC : franceculture.fr/emissions/radi…

Ou cet article de @kakape : sciencemag.org/news/2020/05/w… (qui a aussi fait des threads complémentaires :

https://twitter.com/kakape/status/1263076185724026885

).

Certaines situations sont déjà identifiées comme particulièrement risquées. Si vous pouvez les éviter tant mieux. Sinon soyez au taquet sur les gestes de prévention.

Petite liste :
1/ les situations de forte densité impliquant une proximité physique

2/ les rassemblements en intérieur, dans les lieux non ventilés (ou ventilés en circuit fermé)
3/ les situations où on parle fort/chante/fait un gros effort physique et qui augmentent la probabilité qu'une personne porteuse expulse beaucoup de virus

Si la situation vous pèse, au lieu de maintenir votre niveau de vigilance au top en permanence et de vous épuiser, identifiez les situations les plus à risque de votre quotidien (auxquelles vous ne pouvez pas échapper) et faites attention surtout dans ces moments-là.

Parallèlement, aménagez-vous des bouffées d'air frais pour vous ressourcer de la façon la plus sécurisée possible. Un apéro avec les copains ? Pourquoi pas, mais donnez-vous RDV chez celui qui a un jardin et adaptez votre nombre à la surface.

Bref : on ne sait pas combien de temps cette crise sanitaire va durer, mais ça se compte en mois voire en années. Organisez-vous pour tenir un marathon plutôt qu'un sprint. C'est forcément difficile de trouver son rythme au début mais ça sera important après. Prenez soin de vous.