Thread by @AssoACABB

#Decryptage

Vous avez la flemme de regarder cette vidéo de @Mediapart sur la façon dont la police a truqué l'affaire #VitryChatillon avant de pleurer partout que la justice innocentait des innocents ?

L'@AssoACABB est là pour vous !
#Thread

Voici donc une analyse, sans doute non exhaustive, de ce que l'on peut retenir de cette vidéo :

Tout d'abord superficiellement, on y voit des policiers qui trafiquent des procès verbaux tout en étant filmés. La garde à vue est filmée, enregistrée, même les moments "off", et ça ne les empêche pas de tout simplement écrire ce qu'ils souhaitent sur le procès verbal.

Ensuite on voit qu'un avocat n'est pas là forcément pour défendre son client. Ici on à affaire au cas d'école du "baveux", ce commis d'office qui à autre chose à faire de sa soirée et qui est prêt à conseiller à son client de faire une fausse déclaration plutôt que de rester.

On y voit aussi un peu plus loin dans la machine à brouiller qu'est une enquête dans une police où l'impunité règne, où la conviction d'être en train de "nettoyer" est plus forte que le besoin de faire correctement son travail.

Plus clairement on y voit des policiers faire ce que toute personne qui a déjà fait au moins une garde à vue connait :
Ils mentent, maltraitent, mettent une pression mentale incroyable, construisent des aveux, dirigent l'entretient dans le sens qu'ils souhaitent donner.

C'est particulièrement visible quand après avoir dit à un des accusés qu'ils avaient toutes les preuves qu'il était coupable, les enquêteurs se retirent et en apparté (mais enregistrée par la caméra) s'avouent qu'il est innocent. Avant de le "rattacher" à l'affaire.

On y voit aussi une technique très connue et très discutée en psychologie et psychologie sociale, l'induction de souvenirs.
Quand son client continue à réfuter l'accusation, son baveux n'hésite pas à tenter de le convaincre… qu'il se trompe. Que ses souvenirs sont faux.

Globalement, il prend son client, en situation de détresse, fragilisé par l'interrogatoire à charge qu'il subit depuis déjà plusieurs jours, à part, profitant de la faiblesse, pour lui dire qu'il peut avoir volontairement oublié, lui créant même un exemple (dont on peut douter)

Au point que ce jeune homme en vient à douter de son propre esprit. C'est ignoble, c'est à la limite de la torture psychologique et… c'est gardé au procès verbal.

Mais décrire une vidéo n'en fait pas un décryptage, on est pas chez @BFMTV ici. Donc qu'est-ce que cette vidéo permet de déduire plus globalement ?

Tout d'abord que les auteurs de ces faux témoignages ne le font pas par hasard. Tout est rodé, ils se connaissent visiblement, et connaissent les procédures, savent les contourner. Il est légitime de penser que c'est loin d'être la première fois qu'ils font ça.

Ensuite, que s'ils le font c'est qu'ils se sentent en confiance, légitimes à agir ainsi. On peut se dire que c'est assez commun dans la police mais ça veut aussi dire qu'ils ont conscience qu'ils seront couverts quoi qu'il arrive. Et ça ne traine pas, vu que le chef de la PN -

- cité en fin de témoignage dit bien qu'il ne veut pas d'un procès des enquêteurs.

Et s'ils se sentent protégés, libres d'agir ainsi, c'est aussi démonstratif d'un disfonctionnement global :
À toutes les échelles, des avocats au parquet, du commissariat à la prison, pendant 4 ans alors que tout était à disposition, personne n'a remit en question cette version.

Leurs collègues, leur hiérarchie, le procureur… personne n'a tenté d'éteindre les flammes avant le procès. L'un des innocentés a fait 4 ans de prison pour rien. Un autre un an pour autant.

Et ne tombons pas dans l'angélisme en se disant que la justice a fini par démêler le vrai du faux dans cette affaire : combien de personnes ont tout de même été écroués sur des bases aussi faibles ? Combien d'affaires ont été menées ainsi sans que ça n'emoeuve personne.

Parce que si ça échouait, les policiers n'auraient même pas tenté cette manipulation. Ils savent que ça à marché dans le passé et que ça marchera dans l'avenir. Là ce n'est qu'un accroc que les syndicats ont tenté de cacher sous des propos ignobles réclamant la mise au pas de -

- la Justice sur leurs propres convictions. Ils veulent éviter qu'à nouveau leurs techniques mafieuses ne s'essoufflent et s'ébruitent.

Enfin, nous voulons revenir sur l'attitude des accusés innocents. Ils sont innocents, le savent, le répètent. Mais on voit dans cette vidéo un profond desabusement, une rédition précoce. Ils savent qu'innocents ou non, si le policier en face d'eux veut leur tête, il l'aura.

Des années de coercition raciste, héritée des préfectures coloniales, de violence quotidienne, physique ou morale on finit par en faire des accusés par défaut, des coupables quoi qu'il arrive dans leur propre esprit.

Et après on ose demander pourquoi ces quartiers ne respectent pas la police ou l'État ? À quoi bon, quand ils savent qu'aucun de leurs droits ne sera respecté si les institutions ont soif de sang ?

Il faut conclure.
Évidemment nous n'apprenons pas cette réalité, elle est connue, documentée, montrée par les militant·e·s, les médias et les sciences sociales depuis des décennies. Mais il nous semblait nécessaire de mettre des mots précis, de décrire frontalement ce que cette -

- vidéo ne fait que suggérer parfois bien trop timidement. Pas pour les gens qui subissent ces traitements, qui n'ont pas besoin de nous et que nous soutenons du plus profond de nos cœurs, mais pour ceux qui doutent ou qui nient la douloureuse mais non moins éclatante véritée.

Soutien à nos camarades, aux innocents, aux moins coupables que ce que la justice à laisser penser et aux autres.

Manifestement vôtre,
L'@AssoACABB