Thread by @Tsarorius

La décision du @Conseil_Etat de confirmer la dissolution du CCIF (cc @ccie) est inepte pour plusieurs raisons que je vais exposer dans ce thread. ⬇️

@Conseil_Etat @ccie Tout d'abord rappelons que Gérald Darmanin a fondé son décret de dissolution du CCIF sur le 6° et le 7° de l'article L212-1 du code de la sécurité intérieure.

Cf. capture pour voir de quoi il s'agit.

Le décret de dissolution est là : legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTE…

Voyons donc ce qu'a dit le CE.

Tout d'abord sur le 6° de l'article L212-1 : le CCIF provoquerait à la discrimination, à la haine ou à la violence envers un groupe de personnes à raison de leur origine ou de leur appartenance à une religion, [...]

[...] ou propagerait des idées ou thérories tendant à justifier ou encourager ces discriminations, haine et violence.

Pour soutenir que ce motif, invoqué par Gérald Darmanin pour dissoudre le CCIF, est fondé, le CE commence par rappeler que, je cite, "le CCIF tient depuis plusieurs années des propos sans nuance visant à accréditer l'idée que les autorités publiques françaises mèneraient, [...]

[...] notamment dans le cadre de la lutte contre le terrorisme, un combat contre la religion musulmane et ses pratiquants et que, plus généralement, la France serait un pays hostile aux musulmans". (fin de citation)

Et là on se dit : oui, et alors? C'est la dénonciation d'un racisme d'état. C'est interdit de dénoncer le racisme d'état?

Le CE aurait voulu montrer que cette dissolution reposait sur un délit d'opinion qu'il s'y serait pas pris autrement.

Puis le CE juge que "le CCIF entretient des liens étroits avec des tenants d'un islamisme radical invitant à se soustraire à certaines lois de la République".

Mais le CE se garde bien de préciser à quelles lois de la République le CCIF invite à se soustraire.

Le CE donne ensuite deux exemples de ces "liens étroits avec des tenants d'un islamisme radical".

D'abord, l'exemple de @_MarwanMuhammad, qui aurait, selon le CE, "tenu publiquement des propos tendant à relativiser voire à légitimer les attentats contre le musée juif de Bruxelles (2014) et contre Charlie Hebdo (2015)."

Difficile de savoir exactement quels propos sont reprochés à @_MarwanMuhammad, puisque le CE ne l'indique pas.

Le communiqué du CCIF suite à l'attentat au musée juif de Bruxelles est reproduit sur le site "saphirnews" : saphirnews.com/Tuerie-de-Brux…

Je cherche encore la "relativisation" et la "légitimation" dans ce texte qui m'a plus l'air d'être un simple appel au "pas d'amalgame".

Quant à l'attentat contre Charlie Hebdo, à ma connaissance Marwan Muhammad a dit qu'il "n'était pas Charlie" et a critiqué l'hypocrisie du discours politique suite à l'attentat.

Là non plus je n'ai vu aucune "relativisation" et aucune "légitimation" des attentats.

Le CE reproche aussi au CCIF d'avoir "fait la promotion des thèses de Aït Yahia".

Le CCIF a en effet publié des textes de Aït Yahia, en rapport avec l'islamophobie.

Et Le Point lui a accordé une interview titrée "Au nom de ma foi, je ne suis pas républicain".

Faites gaffe @LePoint, c'est vous les suivants.

lepoint.fr/societe/aissam…

Enfin, on en arrive au réel noeud du problème : le CE juge que "le CCIF suscite régulièrement, par les messages qu'il délivre sur ses comptes ouverts sur les réseaux sociaux, des commentaires antisémites et hostiles aux autres croyances auxquels il n'apporte aucune modération".

C'est là en fait le seul motif de dissolution en rapport avec l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieur.

Le simple fait que des tiers publient des commentaires haineux suffit donc à dissoudre une association si celle ci ne les modère pas.

Y en a qui vont chier mou.

Le CCIF se défendait en arguant qu'il n'était pas responsable, au sens de la LCEN, de la publication de commentaires par des tiers. Argument que le CE a écarté.

Le CCIF arguait également qu'il n'avait fait l'objet d'aucune poursuite devant les tribunaux pour tout ce dont on a parlé plus haut.

Le CE a écarté cet argument d'un pertinent "Osef".

Bah oui, on reproche au CCIF de commettre des délits, mais plutôt que de le poursuivre devant des tribunaux on prend une décision politique de dissolution. Logique.

Maintenant voyons ce qu'a dit le CE au sujet du 7° de l'article L212-1 : le CCIF se livrerait à des agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme.

Et là, plot twist, égalisation du CCIF !

Dans le paragraphe 12 de sa décision, le CE affirme que le CCIF ne s'est jamais livré à des agissements en vue de provoquer des actes de terrorisme. Il donne donc tort à Gérald Darmanin.

Mais en fait non, nouvelle pirouette du CE, je cite : "il résulte toutefois de l'instruction que l'auteur du décret attaqué [Gérald Darmanin] aurait pris la même décision en se fondant uniquement sur le 6° de l'article L. 212-1 du code de la sécurité intérieure".

C'est quand même formidable le contrôle du juge administratif.

La décision de dissoudre le CCIF faisait suite à l'attentat contre Samuel Paty, la communication gouvernementale n'a cessé de faire passer le CCIF pour complice des terroristes, allant jusqu'à l'accuser d'être

liée à l'attentat contre Samuel Paty sous prétexte que le père de l'élève avait contacté le CCIF, mais le CE dit "non non, même sans ça Gérald Darmanin aurait dissout le CCIF c'est évident, lol".

Bien sûr, c'est évident, sans l'assassinat de Samuel Paty, le ministre de l'intérieur aurait quand même dissout le CCIF pour des propos tenus par Marwan Muhammad en 2015 et des commentaires racistes laissés par des tiers.

Qui peut croire cette fable, en fait?

Bref, il fallait que le CE sauve le soldat Darmanin, c'est chose faite.

Prochaine étape, la cour européenne des droits de l'homme?

Au vu de quelques récents arrêts, j'y crois moyen.