My Authors
Read all threads
(1/n) Comment la prise en compte des services publics a gravement faussé la comparaison des taux de croissance des pays européens au premier semestre.
De nombreux articles ont comparé ces derniers jours la chute du PIB observée au sein des différents pays européens. La presse anglaise a par exemple largement commenté la très mauvaise performance du Royaume-Uni. ft.com/content/c8b172…
Si l’on compare l’évolution du PIB sur l’ensemble du premier semestre, l’Espagne enregistre la pire performance, suivie de peu par le Royaume-Uni.
Ces chiffres sont naturellement à prendre avec précaution et ont vocation à être révisés. Mais la plupart des observateurs n’ont pas remarqué à quel point les divergences d’approche dans la prise en compte de la contribution des services publics au PIB faussent les comparaisons.
Comme vous le savez sans doute, le PIB peut se calculer comme la somme de l’investissement, de la variation des stocks, du commerce extérieur et des dépenses de consommation des ménages et des administrations publiques.
Les dépenses des administrations publiques représentent près d’1/4 du PIB dans les pays européens : il s’agit donc d’une composante très importante (santé, éducation, etc.).
Comme les biens et les services produits par les administrations n’ont en général pas de prix de marché, ils sont souvent valorisés comme la somme des coûts nécessaires pour les produire. Ces coûts sont composés principalement de la rémunération des agents publics.
Reste à savoir comment tenir compte de l’impact de la crise sanitaire sur ces dépenses.
Faut-il considérer que les salaires publics ont été versés et donc que la production des services publics a suivi son cours normal ? Ou faut-il tenir compte de la baisse d’activité et du fait que certains agents n’étaient ni au travail, ni en télétravail ?
Eurostat a très vite vu le problème et a essayé d’unifier les approches en publiant des lignes directrices en la matière. ec.europa.eu/eurostat/docum…
Malheureusement, les chiffres détaillés du premier semestre, déjà disponibles pour quelques pays, montrent une énorme divergence d’approche entre les pays, qui faussent grandement les comparaisons.
Dans certains pays, la consommation des administrations publiques a continué d’augmenter (ex : Allemagne, Espagne), alors qu’elle s’est effondrée dans d’autres (France, Royaume-Uni).
Comment est-ce possible ? L’Insee explique avoir considéré conventionnellement qu’un quart des fonctionnaires hors santé n’ont pas travaillé pendant le confinement et n’ont donc pas contribué au PIB. Pour la santé, l’hypothèse d’une stabilité de la production a été retenue.
Son homologue britannique indique pour sa part s’être appuyé sur des indicateurs en temps réel, ce qui a conduit à comptabiliser une baisse plus importante encore de la production des services publics. blog.ons.gov.uk/2020/08/25/pub…
À l’inverse, on peut penser que dans des pays comme l’Allemagne ou l’Espagne, dès lors que les salaires publics ont continué à être versés, il a été décidé de considérer la production des services publics comme maintenue.
Cette différence d’approche explique aussi pourquoi l’indicateur d’inflation utilisé pour calculer le PIB à prix constants (= le déflateur du PIB) s’est envolé en France et au Royaume-Uni mais pas en Allemagne et en Espagne.
Comme les salaires publics ont bien été versés en France et au Royaume-Uni malgré la baisse de la production des services publics, le différentiel a été comptabilité comme une forme d’inflation des prix à la production.
De tels écarts méthodologiques sont en tout cas très surprenants, surtout entre pays européens. Espérons qu’Eurostat permette d’harmoniser tout cela rapidement.
En attendant, on peut essayer de rendre les taux de croissance des pays européens plus comparables en neutralisant grossièrement ces différences d’approche.
Voilà par exemple les taux de croissance du PIB recalculés en supposant dans l’ensemble des pays que les dépenses de consommation des administrations publiques soient restées stables par rapport à leur niveau d’avant-crise (= quatrième trimestre 2019).
Le différentiel de croissance entre la France et l’Allemagne est ainsi réduit de moitié (!) tandis que l’Espagne apparaît de loin comme le pays européen ayant subi la plus forte chute du PIB, alors qu’elle est dans les chiffres officiels au coude-à-coude avec le Royaume-Uni.
Je serais en tout cas ravi d’avoir l’avis des spécialistes de comptabilité nationale sur le sujet (cc. @J_Pouget), car je suis loin d’avoir leur compétence en la matière.
Missing some Tweet in this thread? You can try to force a refresh.

Keep Current with fipaddict

Profile picture

Stay in touch and get notified when new unrolls are available from this author!

Read all threads

This Thread may be Removed Anytime!

Twitter may remove this content at anytime, convert it as a PDF, save and print for later use!

Try unrolling a thread yourself!

how to unroll video

1) Follow Thread Reader App on Twitter so you can easily mention us!

2) Go to a Twitter thread (series of Tweets by the same owner) and mention us with a keyword "unroll" @threadreaderapp unroll

You can practice here first or read more on our help page!

Follow Us on Twitter!

Did Thread Reader help you today?

Support us! We are indie developers!


This site is made by just two indie developers on a laptop doing marketing, support and development! Read more about the story.

Become a Premium Member ($3.00/month or $30.00/year) and get exclusive features!

Become Premium

Too expensive? Make a small donation by buying us coffee ($5) or help with server cost ($10)

Donate via Paypal Become our Patreon

Thank you for your support!