Thread by @EricLagadec

Depuis une semaine, j'ai reçu une centaine de messages demandant comment on devenait astrophysicien et quel avait été mon parcours. Je vais essayer de répondre simplement ici à la question (qui a plusieurs réponses) "Comment devient-on astrophysicien(ne)?" Thread👇

Tout d'abord, un préambule important: pour devenir physicien, il faudra de solides bases en sciences! Voici un extrait de ma thèse, qui était plutôt observationnelle, donc sans forcement beaucoup de calculs compliqués! (si vous trouvez une faute, dites-le moi!)

Regarder des vidéos youtube (même excellentes comme celles de @FlashCordon et @ELedolley ) ou des fils Twitter pourra vous donner une belle culture scientifique, mais pour devenir astrophysicien, il faudra faire des études!

L'astrophysique est un domaine vaste, où l'on retrouve beaucoup de compétences scientifiques (physique, géologie, traitement du signal, simulations, optique), car on va construire des télescopes, en analyser les données, faire des modèles physiques etc...

Les chemins pour devenir astrophysiciens sont donc nombreux, la plupart des mes collègues ont suivis des parcours différents, plus ou moins chaotiques, avec deux voies qui se dégagent: la filière universitaire ou les écoles d'ingénieurs.

Personnelement, je suis passé par l'Université. J'ai étudié la physique @UBO_UnivBrest, où j'ai pu avoir des cours avec des profs qui sont aussi des chercheurs. Certains étaient particulièrement passionnés par l'astrophysique et m(ont transmis un beau virus!

Une fois le virus attrapé, j'ai commencé à dévorer tous les livres de vulgarisation, en commençant par "Poussières d'Etoiles" d'Hubert Reeves

La question "alors, école d'Ingé ou Université?" n'a pas de réponse définitive, cela dépend de ce que vous aimez, comment vous aimez apprendre. La fac donne peut être plus de liberté, mais cela peut aussi être compliqué pour certaines personnes!

Un des buts, je pense, est de trouver un environnement dans lequel vous vous épanouissez, car c'est toujours plus facile d'apprendre quand on aime ce que l'on fait. La bonne nouvelle à priori, c'est que plus vous avancez dans les études, plus vous pouvez choisir ce qui vous plaît

Afin de "rentrer" dans le métier, il est nécessaire de faire un Master. Vous pouvez trouver une liste des master sur le site de l'excellente @SF2A_astro : sf2a.eu/spip/spip.php?…

Comme il n'y avait pas de Master à Brest, j'ai donc quitté la Bretagne avec mon sac à dos et ma guitare il y a 20 ans, direction Nice, les étoiles et l'@ObsCoteAzur ! Pourquoi n'y a-t-il pas d'astronomie à Brest? Mystère!

Le Master durera deux ans, pour vous offrir un bac +5. Cela vous permettra aussi de découvrir les métiers de la recherche, et de voir ce qui vous plaît (ou pas), notamment après un stage de recherche en fin de Master II. Mais ce n'est que le début d'un chemin qui peut être long.

Il vous faudra ensuite trouver une thèse, en France ou ailleurs. Pendant trois ans, vous travaillerez sur un sujet précis, sur lequel personne n'a travaillé avant, et dont vous deviendrez l'expert(e) mondial(e), tout en essayant de vous ouvrir sur les domaines connexes.

Lorsque vous êtes en thèse, vous êtes étudiants, mais c'est un vrai travail, vous êtes payés et avez un contrat de travail. Vous pourrez passer par des moments difficiles (ce que je ne souhaite pas), et vous allez apprendre beaucoup de choses, sans forcément vous en rendre compte

J'ai eu la chance de faire ma thèse à @ObsCoteAzur , dans un cadre merveilleux et d'y tisser des amitiés très fortes! Ma thèse, soutenue en 2005 s'intitule "Apport des observations infrarouges pour l'étude de la perte de masse des étoiles évoluées"

https://twitter.com/EricLagadec/status/1410507178113372167

Vous vous dites qu'après 8 ans d'études, ça y est c'est bon? Mais non, on forme pas mal de docteurs en astrophysique, mais malheureusement il n'y a pas beaucoup de postes (~10 par an en France). Il va donc falloir continuer à travailler en CDD (post-doc), souvent à l'étranger

Personnellement, j'en ai fait trois: Manchester (4 ans), Munich (3ans), à @ESO qui gère les télescopes du VLT au Chili, puis 18 mois aux USA à @Cornell dans l'état de New York.

Ces post-docs sont à la fois des moments enrichissants, avec la découverte de nouveaux sujets et de cultures, mais cela peut aussi être difficile de ne pas savoir sur quel pays/continent on va vie l'année suivante.

Pour moi , cela a fini par l'obtention d'un poste de chercheur en 2013, car j'ai eu la chance d'être au bon endroit au bon moment. Je pense forcément beaucoup aux collègues qui n'ont pas ou pas encore eu cette chance!

Devenir astrophysicien(ne) est donc long chemin, mais si c'est votre rêve, accrochez vous, dans le pire des cas vous aurez essayé et appris pleins de choses utiles (programmation, physique, gestion de projets etc...). Tous mes collègues docteurs en astro ont un boulot!

N'hésitez pas si vous avez des questions, un thread est trop court pour tout expliquer. Un dernier message: tout le monde peut faire de l'astronomie: ce n'est pas que pour les hommes blancs barbus à lunettes! Bon courage à toutes et tous, en espérant que vous vivrez vos rêves!

@SF2A_astro @astropierre

A toutes et tous mes collègues, n'hésitez pas à compléter, j'ai atteint la limite des tweets possibles. Une chose à savoir: on peut aussi travailler dans la recherche en astronomie sans être chercheur, il y a des métiers liés très intéressants, dans les observatoire ou ailleurs.

Pour être plus précis ici, il est possible, avec une thèse en astronomie de faire pas mal de choses, comme "Data Scientist", travailler dans des entreprises privées liées au spatial (par exemple Thales), dans des boites qui utilisent des données satellitaires etc...