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Allez, c'est parti pour le traditionnel exercice de début de semaine : qui suis-je et quel a été mon parcours, un thread que les gens qui me connaissent peuvent se dispenser de lire... mais vous verrez au fil de la semaine que mon parcours et mes préoccupations se recoupent.
On va remonter au lycée, ça suffira. A l'époque j'hésitais entre les sciences (pour devenir prof au lycée ou maître de conférence), les lettres (pour devenir autrice ou critique littéraire) et le théâtre (pour devenir comédienne).
Finalement j'ai décidé de faire des études en sciences en me disant que je pouvais toujours lire et faire du théâtre à côté alors que l'inverse marcherait moins bien. J'ai un peu lâché sur l'aspect littéraire (encore que, on en reparlera), j'ai bien tenu sur le théâtre.
J'en fais toujours, une quinzaine d'années plus tard. Et j'ai encore dans un coin de la tête l'envie de tout plaquer et d'aller passer des castings. Si mon chômage avait duré un peu plus longtemps, ça aurait sans doute fini comme ça (et peut-être raté, on ne saura jamais !).
Bref, je suis naïvement allée voir une personne du CNRS dans un salon d'orientation pro en fin de première et j'ai demandé comment faire pour devenir maître de conférence. Elle m'a dit "si vous avez de bonnes notes, l'idéal c'est de faire une prépa puis l'ENS". C'était parti !
Je n'avais ni chercheur dans mon entourage et ni proche ayant fait des études supérieures mais j'avais effectivement des bonnes notes. Je suis allée dans une petite classe préparatoire tranquille (axée biologie) et j'ai intégré l'Ecole Normale Supérieure sur concours en 2008.
C'est en arrivant à Paris que je me suis rendu compte que je n'avais pas vraiment le profil du normalien classique (et accessoirement que je n'étais pas faite pour vivre en ville). Pas grave, on s'adapte et on apprend !
J'étais particulièrement intéressée par la biologie cellulaire et moléculaire, en gros tout ce qui se passe à l'échelle d'une cellule, grand maximum. Les organes, les organismes, les populations... ce n'était pas mon truc. Puis il a fallu choisir une spécialité de master.
J'étais intéressée par la génétique et la virologie, j'ai finalement choisi la seconde et je ne l'ai jamais regretté ! (Et oui, je vous raconte ça parce que ça va nous resservir dans la semaine.) Je pourrais passer des heures à vous dire pourquoi la virologie c'est le top.
(En résumé : on peut étudier toutes les autres disciplines par le prisme de la virologie, de la biologie moléculaire à la sociologie. Et, malheureusement, on en a l'exemple sous les yeux ces derniers mois...)
Fana de molécules, j'étais plutôt intéressée par la virologie fondamentale et je suis partie à fond là-dedans. Pour mon stage de M1 à l'Institut Cochin, mes cours de M2 à l'Institut Pasteur puis mon stage de M2 et ma thèse à l'Institut de Génétique Humaine de Montpellier.
A l'exception de mes premiers mois de stage quand j'étais en licence, j'ai passé tout mon temps de recherche à travailler dans des laboratoires qui étudiaient le VIH (et vous remarquerez que j'ai fuis Paris dès que possible pour faire ma thèse en province).
Il n'empêche que j'ai découvert le milieu de la recherche sur le tas... et qu'il y avait quelques mauvaises surprises.

J'adorais le côté excitant de la recherche et de la construction de connaissances mais je n'avais pas mesuré le nombre d'échecs derrière chaque petit pas.
Galérer quelques semaines pour avancer un peu, ça m'allait. Galérer plusieurs mois pour finir par abandonner un projet, je l'ai moins bien vécu.

J'avais aussi beaucoup de mal avec l’ego de certains chercheurs et leur côté carriériste, parfois au détriment de la recherche.
Bref, c'était un quotidien moins confortable que je ne le pensais, avec des collègues pas toujours bienveillants ou animé par l'envie de faire progresser les savoirs.

Et en plus de ça, c'était extrêmement difficile d'obtenir un poste pérenne. Par-fait.
Comme beaucoup de doctorants j'étais arrivée naïve en me disant "c'est difficile mais c'est faisable, je peux y arriver". Et je me suis aperçue qu'en fait, même si c'était peut-être possible, je n'avais pas envie de tenter ma chance.
Ça impliquait trop de sacrifices, pour une probabilité de réussite maigre, une ré-orientation difficile en cas d'échec et une situation loin d'être idéale en cas de réussite.

Je me suis pas mal reconnue dans ce texte de @bio_drey : biodrey.home.blog/2020/02/15/let…
Sans compter que, déjà à l'époque, la situation de la recherche en France n'allait pas en s'arrangeant. J'ai régulièrement manifesté avec @SciencesEnMarch sur la fin de ma thèse, en 2014-2015.
Cf cette vidéo collector : dailymotion.com/video/x26hv1x (tournée dans le sous sol d'un labo)
(Et la situation de la recherche française ne s'est pas arrangée depuis, allez faire un tour sur le hashtag #LPPR si vous voulez voir où on en est.)
Bref, après neuf ans d'études et de travail pour devenir maître de conférence j'ai décidé d'arrêter la recherche et d'aller faire autre chose.

Mais quoi ?

Pas de faux suspens, vous savez comment ça a fini si vous avez lu le tweet épinglé ce matin.
Mais comme beaucoup de doctorants s'interrogent sur leur orientation post-thèse et que ça a été un moment clé de ma vie professionnelle, je vais prendre le temps de partager mon raisonnement de l'époque... après manger (le sens des priorités, toujours) !
Si vous voulez nourrir votre réflexion pendant que je remplis mon estomac, voilà le support d'une intervention que j'avais faite sur le thème "De la recherche à la vulgarisation" pour une journée professionnelle destinée à des jeunes chercheurs : bit.ly/PhDOutreach
Après un petit aparté général sur le choix d'une voie professionnelle après la thèse () passons à mon cas particulier.

Comment ai-je fini par bifurquer vers la vulgarisation ?
Quand j'ai décidé d'arrêter la recherche, je voulais partir vers un milieu avec moins de carriérisme et d'ego, plus de possibilités de changement de postes et plus de diversité dans les missions. Je voulais du sens et du contact avec le public.
Je me fichais du salaire ou de la possibilité de CDI, par contre je ne voulais pas être contrainte de vivre à distance de mon conjoint, je voulais garder du temps libre et je ne voulais pas avoir besoin de déménager tous les deux ans.
(Spoiler : j'ai échoué sur certains points, notamment le dernier, mais globalement, si ça colle à votre état d'esprit la culture scientifique est effectivement un domaine qui pourrait vous plaire.)
Au final j'hésitais entre l'enseignement supérieur (via l'agrégation de Biochimie Génie Biologique) et la culture scientifique. J'avais eu l'occasion de pratiquer les deux pendant ma thèse et, a posteriori, j'ai pu peser le pour et le contre de chacun plutôt correctement.
L'enseignement avait l'avantage de la stabilité, mais de grosses contraintes géographiques (vive l'éducation nationale...). En plus il nécessitait de repasser un concours (je n'avais pas envie d'enchaîner thèse et prépa agrég) et j'avais peur de la monotonie des tâches.
A l'inverse le principal inconvénient de la culture scientifique était la difficulté de réussir à y mettre le pied sans aucune formation ou expérience professionnelle dans le domaine (et je ne voulais pas refaire une formation sans certitude d'emploi à la fin).
Du coup ma stratégie était :
- plan A : chercher du travail dans la culture scientifique
- plan B : m'inscrire à l'agrég en candidat libre pour pouvoir au moins tenter ma chance
J'ai soutenu ma thèse en juillet 2015, ça me laissait une petite année avant la prochaine session.
Je ne m'attendais pas à ce que ce soit facile mais j'étais confiante. Je guettais les postes dans la vulgarisation et la communication scientifiques, sans contrainte géographique (mon conjoint pouvait demander une mutation) et j'avais pas mal d'expérience extra-professionnelle.
J'avais organisé trois congrès, été chargée de comm d'une asso, animé des ateliers pédagogiques dans plein de contextes, participé à MT180, monté mon propre projet de vulgarisation (par le théâtre, avec des chercheurs) qui avait été sélectionné au congrès @Science_and_you...
Pour une personne sortant de thèse, c'était déjà pas mal. D'ailleurs j'avais eu mon premier entretien d'embauche une semaine avant ma soutenance et j'avais été classée deuxième sur le poste, derrière une personne plus expérimentée. Ça partait plutôt bien.
La vérité c'est que l'année qui a suivi ma soutenance de thèse a été horrible. Finalement mon conjoint a été muté à l'autre bout de la France avant que je ne trouve du travail et j'ai perdu tout mon réseau professionnel. J'ai envoyé des dizaines de candidatures sans réponse.
Pourtant je visais large, à la fois sur les types de postes et sur la localisation géographique.
Mais ça ne marchait jamais. Et à chaque fois que j'avais un entretien, j'étais systématiquement classée deuxième derrière une personne avec plus d'expérience.
J'ai continué à développer mon réseau, j'ai continué à acquérir de l'expérience et remplir mon CV (j'ai fait des vacations comme médiatrice, un stage comme chargée de communication, j'ai lancé ma chaîne Youtube...)
Rien
à
faire.
Donc avis aux jeunes chercheurs qui veulent se lancer dans la médiation (il y en a de plus en plus) : ne vous attendez vraiment pas à ce que ce soit facile.
Finalement l'année qui a suivi ma thèse a été bien plus pénible que la période la plus pénible de ma thèse.
Quand est venue la période de l'agrégation, j'étais toujours au chômage. Et j'ai appris qu'il fallait revenir dans la région où on s'était inscrit pour passer les écrits.
Je m'étais inscrite à Montpellier. Je vivais en Normandie. Je n'avais pas eu le temps ne serait-ce que d'ouvrir un livre pour réviser un peu et j'avais le moral dans les chaussettes : je n'ai jamais passé les écrits de l'agrégation, adieu plan B.
Une des difficultés à l'époque était que la plupart des postes "en bas de l'échelle", parfaits pour se lancer, étaient des contrats aidés évidemment inaccessibles pour une personne qui venait de valider un Bac + 8.
Ces contrats n'existent plus mais je ne sais pas ce que ça donne aujourd'hui. Entre les masters de médiation/communication scientifique et les services civiques, il me semble que ça doit rester délicat pour un jeune docteur de décrocher un premier poste dans la CSTI.
En tous cas ma situation est devenue plus simple quand j'ai basculé dans la catégorie "chômeur longue durée" et que j'ai pu candidater sur les postes en contrat aidé !
Après plus d'un an de galère, j'ai été acceptée sur deux postes la même semaine.
C'était un soulagement énorme : j'avais soutenu ma thèse en juillet 2015, j'ai décroché mon premier poste de médiatrice en novembre 2016.
Il y avait quand même un soucis : les deux postes étaient en région parisienne.
Je rappelle que je vivais en Normandie, que ne pas m'éloigner de mon conjoint était une de mes priorités et que j'avais volontairement fui Paris pour faire ma thèse en province.
Mais bon, il faut ce qu'il faut ! Après un chômage si long, on fait des compromis.
J'ai accepté un contrat à temps partiel en centre ville de Paris et je me suis retrouvée à faire des allers-retours hebdomadaires en train et à vivre la moitié de la semaine dans une minuscule caricature d'appartement parisien sans fenêtre.
Entre le coût des trajets, le deuxième loyer et le montant logiquement peu élevé du salaire (contrat aidé + temps partiel), je perdais littéralement de l'argent en travaillant. Mais j'avais enfin un travail, il était temps !
On est d'accord, dit comme ça, ça ne fait pas super envie. Mais ce que j'ai caché pour l'instant c'est que je venais d'être recrutée en tant que médiatrice scientifique par le @groupeTraces, pour intervenir avec des scolaires et animer des ateliers à l'@ESPGG !
Autrement dit, même si j'avais trouvé l'entretien d'embauche agréable, je ne m'étais pas encore rendu compte que c'était sans doute le meilleur premier poste sur lequel je pouvais tomber !
Vu mon profil, mes envies et mes questions, j'étais pile à l'endroit dont j'avais besoin !
C'était d'ailleurs là-bas que je travaillais la première fois que je suis intervenue sur ce compte : comscicomca.org/2017/01/01/tan…
J'avais enfin mis un pied dans la porte pour accéder au milieu professionnel de la culture scientifique... et on en reparlera en fin de journée parce que c'est l'heure d'aller travailler maintenant !
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