Un peu partout, on abat des #statues de personnes associées à l’esclavage ou à la colonisation. Des gestes qui divisent énormément.. La question de la destruction des statues païennes traverse également la littérature scandinave médiévale. Un thread ⬇️! #histoire#medievaltwitter
Le christianisme, héritier de l’Ancien Testament, reconnait l’autorité du second commandement qui interdit toute représentation figurative, en particulier celles des dieux païens ("tu ne feras pas d'idoles...")
Les auteurs chrétiens accusent souvent les « idoles » d’être dénuées de pouvoir ; selon un autre argument, souvent mise en scène dans les vies de saints, les idoles pouvaient être habitées par des démons se faisant passer pour des dieux afin de mieux tromper les hommes...
D’après les sagas islandaises, la destruction des idoles païennes représente l’un des éléments essentiels de la christianisation.
Même s’il faut bien retenir que ces textes sont rédigés à partir du XIIe siècle, à un moment où les Scandinaves sont (majoritairement) chrétiens. Ils repensent donc leur passé païen à l’aune d’une culture classique, latine et biblique, nouvellement acquise...
Dans son histoire des rois de Norvège, la Heimskringla (vers 1230), l’écrivain islandais Snorri Sturluson décrit la conversion de la Norvège par les deux rois Olaf : Olaf Tryggvason et Olaf Haraldsson, dit saint Olaf.
Dans ce récit, en grande partie imaginé, les deux rois Olaf éliminent les #statues des dieux païens. Au besoin par la ruse : Olaf Tryggvason accepte de participer à un sacrifice religieux païen, pénètre dans le temple de la région de Mærin et abat l’idole de Thor...
Dans un passage de sa saga, saint Olaf, lui, détourne l’attention des païens en pointant le doigt vers le soleil levant, et en profite pour briser la statue du dieu Thor, « dont sortirent des souris grosses comme des chats, des vipères et des serpents. »
On retrouve ici le thème de la présence démoniaque habitant les idoles, symbolisée par la foule de vermines s’échappant de la statue. Dans ces deux cas, la destruction des idoles contribue autant à la christianisation qu’à l’unification du royaume autour du roi chrétien
Le danois Saxo Grammaticus, dans sa Gesta Danorum (vers 1210), raconte l’expédition lancée en 1168 par le royaume danois (chrétien) contre l’île de Rügen, peuplée alors par des païens - ou plutôt des apostats, convertis au christianisme puis revenus à leur foi païenne
L’auteur insiste sur l’importance de la destruction des statues : les Danois détruisent l’idole du dieu local (un certain Svantevit), la font transporter hors de la cité par des esclaves et la découpent en morceaux, dont ils se servent pour... allumer des feux de cuisine !
La destruction est volontairement violente et humiliante. Comme dans les récits de Snorri, la destruction des idoles est autant un acte religieux que politique : cette destruction est perçue comme étant à la fois le but et le moyen de la conquête militaire
Au Moyen Âge, la statuaire est étroitement associée aux sphères entremêlées du politique et du religieux. Les médiévaux représentaient plus volontiers la destruction des #statues comme un honorable geste de conquérant ou de missionnaire que comme un acte de rébellion
Mais cela ne les empêche pas d’avoir saisi l’aspect éminemment subversif de la destruction des statues. Abattre les statues, ce n'est jamais "effacer l'histoire", mais rejeter les valeurs et les croyances au nom desquelles elles ont été érigées et conservées.
Aujourd’hui comme au Moyen Âge, abattre les statues est un acte politique qui peut être mis au service d’une cause ou d’une autre. Toutes les statues n’ont pas la même fonction et tous les iconoclasmes n’ont pas le même sens...
Rejeter une statue hors de l’espace public, ce n’est pas effacer de l’histoire ce qu’elle représente, c’est cesser de l’honorer comme un reflet fidèle de nos valeurs. Nicolas @Offenstadt l’a parfaitement dit :
Quand les rois Olaf détruisaient les statues du dieu Thor : retrouvez notre article du jour, rédigé par Jules Piet, sur notre site : actuelmoyenage.wordpress.com/2020/06/25/des…
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A l'heure de faire l'appel et de découvrir les prénoms de nos élèves, saviez-vous que le Moyen Âge est une période marquée par un changement complet dans la manière de nommer les gens ?
On parle de "double révolution anthroponymique", et c'est passionnant. Un thread ⬇️
Première révolution : la fin des noms romains/romanisés et, notamment, du système des tria nomina (Marcus Tullius Cicero). Avec l'arrivée en Occident de peuples germaniques, ces noms passent peu à peu de mode, même si certains survivent (Marcus, Julius, Felix, etc).
A leur place, on voit apparaître des prénoms... germaniques ! Clovis, Sigebert, Dagobert, Galswinthe, Brunehaut... Ou, moins connus, Leutgarde, Fryshilde, Gansbold, Hildevoud, Protline, Framberte... (oui je sais ça fait rêver hein ?)
Un soldat africain pendant la bataille d'Hastings (1066) ? Réponse de médiéviste : 1/ c'est possible ; 2/ c'est très improbable ; 3/ on s'en fiche car c'est de la fiction ; 4/ ces réactions outrées sont très signifiantes.
1/ C'est possible. Les sociétés anciennes sont plus connectées qu'on ne le pense souvent, et l'Afrique, y compris l'Afrique subsaharienne, n'est pas coupée de la Méditerranée. Il y a des flux de biens et de personnes (marchands, soldats, esclaves, pèlerins, etc).
1/ Ces flux ont d'ailleurs laissé des traces archéologiques, y compris en Grande-Bretagne : dans cet article, des fouilles dans un cimetière anglais du VIIe siècle ap JC où on a retrouvé une personne ayant un ancêtre récent originaire d'Afrique de l'Ouest
On a pris notre courage à deux mains avec @HMedievale et on a regardé « Saint Louis raconté par Philippe de Villiers » diffusé dimanche soir sur CNews. On n’a pas été déçu du voyage, car comme toujours de Villiers propose une vision très personnelle...
Un fil à dérouler ⬇️!
Tout d’abord, deux éléments de contexte. 1/ Philippe de Villiers s’est sans doute appuyé pour cette émission sur son livre « le Roman de saint Louis » publié en 2014, qu'on a lu. 2/ L'émission est sortie dimanche 24 août, veille du 25, jour de la Saint-Louis.
Dès le début, Villiers annonce la couleur : « la vie de saint Louis est un trésor. Les enseignements que j’en ai tiré sont des lumières pour aujourd’hui ». Saint Louis « incarne le beau, le grand, le bien [et] notre civilisation, qui est la civilisation chrétienne »
Quand on pense à la Muraille de Chine, on imagine souvent un édifice comme le Mur dans Game of Thrones...
Mais de nouvelles fouilles archéologiques montrent que ces fortifications médiévales avaient des buts variés, et souvent plus civils que militaires. Un thread ⬇️
Ici, on n'est pas dans la partie la plus célèbre de la Muraille de Chine, mais dans ce qu'on appelle le Medieval Wall System, un ensemble de fortifications de 4000km de long construit entre le Xe et le XIIe siècle, essentiellement par la dynastie Jin
Les archéologues ont fouillé une partie du mur et un fortin situés sur la partie mongole de cet ensemble. Or, la surprise, c'est que le mur en lui-même est un simple fossé accompagné d'une petite pile de terre. Aucune efficacité contre une armée d'envahisseurs... !
Au début de l'année 1195, Lothaire de Segni, un clerc qui va ensuite devenir pape sous le nom d'Innocent III, écrit un petit traité intitulé "Misère de la condition humaine". Il est ici traduit et commenté par O. Hanne (@BellesLettresEd). Un thread (déprimant 😅)⬇️!
Ce texte s'inscrit dans le contexte des traités du type "Mépris du monde", souvent écrits par des moines, qui listent les raisons de détester et de se détacher du "monde", càd du siècle, de la vie laïque avec ses tentations et ses péchés.
Classiquement, le futur pape explique ainsi que l'être humain est bien malheureux. Fabriqué par Dieu dans la terre, la moins noble des substances, conçu dans "le vil sperme", il vient au monde au milieu du sang, des larmes et des cris.
Vous avez (trop) chaud ?
Et si je vous disais que durant les croisades, les croisés ont eux aussi souffert de la chaleur, au point parfois... de mourir ? Je ne sais pas si ce thread va vous rafraîchir, mais ça vous cultivera... Un thread ⬇️!
La chaleur frappe violemment les croisés quand ils arrivent en Orient. Les chroniques de la croisade le répètent tout le temps, preuve que ça a marqué les contemporains : "les nôtres étaient brûlés par la chaleur dévorante", "la chaleur avait grandement affaibli l'armée"
Les mois d’été sont les plus redoutables. Les auteurs mettent en garde contre le « redoutable mois d’août » ou encore contre « juillet, mois insupportable à cause de l’ardeur du soleil ». Autant que possible, on décale les opérations militaires pour éviter d'agir en plein été.