Thread by @TimdeRauglaudre

Petit résumé de l'article d'@anthony_favier "Avec l'aide et aux frontières de la médecine. L'accompagnement pseudo-médical des homosexuels catholiques en France (des années 1960 au moment de la Manif pour tous)" publié dans @Rev_Emulations ⤵️
ojs.uclouvain.be/index.php/emul…

D'abord, il faut saluer la démarche de produire de la recherche sur les "thérapies de conversion", et il faut absolument poursuivre cet effort. Quand nous avons commencé à enquêter sur le sujet en 2017 avec @JL_Adenor, nous avons été surpris par l'absence totale…

... de recherche universitaire sur cette thématique spécifique, certainement parce qu'elle était perçue (à tort) comme américaine et inexistante en France. Nous avions dû nous appuyer sur des chercheurs américains comme @tanyaerzen ou…

... des spécialistes français du christianisme évangélique qui avaient croisé la route de pasteurs "ex-gays" comme Andrew Comiskey, fondateur américain de Torrents de vie.

Personnellement, j'aime bien m'appuyer sur des travaux de chercheurs pour défricher un sujet d'enquête. Mais dans le cas des "thérapies de conversion", nous avons dû partir quasiment de zéro pour enquêter sur l'implantation des mouvements "ex-gays" américains en France.

Pour revenir à l'article d'@anthony_favier, sa démarche est de remettre en cause l'idée que les parcours de "guérison" de l'homosexualité seraient un phénomène purement évangélique et américain, dont le catholicisme aurait été épargné.

Cette idée nous a longtemps été servie par la Conférence des évêques @Eglisecatho avant la publication de "Dieu est amour" @Ed_Flammarion. En gros : c'est les évangéliques, c'est pas nous, circulez, y a rien à voir.

Une membre de la CEF m'avait ensuite expliqué en off que notre livre l'avait fait changer d'avis et qu'elle était tombée de sa chaise en découvrant tout ce qui existait ou avait existé y compris au sein de l'Église.

@anthony_favier délimite trois périodes durant lesquelles le monde catholique a investi les "thérapies de conversion". Dans les années 1960-1970, avant l'arrivée des "ex-gays" en France, à travers deux médecins, Marcel Eck et Marc Oraison.

Puis, durant les années 1980 et 1990, le "psy" et prêtre Tony Anatrella, reconnu dans l'Église comme l'expert de l'homosexualité, prétend "guérir" celle-ci au sein de son cabinet. Depuis, des patients ont signalé ses agressions sexuelles présumées et il a été sanctionné.

Dans "Dieu est amour", nous racontions d'ailleurs comment ses théories et notamment sa typologie de l'homosexualité continuaient de servir de référence aux promoteurs des "thérapies de conversion", catholiques comme évangéliques.

Puis la période qui s'ouvre dans les années 2000 et continue jusqu'à aujourd'hui est celle de l'importation de théories psycho-spirituelles américaines, dites "ex-gays", dans l'espace catholique charismatique français : Communauté de l'Emmanuel, Chemin Neuf mais aussi Béatitudes.

Il y a certainement encore beaucoup d'autres sphères qu'il faudrait explorer : les théories de la théologienne thomiste Aline Lizotte, très friande de la théologie du corps de Jean-Paul II et fondatrice de l'AFCP, les communautés traditionalistes…

Aujourd'hui, des porte-parole de la Conférence des évêques et une poignée d'évêques ont condamné explicitement les "thérapies de conversion". Mais aucun communiqué officiel de la CEF, certainement divisée en interne.

Et, surtout, il n'y a eu aucune reconnaissance de la responsabilité de l'Église catholique dans ce qu'il faut bien appeler des abus. Au mieux par laisser-faire, au pire par volonté de reconquête anthropologique. Le chemin reste long...