Les auto-expérimentations à la cocaïne par des médecins, épisode 2
En 1898, le chirurgien allemand Auguste Bier étudie une toute nouvelle forme d’anesthésie locale à la cocaïne : la rachianesthésie, qui allait devenir quelques années plus tard la péridurale.
Mais à cette date, la méthode en est à ses balbutiements. Les médecins ont découvert qu’en injectant une substance dans la moelle épinière, son effet est plus direct et plus durable. Ils mènent alors une course contre la montre, au niveau européen, pour définir une méthode sûre
et efficace d’administration de la cocaïne par cette voie. Et comme toujours, ils s’y collent personnellement. Bier constate ainsi que ses patient·es ressentent des effets désagréables après avoir reçu cette forme d’anesthésie locale. Il décide donc de l’auto-expérimenter.
D'abord, Bier ne ressent rien ; mais tout à coup, alors que l’aiguille pénètre la zone médullaire, « j'ai ressenti une douleur semblable à un éclair dans une jambe ». La seringue utilisée ne s’adaptait pas à l’aiguille de ponction : la cocaïne n’est pas versée au bon endroit !
Mais il ne lâche pas l’affaire et recommence quelques minutes plus tard. Cette fois-ci, c’est la bonne ! Au bout de 7 minutes, Bier constate déjà être insensibilisé. Il va alors se prêter à diverses expérimentations sur lui-même de manière à vérifier le degrés d’anesthésie.
On constate à travers les extraits suivants que Bier met toute son imagination à trouver des types de douleurs différents. Attention, c’est pour la Science mais c’est douloureux à lire quand même :
Après 8 minutes, la pénétration profonde d'une grande aiguille émoussée et tordue dans les parties molles de la cuisse n'était pas du tout douloureuse. Après 10 minutes, une grande aiguille à tige a été enfoncée jusqu'au fémur sans causer la moindre douleur.
13 minutes : un cigare brûlant sur les jambes est perçu comme une chaleur mais pas comme une douleur. 20 minutes : l'arrachage des poils pubiens est ressenti "comme le soulèvement d'un pli de peau". L'arrachage des poils de la poitrine par contre sont ressentis douloureusement
Après 23 minutes : un coup fort avec un marteau en fer contre le tibia n'est pas ressenti comme une douleur. Après 25 minutes : la traction sur le testicule n’est "PLUS" sentie de manière douloureuse.
32 minutes : une forte pression sur le testicule n'est pas douloureuses. 40 minutes : les coups violents portés contre le tibia non plus. 42 minutes : couper la cuisse avec un gant de caoutchouc est ressenti comme une légère pression, le bras comme une vive douleur.
Après 45 minutes : La sensation de douleur commence à revenir, mais elle est encore très réduite.
Vous vous demandez comment il va après ces expériences ? Nickel : il est allé « dîner sans nous plaindre après ces tests sur nos propres corps, avons bu du vin et fumé plusieurs cigares. Je me suis couché à 11 heures, j'ai dormi toute la nuit.
Je me suis réveillé frais et dispos le lendemain matin. » Il s’étonne toutefois de ressentir « des douleurs à certains endroits, notamment sur le tibia, où la sensation était aggravée par de fortes contusions et des coups. »
Bon après tout ça il est quand même pas trop en forme notre chirurgien parce qu'il va passer 9 jours au lit : s'il se lève il a des maux de têtes et des vertiges. Il estime ne s'être pas suffisamment ménagé après son expérience.
Il conclut donc qu'il faut continuer les recherches sur cette méthode mais lui-même va cesser ses essais, laissant la place aux autres chirurgiens, notamment français comme Tuffier, qui améliorent et développent cette méthode révolutionnaire d'anesthésie locale.
L'épisode 1 sur les auto-expérimentations à la cocaïne est retrouver ici :
🌿🍸L'absinthe en France, boisson ayant participé à la colonisation de l'Algérie, devenue l'emblème de la sociabilité bourgeoise mais qui finit par être diabolisée à la fin du XIXe siècle (pour des enjeux coloniaux, racistes, économiques, de genre et de classe, oui), un thread !
D'abord, ce contenu se base sur un livre qui vient de sortir (et qui n'est pas traduit en français, comme tous les travaux universitaires sur les psychotropes. Éditeurs français : on vous attend !🤨), The hour of Abstinthe, de l'historienne @drninastuder.
Des boissons à
@drninastuder l'absinthe apparaissent en Suisse dans les années 1760, mais c'est seulement avec la colonisation de l'Algérie (1830) que sa consommation va se diffuser en France. Présentée comme une boisson hygiénique, les soldats français la considèrent comme protectrice contre les fièvres,
💥Appel à articles💥
Vous vous souvenez d’un de mes thread sur les dr0gues qui avait causé un scandale ici pendant 3 jours, aussi appelé le « ZoeDubusGate » 😄 ?
Parce que j’avais dis que les usages de stupéfiants, même de crack ou d’héroïne, pouvaient être ponctuels et
maîtrisés ? Et que je m’étais fait tomber dessus par des médecins non spécialistes de la question ? Parce que oui, par définition, les médecins, les gens qu’ils reçoivent, ils ONT des problèmes avec leurs usages. Sinon ils iraient pas consulter.
J’avais promis que je répondrais
de manière scientifique à cette polémique. Alors évidemment, le temps universitaire est - trop - long. Mais avec mes collègues @_sarahperrin et @Flow__che, on a travaillé ces derniers mois pour proposer à une revue spécialisée un numéro sur les usages dits « non problématiques ».
🍃Des archéologues viennent de trouver des traces de substances psychédéliques dans des tasses Égyptiennes datant du IIe siècle avant notre ère 💫 1/9 Ces tasses représentent le dieu Bes, appelé dans des graffiti Grecs de l'époque le "donneur d'oracles" ou le "donneur de rêves"
Parmi les substances analysées dans la tasse, le Peganum harmala L., appartenant à la famille des Nitrariaceae, communément appelé harmel ou rue syrienne. Il s'agit d'une plante médicinale et psychoactive originaire du bassin méditerranéen. Les graines de cette plante produisent
de grandes quantités d'alcaloïdes harmine et harmaline, qui induisent des « visions oniriques », un état proche du rêve. Ces molécules sont aussi présentes dans la liane Ayahuasca !Les graines produisent aussi, en plus faibles concentrations, de l'alcaloïde vasicine, ayant des
Je réagis à ce post mais visiblement ils se multiplient dans la communauté gay. Alors, comme dit RuPaul, « know your history ».
Les psychotropes (alcool compris), depuis – au moins – la fin du XIXe siècle, sont consommés par une partie de la communauté LGBTQIA+ : dans une
société profondément homophobe/transphobe et violente, les lieux de sociabilités dédiés permettent d'être soi dans une relative sécurité. Les psychotropes aident à la désinhibition à une époque où avoir une sexualité/un genre différent est une souffrance terrible qui pousse
d'ailleurs de nombreuses personnes à chercher des "thérapies de conversions".
Dans ces cabarets, les gens boivent, dansent, se détendent. Parfois il y a d'autres produits, comme la cocaïne. Iels oublient pour un temps qu'iels n'ont pas le droit d'aimer ou d'exister. Les
🍻Bière et femmes dans l’histoire, épisode 2 : le Moyen Age en Angleterre🍻
Au Moyen Age, la bière était nutritive, facile à produire et bon marché. Elle était toujours consommée quotidiennement par l’ensemble de la population, y compris par les enfants, car la teneur en alcool
était faible et servait surtout de conservateur. C'était une boisson essentielle, car elle permettait de s’hydrater et de se nourrir à une époque où l’eau douce était source de maladies. Les archives montrent que certains travailleurs pouvaient même choisir d’être payés en bière
plutôt qu’en monnaie. En 1577 en Angleterre, il y avait en moyenne dans chaque ville un débit de bière pour 142 habitant·es. Le vin quant à lui était un produit cher et réservé aux élites.
Comme pendant l’Antiquité égyptienne, les documents médiévaux font état de réglementations
🍻Bière et femmes dans l'histoire🍻
De l'Antiquité à la fin du Moyen Age, les femmes sont responsables de la production de bière dans les sociétés qui en consomment. Ce thread sera donc en deux parties : ici on va se concentrer sur la contexte Égyptien, puis je ferai un second
contenu pour montrer l'évolution au XVIIe siècle. Je mets en ALT des détails pour les images si vous voulez les dates notamment.
Les recherches archéologiques montrent à quel point la consommation de bière a été cruciale dans l'évolution de l'humanité : les plus anciennes traces
de bières sont aussi anciennes que les premières traces de pain. La première brasserie, découverte en Israël en 2018, date de 11 000 avant notre ère. Bon je vous l’accorde ça ressemble pas des masses à notre idée d’une brasserie mais je fais confiance aux archéologues ! En Égypte