Savez-vous qu’au milieu des années 1960, un projet de centrale #nucléaire franco-allemande voit le jour à #Fessenheim en Alsace ?
La genèse de cette pionnière et ultra médiatisée centrale reste méconnue…
Thread : La genèse de Fessenheim (1965-1978) avec @MathiasRoger6.
🧵⬇️
1/ Avant-propos : Cette histoire, dans un autre format, est également à lire dans le dernier numéro de la Revue générale Nucléaire (RGN) co-écrit avec @MathiasRoger6 : sfen.org/rgn/fessenheim…
2/ L’histoire de la centrale nucléaire de Fessenheim débute en novembre 1963 lorsque le CEA (en tant que concepteur) et EDF (en tant qu’exploitant) envisage la construction de la première centrale nucléaire de production d’électricité « rentable » du programme français.
3/ Il s’agit alors de franchir le cap de la phase industrielle du programme nucléaire civil français. Pour cela, les 2 organismes partent d’un réacteur uranium-naturel-graphite-gaz (UNGG) de référence, celui de Saint-Laurent-des-Eaux A1 alors en début de construction (vidéo).
4/ EDF et le CEA entendent optimiser le réacteur pour en accroître la rentabilité puis le répliquer 4 à 5 fois d’ici 1970. Un partenariat est réalisé avec l’industrie allemande qui prévoit le partage de l’investissement en échange du partage de l’énergie produite par la centrale.
5/ Le site frontalier de Fessenheim est alors choisi. La centrale sera située au bord du Grand canal d'Alsace, en aval de la centrale hydroélectrique de Fessenheim, mise en service en 1956.
6/ En 1964, EDF et RWE [l’équivalent d’EDF outre-Rhin] demandent à Siemens et au Groupement atomique Alsacienne-Atlantique (GAAA) de constituer un consortium en vue de la construction de la centrale tout en gardant la maîtrise d’ouvrage.
7/ Le « projet franco-allemand de Fessenheim » est en route… mais va rapidement être abandonné ! En effet, les Allemands se retirent du projet dès 1965 jugeant le seuil de rentabilité de la technologie de réacteur français inatteignable…
8/… par rapport au fioul et aux filières américaines à eau légère (réacteur à eau pressurisée (REP, pub Westinghouse) et à eau bouillante (REB)) alors également en développement en Allemagne.
9/ À la suite du départ des Allemands, le projet est repris par EDF sous le nom de « projet Fessenheim graphite-gaz ». EDF endosse désormais le double rôle de maître d’œuvre et maître d’ouvrage. Le début de construction prévu fin 1965 est alors reporté à 1967.
10/ Le bureau d’étude de la région d’équipement de Clamart d’EDF multiplie alors les actions visant à améliorer les procédés de conception ainsi que le rendement du combustible. Le projet passe à deux réacteurs de 650 MWe chacun.
11/ Lors du conseil interministériel du 7 décembre 1967, le projet est acté…mais il va connaitre encore des retards liés notamment au prix très faible du fioul qui rend la centrale peu rentable face aux centrales à fioul et à mai 1968 qui impacte les budgets de l’État !
12/ Ces atermoiements sont à replacer dans le contexte de la « guerre des filières » qui oppose les partisans des filières « eau légère » américaines à ceux des UNGG. Pour en savoir + sur cette histoire :
13/ En mai 1969, un rapport de la commission pour la Production d'Électricité d'Origine Nucléaire (PEON) montre que le projet Fessenheim (Fessenheim GG) n’est plus rentable face aux réacteurs américains. De plus, la puissance des UNGG est limitée techniquement…
14/ Le 16 octobre 1969, alors que le chantier de Fessenheim UNGG se prépare, l’abandon de la filière est annoncé (extrait presse locale) lors de l’inauguration de la centrale de Saint-Laurent-des-Eaux par le directeur d’EDF Marcel Boiteux. Le projet Fessenheim UNGG n’est plus…
15/ Mais l’idée d’une centrale nucléaire à Fessenheim demeure. Alors que les travaux de terrassement débutent en 1970, on ne sait pas encore si Fessenheim accueillera des réacteurs à eau pressurisée (REP) ou à eau bouillante (REB).
16/ Finalement, une proposition de la Société des Forges et Ateliers du Creusot (SFAC)-Framatome est retenue pour la construction d’une chaudière nucléaire de type REP sous licence américaine Westinghouse et une proposition Alsthom pour le groupe turboalternateur.
17/ Si la France dispose déjà d’un petit REP à Chooz dans les Ardennes (démarré en 1967), il reste énormément à apprendre pour les ingénieurs et techniciens EDF sur un modèle plus puissant qu’à Chooz.
18/ L’idée est alors de copier fidèlement « une centrale de référence américaine » (Beaver Valley, Pennsylvanie, en construction au 1er plan) via de nombreux échanges et rencontres entre les industriels français et américains.
19/ La licence américaine Westinghouse ne couvre que la partie nucléaire de l’installation mais pas la partie conventionnelle ainsi que tout le génie civil. Des pratiques héritées du projet UNGG (Ex : risque sismique) permettent le démarrage rapide des travaux de gros œuvre.
20/ Le chantier de Fessenheim est expérimental à plus d’un titre et dès le début s’organise une contestation anti-nucléaire avec la première manifestation d’ampleur contre le nucléaire civil en avril 1971.
21/ Une poignée de futurs exploitants sont formés dès 1973 à « L’école eau légère » à Chooz. Les services d’ingénierie d’EDF (l’Equipement) transmettent, progressivement et morceau par morceau, les éléments de la centrale de Fessenheim aux équipes chargées de l’exploitation.
22/ Sur le chantier, les difficultés s’accumulent. De nouveaux moyens de contrôle mettent en lumière des défauts de fabrication et obligent à certaines reprises. Ce fut notamment le cas pour les soudures des coudes des tuyauteries auxiliaires qui durent être entièrement refaites.
23/ Le chantier est, par ailleurs, marqué par les évolutions réglementaires des 2 côtés de l’Atlantique. Par exemple, Westinghouse change la structure de combustible (passage du format 15x15 à 17x17) occasionnant un dérapage des couts et délais de construction pour Fessenheim.
24/ Les organismes de sûreté français et les bureaux d’études d’EDF effectuent un laborieux travail de rédaction du rapport de sûreté de Fessenheim (+ de 40 réunions du groupe permanent d’expert) mêlant la référence américaine et des pratiques héritées de la période UNGG.
25/ Enfin, le chantier est aussi perturbé par les opposants. Le 3 mai 1975, un attentat à la bombe endommage le couvercle de la cuve et un moteur de pompe primaire. Cet attentat va retarder encore le chantier et obliger EDF à revoir toute la sécurité d’accès au site.
26/ Avant le couplage du réacteur 1 au réseau électrique, 45 000 pages de procédures sont rédigées pour les essais de démarrage. Les 2 réacteurs de Fessenheim sont raccordés au réseau en 1977, puis mis en service l’année suivante, avec 16 mois de retard sur le planning initial.
27/ Fessenheim va servir au développement du palier standardisé de réacteur de 900 MWe. Même si les paliers suivants se sont progressivement émancipés de l’héritage alsacien, chaque réacteur aujourd’hui en fonctionnement en France à quelque chose en lui de Fessenheim...
Savez-vous que cette superbe tour aéroréfrigérante accueille un manège ? Qu’elle est située sur le site d’une ancienne centrale #nucléaire allemande devenue un parc d’attraction ?
Fil : Kalkar, une histoire de neutrons rapides et de sensations fortes…
⬇️☢️🎡
1/ Avant-propos : Merci @Kako_line pour l’invitation à travailler sur le sujet des tours aéroréfrigérantes décorées.
Celle de la centrale nucléaire de Kalkar en Allemagne a sans doute l’histoire (thread non exhaustif) la plus incroyable !
C’est parti.
2/ Dès le début de l’ère nucléaire, l’idée de surgénération (capacité d'un réacteur nucléaire à produire plus d'isotopes fissiles qu'il n'en consomme) est en vogue et les projets de piles couveuses (breeder) se multiplient (Experimental Breeder Reactor I dans l’Idaho, USA, 1951).
Point de situation au 5 septembre 2023 concernant la situation à la centrale #nucléaire de #Zaporijjia.
🇺🇦🇷🇺☢️Un fil à dérouler🧵🔽
1/ Sur la situation générale de la centrale #nucléaire : 5 réacteurs sur 6 sont en arrêt à froid. Le réacteur 6 est en arrêt à chaud et produit de la vapeur pour des besoins de sûreté depuis le 13 août 2023 (notamment pour le traitement des déchets radioactifs liquides).
2/ Le réacteur 4 a été transféré d’arrêt à chaud vers arrêt à froid en raison d’une fuite d'eau depuis le circuit primaire vers le circuit secondaire au niveau d’un des générateurs de vapeur (GV) du réacteur survenue le 10 août.
Point de situation au 20 juin 2023, avec un éclairage historique, concernant la sûreté de la centrale #nucléaire de Zaporijia depuis la destruction du barrage hydroélectrique de #Kakhovka.
Un fil à dérouler 🔽🇺🇦🇷🇺🧵
1/ Dans la nuit du 6 juin 2023, le barrage hydroélectrique de #Kakhovka, sur le Dniepr (Nova Kakhovka, oblast de Kherson) est détruit entrainant en aval de fortes inondations aux conséquences humaines, sanitaires et environnementales dramatiques.
2/ Construit dans les années 1950, le barrage (photos) a créé en amont le réservoir de Kakhovka sur le Dniepr, long de 240 km et jusqu'à 23 km de large. L’ensemble barrage/réservoir permet notamment l'irrigation de terres agricoles du sud de l'Ukraine et du nord de la Crimée.
Le Plan particulier d'intervention (PPI) présente une cartographie des communes impactées par des mesures en cas d’accident #nucléaire dans un rayon de 0-20km autour d’une centrale.
Thread : Tour d’horizon des cartes des PPI pour les 18 centrales nucléaires en exploitation.
⬇️🧵
1/ Avant-propos : Un PPI propose une représentation cartographique du risque et est dimensionné sur un accident et des conditions météos donnés.
Les conséquences/mesures d’un accident « réel » peuvent bien entendu déborder ou non de la cartographie du PPI.
C’est parti. ⬇️🧵
2/ Cartographie du PPI de la centrale nucléaire de Belleville (Cher).
On en parle moins donc c’est le moment de faire un point sur la situation de la centrale #nucléaire de #Zaporijjia.
Point de situation au 6 mai 2023
⬇️🧶
1/ Tout d’abord, les 6 réacteurs ne produisent plus d’électricité. Au moins 5 sur 6 sont même en « arrêt à froid ». Jusqu’alors, un ou deux des réacteurs étaient maintenus en « arrêt à chaud » pour alimenter en chaleur le site et la ville voisine d’Enerhodar.
2/ Si les réacteurs ne produisent pas d’électricité, ils ont toutefois besoin d’être refroidis pour des raisons de sûreté et donc d’être alimentés en électricité. Une seule ligne électrique de 750 kV fonctionne actuellement sur les 4 disponibles avant le conflit.
19 octobre au 18 décembre 1964 : Le réacteur #nucléaire PAT (prototype à terre) du CEA Cadarache) « prend la mer » pour une croisière fictive autour du monde.
⤵️🧵 1/4
Tous les jours, sur la base d'un rendement de propulsion supposé, l'énergie produite est transformée en milles marins et la position du « bateau » reportée sur la carte.
En réalité, le réacteur ne bouge pas, au fond de sa « piscine ».
2/4
Ce type de réacteur sera installé à partir de 1971 sur les sous marin nucléaires lanceurs d'engin français (SNLE), dont le premier sera le Redoutable.