Savez-vous que le dans la nuit du 18 janvier 1982, un militant écologiste attaque le chantier de la centrale #nucléaire Superphénix (Creys-Malville) au lance-roquettes ?
C’est parti pour un petit thread sous forme d’enquête sur cet attentat longtemps resté mystérieux…
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C’est parti pour un petit thread sous forme d’enquête sur cet attentat longtemps resté mystérieux…
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1/ Avant-propos : Pour rappel, je tente, au mieux, de faire des threads « neutres. Ce thread ne sera pas un procès du mouvement antinucléaire, tout comme mes threads sur les accidents ne sont pas des procès contre l’industrie nucléaire. On y va !
2/ Si des oppositions au nucléaire civil (mais surtout militaire) existent dans les 60’s, ce n’est qu’au milieu des 70’s que le mouvement antinucléaire prend de l’ampleur en France. Différentes formes de contestations coexistent alors.
3/ On trouve, en parallèle des dizaines de manifestations qui se déroulent près des sites en construction ou en projet, des organes d’informations comme le GSIEN (Groupement de scientifiques pour l'information sur l'énergie nucléaire) créé en 1975 par Monique Sené.
4/ Les oppositions vont parfois prendre une tournure beaucoup plus radicale. En 1977 par exemple, une manifestation déborde sur le futur site de Superphénix. Un militant antinucléaire, Vital Michalon, est tué par le souffle d’une grenade offensive lancée par un policier.
5/ Les 70’s sont également marquées par de nombreuses dégradations de matériels et même des attentats à l’explosif sur des sites nucléaires en construction comme à Brennilis et Fessenheim en 1975. En 1977, Marcel Boiteux, le DG d’EDF, échappe à un attentat à son domicile.
6/ A chaque fois, ces attentats sont revendiqués par des mouvements d’extrême gauche et/ou des indépendantistes (Front de libération de la Bretagne pour Brennilis et Ulrike-Meinhof-Puig-Antich pour Fessenheim).
7/ En janvier 1982, un événement va particulièrement marquer les esprits. A cette époque, la construction de la centrale Superphénix (réacteur à neutrons rapides) est en cours (elle démarre en 1984) et les travaux de génie civil sont bien avancés (vidéo à l’automne 1981).
8/ Dans la nuit du 18 janvier 1982, 5 roquettes sont tirées en direction du site. 2 d’entre elles pénètrent sous le dôme encore ouvert de la centrale….
9/ Les 2 roquettes touchent la structure et causent des dommages minimes, mais elles manquent toutes le cœur du réacteur encore vide de combustible. L’objectif des assaillants est manqué, le chantier de construction n’est pas retardé.
10/ Néanmoins, l’événement est un choc, notamment pour la vingtaine de travailleurs présents dans le réacteur. En effet, il ne s’agit plus d’un « plasticage » mais d’une attaque à l’arme de guerre !
11/ D’ailleurs, preuve que les assaillants voulaient médiatiser cet acte, un lance-roquette « soviétique » de type « RPG-7 » est retrouvé sur l’autre rive du Rhône (vidéo : Nord vietnamien tirant au RPG-7, guerre du Vietnam).
12/ Les auteurs de l’attaque ne sont pas retrouvés et celle-ci n’est pas revendiquée… Malgré plusieurs pistes menant au terroriste Carlos, l’affaire ne sera jamais résolue. Elle est classée sans suite en 1999 et que la centrale de Superphénix est définitivement arrêtée.
13/ Mais, en 2003, alors que le délai de prescription (Suisse) de 20 ans est passé, le suisse Chaïm Nissim sort de silence. Après des passages dans les médias pour tenter de s’expliquer, il publie un livre au nom évocateur : L'amour et le monstre-Roquettes contre Creys-Malville.
14/ Ingénieur, militant contre le nucléaire, Chaïm Nissim participe activement aux manifestations en 1976-1977 contre le projet Superphénix.
15/ Il raconte qu’après 1977, il a formé un groupe clandestin avec une poignée d’autres militants radicaux avec qui il dynamite des pylônes, fait sauter des machines de chantier, incendie un bureau d'ingénieurs…
16/ Il explique également que « depuis le donjon d’un petit château en ruines, on avait une vue imprenable sur le site de Malville. C’est comme ça que nous avons eu l’idée de tirer ». L’équipe se met à la recherche d’une arme….
17/ Après plusieurs années de contacts avec des réseaux terroristes d’extrême gauche, notamment les terroristes allemands de la Fraction armée rouge (la bande à Baader), très actifs à l’époque, la recherche aboutie.
18/ En septembre 1981 un lance-roquettes « RPG-7 » et ses munitions sont remis à Bruxelles à Chaïm Nissim par l'intermédiaire des cellules communistes combattantes, un groupe terroriste belge en lien avec le terroriste Carlos.
19/ Quelques mois plus tard, dans la nuit, posté à 600 mètres de la centrale illuminée, Chaïm Nissim tire 5 fois sur Superphénix…
Mais son histoire ne s’arrête pas en 1982. En 2003, ses aveux étonnent car ce personnage n’est pas un inconnu en Suisse et en France.
Mais son histoire ne s’arrête pas en 1982. En 2003, ses aveux étonnent car ce personnage n’est pas un inconnu en Suisse et en France.
20/ En effet, Chaïm Nissim s’engage en politique après son attentat. En 1985, il est élu au Grand Conseil du canton de Genève, sous les couleurs des Verts. Il siège de 1985 à 1989 puis de 1993 à 2000, puis démissionne en automne 2000.
21/ Ce personnage troublant s’expliquera longuement à la télévision suisse, se questionnant sur l’intérêt de son acte sans néanmoins présenter de remords, ce qui créera un petit choc en Suisse et en France. Il sera renié par les verts.
22/ Une plainte pénale est déposée en mai 2003 par le Conseil Mondial des Travailleurs du Nucléaire (WONUC) mais, à ma connaissance, celle-ci n’a pas abouti.
23/ Atteint de la maladie de Parkinson, Chaïm Nissim meurt le 11 avril 2017 par l'aide au suicide. Ainsi se termine l’histoire de l’attaque la plus spectaculaire contre une centrale nucléaire en Europe.
